Fiche du document numéro 3528

Num
3528
Date
Jeudi 7 juillet 1994
Amj
Hms
20:00:00
Auteur
Taille
16163153
Sur titre
Journal de 20 heures [4:02]
Titre
À Kigali les habitants commencent à ressortir de chez eux et à raconter les massacres
Sous titre
Dans la région de Gikongoro, une patrouille de l'armée française a découvert des milliers de réfugiés hutu mais aussi des Tutsi apeurés.
Lieu cité
Lieu cité
Lieu cité
Mot-clé
Mot-clé
Mot-clé
Mot-clé
Résumé
- In Rwanda the future Prime Minister responsible for forming a government of national unity believes that the French engaged in Operation Turquoise must have left the country at the end of July, as promised.

- For the time being, the first UN planes have started landing again in Kigali, conquered by the RPF. Gradually, residents begin to come out of their homes and tell about the massacres.

- They come out of their hiding places, they survived the massacres. They leave behind their bruised, abandoned, plundered city. The RPF soldiers asked them to regroup for security reasons. At Saint-André college, there are nearly 20,000. A refugee: "My whole family was massacred by government troops".

- Some responsible for the massacres who did not have time to flee would hide in the middle of the crowd. In any case, that's what everyone says. But here for now, no one is thinking of revenge. The pain is too much.

- Three-quarters of the country are under RPF control. The North-West still seems to be under the control of Hutu militiamen and the South-West under French surveillance.

- The rumor reached Gikongoro: children and a Rwandan priest are threatened in a village in the hills. Three days after their installation, the French decide to make a reconnaissance. This is the first time they have visited this region, 50 kilometers from the city. First surprise: the incredible number of villagers on the roads. They are tens of thousands with their children, their cattle, all their belongings. It is no longer a flight but an exodus. The soldiers are inquiring.

- They are fleeing the fighting in the east of the country. Most of them are Hutu. Among them, there are surely people who have killed and massacred but they deny themselves to be all accomplices.

- After many twists and turns, we finally find Father Emmanuel [Uwayezu]. He explains that his college was attacked in May by armed men. The remaining students must be evacuated. The others, around sixty Tutsi, have disappeared. Father Emmanuel, "Priest of Kibeho": "There were a few children that we took, mostly girls and some boys. We took them from school. We certainly killed them or else the others ran away. But they weren't killed here".

- We will learn that a young Tutsi girl saw all the boys massacred with machetes and clubs. The Father went to fetch her from a Hutu peasant who took pity on her after having kidnapped her. Another recounts in a barely audible voice that the girls were taken to be raped. We do not know what became of them. Finally, the last survivors of the horror: a young girl and a driver, Tutsi that the Father has been hiding at his home for weeks.

- Today is finally deliverance for this small group. And the end of the nightmare for Father Emmanuel. A Hutu who took all the risks to save these innocent people from murderous madness.
Source
TF1
Fonds d'archives
INA
Commentaire
On Father Emmanuel Uwayezu, see the African Rights report of May 2009.
Type
Journal télévisé
Langue
FR
Citation
[Patrick Poivre d'Arvor :] Au Rwanda le futur Premier ministre chargé de former un gouvernement d'unité nationale estime que les Français engagés dans l'opération Turquoise doivent avoir quitté le pays fin juillet, comme promis.

Pour l'heure, les premiers avions de l'ONU ont recommencé à se poser à Kigali. Kigali conquise par le FPR. Progressivement, les habitants, euh, commencent à ressortir de chez eux et à raconter les massacres. Reportage de Patricia Allémonière et de David Cosset.

[Patricia Allémonière :] Ils sortent de leurs cachettes, ils ont survécu aux massacres [gros plan sur ce qui semble être un cadavre allongé au bord d'une route ; en arrière-plan, on voit des gens marcher avec des sacs de vivres sur la tête]. Ils laissent derrière eux leur ville meurtrie, abandonnée, pillée [diffusion d'images d'une maison saccagée et d'un quartier vide]. Les militaires du FPR leur ont demandé de se regrouper pour des raisons de sécurité [on voit une masse de gens regroupés derrière les grilles du collège Saint-André]. Au collège Saint-André, ils sont près de 20 000.

[Un réfugié : "Toute ma famille, euh, sont…, sont massacrés par les…, les troupes gouvernementales".

Un autre habitant rescapé : "Moi j'étais dans un…, dans mon plafond. Pendant trois mois".]

Un peu plus loin, Emérence nous entraîne dans la pièce où elle vit avec d'autres familles. Elle veut nous donner l'adresse de sa fille qui habite en France. Il faut que cette dernière sache qu'elle est en vie mais qu'elle a tout perdu. Un appel au secours [on la voit tenir une lettre manuscrite dans ses mains].

[Emérence : "Ça ne va pas. Il…, celui qui a de l'argent, il achète du sucre à 1 000 francs, mille deux…, 1 200. Et moi je n'ai rien ! Seulement rien…, rien, vraiment [elle fond en larmes]…, avec la petite fille de sept ans".]

Certains responsables des massacres qui n'ont pas eu le temps de s'enfuir se cacheraient au milieu de la foule. C'est en tout cas ce que tout le monde affirme. Mais ici pour l'instant, personne ne songe à se venger. La douleur est trop forte [on voit de nombreux réfugiés dans la cour du collège Saint-André].

[Patrick Poivre d'Arvor :] Alors pour bien comprendre la situation, sachez que les trois-quarts du pays sont sous contrôle, euh, FPR. Le Nord-Ouest semble toujours sous la coupe des miliciens hutu et le Sud-Ouest sous surveillance française. C'est là que nous retrouvons à Gikangoro [Gikongoro] Isabelle Marque et…, et Gilles Hémart qui ont suivi une patrouille de l'armée, découvrant des milliers de réfugiés hutu mais aussi des Tutsi apeurés.

[Isabelle Marque :] La rumeur est arrivée à Gikongoro : des enfants et un prêtre rwandais sont menacés dans un village des collines [on voit un militaire français demander des renseignements à des villageois ; une incrustation "Gikongoro, Rwanda" s'affiche à l'écran]. Trois jours après leur installation, les Français décident de faire une reconnaissance. C'est la première fois qu'ils se rendent dans cette région à 50 kilomètres de la ville [on voit la jeep des militaires quitter le village]. Première surprise : le nombre incroyable de villageois sur les routes. Ils sont des dizaines de milliers avec leurs enfants, leurs bétails, tous leurs biens. Ce n'est plus une fuite mais un exode [on voit en effet une colonne de réfugiés le long d'une route]. Les militaires se renseignent [la jeep des militaires arrive dans un autre village].

[Un soldat français : - "Il y a longtemps que vous êtes arrivés là ?". Réponse d'un villageois : - "Non il y a trois jours que nous avons arrivé [sic] par ici". Le soldat français : - "Encore beaucoup de gens qui viennent ?". Le villageois : - "Oui, oui, encore !" [on entend une autre voix dire : "Ça va venir".]

Ils fuient les combats de l'Est du pays. Pour la plupart ce sont des Hutu. Parmi eux, il y a sûrement des gens qui ont tué et massacré mais ils se défendent d'être tous complices [gros plan sur le visage d'une mère tenant son bébé en pleurs dans ses bras].

[Michel, "Réfugié Hutu" : "Euh, on n'est pas tous tueurs. Et ce…, ce qui nous afflige, c'est que… on est abandonnés. La communauté internationale…, internationale ne vient pas…, en tout cas, ne fût-ce que vérifier ce qui se passe".]

Après bien des tours et des détours [on entend le militaire français faire un rapport de situation à l'aide du téléphone radio de sa jeep], on retrouve enfin le Père Emmanuel [il s'agit du Père Emmanuel Uwayezu]. Il explique que son collège a été attaqué en mai par des hommes armés. Les élèves qui restent doivent être évacués. Les autres, une soixantaine de Tutsi, ont disparu.

[Père Emmanuel, "Prêtre de Kibeho" : "Les quelques enfants qu'on a prises [sic], euh, surtout des filles et quelques garçons. On les a…, on les a pris de l'école. On les a certainement tués ou bien les autres se sont enfuis. Mais… ils n'ont pas été tués ici, hein. Donc ils ont été [inaudible]".]

On apprendra que cette jeune fille tutsi a vu tous les garçons massacrés à coups de machette et de massue [on voit la jeune fille, le visage emmitouflé, quitter le collège à l'arrière de la jeep des militaires français ; le Père Emmanuel est quant à lui assis à l'avant du véhicule]. Le Père est allé la chercher chez un paysan hutu qui a eu pitié d'elle après l'avoir enlevé.

Celle-ci raconte d'une voix à peine audible que les filles ont été emmenées pour être violées [on la voit en gros plan en train de s'exprimer en kinyarwanda]. On ne sait ce qu'elles sont devenues. Enfin, derniers rescapés de l'horreur : une jeune fille et ce chauffeur, des Tutsi que le Père cache depuis des semaines chez lui [on voit le chauffeur sortir d'un bâtiment et venir serrer la main du Père Emmanuel].

Aujourd'hui c'est enfin la délivrance pour ce petit groupe. Et la fin du cauchemar pour le Père Emmanuel. Un Hutu qui a pris tous les risques pour sauver ces innocents de la folie meurtrière [on voit un camion de l'armée française quitter le collège avec des gens à bord].

Haut

fgtquery v.1.9, 9 février 2024