Fiche du document numéro 33497

Num
33497
Date
Jeudi 27 juin 2013
Amj
Taille
26520
Surtitre
Barbouzes
Titre
Paul Barril rattrapé par le génocide rwandais
Soustitre
Une information judiciaire a été ouverte à Paris contre «l’ex-gendarme de l’Elysée».
Nom cité
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Nom cité
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Mot-clé
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
«C'est une excellente nouvelle», s'est réjoui hier Patrick Baudouin, l'avocat de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) après l'annonce de l'ouverture d'une information judiciaire pour «complicité de génocide» visant Paul Barril, connu comme «l'ex-gendarme de l'Elysée». Les magistrats du pôle génocide et crimes contre l'humanité, créé en janvier 2012, ont répondu avec une célérité inattendue à la plainte déposée lundi contre Barril par la FIDH, mais aussi la Ligue des droits de l'homme (LDH) et l'ONG Survie.

Une plainte accompagnée de documents accablants révélant notamment, qu’en plein génocide contre la minorité tutsie au Rwanda, Paul Barril signe le 27 mai 1994 un contrat d’assistance et de fourniture d’armes avec le gouvernement extrémiste qui orchestre les massacres. Dix jours auparavant, le 17 mai, le Conseil de sécurité de l’ONU avait pourtant décrété un embargo sur les armes à destination du Rwanda. Entre les mois d’avril et juin 1994, le génocide fera plus de 800 000 morts.

Ex-patron du GIGN (Groupement d'intervention de la gendarmerie nationale), passé par la cellule antiterroriste de l'Elysée puis reconverti dans la sécurité privée, Barril nie aujourd'hui que ce contrat a été exécuté. Problème, c'est lors de perquisitions menées à son domicile et chez ses proches en juin 2012 que le contrat a été retrouvé, ainsi qu'une lettre du ministre de la Défense du gouvernement génocidaire rwandais qui «confirme» cette demande d'assistance. Dès septembre 1994, Sébastien Ntahobari, l'attaché militaire de l'ambassade du Rwanda à Paris au moment du génocide, a de son côté reconnu avoir été mandaté pour verser en juin 1994 à l'une des entreprises de Barril 1,2 million de dollars pour «services rendus». Ntahobari confirmera ses propos dans une lettre adressée à Paul Quilès en 1998 quand ce dernier présidait la Mission d'information parlementaire sur la responsabilité de la France au Rwanda. Pourtant la mission ne convoquera pas l'homme de l'ombre.

En réalité, le rôle de Barril dans cette tragédie suscite des interrogations dès le 6 avril 1994, lorsqu'un attentat vise l'avion du président rwandais, Juvénal Habyarimana. C'est cet assassinat, jamais revendiqué, qui sert de déclencheur au génocide et permet aux extrémistes hutus de s'emparer du pouvoir. En juin 1994, Barril se présente devant les caméras en prétendant détenir la boîte noire de l'avion. Une tentative d'enfumage démasquée en quelques jours. Dans Guerres secrètes à l'Elysée, livre dont il est l'auteur, Barril affirme qu'il se trouvait dans la région au moment de l'attentat. Pourtant, malgré trois auditions, le juge Jean-Louis Bruguière, en charge à partir de 1998 de l'enquête sur l'attaque n'interrogera jamais Barril sur le lieu où il se trouvait le 6 avril.

Mais son successeur, le juge Marc Trévidic, semble bien plus curieux. C'est à son initiative qu'ont eu lieu les perquisitions permettant de mettre la main sur le fameux «contrat d'assistance». Reste une question : Barril agissait-il en électron libre ou en service commandé ? En acceptant la plainte pour complicité de génocide, les magistrats français viennent peut-être d'ouvrir une boîte de Pandore. «Je fais de la diplomatie parallèle», confiait Barril, lors d'une interview filmée en 2004, se vantant, à l'époque, d'avoir effectivement été au Rwanda dès avril 1994 «pour galvaniser l'ensemble». Aujourd'hui, il affirme qu'il était à New York à ce moment. Les propos dans son livre ? «Du roman», aurait-il expliqué en substance au juge Trévidic.

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