Fiche du document numéro 33405

Num
33405
Date
Vendredi Juillet 1994
Amj
Auteur
Taille
53216273
Titre
Diffusion de six reportages de journaux télévisés [Durée totale : 10'56]
Nom cité
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Source
Commentaire
A transcription of these reports can be found here.
Type
Émission télévisée (vidéo)
Langue
FR
Citation

Premier reportage (date estimée : 3 juillet 1994)



[Benoît Duquesne :] Réunion d'état-major à Gikongoro. Nous sommes à une trentaine de kilomètres de Butare tombée la veille aux mains du FPR. Le colonel Rosier vient d'arriver de Bukavu, l'une des bases arrières françaises au Zaïre, pour donner ses ordres au colonel Thibaut qui dirige les opérations sur place [on voit Jacques Rosier, qui fume la pipe, Didier Tauzin ainsi que d'autres militaires en pleine discussion]. Et ses ordres venus de Paris sont fermes : plus question de reculer. La région de Gikongoro et ses camps de réfugiés doivent être protégés contre l'avancée du FPR.

[Jacques Rosier : - "Pour une fois c'est clair : on s'installe à… Gikongoro". Le journaliste : - "Et on n'en bouge plus ?". Jacques Rosier : - "Pour le moment on n'en…, on n'en bouge plus".]

Pendant ce temps-là en ville, les militaires français sont appelés à l'aide par les forces gouvernementales rwandaises : des miliciens campent devant un hôtel où sont réfugiés des Tutsi [on voit des militaires français au béret rouge ainsi que des soldats des FAR et des miliciens devant un bâtiment de couleur jaune].

[Un militaire français au béret rouge s'adresse à un militaire des FAR devant des miliciens : "Lui je l'ai vu à l'hôtel Ibis, lui. Il était à l'hôtel Ibis. Et il protégeait le chef de la milice là-bas [il le désigne de la main]. [Inaudible]. Je l'ai vu avec le drapeau bleu-blanc-rouge dans l'dos".]

Le chef de la milice du Rwanda s'était replié ces derniers jours dans un hôtel de Butare [gros plan sur le milicien et son fusil mitrailleur]. Ces miliciens en déroute cherchent visiblement à massacrer encore quelques Tutsi, sur leur passage [on entend le militaire français au béret rouge dire : "Ça va pas ça !" ; le milicien a un drapeau tricolore accroché sur le dos]. Mais le massacre n'aura pas lieu : les miliciens sont arrêtés et les réfugiés vont être emmenés vers le camps de Gikongoro tenus par les militaires français [on voit les militaires français escorter les miliciens ; on peut lire sur la devanture du bâtiment "J. Gambere / DALLAS CLUB"]. Le seul où sont regroupés les Tutsi évacués hier de Butare.

La scène se déroule sous haute protection des paras. La foule est là, curieuse sinon hostile [on voit des villageois en surplomb qui observent la scène]. Dans cette région qui croule sous les réfugiés qui fuient l'avance du FPR, on sait que la chasse aux Tutsi peut recommencer, que les exactions et les massacres peuvent reprendre, que la peur pousse à la folie [on voit les jeeps des militaires français en train de quitter les lieux]. Pour les Tutsi c'est la fin du cauchemar [on voit des gens en train de monter dans un bus de couleur rouge].

[Un para français : "Y'avait des risques quand même, hein, euh, peut-être pas directement puisque y'avait donc les…, les FAR qui les protégeaient, hein. Donc, euh, y'avait des FAR qui protégeaient les gens, euh…, vis-à-vis d'un…, d'un risque éventuel de la…, de la part des miliciens qui pouvaient être devant. Donc les miliciens, là, ont été récupérés et on les amène à la gendarmerie pour qu'ils soient identifiés et qu'on voit c'qui faisaient là, quoi"].

À leur arrivée au camp les Tutsi peuvent enfin parler, raconter leurs conditions de vie à Butare, leur terreur des milices et des barrages pour fuir la ville [on voit les véhicules des militaires français entrer dans l'école de Murambi].

[Une rescapée au micro d'un journaliste de RFI : - "On était, euh, cachés, quoi". Le journaliste [il semble s'agir de la voix de Christophe Boisbouvier] : - "Dans quel endroit ?". La rescapée : - "Dans la ville même de Butare". Le journaliste : - "Dans une maison, dans un grenier ?". La rescapée : - "Une maison, tantôt dans une…, dans des chambres obscures, tantôt dans les greniers… Dans les plafonds [inaudible]".

Un rescapé : "J'ai eu une chance formidable, c'est que ils ne sont jamais arrivés dans ma maison à moi. C'est…, je n'ai pas compris parce qu'ils ont été dans beaucoup d'autres maisons. Mais dans la mienne, non".]

Pendant qu'ils racontent, les réfugiés voient arriver trois de leurs chasseurs. trois miliciens arrêtés par les Français alors qu'ils tentaient de s'introduire dans le camp la nuit dernière [on voit des militaires français avec des lunettes noires débarquer vigoureusement trois miliciens d'un hélicoptère ; ils ont les mains attachées dans le dos]. Ces trois hommes voulaient tuer une fois d'plus. Ils sont pris en charge, menottés, poussés jusqu'à l'hélicoptère qui les emmène vers une destination inconnue [on voit les trois hommes monter dans un autre hélicoptère].

Sur la route, autour de Butare, l'exode continu. Un mélange de réfugiés, de miliciens et de soldats des forces gouvernementales [on voit deux miliciens armés passer en moto devant un homme tenant une machette à la main]. La peur aux barrages est palpable : peur du FPR, peur d'être abandonnés par les Français. Ils ne savaient pas cet après-midi que la décision avait été prise de stopper l'exode à Gikongoro, de protéger toutes les populations de cette région, qu'elles soient tutsi ou hutu [on voit des miliciens armés de machettes, couteaux et bâtons en train de déambuler sur une route].

Deuxième reportage (date estimée : 5 juillet 1994)



[Amiral Jacques Lanxade, devant les micros de journalistes : - "Les ordres qui ont été donnés aux forces françaises est [sic] d'assurer l'intégrité de la Zone, euh…, humanitaire, euh, sûre. C'est tout. Et de permettre à l'action humanitaire de se développer. Y'a rien d'plus que cela". Un journaliste : - "Y'a un changement d'nature dans l'opération quand même ?". Jacques Lanxade : - "Y'a un…, un aménagement de, euh…, des ordres compte tenu de l'évolution de la situation ! Mais ça n'est rien d'autre. Nous restons dans une position strictement neutre, comme le général Lafourcade vient encore de le rappeler, et nous sommes à la disposition de tous sur place". Le même journaliste : - "Amiral, à moyen terme, votre crainte la plus grande vient d'un affrontement possible avec le FPR ou bien avec les Forces armées rwandaises ?". Jacques Lanxade : - "Ma…, mon inquiétude la plus grande est que on ne…, on nous relève trop tardivement, c'est-à-dire que, euh, la communauté internationale, euh, ne soit pas en mesure, euh, dans les semaines qui viennent, euh, de venir, euh, nous remplacer. Nous souhaitons très vite passer la suite aux Nations unies.]

Troisième reportage (date estimée : 6 juillet 1994)



[Jacques Bihozagara répond à une journaliste : - "Écoutez nous pensons que cette initiative française est une forme de balkanisation de notre pays, une forme de réa…, recolonisation de notre pays. Et ce que nous ne sommes pas prêts à accepter en aucun cas". La journaliste : - "Est-ce que ça veut dire que vous allez continuer à avancer dans cette zone dite de sécurité et que vous allez risquer de faire le coup de feu avec les Français ?". Jacques Bihozagara : - "Bon, c'est-à-dire que cette présence ne va pas du tout changer les objectifs de notre mission qui est celle justement de arrêter les massacres et de neutraliser ceux qui les commettent. Autrement dit si, par hasard, cette zone se trouve dans notre trajectoire, cela ne va pas du tout continuer, euh, changer notre itinéraire".]

Quatrième reportage (date estimée : 4 juillet 1994)



[Laurent Boussié :] On ne connaît pas leur nombre mais dans la partie de Kigali que tenaient les soldats gouvernementaux, ils étaient omniprésents. On les appelle les Interahamwe. Sorte de milice hutu extrémiste, ils sont les nervis de ce qu'il reste du gouvernement rwandais [on voit notamment des miliciens rouler dans un pick-up sur lequel a été installé un drapeau tricolore].

Jeunes -- souvent très jeunes --, bien armés ou simplement équipés de machettes [on voit un milicien qui porte un casque de moto blanc et qui tient dans sa main droite une Kalachnikov], ce sont eux qui sont responsables de la plupart des massacres commis dans ce pays depuis le 6 avril. Dégaines de Rambo, même les soldats les craignent. Et si ce jour-là un gendarme de garde devant un camp de réfugiés fait preuve d'autorité, c'est parce qu'il y a une caméra [on voit un gendarme pousser un milicien armé d'une machette et d'un tournevis].

Parfois ils font la guerre. Mais leur proie favorite reste les réfugiés [on voit trois hommes, dont l'un est blessé, assis à l'arrière d'un véhicule Mitsubishi]. Grâce à des complicités inexplicables, ils entrent dans les camps, en emmènent quelques-uns que l'on ne revoit jamais [on voit un jeune homme armé circuler au milieu des réfugiés ; la scène suivante montre en gros plan un individu tenant une machette à la main].

Des exécutions effectuées dans des conditions atroces : des familles entières sont décimées [on voit un jeune milicien coiffé d'une casquette et tenant un marteau déambuler parmi les réfugiés] ; même les enfants ne sont pas épargnés et les rares qui arrivent à leur échapper sont marqués pour la vie des coups de leurs machettes [on voit un enfant en train de se faire soigner la plaie béante qu'il a au milieu du crâne].

[Laurent Boussié interviewe une femme noire : - "Vous savez qui fait ça ?". La femme : - "Mmm" [on entend des enfants gémir de douleur]. Laurent Boussié : - "C'est qui ?". La femme : - "C'est [inaudible], ce n'est pas les soldats [sourire]".]

Des enfants blessés et traumatisés comme eux, il y en a beaucoup au Rwanda. Et malheureusement, même réfugiés dans des orphelinats, ils ne sont pas à l'abri de leurs bourreaux [gros plans sur des visages d'enfants en pleurs et traumatisés].

[Laurent Boussié, face caméra, dans une rue de Kigali : "Selon le général Bizimungu, chef d'état-major de l'armée rwandaise, ces Interahamwe, ces miliciens hutu n'existent pas. Il s'agirait de simples citoyens organisés en brigades d'auto-défense. Bref, des civils qui lutteraient courageusement contre des réfugiés que l'on sait affamés, appauvris, désarmés et réfugiés dans des camps".]

Cinquième reportage (date estimée : 3 juillet 1994)



[Giles Rabine :] Après plus de deux mois de guerre civile et de chasse aux Tutsi l'orphelinat de Marc Vaiter, c'est cela [on voit un garçon très amaigri se laver à l'aide d'une bassine d'eau] : deux centaines d'enfants et une cinquantaine d'adultes entassés dans la boue d'une arrière-cour [on voit les réfugiés entassés dans la cour de l'orphelinat]. Peut-être parce que Marc Vaiter est le seul qui ait réussi dans cette tourmente à sauver les orphelins dont il s'occupait avant la guerre [gros plan sur des enfants, dont l'un a le visage squelettique], 300 enfants d'un autre orphelinat sont venus se réfugier ici pour échapper aux tueurs, aux Iniheramé [Interahamwe], les mercenaires.

[Un jeune rescapé répond aux questions des journalistes [Marc Vaiter se trouve à ses côtés] : "Il venait, il disait : 'Est-ce que vous n'avez pas des Tutsi adultes ici ?'. J'essayais de…, de…, de dire : 'Non, on n'en a plus ! On…, on a que deux femmes et deux…, deux filles'. Euh…, j'essayais un peu de mentir ! Tu vois, hein. Alors il fait…, il faisait des fouilles, hein, à gauche, à droite. Par hasard il…, il trouve une personne. Bon, ça lui plaît peut…, peut-être ou ça…, ça lui suffit pour…, pour une…, pour la journée. Il part. Deux jours après il revient, comme ça".]

Le refuge qu'ils ont choisi est portant très précaire : déjà avec 200 orphelins on était ici aux limites de la survie. Avec plus de 500 selon Marc Vaiter, cela devient atroce [gros plan sur un enfant en haillon qui attend pieds nus dans la boue].

[Marc Vaiter : "Mais j'espère que le…, euh, la MINUAR va nous apporter de la nourriture, euh, en suffisance. Et puis, euh, mais c'qui nous manque surtout ce sont les médicaments. Alors là, je…, j'avais entendu qu'il y avait un…, un…, un gros-porteur qui était arrivé à Goma mais on n'est pas bénéficiaire encore des médicaments. Et il nous manque énormément de…, d'antibiotiques, de…, de pansements, de…, de…, euh…, produits contre la gale ou des…, ou des infections, hein. [le journaliste essaie de poser une question : "Comment est-ce que vous expliquer…"]. Faut surtout pas oublier qu'y'a des…, des femmes qui ont été…, et…, mais y'a des enfants qui ont été violés et qui représentent des…, des infections. Et on a rien pour les soigner".]

Rien pour les soigner, rien surtout pour les protéger. L'ONU n'en a pas encore les moyens, ni en hommes ni en armement. Elle ne peut pas non plus les évacuer. Elle ne peut que livrer les derniers sacs de nourriture qui lui reste [on voit des Casques bleus en train de décharger des sacs de vivres d'un camion]. L'ONU visite chaque jour Marc Vaiter pour montrer à tous qu'elle porte une attention particulière à cet orphelinat. En espérant que cela suffira à écarter les tueurs.

Faute de place la moitié de ces enfants vont devoir dormir dehors, dans le froid et la pluie. Car au Rwanda c'est l'hiver. Pour les abriter Marc Vaiter a demandé qu'on ouvre les portes de l'évêché voisin. Non seulement le curé refuse mais de plus il veut que les enfants partent [on voit les réfugiés en train de stocker des cartons de vivres].

[Un journaliste interroge un groupe de trois religieux : - "Vous voulez pas prendre les…, les nouveaux réfugiés apparemment ?". L'un des religieux : - "Non, c'est pas une question ! C'est pas ça la question". Le journaliste : - "C'est quoi la question ?". Le religieux : - "On n'en parle plus".

Marc Vaiter, interrogé à part : "Les enfants ne peuvent pas dormir dehors. Donc ils ont…, les prêtres d'ici ont une responsabilité à prendre. Et j'crois qu'il faut qu'ils la prennent".]

L'orphelinat et l'évêché sont mitoyens mais la maison de Dieu restent fermés et les orphelins parqués de l'autres côté du mur [vue en surplomb de l'évêché puis de l'orphelinat, ces deux bâtiments étant situés l'un de l'autre à quelques mètres seulement].

Sixième reportage (date estimée : 4 juillet 1994)



[Philippe Harrouard :] "La poignée de main sur le sol libre d'Afrique du Sud", dit Nelson Mandela [on voit Nelson Mandela serrer longuement la main de François Mitterrand devant de nombreux officiels]. Premier chef d'État étranger reçu au Parlement, François Mitterrand célèbre la victoire d'un peuple sur la peur et l'intolérance.

[François Mitterrand s'exprime devant les parlementaires sud-africains : "Que de prophéties avons-nous entendu… Rien ne serait que bain de sang, haine et refus. Eh bien, c'est le contraire qui se passe. J'aime et je salue ce défi !".]

L'avenir de l'Afrique du Sud, il se joue ici dans les townships. Dans celui-ci près du Cap [la vidéo s'interrompt].

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024