Fiche du document numéro 33387

Num
33387
Date
Lundi 29 octobre 2012
Amj
Taille
19997
Surtitre
Critique
Titre
Opération turquoise au Rwanda : les ambiguïtés du pouvoir français
Nom cité
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Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Il existe un étrange silence autour du livre Silence Turquoise, sorti il y a un mois et qui pointe justement les silences coupables d'une page sombre de notre histoire récente, le génocide rwandais. De hauts responsables politiques et militaires y sont accusés d'avoir menti ? Ces mêmes responsables, tous cités, sont également soupçonnés d'avoir indirectement laissé mourir un millier de personnes ? Pourtant, aucun d'eux ne réagit, aucun d'eux ne se justifie ou ne dément les informations relayées, voire révélées, par Laure de Vulpian. Cette journaliste à France Culture enquête depuis plusieurs années sur l'opération Turquoise menée par la France au Rwanda en 1994, dans les derniers jours du génocide.

En réalité, quand la France se révèle soudain pressée d'agir, la minorité tutsie du Rwanda est déjà en grande partie décimée… par les héritiers d'un régime allié de la France. Le premier mérite du livre est de rappeler les raisons cachées de cette mission qui, au départ en tout cas, n'était pas «que» humanitaire. Le livre se concentre sur les dix premiers jours. «On nous a trompés», confessera ainsi Thierry Prungnaud. Ce sous-officier de gendarmerie envoyé au Rwanda dès la fin juin a cosigné le livre avec Laure de Vulpian. Il se souvient bien d'avoir entendu son supérieur, le colonel Jacques Rosier, expliquer aux troupes que ce sont les Tutsis qui «zigouillent» les Hutus. Or c'est le contraire qui se produit. Pourquoi cette confusion entre bourreaux et victimes ? Parce que l'opération Turquoise a été conçue non pas tant pour sauver les dernières victimes du génocide, que pour empêcher les rebelles du Front patriotique rwandais (FPR) de gagner la guerre qui avait repris. Ces rebelles, en majorité tutsis, l'armée française les avait déjà combattus, lorsqu'elle soutenait le président Habyarimana sans s'inquiéter de la dérive «ethniste» de son régime.

Loin de jeter l’opprobre sur l’ensemble de l’armée, Laure de Vulpian démonte les faux-semblants imposés aux troupes par des supérieurs enfermés dans une grille mentale dépassée qui les conduira à négliger l’urgence d’un sauvetage. Mais le livre révèle aussi l’existence d’une opération secrète pendant Turquoise pour récupérer des militaires français restés aux côtés des forces rwandaises. Au cœur de cette guerre, la journaliste pointe l’ancien président François Mitterrand et certains de ses proches. Notamment Hubert Védrine, à l’époque secrétaire général de l’Elysée. Sollicité pour débattre avec l’auteure sur France Culture, il a botté en touche. Encore un silence pour éviter de se pencher sur ceux du passé ?

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