Fiche du document numéro 31732

Num
31732
Date
Mardi 31 mai 1994
Amj
Hms
19:00:00
Taille
11582410
Sur titre
Journal de 19 heures (Paris Ile-de-France) [3:19]
Titre
Pendant que le Rwanda est à feu et à sang, la communauté rwandaise à Paris vit dans l'angoisse
Nom cité
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Mot-clé
Résumé
- While Rwanda is on fire and bloodshed, the Rwandan community in Paris lives in anguish. They are a hundred installed for a long time or arrived very recently. But all of them have family there. News is rare and everyone clings to the slightest hope without believing it too much.

- Charles is perhaps the only survivor of the French Cultural Center in Kigali. For a month he has been in Paris where he has joined his sisters. After being locked up by the militia in his apartment, he managed to escape. It was the Belgian authorities who evacuated him to Nairobi. He is a miracle of the Rwandan tragedy. Charles Rubagumya, librarian at the French Cultural Center in Kigali: "I stayed at my house for five days. I did not move, I did not go out. Because I was afraid to go down, for fear that I would also die like the others. I had never seen a person dying before my eyes. It was truly a nightmare".

- This nightmare, these two men who have been living in Paris for several months are also living it. One is Hutu, the other is Tutsi. Both reject the term ethnic conflict to designate the genocide unleashed by a beleaguered dictatorship. Both know that part of their family has been massacred. With each passing day, the doubt becomes more and more unbearable. Jean-Pierre Rubulika, intern at the Caisse Française de Développement: "At home, everything was destroyed. My wife and my children fled to a church. In this church, they shot everyone. I don't know if 'they were able to escape but I'm pessimistic". Antoine Nyagahene, professor at the University of Kigali: "I had a family, I left it there when I came here. But I have just learned that my wife was killed a week ago. I am Hutu , my wife was Tutsi. But at the very start of the fighting, my brothers who were in Cyangugu were killed. To say that the Tutsis were killed but that the Hutus were also killed. Our children no longer have anyone to take care of them. They are motherless. And I am here, helpless".

- This feeling of powerlessness and despair, all Rwandans living in Paris share it. Here, once a week, a dozen women meet to dance but above all to be together. Nido Uwera, dancer: "It's a way to keep hope. And I think it's also a way to fight".
Source
Fonds d'archives
INA
Type
Journal télévisé
Langue
FR
Citation
[Présentateur :] Pendant que le Rwanda est à feu et à sang, la communauté rwandaise à Paris vit dans l'angoisse. Ils sont une centaine installés depuis longtemps ou arrivés très récemment. Mais tous ont de la famille là-bas. Les nouvelles sont rares et tout le monde se raccroche au moindre espoir sans trop y croire. Laëtitia Fernandez et Fernando Malverde ont rencontré quelques membres de la communauté rwandaise à Paris.

[Laëtitia Fernandez :] Charles est peut-être le seul rescapé du Centre culturel français de Kigali. Depuis un mois il est à Paris où il a rejoint ses sœurs [on voit Charles Rubagumya dans un appartement parisien]. Après avoir été enfermé par la milice dans son appartement, il a réussi à s'enfuir [gros plan sur des photographies d'enfants]. Ce sont les autorités belges qui l'ont évacué sur Nairobi. Il est un miraculé de la tragédie rwandaise.

[Charles Rubagumya, "Bibliothécaire Centre Français Culturel de Kigali" : "Je suis resté chez mois, euh, cinq jours durant. Euh, je ne bougeais pas, je ne sortais pas. Parce que j'avais peur de descendre, euh…, de peur que je meurs aussi comme les autres. J'avais jamais vécu [sic] une per…, euh…, une personne en train de mourir sous mes yeux. Et moi je…, je ne croyais même pas à mes yeux. Alors, euh, quand…, et moi la…, la nuit je me disais de…, peut-être je rêvais ou bien c'était un fou qui l'a fait. Le lendemain je voyais la même chose. À…, une heure après je voyais la même chose. C'était vraiment un…, un cauchemar".]

Ce cauchemar, ces deux hommes installés à Paris depuis plusieurs mois le vivent aussi. L'un est Hutu, l'autre est Tutsi. Tous deux refusent le terme de conflit ethnique pour désigner le génocide déclenché par une dictature aux abois. Tous deux savent qu'un partie de leur famille a été massacrée. Avec chaque jour qui passe, le doute devient de plus en plus insoutenable [on voit Jean-Pierre Rubulika et Antoine Nyagahene marcher côte-à-côte dans un parc].

[Jean-Pierre Rubulika "stagiaire caisse Française de développement" : "On m'a appris que… chez moi on a tout détruit. Et… la femme, ma femme et…, et dans…, et les enfants étaient enfuis dans une…, dans une église. Ils ont été dans cette église, euh, ils ont tiré sur tout le monde. Je sais pas si elle a pu échapper mais… je suis pessimiste".

Antoine Nyagahene, "Professeur université de Kigali" : "J'avais une famille, euh…, je l'avais laissée… là…, en venant ici. Mais je viens d'apprendre, euh, que ma femme, euh, a été tuée dernièrement. Il y a une semaine".

Jean-Pierre Rubulika : "Quand on me dit qu'il y a 500 000 personnes, je me dis, euh, ça serait une surprise que…, que je trouve quelqu'un de vivant de ma part, de mon côté. Je suis, euh…, j'ai vraiment atteint le…, le fond du désespoir".

Antoine Nyagahene : "Moi je suis Hutu. Euh, ma femme était tutsi. Euh…, mais, euh…, au début même des combats on avait tué mes frères qui se trouvent, euh, au sud-ouest du pays, euh…, à Cyangugu. Pour dire que, euh…, on a tué les Tutsi, on a poursuivi [inaudible] véritablement les Tutsi. Mais les Hutu eux aussi ont été tués. Nos enfants ils n'ont plus personne -- c'est cinq enfants… euh, que j'avais, euh… --, ils n'ont plus personne pour s'en occuper. Bon ils sont orphelins de… orphelins de mère, ils n'ont pas leur père. Et moi je suis là, impuissant".]

Ce sentiment d'impuissance et de désespoir, tous les Rwandais vivant à Paris le partage [on voit des Rwandaises assises dans une salle en train de regarder la Une du journal Libération]. Ici, une fois par semaine, une dizaine de femmes se retrouvent pour danser mais surtout pour être ensemble [on voit Nido Uwera donner un cours de danses aux femmes rwandaises].

[Nido Uwera, "Danseuse" : "C'est une façon de…, de garder espoir. Et je crois qu'c'est… une façon aussi de…, de…, de combattre".]

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