Fiche du document numéro 31521

Num
31521
Date
Jeudi 17 décembre 1998
Amj
Auteur
Taille
37143
Titre
Erreurs et incohérences de la politique française au Rwanda
Sous titre
RAPPORT. La Mission d'information parlementaire sur le rôle joué par la France au Rwanda de 1990 à 1994, présidée par Paul Quilès, a rendu son rapport, mardi 15 décembre. Les députés soulignent les incohérences de la politique française au Rwanda mais dégagent sa responsabilité sur le génocide. La mission n'apporte pas de réponse à la question cruciale : qui a abattu l'avion du président Habyarimana ? Elle renvoie dos à dos les Tutsis du Front patriotique rwandais (FPR) et les extrémistes hutus. Les militaires français sont intervenus à trois reprises au Rwanda. Le rapport n'exclut pas que les soldats français soient intervenus sur le terrain « de façon extrêmement proche » des armées rwandaises. Le nom de Paul Barril, l'ex-capitaine de gendarmerie, apparaît dans le rapport, mais celui-ci n'a jamais été interrogé par les parlementaires.
Nom cité
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Mot-clé
MIP
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
La mission d'information parlementaire sur le rôle de la France au Rwanda, présidée par Paul Quilès, ancien ministre socialiste de la défense, a rendu son rapport, mardi 15 décembre, au terme de neuf mois de travaux. « Il est regrettable qu'il ait fallu attendre quatre ans pour qu'une investigation soit menée sur une pareille tragédie », a dit M. Quilès à propos du génocide rwandais de 1994, remarquant « que le silence du gouvernement, l'apparente indifférence du Parlement ont suscité des interrogations et fait naître des suspicions, voire des mises en accusation de la politique de la France ».

La mission a étudié assez méticuleusement les rapports que Paris a entretenus avec le « pays des mille collines », de la première offensive armée du Front patriotique rwandais (FPR), le 1er octobre 1990, au génocide « déclenché » par l'attentat qui a coûté la vie au président Juvénal Habyarimana, et à son homologue burundais, Cyprien Ntaryamira, le 6 avril 1994. Le rapport, après avoir détaillé plusieurs hypothèses, retient, in fine, deux pistes qui pourraient permettre d'identifier ceux qui ont tiré les missiles pour abattre l'avion présidentiel, renvoyant, pour ainsi dire, dos à dos les Tutsis du FPR et les extrémistes hutus sans désigner de coupables. « Il appartiendra à une autre autorité de poursuivre l'enquête », dit le texte. « Noroît », « Amaryllis » et « Turquoise », les trois grandes opérations militaires françaises menées pendant cette période au Rwanda, sont analysées par la Mission d'information. Les deux premières ont été conduites au titre de l'assistance d'Etat à Etat, la dernière à titre humanitaire. Paul Quilès souligne que l'examen scrupuleux de son déroulement permet de répondre « de façon circonstanciée aux vives critiques formulées à son encontre ».

Les « erreurs » de l'ONU



Le génocide est « un échec de la communauté internationale » et « la France n'est pas impliquée dans ce déchaînement de violence », dit encore le rapport qui stigmatise plusieurs « erreurs » des Nations unies dans la gestion de la crise, dont la plus grave, selon le texte, est d'avoir considéré la situation « au Rwanda comme une simple guerre civile ». C'est l'ONU et la force de surveillance des accords qui ont été « incapables d'enrayer la montée des violences et de mettre fin aux massacres. Leur défaillance est évidente », a estimé Paul Quilès, au cours d'une conférence de presse. Et la mission rappelle, à juste raison, que ce sont bien « des Rwandais qui pendant plusieurs semaines ont tué d'autres Rwandais, dans les conditions d'atrocité que l'on sait ».

L'opposition a rejeté les conclusions du document, estimant que « notre pays peut et doit être fier de l'action qu'il a conduite » au Rwanda et que le rapport contient des passages « inacceptables ». Les députés RPR, DL et UDF critiquent notamment « la tonalité de l'introduction », qui « favorise une tendance à rejeter sur la France la responsabilité des événements qui ont conduit au génocide », « la publication des auditions à huis-clos » et « l'analyse des faits ». Pour les parlementaires de l'opposition, « le rapport ne tire pas explicitement les conclusions positives pour la France que cette analyse fait pourtant apparaître ». « La France n'a pas à rougir de ce qu'elle a fait », a déclaré le député RPR René Galy-Dejean, tandis que son collègue Jacques Myard, qui s'était fait remarquer au cours des auditions en traitant les universitaires invités à témoigner d' « idiots utiles », dénonçait « une véritable campagne de haine médiatique à l'encontre de la France » qui a « visiblement été orchestrée par des intérêts et services étrangers ». Les députés de l'opposition critiquent en outre le fait que M. Quilès et les rapporteurs, Pierre Brana et Bernard Cazeneuve, aient formulé des « propositions » à la fin du rapport, estimant celles-ci « inacceptables ». « Elles reflètent à l'évidence un positionnement politique », ont-ils déclaré.

Contrôle du Parlement



Dans cet ultime chapitre, la majorité propose diverses idées « pour qu'à l'avenir, les actions de gestion des crises, notamment en Afrique, souffrent de moins d'insuffisance et soient plus efficaces » : l'amélioration du contrôle du Parlement sur les opérations militaires extérieures, le rattachement de l'assistance militaire technique au ministère de la défense plutôt qu'à celui des affaires étrangères, une coordination plus efficace entre les différents services secrets, l'approfondissement de la réforme de la coopération, une contribution plus efficace à la sécurité africaine et la ratification rapide du traité de Rome sur la Cour pénale internationale.

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