Fiche du document numéro 30853

Num
30853
Date
Samedi 17 septembre 2022
Amj
Taille
17149
Titre
Nous transmettions nos doutes, nos interrogations… Nous étions désavoués par nos autorités centrales
Sous titre
Témoignage enregistré pour la soirée du colloque international sur le génocide des Tutsi au Centre culturel francophone de Kigali.
Source
RTV
Commentaire
Thérèse Pujolle appears in the documentary The orphans of Rwanda broadcast on Canal+ on April 16, 1994 in the program "24 hours".
Type
Témoignage
Langue
FR
Citation
[Thérèse Pujolle s'exprime face caméra, en regardant à une seule reprise ses notes] Bonjour à tous. Permettez-moi d'abord de me souvenir avec vous de tous ceux qui ont été nos partenaires de travail, nos proches, nos familiers disparus et exterminés…, que nous n'avons pas protégés. J'ai été responsable de la coopération civile entre 81 et 84. [Plan de coupe] Ces trois années furent tumultueuses car elles détruisaient notre naïveté de coopérant. Qu'en était-il de ce pays, de son histoire… si lourde, si peu racontée, masquée parfois. Lorsque j'ai quitté le Rwanda, en 84, j'avais lancé des alertes. Il y avait eu des temps de crises fortes : je pense aux arrestations de jeunes femmes tutsi. Je quittais un pays dont je pressentais que les ténèbres le menaçaient. [Plan de coupe] Nous transmettions… nos doutes, nos interrogations à nos successeurs. Nous savions que nos coopérants…, fidèles à certaines valeurs, ne laisseraient pas le silence reprendre. Nous étions désavoués par nos autorités centrales. Nous savions pourtant… que peu à peu, ce que nous appelions "la nuit rwandaise" serait plus noire. L'évolution de la coopération militaire française était déjà, dans ces années, un problème. Et pourtant… nous avions choisi de maintenir, de plaider pour maintenir cette coopération. Nous faisions le pari qu'en aidant la société civile à prendre en main son propre développement, en pariant que le Président Habyaramana [Habyarimana] réussirait à surmonter les conflits, les violences, nous faisions le pari qu'on pouvait avancer. Et pourtant. Et pourtant nous savions combien des complots obscurs, chez les officiers, menaçaient non seulement la paix civile mais le pouvoir lui-même. Nous savions que les oppositions entre clans, les oppositions entre régions masquaient aussi le marquage ethnique. Nous savions tout cela.

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