Fiche du document numéro 30461

Num
30461
Date
Jeudi 21 juillet 1994
Amj
Hms
20:00:00
Auteur
Taille
27878
Surtitre
Journal de 20 heures
Titre
Terrible épidémie de choléra au Rwanda. Plusieurs milliers de personnes ont trouvé la mort en moins de 24 heures. Les équipes de médecins sont débordées
Soustitre
Les réfugiés préfèrent mourir à Goma que de retourner au Rwanda où ils ont peur d'être assassinés.
Nom cité
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Lieu cité
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Résumé
- Ceremony of the fiftieth anniversary of the Vercors maquis. Edouard Balladur pays homage to the sacrifice of the maquisards.

- In Rwanda, as if the lack of food, as if the most extreme destitution were not enough, cholera has just struck the refugees in the camps around the city of Goma. Within 24 hours, several thousand people were killed. A devastating, brutal epidemic. The teams of doctors are overwhelmed. There is horror on the spot.

- This woman is looking for family, relatives in this already pestilential mass grave. She cannot find or recognize them. She runs off and swears the devil is behind this horror. The devil took for these people the features of the Rwandan Patriotic Front. A refugee: "It was the RPF that poisoned the water. That's why we will die here. The RPF is chasing us as far as Goma".

- Unreal image like that of Lake Kivu in Goma. This dirty water that causes cholera is still used to elicit a few smiles and a little fun. We bathe there but above all we fill cans while being fully aware of what we are doing. This man tells us that he knows this water is bad and adds that he prefers to die here.

- Medical assistance has the greatest difficulty in making its way to the sick. The catastrophe takes on such a scale that it becomes difficult to express. Isabelle Pardieu, "Médecins sans Frontières": "Things are getting worse and worse because we do not have the means to do what is necessary for 800,000 refugees".

- The refugees would rather die in Goma than return to Rwanda where they are afraid of being murdered. The problem is therefore not only humanitarian. And if we do not quickly succeed in convincing these men and women that it is not necessarily death that awaits them at home, the cholera will progress here with frightening mathematical rigor.

- Cholera is the scourge of the poor, of misery, of underdevelopment. Already in 1991, in Africa, more than 10,000 people had died. The effectiveness of the available vaccines is far from absolute and hygiene measures remain the best remedy to stop the epidemic.

- Drinking water in tiny quantities, no suitable sanitation network, children who will draw a little water from a lake of mud. These catastrophic hygienic conditions and the displacement of thousands of refugees paved the way for cholera.

- A disease of poverty and underdevelopment, cholera is an acute intestinal infection caused by bacteria. Contamination occurs through water, food and dirty hands. Vomiting, diarrhea, the progression quickly leads to severe dehydration.

- The current cholera pandemic first appeared in Africa 25 years ago. The disease has become endemic, especially in the countries of central Africa. 76,000 cases and 2,500 deaths were officially declared last year. Since January Rwanda had only reported a dozen cases. But the influx of refugees into the camps and underdevelopment quickly changed the situation.

- It is all the more tragic since cholera is a disease that can be treated with oral rehydration solutions, antibiotics and infusions. During an epidemic, virtually anyone infected could be cured, but only if they were treated in time.

- Médecins sans frontières is appealing to strengthen its presence in Rwanda. The organization needs to increase its human and financial capacities.

- Several Rwandan government ministers must go in the coming hours to the humanitarian security zone in order to convince the refugees to return home. A French mission has just arrived on site to establish a dialogue with this new government and to work on the succession of Operation Turquoise.

- Among these admirable people who are there in the camps to help the refugees to survive, there are these little Rwandan Sisters who have just arrived in France thanks to the intervention of Cardinal Lustiger. Césarie, "Rwandan Sister": "We wonder what the Church has done, what the Church has been in this country. […] There were 12 Sisters. We separated the Hutus from the Tutsi. And the Tutsi were massacred. And the others are almost guilty of not having been with them, of not having been taken".
Source
TF1
Fonds d'archives
INA
Type
Transcription d'une émission de télévision
Langue
FR
Citation
[Jean-Claude Narcy :] Madame, Monsieur, bonsoir. Terrible épidémie de choléra au Rwanda. Plusieurs milliers de personnes ont trouvé la mort en moins de 24 heures. Les équipes, euh, de médecins sont débordées. Nos envoyés spéciaux témoignent.

Regain de tension à Sarajevo : nouvelles attaques contre trois avions de l'ONU. Le pont aérien est suspendu.

Cérémonie du cinquantième anniversaire du maquis du Vercors. Edouard Balladur rend hommage au sacrifice des maquisards.

[…]

Au Rwanda, comme si le manque de nourriture, comme si le dénuement le plus extrême ne suffisait pas, le choléra vient de frapper les réfugiés des camps autour de la ville de Goma. En 24 heures, plusieurs milliers de personnes ont trouvé la mort. Une épidémie foudroyante, brutale. Les équipes de médecins sont débordées. Sur place c'est l'horreur. Le témoignage de nos envoyés spéciaux Gauthier Rybinski et Manuel Joachim.

[Gauthier Rybinski :] Cette femme cherche de la famille, des proches dans ce charnier déjà pestilentiel [une incrustation "Région de Gisenyi, Rwanda" s'affiche à l'écran]. Elle ne les trouve pas ou ne les reconnaît pas. Elle s'enfuit et jure que le diable est derrière cette horreur. Le diable a pris pour ces gens les traits du Front patriotique rwandais.

[Un réfugié devant la fosse commune [il porte un masque sur le nez et la bouche] : "C'est le FPR qui a empoisonné l'eau. C'est pour ça que nous mourrons ici. Le FPR nous poursuit jusqu'à Goma".]

Et le travail continue. Avant de soigner les vivants, il faut d'abord enterrer les morts [on voit cinq hommes jeter un cadavre dans la fosse commune].

Image irréelle que celle du lac Kivu à Goma. Cette eau sale qui provoque le choléra sert encore à susciter quelques sourires et un peu d'amusement. On s'y baigne mais surtout on remplit des bidons en étant pleinement conscient de ce que l'on fait. Cet homme nous dit qu'il sait que cette eau est mauvaise [il s'exprime en kinyarwanda] et il ajoute qu'il préfère mourir ici.

L'assistance médicale a les plus grandes difficultés à se frayer un chemin jusqu'aux malades. La catastrophe prend une telle ampleur qu'elle en devient difficile à exprimer [on voit une humanitaire de MSF distribuer de la nourriture aux réfugiés].

[Isabelle Partdieu [Pardieu], "Médecins sans Frontières" : "Euh…, l'aide humanitaire a démarré, ça c'est sûr. Mais, euh, ça va de pire en pire… parce qu'on n'a pas les moyens de faire, euh…, de…, de faire ce qu'il faut, euh…, pour 800 000, euh, réfugiés".]

Depuis ce soir ceux qui ne peuvent plus espérer survivre sont emmenés, vivants, pour ne pas contaminer les autres [on voit plusieurs personnes en train d'évacuer un homme inconscient].

[Gauthier Rybinski, face caméra, au milieu des réfugiés sur une route de Goma : "Vous l'avez entendu, ces réfugiés préfèrent mourir ici que de retourner au Rwanda où ils ont peur d'être assassinés. Le problème n'est donc pas uniquement humanitaire. Et si l'on ne parvient pas rapidement à convaincre ces hommes et ces femmes que ce n'est pas forcément la mort qui les attend chez eux, eh bien, le choléra progressera ici avec une effrayante rigueur mathématique".]

[Jean-Claude Narcy :] Le choléra, c'est le fléau des pauvres, de la misère, du sous-développement. Déjà en 1991, en Afrique, plus de 10 000 personnes en étaient mortes. L'efficacité des vaccins disponibles est loin d'être absolue et les mesures d'hygiène restent le meilleur remède pour stopper l'épidémie. Lucie Soboul nous aide à mieux comprendre cette maladie.

[Lucie Soboul :] De l'eau potable en quantité infime, pas de réseau d'assainissement convenable [gros plan sur deux personnes en train d'essayer de faire boire un réfugié très affaibli], des enfants qui vont puiser un peu d'eau dans un lac de boue. Ces conditions hygiéniques catastrophiques et les déplacements de milliers de réfugiés ont ouvert la voie au choléra [gros plan sur un enfant couché dans la boue en train de pleurer].

Maladie de la pauvreté et du sous-développement, le choléra est une infection intestinale aiguë provoquée par une bactérie. La contamination s'effectue par l'eau, l'alimentation et les mains sales. Vomissements, diarrhées, l'évolution se fait vite vers une forte déshydratation [gros plans sur des personnes à l'agonie puis sur une rangée de cadavres emmitouflés dans des couvertures].

[Docteur Jean-Michel Fournier, "Institut Pasteur - Paris" : "S'il n'y a pas compensation très rapide des pertes d'eau, on meurt par déshydratation. Quand le… niveau d'hygiène est très bas, euh…, l'épidémie de choléra peut se développer, euh, de façon extrêmement rapide".]

L'actuelle pandémie de choléra a fait son apparition en Afrique il y a 25 ans. La maladie est devenue endémique, surtout dans les pays de l'Afrique centrale. 76 000 cas et 2 500 morts ont été déclarés officiellement l'an dernier. Depuis janvier le Rwanda n'avait signalé qu'une dizaine de cas. Mais l'afflux de réfugiés dans les camps et le sous-développement ont vite fait basculer la situation.

C'est d'autant plus tragique que le choléra est une maladie qu'on peut traiter par des solutions de réhydratation orale, des antibiotiques, des perfusions. Au cours d'une épidémie, pratiquement toutes les personnes infectées pourraient guérir, mais à la seule condition d'être soignées à temps [diffusion d'images de réfugiés, dont des enfants, en train d'agoniser dans les camps].

[Jean-Claude Narcy :] Médecins sans frontières lance un appel pour renforcer sa présence au Rwanda. L'organisation a besoin d'augmenter ses capacités humaines et financières. Alors si vous êtes médecins et que vous êtes disponible, un numéro de téléphone : le 40 21 28 28. Et si vous voulez envoyer une aide financière : Médecins sans frontières…, boîte postale 77, Paris 75 011 [ces informations sont en même temps diffusées à l'écran].

Ajoutez encore à ce chapitre que plusieurs ministres du gouvernement rwandais doivent se rendre dans les heures qui viennent dans la zone de sécurité humanitaire afin de convaincre les réfugiés à rentrer chez eux. Enfin une mission française vient d'arriver sur place pour établir un dialogue avec ce nouveau gouvernement et travailler à la relève de l'opération Turquoise.

Afin de vous rendre compte de l'ampleur de la catastrophe, faut-il ajouter ces images, tournées cet après-midi d'un hélicoptère : des camps peuplés, une véritable marée humaine. Ici près d'un million de personnes s'entassent. Et à l'heure qu'il est le flux des réfugiés ne tarit pas. Comment contenir une épidémie dans de telles conditions ?

Parmi ces personnes admirables qui sont sur place dans les camps pour aider les réfugiés à survivre, dans des conditions que vous pouvez imaginer, il y a ces petites Sœurs rwandaises qui viennent tout juste d'arriver en France grâce à l'intervention du cardinal Lustiger. Elles témoignent au micro de Corinne Magne.

[Sœur Claire, "Mère des religieuses de l'Assomption" : "Elles ne pouvaient rien faire. C'est, euh…, elles…, que s'angoisser et…, et être des témoins impuissants de beaucoup de choses. Ainsi j'ai décidé de…, de les sortir.

Césarie, "Sœur rwandaise" : "On se demande, maintenant, ce que l'Église a fait, ce que l'Église a été dans ce pays. Parce que il y a eu tant, tant, tant et tant de massacres. Mais je pense qu'on ne peut le juger qu'à ces témoignages vivants des hommes et des femmes qui ont tout donné jusqu'à donner leur vie. Et y'en a plus qu'on ne croit".

Capitolina, "Sœur rwandaise" : "Et l'exemple, le veilleur de notre centre nutritionnel…, euh, on lui a obligé d'aller tuer, hein. Il a dit : 'Au nom de Yahvé, je peux pas verser le sang'. Il a été tué".

Césarie : "Elles étaient 12 Sœurs. On a séparé des Sœu…, des Hutu…, des Hutu des Tutsi. Et les Tutsi ont été massacrées. Et les autres… sont culpabilisées presque de n'avoir pas été avec elles, de n'avoir pas… être [sic] prises. Et ces personnes je pense qu'elles sont mortes vraiment martyres de la fraternité, de l'amour, de…, de la paix. Ce sont les martyres d'aujourd'hui".]

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