Fiche du document numéro 30435

Num
30435
Date
Vendredi 15 juillet 1994
Amj
Hms
20:00:00
Auteur
Taille
25841
Surtitre
Journal de 20 heures
Titre
200 000 réfugiés sont déjà arrivés dans l'Est du Zaïre au cours de ces dernières 24 heures. La grande catastrophe humanitaire qu'on prévoyait est désormais bien réelle
Soustitre
Le Président rwandais par intérim et trois de ses ministres se sont réfugiés dans la zone humanitaire créée par la France dans le Sud-Ouest du pays.
Nom cité
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Lieu cité
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ZHS
Résumé
- 200,000 refugees have already arrived in eastern Zaire in the past 24 hours. The great humanitarian catastrophe that was foreseen is very real today. 600,000 additional civilians are still expected in the coming days in Goma.

- Exhausted after hours of walking, the refugees at nightfall contented themselves with putting their packages where they were in the invaded city of Goma. But this morning, at dawn, they hit the road. They don't know where they're going, they're just going with the flow. A movement that humanitarian associations overwhelmed by events are trying to channel.

- Despite the logistical difficulties, it is time for non-governmental organizations to take matters into their own hands. Because Goma hardly has the means to accommodate these thousands of families in distress. The Zairians, who had never seen this before, stand in solidarity with the refugees but they are worried.

- Despite the night the tide did not stop. In the midst of this crowd, the Zairian paratroopers who came to reinforce them from Kinshasa are doing their best to put some order and confiscate the weapons. But the barrier remains open permanently, nothing could stop the movement. Because the Rwandan Patriotic Front is on the road to Gisenyi, the twin city of Goma, located just a few kilometers in Rwanda.

- At the psychiatric hospital [in Ndera], on the outskirts of Kigali. Locked in their cell, the living dead, malnourished, without medication, abandoned in their deep madness. Last April government forces stormed the hospice, killing 250 patients. Since then, the few survivors have been molding here. The last psychiatrist left them on Sunday [July 10]. The sanitary conditions in the hospital are unbearable.

- The interim Rwandan President and three of his ministers took refuge in the humanitarian zone created by France in the southwest of the country.

- A new Rwandan government will be sworn in on Monday [July 18] in Kigali according to a statement by the representative of the Rwandan Patriotic Front in New York.

- Washington has let it be known that the White House no longer recognizes the current government of Rwanda and has decided to close the Rwandan embassy in the United States.

- Secretary of State Warren Christopher announced a ceasefire accepted by the Tutsi rebels.
Source
TF1
Fonds d'archives
INA
Type
Transcription d'une émission de télévision
Langue
FR
Citation
[Jean-Claude Narcy :] Le dossier Rwanda à présent : 200 000 réfugiés sont déjà arrivés dans l'Est du Zaïre au cours de ces dernières 24 heures. La grande catastrophe humanitaire qu'on prévoyait est bien réelle aujourd'hui. 600 000 civils supplémentaires sont encore attendus dans les jours qui viennent à Goma. Sur place, l'équipe de nos envoyés spéciaux Isabelle Marque et Gérard Ramirez.

[Isabelle Marque :] La grande place [inaudible] avait cette nuit l'allure pathétique d'une cour des miracles [une incrustation "Goma, Zaïre" s'affiche à l'écran]. Épuisés après des heures de marche, les réfugiés à la nuit tombée se sont contentés de poser leurs paquets là où ils se trouvaient dans la ville envahie. Sur les chemins, les talus, les terrains vagues. Là où ils pouvaient allonger leurs nattes pour profiter d'un bref répit à peine rompu de loin en loin par des rafales de Kalachnikov au-delà de la frontière [diffusion d'images de réfugiés en train de dormir dans les rues de Goma]. Mais ce matin, dès l'aube, ils ont repris la route. Ils ne savent pas où ils vont, ils ne font que suivre le mouvement. Un mouvement que tentent de canaliser les associations humanitaires dépassées par les évènements.

[Marcus [Markus] Dolder, "Responsable Secours C.I.C.R." : "On a eu des discussions hier [14 juillet] avec, euh…, les…, les gens, les autorités sur place. Et…, ils ont dit on peut les acheminer vers le Nord parce que là en haut, il y a, euh…, des…, des…, des petits rivières [sic], y'a assez de bois, y'a, euh, des lieux où on peut les installer, quoi. Alors, euh…, c'est mieux de…, de…, de faire tout…, le tout possible pour dégager la ville au lieu de les avoir ici sur place".]

Malgré les difficultés de logistique, il est temps que les organisations non gouvernementales prennent les choses en main. Car Goma n'a guère les moyens d'accueillir ces milliers de familles en détresse. Les Zaïrois, qui n'avaient jamais vu ça, sont solidaires des réfugiés mais ils s'inquiètent [on voit un camion de la Croix-Rouge rempli de sacs de vivres en train d'être déchargé].

[Un Zaïrois : "On ne sait pas faire grand-chose pour eux. Ils doivent vivre. Ils ont droit à la vie. Ce sont des hommes comme nous. Mais comment est-ce qu'ils seront abrités ? Comment seront-ils nourris ?".]

Malgré la nuit le flot ne s'est pas tari, loin de là. Le passage de la douane est engorgé par les troupeaux, les voitures les plus hétéroclites, les camions surchargés. Les plus pauvres et les plus nombreux, ceux qui vont pieds nus, se faufilent difficilement.

Au milieu de cette foule, les parachutistes zaïrois venus en renfort de Kinshasa font leur possible pour mettre un peu d'ordre et confisquer les armes [gros plans sur deux tas d'armes confisquées]. Mais la barrière reste ouverte en permanence, rien ne pourrait arrêter le mouvement. Car le Front patriotique rwandais est sur la route de Gisenyi, la ville jumelle de Goma, située à quelques kilomètres à peine au Rwanda [diffusion d'images de réfugiés en train de marcher].

[Jean-Claude Narcy :] Et nous venons de recevoir les images d'un nouveau massacre, celui de l'hôpital psychiatrique de Kigali. Les troupes gouvernementales ont ouvert le feu et tué quelque 250 malades. L'établissement est désormais squatté par des réfugiés livrés à eux-mêmes dans des conditions, vous allez voir, dramatiques. Nahida Nakad.

[Nahida Nakad :] À l'hôpital psychiatrique, dans la banlieue de Kigali [il s'agit de l'hôpital de Ndera]. Enfermés dans leur cellule, des morts-vivants [on voit deux mains tremblantes sous la porte de la cellule], mal nourris, sans médicaments, abandonnés dans leur folie profonde [on aperçoit notamment un œil au travers de la porte d'une cellule et on entend une femme chanter puis une autre ricaner].

En avril dernier les forces gouvernementales ont pris d'assaut l'hospice, tué 250 malades. Depuis, les quelques survivants moisissent ici dans des conditions [inaudible] [gros plan sur une femme qui enroule ses bras autour de son cou]. Le dernier psychiatre les a quittés dimanche [10 juillet]. Leur état se dégrade de jour en jour [on voit un mur criblé d'impacts de balles]. Les conditions sanitaires dans l'hôpital sont insoutenables. Deux médecins anglais sont arrivés par hasard dans cet enfer. Ils en sont bouleversés.

[Docteur Andrew Carney, "Médecin pour les Droits de l'Homme" [il s'exprime en anglais mais ses propos sont traduits] : "Aaah [il prend sa tête dans sa main droite puis on le voit tenir un morceau de crâne humain sur un autre plan] ! Je ne sais pas si je dois crier, pleurer ou vomir en regardant autour de moi. Honnêtement, je n'arrive pas à croire qu'un être humain est capable de faire subir des choses pareilles à des gens si vulnérables".]

Il ne reste plus qu'à se demander s'il y a une limite à l'horreur au Rwanda [gros plan sur le visage d'un bébé en train de pleurer].

[Jean-Claude Narcy :] Le Président rwandais par intérim et trois de ses ministres se sont réfugiés dans la zone humanitaire créée par la France dans le Sud-Ouest du pays.

Et je vous le disais tout à l'heure dans les titres : par une dépêche, j'ai appris qu'un nouveau gouvernement rwandais prêterait serment, donc, euh, lundi [18 juillet] à Kigali. C'est une déclaration du représentant du Front patriotique rwandais à New York.

Washington a fait savoir que la Maison-Blanche ne reconnaissait plus l'actuel gouvernement, d'ailleurs, du Rwanda et décidé la fermeture de l'ambassade rwandaise aux États-Unis.

Par ailleurs le secrétaire d'État, Warren Christopher, a annoncé un cessez-le-feu accepté par les rebelles tutsi.

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024