Citation
: 10 juillet 1994
Le Général de
Chef du Cm
CONFIDENTIEL DÉFENSE
N° Document : FICHQUOT
MINISTERE DE LA DEFENSE
ETAT MAJOR DES ARMEES
14, rue Saint Dominique
00456 ARMEES
ESS Tél : 42.19.57.30
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MN) N°_231 /DEF/EMA/COIA/CCR/CD
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Objet : Opération Turquoise - Point de situation du 10 juillet 1994.
Pièce jointe : une annexe,
1 - Activités opérationnelles :
- acheminement du détachement sénégalais de Goma à Kibuye par voie
routière, ce qui porte à 2615 hommes les effectifs de Turquoise,
- vols de reconnaissance et d'entraînement au-dessus du territoire
zairois,
- mission d'aide aux réfugiés et d'extractions aux personnes menacées :
12 religieuses rwandaises ont été acheminées vers Bangui.
La prise de Rushashi par le FPR a accéléré l'exode de 200 000 déplacés
qui s'y trouvaient.
Au centre, le FPR s'est emparé de Mushubati et tient les rives Est de la
Nyabarongo.
Au sud, le FPR tient désormais la rive Est de la rivière Mwogo.
Les milices, quant à elles, durcissent leur attitude dans les régions de
Kibuye, Cyangugu et Gikongoro ce qui intensifie les missions de contrôle des
unités Turquoise.
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2 - Camps de réfugiés :
La progression du FPR continue à chasser les déplacés d'un camp à
l'autre. Ainsi, dans le centre les camps de Kaduha et Rukondo regroupent
maintenant plus de 100 000 personnes tandis qu'au sud, de nombreux déplacés
font encore mouvement vers le camp de Kitabi.
3 - Déploiement :
Le groupe Nord a été renforcé par l'arrivée de soixante soldats de
l'armée sénégalaise à Kibuye.
L'activité du FPR aux limites de la zone humanitaire sûre justifie le
maintien de l'alerte opérationnelle des moyens aériens et terrestres.
4 - Point des participations étrangères :
Suite à la décision du gouvernement prise le 06 juillet, le Tchad étudie
la possibilité de participer à l'opération Turquoise.
La Guinée Bissau a renouvelé sa proposition de participation à hauteur
d'une section.
L'Egypte devrait, dans la semaine à venir, déployer six à sept
observateurs au lieu de vingt initialement prévus, mais propose en revanche,
d'accroître sa participation à la MINUAR.
5 - Environnement médiatique :
Les relations entre militaires et médias restent bonnes.
A travers quelques articles, la presse met l'accent sur les réactions des
participants au sommet du G 7 face à la crise rwandaise et, sur l'arrivée sur le
théâtre Turquoise d'un nouveau détachement sénégalais.
6 - Humanitaire :
On assiste à une intensification des regroupements dans la région sud
de la zone humanitaire sûre, alors qu'au nord les populations semblent pour
l'instant se fixer sur les lisières de la zone.
Des flux importants se poursuivent dans la région de Gitarama en
direction de Ruhengeri et Gysenyi.
Au total, on estime à | 200 000 le nombre de déplacés au Sud-Ouest
du pays et à 500 000 au Nord-Ouest.
En revanche, des réfugiés auraient quittés les camps en périphérie de
Kigali pour rejoindre leurs habitations dans la capitale.
7 - Divers :
Échange de DL avec la MINUAR à compter du lundi 11 juillet.
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ANNEXE SITUATION
Situation politique et intérieure :
M. Sharyar Khan, représentant spécial du Secrétaire général des
Nations unies, s’est entretenu avec le gouvernement intérimaire rwandais à
Gisenyi. À cette occasion, M. Khan a déclaré que le FPR pourrait annoncer
prochainement un cessez-le-feu unilatéral, assorti de ‘conditions’ mais
refuserait très certainement d’en négocier les termes avec le gouvernement
intérimaire ou même avec les forces armées rwandaises.
Commentaire : volontiers évoquée avant la prise de Kigali, l'idée
d'un cessez-le-feu négocié exclusivement par des militaires, c'est-à-dire par les
généraux Kagame, Bizimungu et Dallaire, n'est plus aujourd'hui d ‘actualité.
Pour n'avoir pas su se désolidariser à temps du gouvernement de Gisenyi, dont
la responsabilité collective dans les massacres ne fait guère de doute, le
général Bizimungu, chef d'état-major des FAR n'inspire plus confiance au
FPR : ce dernier, toujours hostile à toute forme de dialogue avec le
gouvernement intérimaire, risque en effet, une fois ses positions militaires
confortées, d'annoncer un cessez-le-feu unilatéral, éventuellement assorti de
conditions impossibles à remplir par la partie adverse.
Les conversations tenues le 8 entre le FPR et le Comité de
coordination des forces démocratiques du changement (CCFDC), fédération de
l'opposition hutue modérée, ont permis de désigner les candidats à la
présidence. M. Seth Sendashonga, fonctionnaire de l'ONU marié à une Tutsie,
semble, pour l’heure, le plus à même d'établir un consensus en sa faveur.
Situation militaire :
Au Nord, le FPR s’est emparé de Rushashi (35 km SE de Ruhengeri)
et son avance chasse devant elle les déplacés qui encombrent les axes en
direction de Ruhengeri ou de Gisenyi. Par ailleurs, de nombreux poids lourds,
chargés de conteneurs cadenassés et portant un marquage Vivres divers”,
franchissent la frontière ougando-rwandaise en direction du sud, à Kagitumba.
Les observateurs de la Mission d'observation des Nations unies en Ouganda-
Rwanda (MONUOR) ne sont cependant pas habilités à contrôler le contenu de
ces chargements.
Au centre, après la chute de Mushubati dans la nuit du 8 au 9, le 99e
bataillon des FAR s’est replié sur Mwaka et tient encore la rive est de la rivière
Nyabarongo, en dépit de la pression que le FPR exerce sur le pont situé à l'ouest
de cette localité.
Au sud, les 3 bataillons qui assuraient la protection de Gikongoro ne
devraient faire mouvement vers Kivumu que le 10. Le FPR tient désormais la
rive est de la rivière Mwogo et interdit tout mouvement à fond de vallée, sans
pour autant chercher à franchir la limite de la zone de sécurité.
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SRE
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Commentaire : à l'évidence, le FPR entend à la fois maintenir une
pression forte dans le nord du pays, en menaçant directement Ruhengeri puis
Gisenyi, et poursuivre l'avance vers le nord de Kibuye, le long de la Zone
humanitaire sûre qu'il pourrait ainsi couper du reste du secteur demeuré sous
le contrôle des FAR. Encore maintenus à l'est de la Nyabarongo, les éléments
du FPR peuvent en effet s'emparer rapidement du pont de Mwaka et ouvrir la
route vers Kivumu, où 80 000 déplacés seraient alors chassés en direction de
Kibuye.
De même, alors que la chute de Rushashi ne peut qu'accentuer la
menace qui continue de peser sur Ruhengeri et Gisenyi, un tel assaut ne
manquerait pas de précipiter un flot accru de réfugiés en direction du Zaire,
où une réaction des forces armées serait inévitable, ou vers la zone
humanitaire, dans la mesure où la route Gisenyi-Kibuye serait toujours
ouverte. Un revers militaire dans celte zone conduirait, enfin, à envisager la
question du repli d'éléments des FAR dans cette même zone.
Situation diplomatique
Le Liberia et la Sierra Leone ont à leur tour apporté leur soutien à
l'opération Turquoise, à laquelle le Niger a décidé de contribuer par un
contingent de 40 hommes. En revanche, la participation de l'Egypte à Turquoise
a été ramenée de 20 à 7 officiers. Enfin, les forces tchadiennes ont reçu l’ordre
de mettre sur pied un bataillon dont l'effectif, non encore précisé, devrait
atteindre une centaine d'hommes.
En Espagne le ministère de la Défense va proposer au gouvernement
l'envoi d'une aide humanitaire, vraisemblablement composée de 2 appareil C 130
et d'une équipe médicale.
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