Fiche du document numéro 29789

Num
29789
Date
Mercredi 15 juin 1994
Amj
Taille
3430711
Titre
Fiche n° 18722/N - Rwanda-Burundi : Point de situation
Nom cité
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Lieu cité
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Lieu cité
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Mot-clé
Cote
N° 18722/N
Source
Type
Note
Langue
FR
Citation
FICHE
RWANDA-BURUNDI

Le 15juin 1994
18722/N

03 NOV2000

POINT DE SITUATION

Le Front Patriotique Rwandais (FPR) semble avoir remporté une victoire significative en s'emparant de la ville de Gitarama, où séjournait le gouvernement intérimaire rwandais. Faute de munitions, les troupes gouvernementales ne semblent désormais avoir d'autre choix que d'engager un lent repli vers la frontière zaïroise.

I - SITUATION MILITAIRE

Le FPR contrôle actuellement plus de la moitié du territoire rwandais et, notamment, l'essentiel des zones frontalières jouxtant l'Ouganda, la Tanzanie et une partie du Burundi.

Le FPR concentre l'essentiel de ses efforts sur la ville de Gitarama qui, selon un communiqué non vérifié des rebelles, aurait été prise, dans la journée dù 13 juin 1994. Noeud routier d'intérêt stratégique, la prise de cette localité représenterait, pour le FPR, un succès majeur, lui permettant de poursuivre son avance vers le sud-ouest du pays. Gitarama est également la ville qui a abrité, pendant plus d'un mois, le gouvernement intérimaire rwandais qui serait en
cours de reconstitution à Gisenyi. De violents combats opposent toujours les soldats gouvernementaux aux rebelles, qui ont consolidé leurs positions à Kabgayi, au sud de la ville, et ont ouvert un deuxième front au nord-ouest. Des éléments avancés du FPR ont également pris le contrôle de la route de Butaré en plusieurs endroits, au sud de Gitarama.

Par ailleurs, le FPR n'a pas relâché sa pression sur Kigali et le quartier de Nyamirambo, un des seuls qui ne soit pas encore sous son contrôle, lequel est sujet à des bombardements quotidiens. De même, fidèle à sa tactique de harcèlement et d'infiltration, le FPR est en train d'investir le quartier de Gikondo, sans doute en prévision d'un assaut sur le camp de la Garde Présidentielle (GP).

Les massacres, incessants dans le pays, empêchent toute négociation sérieuse entre les deux parties. Après l'exode massif des populations tutsi, les populations hutu fuient devant la progression des troupes rebelles. Des camps de fortune sont installés à la périphérie rwandaise et les Organisations Non Gouvernementales (ONG) sont partiellement débordées.

II - RISQUES DE CONTAGION AU BURUNDI

Le risque de propagation de la crise au Burundi voisin devient élevé. Des heurts récents entre milices hutu et militaires burundais tutsi laissent craindre une contagion imminente, en cas de victoire du FPR au Rwanda.

Des rumeurs alarmantes font état, depuis quatre jours, de combats, à proximité de Bujumbura et à la frontière rwando-burundaise, qui auraient fait plus de quinze morts. D'anciens membres des milices hutu du quartier de Kamenge, réarmés, n'hésiteraient pas à provoquer l'armée depuis les collines avoisinantes de Bujumbura. Malgré les opérations de désarmement de la population hutu effectuées, le mois dernier, l'armement semble ne pas manquer. Ainsi, plusieurs véhicules blindés de l'armée burundaise (à 90% tutsi) ont été récemment attaqués au RPG-7 et une grenade aurait été lancée, le 12 juin 1994, en plein coeur de Bujumbura, dans le quartier de Bwisa.

CONFIDENTIEL DEFENSE

03 NOV 2006


La situation burundaise est d'autant plus instable que la classe politique nationale paraît peu décidée à trouver un consensus sur la question des futures institutions. En particulier, le mode de désignation du président de la République est toujours sujet à controverse et dérobades de part et d'autre. Une victoire totale du FPR, au Rwanda, devenue possible avec le succès majeur de Gitarama, risque de provoquer de violents affrontements ethniques et la remise en cause immédiate, par la minorité tutsi, des résultats des élections du mois de juin 1993.

III - TENTATIVES DIPLOMATIQUES

Sur le terrain, la Mission des Nations Unies pour l'Assistance au Rwanda (MINUAR) tente d'amener les belligérants à conclure une trêve, afin de procéder, dans de meilleures conditions, au déploiement des renforts qu'elle attend et d'appliquer son mandat, à vocation essentiellement humanitaire. Ainsi, cinq sessions de pourparlers viennent de se succéder. Il est fort probable que la prise de Gitarama, jugée décisive par nombre d'experts militaires, permettra désormais au FPR d'aborder la question d'un éventuel cessez-le-feu en position nettement plus favorable.

A Tunis, le Conseil ministériel de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) a demandé "l'arrêt immédiat des hostilités et l'établissement d'un cessez-le-feu" en prélude au sommet annuel de l'OUA. M. Sindikubwabo, président par intérim du Rwanda, a plaidé en faveur du cessez-le-feu et condamné les massacres. Il a également demandé que le mandat de la MINUAR soit élargi et souhaité un retour aux accords d`Arusha.

IV - ASSISTANCE MILITAIRE AU PROFIT DES BELLIGERANTS

Le FPR, s'il bénéficie d'un soutien logistique ougandais, ne dispose, en aucun cas, d'un engagement massif de la NRA (National Résistance Army). Il semblerait que le président Museveni transfère discrètement une partie de ses surplus d'équipement au profit du FPR, la Banque Mondiale l'encourageant à démobiliser, en contrepartie d'un Plan d'Ajustement Structurel (PAS) avantageux.

Les forces gouvernementales sont de plus en plus gênées par l'embargo sur les armes et les munitions décrété par les Nations Unies. Elles bénéficient toutefois d'un soutien zaïrois en munitions. Timide au début de la crise, l'aide zaïroise a augmenté considérablement à la suite de l'entrevue, le 26 mai 1994, à Gbadolite, entre le président Mobutu et les ministres rwandais des Affaires étrangères et de la Défense. Au total, ce sont plus de 19 tonnes de munitions diverses, prélevées sur les stocks de la Garde Civile zaïroise (GACI), qui viennent d'être acheminées auprès des forces gouvernementales rwandaises. Par ailleurs, il semble que le Zaïre, par le biais du colonel Imbega, responsable des approvisionnements des Forces Armées Zaïroises (FAZ), serve d'intermédiaire pour fournir des munitions aux forces gouvernementales. Des munitions, en provenance d'Afrique du Sud, auraient transité par le Shaba, avec la bienveillance des Forces Armées Zaïroises (FAZ). Des rumeurs, en provenance du FPR, font également état de l'acheminement d'armements tchèque ou bulgare à partir de la localité zaïroise de Goma.

Les forces gouvernementales ont effectué des démarches auprès de sociétés d'armement françaises (Thomson-Brandt notamment) en vue de se procurer des moyens de transmissions et des munitions. Les licences d'exportation ont été bloquées, conformément à l'embargo décidé par les Nations Unies. Enfin, il semble que le capitaine Barril, dirigeant de la société "Secret", exerce. en liaison avec la famille de l'ex président Habyarimana décédé dans l'accident d'avion du début du mois d'avril 1994, réfugiée à Paris, une activité remarquée, en vue de fournir des munitions et de l'armement aux forces gouvernementales.

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