Fiche du document numéro 28919

Num
28919
Date
Mercredi 25 mai 1994
Amj
Hms
20:00:00
Auteur
Taille
19301533
Surtitre
Journal de 20 heures [5:11]
Titre
Marine Jacquemin, envoyée spéciale : « À Kigali ces milices omniprésentes, redoutables. Nous avons de la chance d'être Français, notre gouvernement est leur ami, disent-ils »
Soustitre
La guerre mais aussi de nouveaux massacres seraient commis cette-fois par le FPR. Représailles, vengeance, les journalistes sont mis en accusation.
Nom cité
Lieu cité
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ONU
Résumé
- Resumption of violent fighting in Kigali between government forces and Patriotic Front troops. Two shells hit the ICRC premises, killing two Rwandan Red Cross employees.

- The war but also new massacres would be committed this time by the RPF. Reprisals, revenge, journalists are indicted. A black woman: "We always speak positively for the Tutsi. And we always condemn the Hutus". When we tell them about genocide - 200,000, maybe 500,000 dead - they say, "It's intoxication".

- In Kigali, almost deserted streets, feeling of war. And these omnipresent, formidable militias. We are lucky to be French. Our government is their friend, they say.

- The UN Human Rights Commission, meeting in Geneva, has decided to open an international investigation to establish responsibility for these killings.
Source
TF1
Fonds d'archives
INA
Type
Journal télévisé
Langue
FR
Citation
[Patrick Poivre d'Arvor :] Dans ce journal […], la situation au Rwanda avec la reprise de violents combats à Kigali et des obus sur la Croix-Rouge. Le reportage de là-bas de nos envoyés spéciaux.

[…]

Mesdames, Messieurs, bonsoir. Donc, euh, le Rwanda : "Un échec, un scandale dont tout le monde est responsable", voilà ce que vient de déclarer le secrétaire général de l'ONU Boutros Boutros-Ghali. Là-bas en effet, reprise de violents combats à Kigali entre forces gouvernementales et troupes du Front patriotique. Deux obus ont touché les locaux du CICR, tuant deux employés rwandais de la Croix-Rouge.

Marine Jacquemin, Thierry Froissart et Gilles Tuban forment la première équipe de télévision à être entrée dans Kigali, côté gouvernemental. Leur reportage a bien entendu été difficile à réaliser vu l'agressivité ambiante. De là un certain nombre d'images filmées à la hâte.

[Marine Jacquemin :] [Inaudible] kilomètres nous sépare de Gitarama, refuge du nouveau gouvernement, à Kigali la capitale. Peu de journalistes ont emprunté cette route, les habitants disent qu'elle n'est pas recommandée. Pour nous le principal obstacle : les barrages [gros plans sur un milicien en treillis tenant dans sa main un grand sécateur]. Même accompagnés de militaires rwandais, les miliciens sont incontrôlables [gros plan sur le visage de miliciens à un barrage]. Dans leurs mains et autour de leur taille, de sales armes qui ont commis ces dernières semaines tant d'atrocités [on voit notamment des miliciens juchés sur une voiture].

[Des miliciens, filmés à la hâte : "[Inaudible] les esclaves de Monsieur Dallaire, où est-ce qu'ils sont [rires] ?".]

Sang-froid et diplomatie sont au programme. Il nous faudra en passer une centaine [scène montrant la voiture des journalistes franchissant un barrage].

Nous croisons d'abord quelques déplacés par grappes de 10, puis de 20, bientôt de 40. Et très vite ils deviennent une marée humaine, jetée par la guerre, désœuvrée, ne sachant où aller [on voit des colonnes de gens déplacés].

Cet enfant dit qu'il a perdu ses parents sur la route [image d'un jeune enfant noir portant un matelas sur son dos].

[Un homme noir : "Il dit, euh, que c'est…, la ville est tout…, est pilonnée".]

Cette femme explique que l'on fusille tout ce qui bouge [une femme noire parle face caméra mais ses propos ne sont pas diffusés].

La guerre mais aussi de nouveaux massacres seraient commis cette-fois par le FPR. Représailles, vengeance, les journalistes sont mis en accusation.

[Une femme noire : "On parle toujours, positivement, pour les Tutsi. Et on condamne toujours les Hutu".]

Quand nous leur parlons de génocide -- 200 000, peut-être 500 000 morts --, ils répondent :

[Un homme noir : - "Comment on a pu re…, faire une recensement de…, de ces personnes qui ont été massacrées ?". Marine Jacquemin : - "Pour vous c'est de l'intoxication ?". Réponse [plusieurs personnes répondent en même temps] : - "Oui, Oui. C'est de l'intoxication. Oui !".]

La Croix-Rouge -- c'est l'organisation humanitaire très présente -- fait régulièrement cette route mais pas sans risque puisque le réservoir du camion a été percé de balles. Bilan : un médecin blessé [on voit un homme de la Croix-Rouge en train de réparer son véhicule].

[Un humanitaire de la Croix-Rouge : "Là-bas donc, au coin, ça tire encore et, euh…, mais les gens, ils essaient de passer quand-même".]

Puisque ça passe, nous y allons à toute allure [on aperçoit un bus de l'ONATRACOM dans le fossé]. Il nous faut entrer dans cette ville isolée du monde. Finalement, Kigali [la voiture des journalistes arrive dans la ville].

[Un soldat des FAR s'adressant à une personne sur un barrage : "Salut, salut !".]

Des rues quasi désertes, impression de guerre. Et ces milices omniprésentes, redoutables.

[Un milicien [son visage n'est pas filmé] : - "Vous êtes Français ou Belges ?". Réponse du conducteur du véhicule : - "Français !".]

Nous avons de la chance d'être Français. Notre gouvernement est leur ami, disent-ils. Pour les Belges, c'est une autre histoire.

[Des miliciens armés s'adressant à la voiture des journalistes" : - "Pas Belges ?". Un autre milicien : - "Ce sont des Français, ouais, ouais !". Une autre voix : - "On ouvre la barrière !". Un milicien armé : - "[Inaudible], allez, allez !".]

Derrière les murs bien gardés de l'hôtel les Mille Collines, ou du stade ou d'ailleurs, nombreux sont ceux en danger de mort [des soldats des FAR qui gardent l'hôtel des Mille Collines en refusent l'entrée aux journalistes]. Notre impuissance nous empêche d'aller les voir.

Au détour d'une rue, coïncidence : un cortège de l'ONU, celui d'officiels qui profitent d'un cessez-le-feu pour se déplacer [on voit plusieurs véhicules de l'ONU, dont un blindé].

[Marine Jacquemin, face caméra et équipée d'un gilet pare-balles, devant un véhicule blindé de l'ONU : "Ça et là nous entendons sporadiquement des tirs de mortiers. La trêve signée pour quelques heures ne semble pas vraiment respectée. Il n'empêche qu'à l'intérieur de ce bâtiment, le général Dallaire et l'envoyé spécial de Boutros Boutros-Ghali essaient de se frayer un chemin vers la paix".]

[Patrick Poivre d'Arvor :] La commission des droits de l'Homme de l'ONU, réunie à Genève, a décidé d'ouvrir une enquête internationale pour établir les responsabilités dans ces tueries. Et l'image de ce petit garçon, euh, blessé, chantant en français, est en elle-même une terrible condamnation de ceux qui sont entrés dans cette spirale infernale. Écoutez-le :

[Est diffusée la scène d'un enfant blessé chantant une comptine en kinyarwanda mélangé de français : "[…] Au pas camarade ! Au pas camarade ! Au pas, au pas, au pas […]".]

Voilà. Une poignée de médecins, euh, luttent jour et nuit dans cet hôpital de Kigali pour sauver les enfants du Rwanda. Ils réalisent chaque jour -- ils sont cinq seulement -- 300 opérations chirurgicales.

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024