Fiche du document numéro 28465

Num
28465
Date
Vendredi 28 mai 2021
Amj
Taille
459242
Titre
Paris poursuit sa réconciliation à petits pas avec Kigali
Sous titre
Les excuses de la France ne sont pas venues
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
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Lieu cité
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Le président français est à Kigali. Un voyage
délicat à un an de la présidentielle. Il a reconnu
la “responsabilité” de son pays dans
le génocide du printemps 1994. Mais pas
d’excuses dans la bouche du président français,
contrairement à ce qu’avait fait le Premier ministre
belge Guy Verhofstadt le 7 avril 2000.
Six ans, jour pour jour après le début
du génocide, à Kigali, écrasé par
un soleil de plomb, devant le petit
bâtiment bleu délavé où ont péri la
plupart des dix casques bleus belges
assassinés au Rwanda, Guy Verhofstadt
avait dit sa tristesse et sa colère
face au drame inhumain qui avait
frappé l’ancienne colonie belge. Il
avait surtout demandé publiquement
pardon dans un discours fort
qui a marqué tout un peuple. “Au
nom de mon pays, je m’incline devant
les victimes du génocide. Au nom de mon pays, au nom
de mon peuple, je vous demande pardon. […] Il faut que
le monde se souvienne toujours de l’horreur perpétrée
ici. Nous devons trouver la force et la volonté de ne
plus jamais tolérer de tels massacres, qui font injure à
l’intelligence et aux valeurs essentielles de l’humanité.”
À quelques mètres de là, au Mémorial du génocide
de Gisozi, vingt et un an plus tard, Emmanuel
Macron a prononcé un discours qu’il savait attendu
de toutes parts. Chacun de ses gestes, chacun de ses
mots ont été scrutés par les 12 millions de Rwandais
qui espéraient des excuses “pour en finir une
bonne fois pour toutes. Pour que la réconciliation entre
les deux pays soit totale”, comme l’explique Albert
Hakizimana, habitant de Kigali, qui aura attendu
en vain.
Après plus de vingt-cinq ans de tensions, le lien se
retend entre Paris et Kigali depuis le début de ce
quinquennat. Le président Macron a pris une série
d’initiatives pour sortir de l’impasse. C’est lui qui a
demandé un rapport d’historiens
dirigé par Vincent Duclert, consacré
au rôle de la France au Rwanda
avant et pendant le génocide.
Jusqu’ici, Nicolas Sarkozy était le
seul président français à s’être
rendu à Kigali depuis 1994. Il avait
alors reconnu de “graves erreurs” et
“une forme d’aveuglement” des autorités
françaises. Emmanuel Macron
est allé un peu plus loin. Il a prononcé
huit fois le mot “génocide”. Il
a insisté sur sa volonté de mettre un
terme à des années de “silence”. “Un génocide ne se
compare pas. Il a une généalogie. Il a une histoire. Il est
unique”, a-t-il martelé en rendant hommage aux
victimes, “dont nous n’avons écouté la souffrance ni
avant, ni pendant, ni même après, et c’est peut-être le
pire”.
Pas de repentance
“En me tenant, avec humilité et respect, à vos côtés,
ce jour, je viens reconnaître nos responsabilités, a-t-il
poursuivi. En voulant faire obstacle à un conflit régional
ou une guerre civile, (la France) restait de fait
au côté d’un régime génocidaire. En ignorant les aler-
tes des plus lucides observateurs, la France endossait
une responsabilité accablante dans un engrenage qui
a abouti au pire, alors même qu’elle cherchait précisément
à l’éviter”.
Alors que beaucoup de Rwandais espéraient qu’il
prononce des “excuses” au nom de son pays, le président
Macron n’a pas franchi le pas. Il a même déclaré
que la France n’avait “pas été complice”. “Les
tueurs qui hantaient les marais, les collines, les églises
n’avaient pas le visage de la France”, a-t-il insisté.
Toutefois, il a tout de même reconnu que la France
avait “un rôle, une histoire et une responsabilité politique
au Rwanda”. Elle a aussi selon lui “un devoir” :
“celui de regarder l’histoire en face et de reconnaître la
part de souffrance qu’elle a infligée au peuple rwandais
en faisant trop longtemps prévaloir le silence sur
l’examen de vérité”.
Qu’importe, officiellement pour le président
rwandais Paul Kagame qui a salué le discours de
son homologue français. “Ses paroles avaient plus de
valeur que des excuses. Elles étaient la vérité”, a-t-il
expliqué lors d’une conférence de presse commune,
évoquant le “courage immense” de son “ami”
Emmanuel Macron.
Le président de la principale organisation de rescapés
Ibuka, Egide Nkuranga, était un peu moins
enthousiaste et s’est permis de regretter que le président
français n’ait “pas présenté clairement des excuses
au nom de l’État français” ni “même demandé
pardon”. Avant d’ajouter : “Il a vraiment essayé d’expliquer
le génocide et la responsabilité de la France.
C’est très important, ça montre qu’il nous comprend.”

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024