Fiche du document numéro 28283

Num
28283
Date
Mardi 27 avril 2021
Amj
Taille
84397
Titre
Rwanda : Gilbert Mitterrand demande à Emmanuel Macron de ne pas "insulter l'Histoire"
Soustitre
Gilbert Mitterrand, l’ex-député-maire de Libourne et fils de François Mitterrand, ne partage pas les conclusions du rapport Duclert sur le Rwanda. Il demande à Emmanuel Macron de ne pas se “défausser” sur l’ancien président socialiste.
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Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Pour Gilbert Mitterrand, le rapport Duclert sur le génocide du Rwanda “ressemble davantage à une démarche utilitaire qu’à une œuvre d’historiens.” © Crédit photo : Pascal Bats

Le rapport Duclert a écarté la complicité de la France dans le génocide des Tutsis en 1994 au Rwanda, mais pointe des faillites, en particulier à l'Élysée. Pourquoi en contestez-vous l'analyse ?

Le rapport Duclert tord enfin le cou à cette accusation de complicité de génocide matraquée médiatiquement par les plus violents des accusateurs, dont Kagame, l'actuel président du Rwanda. Afin de compenser ce désaveu pour eux, le rapport pointe des faillites et ressemble davantage à une démarche utilitaire qu'à une œuvre d'historiens. Il avoue lui-même qu'il est incomplet. Les conclusions qu'en tire son auteur sont nécessairement partielles, donc faussées d'un point de vue scientifique. Nous rentrons alors dans un débat qui n'est plus historique mais politique.

Les historiens de ce rapport ont pourtant eu accès à des milliers d'archives. Selon vous la France est exempte de tout reproche ?

Les reproches ont leur place, mais doivent être contextualisés. Pour ne pas l'avoir fait, il y a une véritable distorsion entre ce que disent les archives et les conclusions que ce rapport formule viscéralement à charge. Que reprocher à la France ? D'avoir appliqué un accord de coopération signé en… 1975, qualifié par le rapport lui-même de « limité et de soutien militaire modeste » ? D'y avoir mis la condition d'un engagement des autorités rwandaises à démocratiser leurs institutions ? D'avoir réussi à imposer une négociation entre les adversaires ? D'avoir abouti aux accords d'Arusha en 1993 pour lesquels le FPR de Kagame remerciera publiquement et personnellement François Mitterrand ? D'avoir quitté le Rwanda pour laisser la place à l'ONU ? D'avoir cru en un processus de paix retrouvée ?

C'est le gardien du temple mitterrandien qui parle ?

Les rapports de la Mission parlementaire (1998), de l'ONU (1999), de l'OUA (2000), du TPIR, des juges Bruguière et Trévidic, de juges espagnols (2008) et plus de 20 livres publiés parlent aussi. Ce ne sont pas des gardiens du temple.

Alain Juppé, l'ex-ministre des Affaires étrangères de l'époque, a, lui aussi, déploré dans une récente tribune au Monde « la terrible solitude de la diplomatie française » face à la communauté internationale. Pourtant, il a estimé que la France « n'a pas assez accompli »...

Alain Juppé déplore le retrait des troupes de l'ONU après l'attentat de 1994 qui déclenche le génocide, malgré les alertes diplomatiques de la France. La France y retourne seule pour créer une zone de sécurité pour tous ceux qui fuient le génocide, sous couvert d'un mandat de l'ONU. Juppé déplore le délai mis par l'ONU pour y répondre, et les demi-mesures que ce mandat accorde à la France.

Emmanuel Macron doit se rendre au Rwanda prochainement. Qu'attendez-vous de lui ?

De ne pas insulter l'Histoire et de ne pas se défausser sur François Mitterrand, ni sur les autorités françaises, ni sur la France, pour solder à bon compte l'affaire du Rwanda. Qu'il demande qu'une Commission internationale complète les travaux de la Commission Duclert en y intégrant, au-delà des seules archives françaises, toutes les données nécessaires à la compréhension de cette épouvantable tragédie.

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024