Fiche du document numéro 26961

Num
26961
Date
Lundi 22 juin 2020
Amj
Taille
98574
Sur titre
Au Conseil d'État
Titre
Consultation anticipée des archives publiques, le juge aux commandes
Sous titre
CE, ass., 12 juin 2020, n° 422327, Lebon
Tres
 
Page
 
Nom cité
Cote
 
Résumé
In a decision issued on June 12, 2020, the Council of State decided to authorize advance consultation of public archives consisting of notes, reports, diplomatic telegrams,
letters received or sent by the President of the Republic, official speeches, press cuttings, relating in particular to the foreign and military policy of France in Rwanda.
Source
JCP
Extrait de
 
Commentaire
 
Type
Article de revue
Langue
FR
Citation
Le Conseil d’État autorise la consultation anticipée
d’archives publiques constituées de
notes, comptes rendus, télégrammes diplomatiques,
lettres reçues ou envoyées par le président
de la République, discours officiels,
coupures de presse, relatifs notamment à la
politique étrangère et militaire de la France au
Rwanda. S’y trouvent en particulier des prises
de position personnelles du président François
Mitterrand, de ministres en exercice, de hauts-fonctionnaires
français et de personnalités françaises
et étrangères. Ces documents, qui
concernent les années 1991 à 1995, couvrent
aussi les conditions dans lesquelles la politique
de l’État a été conduite à cet égard pendant la
période de cohabitation 1993-1995. L’accord
ainsi donné par le juge administratif l’est aux
termes d’un contrôle entier sur la régularité et
surtout le bien-fondé de la décision de refus de
consultation anticipée opposée par le ministre
de la Culture, prise sur avis conforme du mandataire
du signataire du protocole intervenu le
15 février 1995 pour une période de 60 ans. Un
tel protocole est signé lors du versement des
documents d’archives publiques émanant du
président de la République, du Premier ministre
et des autres membres du Gouvernement (C.
patr., art. L. 213-4). Jusqu’à présent, le Conseil
d’État n’admettait qu’un contrôle de l’erreur manifeste
du refus de consultation anticipée (CE,
29 juin 2011, n° 335072 : JurisData n° 2011-
012731 ; Lebon, p. 306 ; JCP A 2011, act. 493).
Le juge doit confronter l’intérêt qui s’attache
à la consultation, avant l’heure fixée par le protocole,
de ces documents et les intérêts que la
loi a entendu protéger en réglementant cette
consultation, en particulier le secret des délibérations
du pouvoir exécutif, la conduite des relations
extérieures et les intérêts fondamentaux
de l’État dans la conduite de la politique extérieure.
Et, pour que son intervention soit pleinement
utile, le juge de l’excès de pouvoir décide
aujourd’hui de se placer exceptionnellement à
la date à laquelle il statue, prenant ainsi pleinement
en compte, comme il le précise, la nature
des droits, l’écoulement du temps et l’évolution
des circonstances de droit et de fait.
L’intérêt du demandeur repose sur le droit
des citoyens de demander compte à tout agent
public (Décl. 16 août 1789, art. 15) et sur la liberté
de recevoir et de communiquer des informations
(CEDH, art. 10). Cet intérêt légitime
s’apprécie au vu de la démarche qu’il entreprend
et du but poursuivi, de la nature des documents
sollicités et des informations qu’ils
comportent. Il est tenu compte de l’écoulement
du temps, mais aussi, le cas échéant, du fait
que les documents ont déjà été consultés par
anticipation ou rendus publics. Dans la présente
affaire, le requérant avait déjà publié deux
ouvrages sur le rôle de la France au Rwanda et
justifiait sa demande par les besoins de nouveaux
travaux de recherche destinés à une nouvelle
publication intéressant plus
particulièrement la politique du président François
Mitterrand en Afrique centrale. Un intérêt
légitime, admet la présente décision qui relève,
dans l’examen de proportionnalité, que la
consultation aujourd’hui des archives en question
ne compromet pas les intérêts fondamentaux
de l’État ou la sécurité des personnes et
portent sur des événements survenus il y a plus
d’une génération, dont les acteurs ne sont plus
en activité, pour la plupart. La balance des intérêts
était ainsi favorable au demandeur. La
Haute Assemblée en déduit que la consultation
ne pouvait en conséquence qu’être autorisée,
rompant ainsi avec la jurisprudence précédente
qui ne prévoyait pas une telle « compétence
liée » (CE, 29 juin 2011, préc.).
Le contenu des documents sollicités était
connu de la juridiction pour en avoir obtenu communication
hors débat contradictoire (CE,
29 juin 2011, préc.).

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