Fiche du document numéro 2509

Num
2509
Date
Dimanche 18 novembre 2012
Amj
Taille
135975
Surtitre
Exclusif
Titre
Comment la police allemande a raté le « financier » du génocide
Soustitre
Selon toute vraisemblance, Félicien Kabuga, recherché par le Tribunal pénal international pour le Rwanda, était à Francfort en 2007.
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Cote
n° 2706
Source
Type
Langue
FR
Citation
Le 7 septembre 2007, près de Francfort, en Allemagne. Des policiers
frappent à la porte d'une maison. À l'intérieur, un homme recherché
par le Tribunal pénal international pour le Rwanda : Augustin
Ngirabatware, ministre du Plan pendant le génocide.

À la vue des policiers, venus l'interpeller, Ngirabatware a une
réaction étrange : il sort une clé USB de sa poche, la jette au sol et
la détruit à coups de talon. Maîtrisé par les policiers, il est placé
en détention. Que cherchait-il donc à cacher ? Pour en avoir le coeur
net, les enquêteurs décident de confier les débris de l'appareil à un
laboratoire d'analyse. Mais Augustin Ngirabatware s'est acharné : il
faudra plusieurs semaines pour faire parler le support. Les
techniciens parviennent toutefois à en extraire plusieurs documents,
dont au moins un est intéressant : une facture d'hôpital, d'un montant
d'environ 5 000 euros, au nom d'un citoyen tanzanien. Elle mentionne
des traitements pour « insuffisance respiratoire chronique ».

Intrigués, les policiers allemands cherchent et retrouvent la trace du
­passeport utilisé par le patient pour entrer sur le territoire et
demandent aux autorités tanzaniennes le dossier de son
titulaire. Surprise : la photo qu'ils reçoivent, et que Jeune Afrique
s'est procurée (voir ci-contre), est à l'évidence celle du beau-père
de Ngirabatware, Félicien Kabuga (77 ans), surnommé le « financier »
du génocide. Il était le président de la tristement célèbre Radio
Télévision libre des mille collines (RTLM) et est soupçonné d'avoir
importé des milliers de machettes destinées à armer les milices
génocidaires. Accessoirement, cette photo contredit les rumeurs, qui
circulaient déjà à l'époque, affirmant qu'il avait subi une opération
de chirurgie esthétique pour changer de visage.

Faux nom



Lorsque les enquêteurs retournent au domicile d'Augustin Ngirabatware,
Félicien Kabuga a évidemment quitté le pays depuis longtemps. Mais une
enquête de voisinage à l'aide du cliché leur permet d'apprendre qu'il
a bien séjourné dans cette maison. Les témoins l'ont vu se déplacer
avec une canne anglaise. Selon certains indices, il était même encore
dans la propriété le jour de l'interpellation !

D'après une source proche de l'enquête, Ngirabatware a eu le temps de
lancer plusieurs phrases « dans une langue inconnue des policiers »
avant son arrestation. Était-ce du kinyarwanda ? Était-ce destiné à
son beau-père ? Une chose est sûre : le 17 septembre 2007, le
génocidaire présumé le plus recherché au monde est passé tout près
d'une arrestation. Il s'en est fallu de quelques heures. Peut-être
même de quelques mètres.

Et depuis ? Le procureur du Tribunal pénal international pour le
Rwanda (TPIR), Hassan Bubacar Jallow, l'affirme régulièrement : il se
trouverait au Kenya. Cet homme richissime y gérerait plusieurs
affaires sous un faux nom. Malgré l'arrestation d'Augustin
Ngirabatware, certains membres de sa famille restent haut placés,
comme son autre gendre, Fabien Singaye, le conseiller spécial du
président centrafricain, François Bozizé. Le gouvernement kényan
continue de nier que Kabuga est présent sur son sol. Mais un
documentaire - il est vrai controversé - de la chaîne privée kényane
NTV diffusé en juillet tend à prouver le contraire.

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