Fiche du document numéro 24947

Num
24947
Date
Jeudi 25 septembre 2014
Amj
Auteur
Taille
154658
Titre
Rwanda. Un travail de vérité publique sur le génocide
Sous titre
Grâce à une enquête minutieuse, Jean-François Dupaquier propose un ouvrage de référence sur le déroulement des faits qui a conduit au massacre perpétré, il y a vingt ans, au Rwanda.
Source
Type
Langue
FR
Citation
Politiques, militaires et mercenaires français au Rwanda. Chronique d’une désinformation, par Jean-François Dupaquier. Éditions Karthala, 480 pages, 28 euros.

Depuis deux décennies, nombre de commentateurs français – notamment les anciens officiers de l’opération « Turquoise » (juin-août 1994), qui s’en sont fait une véritable spécialité – psalmodient la même antienne concernant le génocide perpétré au Rwanda: celui-ci fut le résultat d’une « colère populaire spontanée » suite à l’assassinat du président Habyarimana, le 6 avril 1994, sur fond de « guerre ethnique » se perdant dans la nuit des temps.

Des sources irréfutables



Incompréhensible pour un esprit cartésien, il ne pouvait donc être prévu par les autorités de notre pays ayant décidé du soutien militaire au régime alors en place à Kigali, ce dès octobre 1990 et la première offensive du Front patriotique rwandais (FPR)... Le nouvel ouvrage de Jean-François Dupaquier confirme l’inanité de ce discours autojustificateur: le dernier génocide du XXe siècle fut l’aboutissement d’une propagande méthodique et de longue haleine faisant appel aux techniques de manipulation qui avaient caractérisé le nazisme. Comment soutenir sérieusement que rien ne le laissait prévoir: rencontrant confidentiellement des hauts dirigeants du FPR pour leur enjoindre de cesser le combat, Paul Dijoud, alors directeur des Affaires africaines et malgaches au Quai d’Orsay, prophétisait que sinon « vous ne retrouverez pas vos frères et vos familles, parce que tous auront été massacrés » ! De peur sans doute de ne pas avoir été assez clair, il revenait à la charge : « Si vous ne déposez pas les armes, vous trouverez tous les vôtres déjà exterminés à votre arrivée à Kigali. » Cette entrevue avait lieu à Paris en septembre 1991 ; trois ans plus tard...

Travaillant à partir de sources irréfutables (Mission d’information parlementaire et « Fonds Mitterrand » en particulier), Jean-François Dupaquier élabore ce que l’on pourrait appeler une oeuvre de lucidité publique. Tant en ce qui concerne le compte à rebours du génocide lui-même que, à chacune de ses étapes, les interférences des politiques diplomatique et militaire menées par et depuis Paris. Ce qui permet un coup de projecteur sur une dimension largement sous-estimée jusqu’à aujourd’hui, le recours par Kigali à des sociétés de mercenaires français, y compris au plus célèbre d’entre eux, Paul Barril. Avantage pour le gouvernement français : se dégager de toute responsabilité officielle en poursuivant dans la même voie que précédemment.

Un dédoublement de la personnalité qui permit bien des astuces à la Dr Jekyll et M. Hyde en matière de trafic d’armes au profit du camp génocidaire après la proclamation de l’embargo par les Nations unies. Avant de donner dans le mercenariat de haut vol, le sieur Barril fut commandant du GIGN puis l’un des premiers cadres de la « cellule antiterroriste de l’Élysée ». Si l’on en croit ses très périodiques confidences médiatiques (ce qui n’est sans doute guère recommandé), il aurait « passé un contrat », courant 1994, visant Paul Kagame alors dirigeant militaire du FPR et aujourd’hui président. La mafia françafricaine perdrait-elle la main ?

Jean Chatain

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