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Rencontre avec le metteur en scène de "Rwanda 94", un spectacle représentant pour la première fois le génocide des Tutsi au Rwanda. Pour Jacques Delcuvellerie, "quand le théâtre s'empare d'un tel sujet, il doit créer ses propres règles : qu'est-il juste de montrer et quel tabou doit-on respecter ?". Avec Jacques Delcuvellerie (metteur en scène, fondateur du Groupov).
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Il y a 25 ans et un jour, le 6 avril 1994, l’avion de Juvénal Habyarimana, Président du Rwanda était abattu. Dans la seconde, le pays basculait dans l’horreur. En l’espace de trois mois, 800 000 Tutsis ont été tués. Femmes, hommes, enfants, vieillards, le génocide du Rwanda n’a épargné personne.
Notre travail fut une tentative de réparation symbolique envers les morts à l’usage des vivants ; il nous est apparu que le spectacle ne serait nulle part un travail qui montre le massacre de masse, qui prendrait l'événement génocide dans sa dimension énorme et monstrueuse. Tout est passé par la parole et le témoignage. Jacques Delcuvellerie
En avril 2000, au Théâtre de Liège, les spectateurs belges ont découvert l’intégralité d’un travail collectif. Signé par le Groupov que dirige le metteur en scène Jacques Delcuvellerie, cette œuvre s’intitulait : Rwanda 94, Une tentative de réparation symbolique envers les morts, à l’usage des vivants__. Cette représentation édifiante, sidérante, exemplaire, d’une durée d'environ 6 heures, entremêlant fiction et réel, chant et paroles, vidéo et théâtre, témoignage et information, restera, pour le critique, écrivain et chercheur Georges Banu, « le grand spectacle indépassable de la fin du siècle passé. La tragédie des temps modernes. »
Portrait de Jacques Delcuvellerie (à gauche) / Extrait de "Rwanda 94" (à droite)Portrait de Jacques Delcuvellerie (à gauche) / Extrait de "Rwanda 94" (à droite) - Lou Hérion / Groupov
En 2004, lors de la représentation du spectacle au Rwanda, il y eut des phénomènes cathartiques, les gens ne pouvaient se retenir alors même que la culture rwandaise entend ne pas se répandre en émotions. Un proverbe rwandais dit d’ailleurs : ‘les larmes de l’homme coulent vers l’intérieur, garde-les pour toi’. Jacques Delcuvellerie
L’ambassadeur français au Rwanda nous avait demandé de supprimer dans le spectacle Rwanda 94 les passages qui impliquaient la France dans le génocide des Tutsis. Que l’Etat français puisse se donner la peine de vouloir censurer une pièce de théâtre montre qu’il accorde une grande importance à ce que peut la culture. Jacques Delcuvellerie
A ces paroles nous souscrivons sans aucune réserve et ajoutons qu’il y a pour toutes celles et tous ceux qui ont vu ce spectacle un avant et un après Rwanda 94.
Prenant place à notre tour dans cette semaine que France Culture consacre au génocide des Tutsis au Rwanda, nous ouvrons donc avec Jacques Delcuvellerie et à sa lettre R, comme Réparation, notre encyclopédie en mouvement du théâtre.
Sur scène, une comédienne a commencé à avoir les larmes qui coulent, une femme du public s’est alors approchée d’elle pour lui tendre un mouchoir. Nous étions bien sur la limite : cette femme est venue casser le quatrième mur qui normalement sépare la scène et la salle, elle a fait une transgression, comme si nous devions assumer ensemble (scène et salle) que la représentation ne dégénère pas. Jacques Delcuvellerie
Extraits de "Rwanda 94", co-écrit et mis en scène par Jacques Delcuvellerie, pour le théâtre de la Place à Liège, mars 2000Extraits de "Rwanda 94", co-écrit et mis en scène par Jacques Delcuvellerie, pour le théâtre de la Place à Liège, mars 2000 - Lou Hérion/Groupov
A VOIR, A DÉCOUVRIR
Le Coffret DVD de Rwanda 94 : avec le film Rwanda 94, de Marie-France Collard et Patrick Czaplinski, le documentaire Rwanda. A travers nous, l’humanité…, de Marie-France Collard, le documentaire Bruxelles-Kigali de Marie-France Collard, ainsi que le documentaire Œuvres en chantier de Marianne Sluszny et Guy Lejeune.
Vous pouvez également retrouver sur le site du Groupov, de nombreuses informations sur le spectacle Rwanda 94 : Journaux de création, Dossier de presse, Bibliographie.
Il existe un numéro spéciale de la revue Alternatives Théâtrales, "Rwanda 94 Le théâtre face au génocide", avril 2001.
