Fiche du document numéro 24164

Num
24164
Date
Vendredi 5 avril 2019
Amj
Taille
1220888
Titre
Un rapport sur le rôle de la France au Rwanda d'ici deux ans
Nom cité
Source
Type
Dépêche d'agence
Langue
FR
Citation
PARIS (Reuters) - Vingt-cinq ans après le génocide des Tutsis au Rwanda, un groupe de neuf chercheurs va être chargé pendant deux ans de faire la lumière sur les zones d’ombre qui planent encore sur le rôle joué par l’armée française, objet de polémiques récurrentes et de tensions entre Paris et Kigali.

Emmanuel Macron et des représentants de l'association Ibuka France. Vingt-cinq ans après le génocide des Tutsis au Rwanda, un groupe de neuf chercheurs va être chargé pendant deux ans de faire la lumière sur les zones d'ombre qui planent encore sur le rôle joué par l'armée française, objet de polémiques récurrentes et de tensions entre Paris et Kigali. /Photo prise le 5 avril 2019/REUTERS/Philippe Wojazer

Pour y parvenir, cette commission, présidée par l’historien Vincent Duclert, aura un “accès direct” aux archives présidentielles, du Quai d’Orsay, du ministère des Armées et de la DGSE, a indiqué vendredi l’Elysée à l’issue d’une rencontre entre Emmanuel Macron et une association de soutien aux rescapés du génocide, Ibuka France.

“Le but final c’est d’avoir un rapport au bout de deux ans qui sera public, remis au président de la République, accessible à tout le monde et qui rendra compte de manière scientifique à partir des archives de ce qu’a été le rôle de la France au Rwanda entre 1990 et 1994”, souligne-t-on à Paris. Une note intermédiaire est prévue dans un an.

Cette annonce intervient deux jours avant la journée de commémoration des massacres qui ont fait 800.000 morts à laquelle Emmanuel Macron, officiellement invité par les autorités rwandaises, sera représenté par le député des Côtes-d’Armor et orphelin tutsi Hervé Berville.

Vingt-cinq ans après les faits, la question du rôle joué par l’armée française - qui avait lancé en juin 1994 l’opération militaro-humanitaire “Turquoise” sous mandat de l’Onu “pour mettre fin aux massacres partout où cela sera possible, éventuellement en utilisant la force” - continue de faire l’objet de polémiques récurrentes.

Le président rwandais Paul Kagamé a notamment accusé en 2014 Paris d’avoir “participé” aux massacres, des accusations rejetées par les autorités françaises. Des actions en justice ont également été engagées pour “complicité de génocide et complicité de crimes contre l’humanité”.

Mémoire collective



Pour tenter de sortir de “cet engrenage”, Emmanuel Macron avait annoncé en mai 2018, lors d’une visite de son homologue à Paris, son intention de mener un “travail apaisé et documenté” sur “la place du génocide des Tutsis dans notre mémoire collective”.

Annoncée en 2015 par François Hollande, la déclassification des archives de la présidence française n’a permis jusqu’à présent qu’une communication partielle des documents sensibles selon les chercheurs, qui y ont vu une ouverture en trompe-l’oeil, et n’a pas permis de trancher la question du rôle joué par Paris.

“Plusieurs dizaines de documents ont été déclassifiés mais pas à l’échelle de ce qui était demandé par les chercheurs”, relève-t-on à l’Elysée. “Si vous cherchez ce qui est écrit aujourd’hui sur le rôle de la France, vous trouvez des thèses qui disent des choses radicalement différentes mais vous ne trouvez aucune production qui fait autorité de manière scientifique pour trancher cette question”.

Afin de ne pas reproduire les blocages des années précédentes, décision a donc été prise de ne pas faire appel à des spécialistes du Rwanda mais à des experts “des politiques publiques, des processus de décisions” et surtout de la connaissance de contexte “hors norme” comme les génocides.

Au-delà de faire toute la lumière sur cette période, Emmanuel Macron souhaite également inscrire le génocide au Rwanda dans “la mémoire collective française” au même titre que la Shoah ou encore le génocide des Arméniens.

“Au travers de cette commission, il s’agit de créer un support qui va permettra aux enseignants de s’emparer du sujet et de le transmettre aux jeunes générations”, explique-t-on à l’Elysée. Recommandée par le rapport de la mission Duclert sur les génocides, l’inscription du génocide des Tutsis dans les manuels de terminale prendra ainsi effet à partir de la rentrée 2020. Une chaire d’excellence dédiée à l’histoire du génocide des Tutsis va également être créée.

Sur le volet judiciaire, les moyens du pôle du Tribunal de grande instance chargé du traitement des procédures relatives au génocide rwandais vont être renforcés et les effectifs de police judiciaire vont être augmentés “afin que les génocidaires présumés faisant l’objet de poursuites puissent être jugés dans un délai raisonnable”, a précisé l’Elysée dans un communiqué.

Marine Pennetier, édité par Yves Clarisse

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