Fiche du document numéro 18577

Num
18577
Date
Dimanche 3 mars 2019
Amj
Taille
534768
Titre
Le rôle de Laurent Serubuga dans le génocide des Tutsi
Nom cité
Type
Note
Langue
FR
Citation
Le rôle de Laurent Serubuga dans le génocide des
Tutsi
Jacques Morel
3 mars 2019, v2.9
Laurent Serubuga est né en 1936 dans la cellule Ruhunga, secteur Murambi,
commune de Giciye, préfecture de Gisenyi. Ses parents s’appellent Simpenzwe
et Nyirataha. Il est donc du Bushiru, la région d’origine du président et de son
épouse Agathe. Il est de la 2e promotion de l’école d’officiers (1963). 1 Le colonel
Bagosora était de la 3e promotion.
Il est un des animateurs des Comités du Salut lancés par l’abbé Naveau en
1973. 2 Il participe au coup d’État du 5 juillet 1973 qui renverse le régime de
Grégoire Kayibanda et porte Juvénal Habyarimana au pouvoir . La participation
de Serubuga à ces Comités du Salut vient confirmer la thèse que Habyarimana
et ses « compagnons du 5 juillet » ont d’abord attisé l’incendie avant de se
présenter comme ceux qui l’ont éteint. 3
Serubuga aurait été chargé après le coup d’État de liquider les opposants :
Lors de la prise du pouvoir du président HABYARIMANA en
1973, RUSATIRA, proche de ce dernier, était chargé avec son ami le
colonel SERUBUGA de l’exécution des opposants au régime, opposants recensés sur une liste noire. Ces informations m’ont été données
avant mon arrivée au RWANDA par mon beau père le colonel BEM
PETTIAUX actuellement attaché militaire à Kinshasa et à l’époque
capitaine faisant partie de la CTM au RWANDA. 4
Serubuga devient membre du Comité pour la paix et l’unité nationale du 5
juillet 1973. Il est chef d’état-major adjoint de l’armée rwandaise (FAR) de 1973
à 1992, le chef d’état-major étant Juvénal Habyarimana lui-même.
Après la disparition du Comité pour la paix et l’unité nationale et la création du MRND, Habyarimana forme une cellule occulte composée de Serubuga,
1. André Guichaoua, Les Camarades du 5 juillet 1973 - Premières promotions d’officiers FAR. http://rwandadelaguerreaugenocide.fr/wp-content/uploads/2010/01/Annexe_
1.pdf.
2. Christophe Mfizi, Le Réseau Zéro, Fossoyeur de la Démocratie et de la République au
Rwanda (1975-1994), Rapport de consultation rédigé à la demande du Bureau du Procureur
du Tribunal Pénal International pour le Rwanda, Arusha (Tanzanie), mars 2006, p. 36. http:
//www.francegenocidetutsi.org/MfiziLeReseauZero.pdf
3. V. Kajeguhakwa [14, p. 148].
4. Lieutenant Yves Theunissen, Auditorat militaire, Bruxelles, 26 mai 1994. http://www.
francegenocidetutsi.org/TheunissenYves26mai1994.pdf

1

2

Figure 1 – Laurent Serubuga. Source : Théoneste Lizinde, La découverte de
Kalinga ou la fin d’un mythe. Contribution à l’histoire du Rwanda

Rwagafilita, Buregeya et de quelques autres militaires, qu’il consulte sur les
grandes orientations. Ses avis sont repris ensuite par le MRND. Cette cellule
est infiltrée de plus en plus par Protais Zigiranyirazo dit M. “Z” avec qui Serubuga est en liaison étroite. 5 Serubuga est donc une des personnalités les plus
influentes de l’Akazu, ce groupe qui, autour de la présidente et de M. “Z”, dirige en fait le pays. Les autorités françaises sont informées que Serubuga fait
partie du « premier cercle du pouvoir », connu pour contrecarrer les velléités de
réforme d’Habyarimana :
Ses membres connus et honnis des populations de toutes conditions paralysent l’action du chef de l’État et minent ses éventuelles
velléités de transformation en profondeur. Parmi eux se distingue
son épouse, le colonel Sagatwa (Chef de son secrétariat particulier,
5. Christophe Mfizi, Le Réseau Zéro, Fossoyeur de la Démocratie et de la République au
Rwanda (1975-1994), Rapport de consultation rédigé à la demande du Bureau du Procureur
du Tribunal Pénal International pour le Rwanda, Arusha (Tanzanie), mars 2006, pp. 31–32.
http://www.francegenocidetutsi.org/MfiziLeReseauZero.pdf

1

LE CONFLIT AVEC JEAN BIRARA

3

véritable cerbère de la Présidence), le ministre Tsirorera [Nzirorera]
(Industrie et artisanat), le colonel Serubuga et le colonel Rwagafilita (respectivement chefs d’état-major adjoints de l’armée et de la
gendarmerie), le colonel Nsekalije (retraité)... 6
Serubuga utilise son pouvoir pour s’enrichir. Par exemple, un militaire doit
passer par Serubuga pour obtenir des prêts bancaires. 7

1

Le conflit avec Jean Birara

En mars 1980, Jean Birara, gouverneur de la Banque Nationale du Rwanda
(BNR) est mis en cause par trois officiers, les colonels Buregeya, Serubuga et
Rwagafilita. Il décide de leur répondre dans une lettre ouverte où il les accuse
d’être de prétendus officiers, des hommes d’affaires véreux qui pillent le pays.
Sur Serubuga, il écrit :
Quant à l’insignifiant Chef d’Etat-Major Adjoint de l’Armée, le
Colonel Serubuga, seuls le pillage des magasins de cette dernière
et l’oppression de petites coopératives d’artisans rwandais lui permettent de posséder des immeubles dans Kigali et des camions qui
satisfont plus son avidité insatiable à tel point qu’il compte parmi
les détaillants clandestins de bière les plus adroits, les plus connus
et impunis. Sachant à peine lire et écrire, il ne sait même pas tenir
son bâton de commandement et compte sur ses capacités de délateur
pour imposer sa personne ennemie du bien public et du bonheur des
individus et ainsi continuer de pousser impudemment une fortune
sortie du néant. 8
La publication de cette lettre ouverte est à l’origine d’une « guerre des
tracts » qui déboucha sur l’arrestation en avril 1980 des membres d’un prétendu complot dont le major Lizinde, compagnon du 5 juillet et directeur du
Service central de renseignement (SCR), fut tenu comme le principal responsable. Les trois compères Buregeya, Serubuga et Rwagafilita restèrent en place,
Jean Birara également.

2

L’assassinat du colonel Mayuya

Le 12 mai 1988, le colonel Stanislas Mayuya, commandant du camp Kanombe et du bataillon para-commandos, proche du Président Habyarimana, est
assassiné sur l’ordre du colonel Serubuga et à l’instigation de Protais Zigiranyirazo et du colonel Sagatwa. L’assassin, le sergent Birori, originaire de Gikongoro,
6. Voir télégramme « confidentiel défense » du 19 juin 1991 publié par Patrick de SaintExupéry, France-Rwanda : des mensonges d’État, Le Figaro, 2 avril 1998, p. 4. http://www.
francegenocidetutsi.org/FranceRwandaMensongesDetatFigaro2avril1998.pdf
7. C. Mfizi, ibidem, p. 22.
8. Jean Birara, Kigali, 7 mars 1980. Cf. S.J. Barahinyura [3, p. 83].

3

LES MENACES DE SERUBUGA SUR VALENS KAJEGUHAKWA

4

« décède » en prison. 9 Serubuga l’aurait étranglé lui-même quelques minutes
avant que Habyarimana ne se rende en prison pour le rencontrer à sa demande.
Ce crime est analysé ainsi par les sénateurs belges :
Le premier signe que les choses tournaient mal fut le meurtre du
colonel Stanislas Mayuya en avril 1988. Mayuya était un ami proche
du président Habyarimana et des rumeurs persistantes faisaient état
de son arrivée au pouvoir, éventuellement au poste de vice-président,
en vue de le préparer à prendre la succession du président. [...]
Dans le climat de la fin des années 1980, alors que la compétition politique pour arracher le contrôle d’une économie en net recul
s’intensifiait, les projets de succession que le président Habyarimana
nourrissait pour le colonel Mayuya constituaient une grave menace
pour le Clan de Madame qui risquait de perdre le contrôle du pouvoir
à un moment où ce contrôle était plus vital que jamais car Mayuya
était l’homme du président (l’un des rares ! 10 ). Le colonel Serubuga,
un des akazu les plus puissants, organisa le meurtre de Mayuya. Le
sergent qui appuya sur la détente fut par la suite assassiné en prison
et le magistrat du ministère public en charge du dossier fut assassiné
pendant l’instruction. 11
Le colonel Bagosora remplace Mayuya comme commandant du camp Kanombe mais pas à la tête des para-commandos. 12

3

Les menaces de Serubuga sur Valens Kajeguhakwa

Dans la nuit du 19 au 20 avril 1990 à Gisenyi, un commando de 5 hommes
pénètre dans la résidence de Valens Kajeguhakwa, riche homme d’affaires tutsi.
Ils sont mis en fuite par un gardien. Ils embarquent sur des canots qui prennent
la direction du camp militaire de Butotori. Kajeguhakwa dépose plainte. 13
Le 19 mai 1990, un nommé Manzi Djamali tenta d’empoisonner Christian, le
fils de Valens Kajeguhakwa. Surpris, il avoua qu’il avait été chargé d’empoisonner Valens, mais dans l’impossibilité de l’atteindre, il s’était retourné contre son
fils. Parmi les commanditaires de ce crime, il désigna le colonel Serubuga. 14 Ce
Manzi Djamali faisait des études en Belgique avec l’aide financière de Valens.
Il reçut un ordre de rentrer d’urgence au pays. Arrivé à l’aéroport de Kigali,
il fut accueilli par le colonel Serubuga qui le chargea d’empoisonner Valens et
9. A. Guichaoua, [12, p. 217] ; G. Prunier [18, p. 108, 111] ; L. Rusatira [21, p. 276] ; Valens
Kajeguhakwa [14, p. 227].
10. Le colonel Aloys Nsekalije, ami du président et longtemps ministre, a lui aussi été évincé
parce qu’il était étranger au clan de Madame.
11. Commission d’enquête parlementaire du Sénat belge [22, 1-611/7 - 1997/1998, pp. 141,
143]. http://www.francegenocidetutsi.org/SenatBelgique-r1-611-7.pdf#page=141
12. A. Guichaoua [13, p. 142].
13. V. Kajeguhakwa [14, p. 240].
14. V. Kajeguhakwa [14, p. 244].

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DÈS OCTOBRE 1990, SERUBUGA ORGANISE LE GÉNOCIDE

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toute sa famille. 15 Valens déposa plainte. Manzi répéta son témoignage devant
le major Bahufite, commandant militaire et le capitaine Bizimana, commandant
de la Sûreté. Il fut transféré à Kigali où, sous la pression, il revint sur ses déclarations. La plainte de Valens fut transformée en un procès contre lui et, sans
pouvoir se défendre, puisqu’étant interdit de sortir de chez lui par des militaires,
il fut condamné à cinq ans de prison avec sursis le 9 juin 1990. 16
Pasteur Bizimungu, qui devint président de la République du Rwanda après
le génocide, a fait des études en France. Sa bourse lui ayant été supprimée,
c’est Valens Kajeguhakwa, rencontré à Paris, qui y suppléa. Pasteur Bizimungu
se vit par suite nommé directeur général de l’Électrogaz, après l’assassinat du
colonel Mayuya dont il était le neveu. Pasteur fut admis dans le cercle restreint
des conseillers d’Habyarimana, dont faisait partie le colonel Serubuga. Un jour
où les 5 conseillers principaux ont été convoqués par le président Habyarimana
pour statuer sur le sort de Valens Kajeguhakwa, il s’est étonné devant les autres
dont Serubuga en disant qu’il ne voyait pas pourquoi poursuivre Kajeguhakwa
qui n’a rien fait alors que ceux qui ont assassinés son oncle Mayuya ne sont
pas poursuivis ! Il aurait claqué la porte de la réunion. Serubuga se serait alors
fâché, et aurait demandé à Habyarimana que le dossier de ce garçon soit étudié
de près. Un membre du groupe aurait prévenu Bizimungu que c’est son tour,
raison pour laquelle il a fui le pays en même temps que Kajeguhakwa le 25 août
1990. 17

4
4.1

Dès octobre 1990, Serubuga organise le génocide
Il est un des instigateurs de la presse extrémiste

Le colonel Serubuga est, avant l’attaque du FPR en octobre 1990, un des
instigateurs de la presse extrémiste. Le 11 mai 1990, Hassan Ngeze, précédemment agent de Kanguka à Gisenyi, crée le journal Kangura à l’instigation des
colonels Nsengiyumva, Sagatwa, Serubuga et du directeur du Service central
de renseignement, Augustin Nduwayezu. Le premier article, une dénonciation
de l’homme d’affaires Valens Kajeguhakwa, avait été refusé par la rédaction de
Kanguka. Il est signé Ngeze mais en réalité écrit par le colonel Nsengiyumva. Il
fait suite à la plainte déposée par Kajeguhakwa pour l’agression qu’il a subie à
Gisenyi dans la nuit du 19 au 20 avril 1990. 18
Le colonel Galinié, attaché de défense, considère Serubuga comme le propriétaire du journal Kangura. 19
Dans une lettre au ministre de la Défense, Serubuga dénonce les journaux
15. Témoignage de I.C., 29 mai 2011.
16. V. Kajeguhakwa [14, p. 249].
17. Témoignage de I.C., 29 mai 2011.
18. V. Kajeguhakwa [14, p. 244] ; J.-P. Chrétien (dir.) Les médias du génocide, [6, p. 27].
19. René Galinié, Compte rendu semestriel de fonctionnement , 4 avril 1991, voir infra.
http://www.francegenocidetutsi.org/CR-MAMGalinie4avril1991.pdf

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DÈS OCTOBRE 1990, SERUBUGA ORGANISE LE GÉNOCIDE

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qui « se cachent derrière la liberté d’expression pour faire de la propagande en
faveur de l’ennemi, tout en participant au pourrissement de la situation politique interne ». 20 Il accuse des journaux d’être financés par l’ennemi et des
journalistes comme André Kameya de Rwanda Rushya, qui sera assassiné en
1994. 21
Serubuga était résolument antitutsi. D’après Christophe Mfizi, il exige le
départ d’une journaliste de Radio Rwanda :
Au contraire, le Colonel Serubuga jouait explicitement la fibre
ethnique, jusqu’à m’enjoindre de chasser de l’antenne de Radio Rwanda
la journaliste Louise Kayibanda, parce que « cette “tutsitule” »
n’était pas digne de rapporter les hauts faits de l’Armée rwandaise.
Cherchant à mettre la journaliste à l’abri de cette hargne, j’avais demandé à ma collaboratrice de décider, à son aise, ce qu’il convenait
de faire. Elle a courageusement choisi de rester à l’antenne puisque la
qualité de sa prestation n’était pas en cause. Au demeurant, j’avais
bien dit à son agresseur que je ne la retirerais pas de l’antenne sans
faute professionnelle avérée. Le Colonel raciste m’avait raccroché au
nez avec des menaces : « Ni uko unshubije, sha ? Ba uretse gato
uzaba ureba [C’est comme cela que tu me réponds, toi ? Attends un
peu, tu vas (me) voir...] » 22

4.2

La fausse attaque dans la nuit du 4 au 5 octobre 1990

Les colonels Serubuga et Rwagafilita sont suspectés d’avoir organisé la fausse
attaque dans la nuit du 4 au 5 octobre 1990 destinée à faire croire que des
éléments infiltrés du FPR ont attaqué Kigali. Celle-ci a fourni le prétexte à
l’arrestation d’environ 10 000 Tutsi. 23

4.3

Serubuga diffuse de fausses informations

En octobre 1991, il participe à l’élaboration d’une campagne de propagande
dans l’armée pour convaincre les militaires que les nouveaux partix d’opposition
étaient des couvertures du FPR. 24
En mars 1992, il écrit au ministre de la Défense que les étudiants tutsi veulent
gagner les Hutu du Sud à leur cause. Ils leur racontent que les Hutu du Nord
ont l’intention de massacrer les Tutsi et les Hutu du Sud. 25
20. Colonel Laurent Serubuga, Chef EM AR Adjt, à Monsieur le ministre de la
Défense nationale, Kigali, 29 novembre 1991, No 1404/G2.5.1, ICTR-98-41-T, exhibit
P.11(a). Objet : Activité de la presse privée. http://www.francegenocidetutsi.org/
Serubuga29Novembre1991Melvlin-7.pdf
21. Ibidem.
22. C. Mfizi, ibidem, p. 47.
23. A. Guichaoua [13, p. 76].
24. Rwandan republic. Ministry of Defence. G2. Meeting of 26 October 1991. Secret. Rapporteur : Anatole Nsengiyumva. Cf. L. Melvern [17, pp. 37, 291].
25. L. Melvern [17, p. 37].

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DÈS OCTOBRE 1990, SERUBUGA ORGANISE LE GÉNOCIDE

4.4

7

Serubuga de connivence avec les assassins

Après que les FAR aient repoussé l’attaque du FPR avec l’aide des Français,
le colonel Gilbert Canovas 26 juge Serubuga menaçant en novembre 1990 :
« Ainsi, les FAR dont la cohésion est plus affirmée aujourd’hui
que jamais, grâce aux liens que créent les contacts menés contre
l’adversaire, voient-elles leur influence politique et populaire considérablement augmentée, au point que leurs chefs comme le Colonel
Serubuga apparaissent menaçants. » 27
Il n’est pas précisé en quoi Serubuga est menaçant et vis-à-vis de qui il
l’est. Comme le colonel Canovas préconise les méthodes de la guerre contrerévolutionnaire, il y a lieu de penser que cette qualification est très grave.
Christophe Mfizi accuse Serubuga d’avoir été informé des massacres de Kibilira en octobre 1990 et de n’avoir rien fait pour les empêcher :
Or, feu le Major I. Nzabanita dit « Dictionnaire », improvisé
agent de liaison auprès des services d’information avec l’Etat Major
des FAR, me dira très clairement que le Colonel Serubuga avait reçu,
régulièrement sur son bureau, dès le premier jour des massacres de
Kibilira, les informations détaillées en provenance du renseignement
militaire de Gisenyi. Donc il y a eu au moins un haut responsable
de la sécurité publique, adjoint immédiat du Chef d’Etat Major,
qui avait la bonne information. Comment se fait-il que le Président
de la République ait reçu une information qui tendait à lui faire
comprendre qu’il n’y avait pas lieu d’intervenir ? 28
Serubuga serait l’un des organisateurs du massacre des Bagogwe début 1991,
selon un officier français :
« Au début de janvier 1991, le groupe dirigé par le colonel Serubuga (NDLR : alors chef d’état-major de l’armée de terre rwandaise) entame les opérations ethniques. Une centaine de personnes
sont tuées dans une église. Informé, Paris ne réagit pas. En avril,
une tribu tutsie est totalement liquidée dans le Nord-Ouest. Aucune
réaction... » 29
Lors de l’attaque de la prison de Ruhengeri par le FPR le 23 janvier 1991,
Serubuga aurait ordonné, avec le colonel Sagatwa, de tirer au mortier sur la prison mais le colonel Uwihoreye aurait refusé. 30 Celui-ci sera muté le 27 janvier et
26. Le colonel Gilbert Canovas du 1er RPIMa est adjoint de l’attaché de défense, chargé de
conseiller l’état-major des FAR, entre le 11 octobre 1990 et le 26 novembre 1990.
27. Extrait du télégramme de l’attaché de Défense, 18 novembre 1990. Cf. Enquête sur la
tragédie rwandaise 1990-1994 [19, Rapport, p. 133]. http://www.assemblee-nationale.fr/
dossiers/rwanda/r1271.asp#P2171_302197
28. C. Mfizi, ibidem, p. 36.
29. Patrick de Saint Exupéry, France-Rwanda : des mensonges d’État, Le
Figaro, 2 avril 1998, p. 4, colonne 1. http://www.francegenocidetutsi.org/
FranceRwandaMensongesDetatFigaro2avril1998.pdf
30. Le Tribun du Peuple, no 15, janvier 1992. Cf. D. Bideri [4, p. 59].

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DÈS OCTOBRE 1990, SERUBUGA ORGANISE LE GÉNOCIDE

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son commandement sera remis le 28 au major Augustin Bizimungu en présence
des colonels Serubuga et Rwagafilita. 31
Serubuga ordonne aux militaires du camp de Bigogwe de participer aux
massacres :
Pendant la nuit du 3 au 4 février 1991, les militaires du camp
Bigogwe tuèrent des dizaines de familles de Bagogwe. Le colonel Serubuga avait ordonné au commandant du camp de déployer des soldats dans la commune de Mutura. Plusieurs personnes furent tuées
par des groupes de militaires, appuyés par des membres de la population. Lorsque les gens n’étaient pas exécutés sur place, les futures
victimes étaient emmenées en camion dans les lieux où avaient lieu
des exécutions collectives. 32
En avril 1991, un agent de la Croix rouge à déclaré à table chez les frères
canadiens de Muhira, près de Nyundo, que dans la commune Mutura ils ont
recensé 362 corps. Un agronome, Camille Kalisa, a été décapité. Sa tête a été
exposée. Augustin Ndindiliyimana, alors ministre à la Présidence chargé de la
Défense, a conduit la délégation des ambassadeurs pour leur montrer qu’il n’y
avait pas eu de massacre. Ils ont tout nettoyé, mais un paysan a montré cette
tête, ce qui a fait scandale. 33
Phocas Nkinzigabo, ingénieur travaillant pour une société française, s’était
réfugié chez ces frères canadiens. Il a été réquisitionné par le bourgmestre de
Rubavu. Dehors, il était attendu par le conseiller Stanislas Kabiligi et des policiers qui l’emmenèrent au camp militaire de Gisenyi. Il y a été blessé et achevé
par des femmes. 34
L’ambassadeur Georges Martres informe Paris des révélations de Janvier
Afrika rapportées par Jean Carbonare, membre de la Commission d’enquête
internationale de janvier 1993, qui met en cause plusieurs personnalités dont
Serubuga. Celles-ci auraient participé à une réunion en janvier 1991 qui aurait
décidé du massacre des Bagogwe 35 :
Selon Janvier Afrika, les massacres auraient été déclenchés par
le président Habyarimana lui-même lors d’une réunion de ses collaborateurs. Monsieur Carbonare m’en a présenté la liste (les deux
beaux-frères du président, Casimir Bizimungu, les colonels Bagosora,
Nsengiyumva, Serubuga, etc.) Au cours de cette réunion l’opération
aurait été programmée avec l’ordre de procéder à un génocide systématique en utilisant, si nécessaire, le concours de l’armée et en impliquant la population locale dans les assassinats, sans doute pour
rendre celle-ci plus solidaire dans la lutte contre l’ethnie ennemie. 36
31. D. Bideri, ibidem, p. 64.
32. D. Bideri, ibidem, p. 65.
33. Témoignage de I.C.
34. Témoignage de I.C. ; D. Bideri [4, pp. 85-86]
35. Rapport de la Commission internationale d’enquête sur les violations des Droits de
l’homme au Rwanda depuis le 1er octobre 1990, 7 - 21 janvier 1993, [9, p. 37]. http://www.
francegenocidetutsi.org/ComIntEnqMars1993.pdf
36. TD Kigali 51, Confidentiel Diplo, signé Martres, 19 janvier 1993, 9 h 02. Objet :

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DÈS OCTOBRE 1990, SERUBUGA ORGANISE LE GÉNOCIDE

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Le colonel Galinié, attaché militaire français, juge que, renforcé par le soutien militaire français, le colonel Serubuga s’oppose aux timides initiatives du
président Habyarimana en faveur de la démocratisation de son régime et des
négociations avec le FPR :
1- Le contexte politico-militaire au 1er Avril 1991
La situation politique au Rwanda en raison de la domination
militaire des Forces armées rwandaises et de la signature du cessez-lefeu le 29 mars est devenue paradoxalement incertaine voire confuse.
[...]
En conséquence, tous attendent la mise en œuvre du processus
démocratique annoncé par le président, mais non encore fixé. [...]
Les libérations actuelles des détenus emprisonnés à l’occasion des
troubles à la frontière donnent le ton des difficultés : elles paraissent
excessives aux uns, insuffisantes aux autres.
Ces incertitudes ont d’évidentes répercussions sur le comportement des hautes autorités civiles et militaires qui interviennent dans
le débat soit par conviction soit par intention de préserver leurs fonctions et avantages actuels.
Dans cette seconde catégorie prend place en particulier le colonel SERUBUGA, chef d’état-major adjoint de l’armée rwandaise et
commandant des opérations, et, à moindre titre, son homologue de la
gendarmerie le colonel RWAGAFILITA. Leur attitude, en raison de
l’influence déterminante des forces armées dans le déroulement quotidien de la vie politique, ne facilite pas la tâche du président, qui
semble bien hésitant, au moment où s’imposent des décisions claires,
spécialement concernant la voie de démocratisation du régime et la
conduite des négociations avec le Front patriotique rwandais.
Ses hésitations peuvent être expliquées par le fait que ce premier
officier animateur de l’entourage "dur" , a su mettre à profit "la
Guerre" pour réassurer son autorité naguère défaillante.
En effet, l’union sacrée autour des forces armées, remarquablement orchestrée par ses partisans dès le début du conflit lui a permis
d’imposer ses vues et notamment de geler toute réforme politique,
en particulier en accusant ouvertement les Tutsis de l’intérieur de
soutenir l’adversaire et en clamant “la victoire avant les réformes.”
(Il a largement utilisé à cet effet son journal le Kangura qui est allé
jusqu’à donner la liste des riches rwandais soupçonnés d’avoir fourni
des subsides à la rébellion). 37
Relevons que, selon Galinié, Serubuga considère les Tutsi de l’intérieur comme
complices de l’ennemi. On en trouve un exemple dans le rapport qu’il envoie sur
la sécurité dans la commune de Muvumba, au Nord-Est près de l’Ouganda, où
Mission d’enquête de la Fédération internationale des Droits de l’homme. http://www.
francegenocidetutsi.org/Martres19janvier1993.pdf
37. René Galinié, Compte rendu semestriel de fonctionnement , 4 avril 1991. http://www.
francegenocidetutsi.org/CR-MAMGalinie4avril1991.pdf

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DÈS OCTOBRE 1990, SERUBUGA ORGANISE LE GÉNOCIDE

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7 000 personnes regroupées dans des ranchs et des personnes instruites comme
le procureur de Ngarama sont suspectées d’être complices de l’ennemi. 38
Serubuga est de connivence dans les massacres du Bugesera en mars 1992.
Selon le télégramme de l’ambassadeur Georges Martres du 9 mars 1992 sur les
événements du Bugesera :
La réaction des forces de l’ordre a été tardive, le chef d’étatmajor des armées le colonel Serubuga, a déclaré, dans l’après-midi
du 6, qu’il n’était pas au courant. 39
Notons cependant que Serubuga ne figure pas dans l’état-major secret qui,
selon l’ambassadeur belge Swinnen, a organisé les massacres du Bugesera. 40
Filip Reyntjens considère que Serubuga figure dans le noyau central du Réseau Zéro ou « Escadron de la mort » qui vise à créer des troubles pour discréditer les changements en cours, dont le multipartisme et le gouvernement Nsengiyaremye. 41 Richard Mugenzi classe aussi Serubuga dans le Réseau Zéro. 42
Dans sa lettre « Sécurité en commune Muvumba » du 12 octobre 1991 au
ministre de la Défense, Laurent Serubuga interdit le commerce avec l’Ouganda
car il peut faciliter les infiltrations de l’ennemi. Il interdit les mouvements des
taxis et des personnes déplacées à partir de 18 heures. Des zones sont interdites
en raison des tirs de l’artillerie ennemie. Des armes seront distribuées à des
personnes présentant des garanties morales proposées par le comité de sécurité
de la commune. Un groupe de personnes de la comune de Ngarama complices de
l’ennemi doit être démantelé. Des religieux sont accusés de complicité avec les
Inkotanyi. La population regroupée dans les ranchs Oyonyo et Cyabayaga doit
être étroitement contrôlée car beaucoup de personnes sont liées aux Inkotanyi.
Commentant cette lettre, Richard Mugenzi explique que le vocabulaire est
codé et que les verbes contrôler, surveiller, démanteler signifient éliminer. 43
Selon un rapport du MDR sur les Interahamwe, Serubuga, « l’intelligent
machiavel connu de toutes les Forces Armées Rwandaises dont il est le Chef
d’Etat Major », serait chargé du recrutement parmi les réservistes. 44

4.5

Il prône le génocide des Tutsi

Serubuga envisage le génocide des Tutsi dès fin 1990. L’ambassadeur Georges
Martres le dit à la Mission d’information parlementaire :
38. Colonel Serubuga au ministre de la Défense, Sécurité dans la commune
de Muvumba, no 1152/G2.1.2, 12 octobre 1991. http://www.francegenocidetutsi.org/
Serubuga12octobre1991en.pdf
39. G. Martres, TD Kigali, 9 mars 1992, Enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994 [19,
Tome III, Annexes, p. 166]. http://www.francegenocidetutsi.org/Martres9mars1992.pdf
40. Commission d’enquête parlementaire du Sénat belge [22, 1-611/7, 3.6.5.2, p. 495]. http:
//www.francegenocidetutsi.org/SenatBelgique-r1-611-7.pdf
41. Filip Reyntjens, Données sur les escadrons de la mort, 9 octobre 1992. http://www.
francegenocidetutsi.org/EscadronsDeLaMortReyntjens9octobre1992.pdf
42. J.-F. Dupaquier [8, p. 169].
43. J.-F. Dupaquier [8, p. 105].
44. Anastase Gasana, Dossier “Interahamwe za Muvoma” ou les irréductibles du MRND :
Essai de déracinement du mal, Kigali, 14 mai 1992, p. 3. Cf. TPIR, ICTR-98-41-T, Exhibit
P12(a). http://www.francegenocidetutsi.org/RapportMDRInterahamwe6octobre1994.pdf

4

DÈS OCTOBRE 1990, SERUBUGA ORGANISE LE GÉNOCIDE

11

Le génocide était prévisible dès cette époque [fin 1990], sans toutefois qu’on puisse imaginer l’ampleur et l’atrocité. Certains Hutus
avaient d’ailleurs eu l’audace d’y faire allusion. Le colonel Serubuga,
Chef d’état-major adjoint de l’armée rwandaise, s’était réjoui de l’attaque du FPR, qui servirait de justification aux massacres des Tutsis. 45
Le 31 mai 1992, Serubuga écrit à son ministre que le vice-recteur du campus
de Nyakimana, près de Ruhengeri, semble croire qu’il y a un plan pour nettoyer
le pays de tous les Tutsi qui commencera par les enfants. Il ne voit pas du tout
comment cet homme a pu avoir une telle idée. 46
Le 22 novembre 1992, Serubuga assiste à Kabaya, commune de Gaseke (Gisenyi), au discours de Léon Mugesera où celui-ci recommande de renvoyer les
Tutsi d’où ils viennent, par le raccourci, à savoir la rivière Nyabarongo. 47
Selon René Lemarchand, Serubuga fait partie de l’appareil qui a supervisé
le génocide. Celui-ci est constitué selon lui dès 1992 :
En 1992, l’appareil institutionnel du génocide était déjà en place.
Il impliquait quatre niveaux distinctifs d’activité, ou jeux d’acteurs :
a) l’akazu (petite maison), qui est le groupe-clé, consistant en l’entourage immédiat d’Habyarimana, c’est-à-dire sa femme (Agathe),
ses trois beaux-frères (Protée Zigiranyirazo, Séraphin Rwabukumba
et Elie Sagatwa), ainsi que quelques conseillers de confiance (dont
notamment Joseph Nzirorera, Laurent Serubuga et Ildephonse Gashumba) ; b) les organisateurs ruraux, dont le nombre était d’au
moins deux à trois cents, tirés des cadres communaux et préfectoraux (préfets, sous-préfets, conseillers communaux, etc.) ; c) la milice
(Interahamwe), estimée à 30 000, constituant les opérateurs de base
de l’exécution des massacres ; et d) la garde présidentielle, recrutée
presque exclusivement parmi les hommes du nord et entraînée dans
l’optique de fournir un support auxiliaire aux escadrons de la mort
civils dans les massacres. 48
Il est suspecté d’envoyer au front dans des secteurs difficiles les militaires dont
il veut se défaire comme dans le cas du colonel Deogratias Nsabimana. 49 « Il
en profite également pour exposer à la mort les jeunes officiers rivaux brillants
du Nord », écrit James Gasana, ancien ministre de la Défense, qui cite le cas
du colonel Deogratias Nsabimana et du major Rwendeye. 50 Ce dernier sera tué
dans une embuscade dont il n’est pas sûr qu’elle ait été tendue par le FPR. 51
45. Enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994 [19, Tome III, Auditions, Vol. 1, p. 119].
http://www.assemblee-nationale.fr/dossiers/rwanda/auditi01.asp#MARTRES
46. Rwandan Republic. Ministry of Defence. G2. Subject : Tension at the UNR. Campus of
Nyakinama. Signed Laurent Serubuga. 31 May, 1992. Cf. L. Melvern [17, pp. 37, 291].
47. Aucun témoin ne doit survivre [10, pp. 103–105, 125].
48. René Lemarchand, Rwanda : The Rationality of Genocide [16, pp. 84-85] ; Commission
d’enquête parlementaire du Sénat belge [22, 1-611/7 - 1997/1998, section 3.6.4.1, p. 476].
http://www.francegenocidetutsi.org/SenatBelgique-r1-611-7.pdf#page=476
49. C. Mfizi, ibidem, p. 4.
50. J.-K. Gasana [11, p. 66].
51. C. Mfizi, ibidem, p. 47.

5

SERUBUGA DEMANDE DES MISSILES SOL-AIR

12

Deogratias Nsabimana sera tué dans l’attentat du 6 avril 1994 contre l’avion
du président Habyarimana. C’est le colonel Bagosora, directeur de cabinet au
ministère de la Défense, qui lui aurait donné l’ordre d’accompagner le président
à Dar es-Salaam. 52

5

Serubuga demande des missiles sol-air

Le 17 janvier 1992, le colonel Laurent Serubuga, chef d’état-major de l’armée
rwandaise, demande au ministre de la Défense de renforcer la défense antiaérienne par l’achat d’une batterie de 12 lanceurs de 120 missiles de type SAM
16. 53

6

Serubuga est en bonne relation avec la coopération militaire française

Le colonel Serubuga demande la prolongation du séjour du capitaine Lemaire, moniteur pilote sur hélicoptère Alouette II, du fait que ces hélicoptères
n’ont pas encore été livrés. 54
Le 23 mars 1991, il demande à son ministre de faire bénéficier le colonel
Canovas de l’accès téléphonique à l’international pour que celui-ci puisse parler
avec sa famille. 55

6.1

Il approuve la nomination d’un conseiller auprès de la
garde présidentielle

Le 25 juin 1991, le colonel Serubuga donne son feu vert à la nomination du
capitaine Denis Roux au poste de conseiller technique auprès du commandant
de la garde présidentielle. 56 Ce capitaine de gendarmerie est membre du Groupement de sécurité et d’intervention de la Gendarmerie nationale (GSIGN) et
du Groupe de sécurité de la Présidence de la République (GSPR) à VersaillesSatory. Deux sous-officiers lui seront adjoints. La date où Denis Roux quitte le
Rwanda n’est pas connue. Le 10 novembre 1992, le colonel Capodanno prévoit
de supprimer le DAMI de 2 sous-officiers et de transformer le poste du capitaine
52. Rapport Mutsinzi d’enquête sur l’attentat du 6 avril 1994 [7, p. 32]. http://www.
francegenocidetutsi.org/mutsinzi.pdf#page=32
53. Laurent Serubuga, Défense anti-aérienne du territoire rwandais, TPIR, Procès
Militaires-I, Pièce à conviction P371B, 16/11/2005. http://www.francegenocidetutsi.org/
Melvlin8.pdf
54. Le colonel Serubuga au ministre de la Défense à Kigali, Kigali le 11 juin 1991,
No 0565/Offr.1.8. Objet : Prolongement de séjour du Capt Moniteur Pilote Lemaire. http:
//www.francegenocidetutsi.org/SerubugaLemaire11juin1991.pdf
55. Laurent Serubuga, Lettre à Monsieur le Ministre de la Défense. Objet : Téléphone du
LT Col CANOVAS, No 0310/G3.1.2, 23 mars 1991.
56. Laurent Serubuga à Monsieur le ministre de la Défense nationale, Candidature du
Capt. Roux Denis, No 0616 OFFR.1.8, 25 juin 1991. http://www.francegenocidetutsi.org/
SerubugaRoux25juin1991.pdf

6

SERUBUGA EST EN BONNE RELATION AVEC LA COOPÉRATION MILITAIRE FRANÇAISE13

Roux, conseiller technique auprès du commandant de la garde présidentielle, en
poste de conseiller au Groupement mobile. 57 Le 17 mai 1993, le colonel Cussac
informe le ministre de la Défense à Kigali que le poste du major Denis Roux,
conseiller du commandant de la garde présidentielle sera pas renouvelé à l’été
1993. Il est donc resté jusqu’à l’été 1993 et a peut-être été ensuite affecté au
Groupement mobile de la gendarmerie. Le lieutenant-colonel Damy écrit qu’à
son départ le commandant Roux n’a pas été remplacé mais ne précise pas la
date. 58 Le colonel Serubuga avait donc certainement des relations avec Denis
Roux. Selon la Mission d’information parlementaire , il est encore à Kigali après
le 15 décembre 1993 ! 59
La garde présidentielle a été le fer de lance du génocide des Tutsi. En particulier, c’est elle qui a déclenché les massacres de personnalités à Kigali dans la
nuit du 6 au 7 avril 1994.

6.2

La proximité de Jean-Jacques Maurin avec Serubuga

Le lieutenant-colonel Jean-Jacques Maurin, attaché de défense adjoint, conseille
le colonel Serubuga d’avril à juin 1992 :
Entendu par la Mission, le Lieutenant-Colonel Jean-Jacques Maurin a déclaré qu’il avait été désigné par l’Amiral Jacques Lanxade
pour une mission temporaire de durée indéterminée en tant qu’adjoint opérationnel plus spécialement chargé de conseiller le Chef
d’état-major de l’armée rwandaise dans la conduite des opérations et
dans la préparation et l’entraînement des forces. Il a précisé que, peu
après son arrivée à Kigali, le 24 avril 1992, le Chef d’état-major des
FAR avait expressément souhaité, dès le mois de mai 1992, sa participation aux réunions quotidiennes de Chef d’état-major de l’armée
rwandaise et a indiqué qu’il accompagnait le Chef d’état-major dans
tous ses déplacements sur le territoire. [...]
Dans le cadre de cette mission de conseil, le Lieutenant-Colonel
Jean-Jacques Maurin rencontre tous les jours le Colonel Serubuga. Il
est sollicité notamment sur la conception d’une compagnie de renseignement conçue à partir des équipes CRAP, des groupes RASURA
et d’une section d’écoute. Par ailleurs, il tient à jour la situation tactique à partir du compte rendu de tous les chefs de secteurs présents
sur le terrain, des comptes rendus quotidiens et du bilan des écoutes
rwandaises. [...]
57. Ministère de la Coopération et du Développement, Mission militaire de coopération No 000196/MMC/SP/CD, Paris, 10 nov. 1992, Rapport du colonel Capodanno sur
sa mission au Rwanda (3 - 6 nov 1992), p. 6. http://www.francegenocidetutsi.org/
Capodanno10nov1992.pdf
58. Lettre du lieutenant-colonel Damy à Bernard Cazeneuve, Enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994 [19, Tome II, Annexes, p. 181]. http://www.francegenocidetutsi.org/
DamyCazeneuve23octobre1998.pdf
59. Enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994 [19, Rapport, p. 351] ; V. Kayimahe [15,
p. 127].

7

LA MISE À LA RETRAITE DE SERUBUGA PAR JAMES GASANA 14

Le fait, d’autre part, pour le Lieutenant-Colonel Jean-Jacques
Maurin d’accompagner le Colonel Serubuga dans ses déplacements
et de participer à la définition des opérations tactiques montre bien
qu’au-delà d’une mission consistant à seconder l’attaché de défense
dans sa fonction d’assistance opérationnelle des FAR, existait bien
une mission consistant à « conseiller discrètement le Chef d’étatmajor des FAR pour tout ce qui concerne la conduite des opérations,
mais aussi la préparation et l’entraînement des forces ». 60
Dans l’hypothèse que l’attentat contre le président Habyarimana ait été organisé par des militaires de l’armée rwandaise, hypothèse renforcée par la détermination par les experts du juge Trévidic du lieu de départ du tir des missiles
à la lisière est du camp militaire de Kanombe, ce commentaire des députés sur
le rôle de Jean-Jacques Maurin laisse entendre qu’il était bien placé pour être
informé du projet d’attentat. Il est possible qu’après la mise à la retraite de
Serubuga, il soit resté en relation avec celui-ci.

7

La mise à la retraite de Serubuga par James
Gasana

La mise à la retraite d’officiers supérieurs aurait été recommandée par la
Commission de dix officiers formée en décembre 1991 et chargée d’étudier les
moyens de vaincre l’ennemi « sur le plan militaire, médiatique et politique. » 61
Mais les relations du colonel Serubuga avec James Gasana, ministre de la Défense du gouvernement de coalition, ne sont pas les meilleures. « Les 25 et
26 avril 1992, écrit Gasana, j’effectue des visites aux états-majors et camps
militaires de Kigali. Je me rends compte de l’incompétence patente des chefs
d’états-majors et de la plupart des membres de leurs bureaux. » 62 En mai 1992,
le ministre somme le colonel Serubuga de fournir les preuves de ses accusations
publiques contre les majors Augustin Cyiza et Cyprien Kayumba, qui seraient
des complices de l’ennemi. 63 Le 9 juin 1992, James Gasana met Laurent Serubuga à la retraite :
En juin 1992, le Ministre de la Défense, M. James Gasana, pourtant lui-même issu du MRND, entreprend alors une réorganisation
importante de l’encadrement de l’armée, incapable de mettre fin aux
mutineries et exactions. Les deux Chefs d’état-major de l’Armée et
de la Gendarmerie sont ainsi mis à la retraite, ainsi que de nombreux
officiers supérieurs. 64
60. Enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994 [19, Rapport, pp. 151–152]. http://www.
assemblee-nationale.fr/dossiers/rwanda/r1271.asp#P2458_345435
61. Aucun témoin ne doit survivre [10, p. 77].
62. J.-K. Gasana [11, p. 107].
63. James
Gasana,
Lettre
au
colonel
Serubuga,
mai
1992.
http://www.
francegenocidetutsi.org/GasanaSerubugaMai1992.pdf
64. Enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994 [19, Tome I, Rapport, p. 101]. http://
www.assemblee-nationale.fr/dossiers/rwanda/r1271.asp#P1820_222438

7

LA MISE À LA RETRAITE DE SERUBUGA PAR JAMES GASANA 15

Selon Gérard Prunier, cette éviction a été faite à la demande du président
Habyarimana :
En 1992, le Président Juvénal Habyarimana avait demandé au
Ministre de la Défense James Gasana de le débarrasser d’un certain nombre d’hommes de son entourage, qu’il trouvait peu sûrs,
voire dangereux pour lui, en les marginalisant ou en les éliminant
de leur poste (...) parmi ceux-ci figuraient les Colonels Rwagafilita,
Serubuga, Sagatwa, avant qu’il ne change de camp, et Bagosora. 65
Cette volonté d’Habyarimana d’écarter Serubuga n’est pas établie. En effet,
le général Jean Varret, à qui le Premier ministre et le ministre de la Défense
confient leur intention de mettre à la retraite les colonels Serubuga, Rwagafilita
et Sagatwa, écrit : « Il est peu probable que le Président acceptera facilement le
départ à la retraite de ces trois fidèles représentants de la tendance intransigeante
de son armée. » 66
Habyarimana aurait voulu nommer Serubuga conseiller du ministre mais
James Gasana aurait refusé. 67 Voulue ou pas, le président Habyarimana a signé
cette mise à la retraite, ce qui n’a pu qu’accroître l’aversion de Serubuga pour
Habyarimana.
James Gasana s’enfuit du Rwanda en 1993. Il se dit menacé par l’AMASASU.
AMASASU ou « Alliance des militaires agacés par les séculaires actes sournois
des Unaristes » est un mot qui signifie balles en rwandais. C’est un groupe
de militaires opposés aux Accords d’Arusha qui prônait de faire justice aux
complices du FPR. Il serait dirigé par un certain « Commandant Tango Mike »
derrière lequel on croit reconnaître le colonel Bagosora. Serubuga fait-il partie
d’AMASASU ? La liste de ses membres fluctue suivant les témoignages.
Mis à la retraite, Serubuga garde une certaine influence. Il agissait comme
conseiller ou consultant. Les rumeurs disent que le colonel Bagosora ne faisait
rien sans le consulter. 68

7.1

Les incidents avec la MINUAR

Le 26 janvier 1994, des Casques bleux belges de la MINUAR aurait contrôlé à
Gikondo une voiture où se trouvait Brigitte, la fille de Serubuga. Cet incident est
repris par la radio RTLM pour justifier la chasse aux Belges pendant le génocide.
« Ces sales voyous, dit Valérie Bemeriki, se sont permis de contrôler les véhicules
et ont brutalisé certaines personnes dont la fille du colonel Serubuga, Brigitte.
Par ailleurs, son véhicule a été endommagé. » 69 Filip Reyntjens affirme que
65. Ibidem, pp. 101–102.
66. Le général de division Jean Varret à Monsieur le Ministre délégué chargé de la Coopération et du Développement, 27 mai 1992, No 000104/MMC/SP/CD, Confidentiel défense, Objet : Compte rendu de mission au Rwanda et au Burundi, p. 3. http://www.
francegenocidetutsi.org/Varret27mai1992.pdf
67. A. Guichaoua [13, p. 143].
68. Témoignage de I.C.
69. Valérie Bemeriki, RTLM, 22 avril 1994.

8

SON RÔLE DANS L’ASSASSINAT DE JUVÉNAL HABYARIMANA

16

« des militaires belges ont crevé des pneux du véhicule du colonel en retraite
Serubuga. » 70

8

Son rôle dans l’assassinat de Juvénal Habyarimana

José Kagabo, chercheur à l’École des hautes études en sciences sociales, met
en cause Serubuga dans l’attentat contre Habyarimana :
Son clan [d’Habyarimana], nordique, de Gisenyi et de Ruhengeri,
est en fait celui de sa belle famille. Elle constituait le noyau dur
du pouvoir, notamment la garde présidentielle. Le colonel Serubuga,
dont beaucoup pensent qu’il a ordonné l’assassinat du président,
appartient à ce cercle. 71
Entendu par l’Auditorat militaire belge le 26 mai 1994, Jean-Berchmans
Birara, gouverneur de la Banque nationale du Rwanda jusqu’en 1993, remet un
document sur les circonstances de l’attentat contre le Président Habyarimana :
A l’origine du coup d’état se trouvent :
1) le colonel SERUBUGA Laurent, ancien chef d’état-major, mis
à la retraite contre son gré, et sans le grade de général qu’il réclamait. 72
Birara met en cause également les colonels Buregeya et Rwagafilita, mis à
la retraite comme Serubuga. Nous remarquons qu’en 1980 déjà, il accusait les
mêmes.
René Chantraine, coopérant militaire belge, range Serubuga parmi les éventuels commanditaires de l’attentat contre Habyarimana. Mais il est difficile d’y
inclure le colonel Nsabimana qui en a été victime :
Il y avait un noyau dur au sein des forces armées, de tendance
CDR. Ce serait ce noyau dur qui aurait armé les “Interahamwe” et
déjà provoqué des massacres par le passé.
Personnellement je ne serais pas étonné que le général Nsabimana, l’ex-colonel Serubuga (pensionné), le colonel Baransalitse et
le colonel Bagasora [Bagosora] aient été impliqués comme commanditaires dans cet attentat. 73
Massimo Pasuch, médecin militaire belge coopérant, suspecte aussi Serubuga :
70. F. Reyntjens [20, p. 73, note 129].
71. Marc Lathuillière, « La réconciliation ethnique est le seul modèle viable » Interview de José Kagabo, La Croix, 17 avril 1994. http://www.francegenocidetutsi.org/
JoseKagaboLaCroix17avril1994.pdf
72. Auditorat militaire belge. Annexe à la déposition de Jean Birara, 26 mai 1994. http:
//www.francegenocidetutsi.org/Birara26mai1994.pdf
73. Déposition de René Chantraine, Auditorat militaire, Guy Artiges, 9 mai 1994, PV
No 677. http://www.francegenocidetutsi.org/Chantraine9mai1994.pdf

9

SON RÔLE DANS LE GÉNOCIDE

17

A votre demande je réponds que les bruits courent que l’attentat aurait été commandité par la faction dure du pouvoir (CDR,
belle-famille du Président, Col Bagosora, Sagatwa, clique des durs
de laquelle faisait aussi partie Baransalitse et Serubuga). 74
Le lieutenant-colonel Jacques Duvivier, coopérant militaire belge, le range
parmi les inspirateurs de l’attentat :
Ma conviction est que les gens qui sont derrière cet attentat sont
des gens du CDR, la faction dure et raciste du gouvernement. J’imagine que des gens comme... Serubuga, Bagosora, Buregeya, Rwagafilita. 75
En dehors de ces témoignages nous n’avons aucun élément factuel, du 6 avril
ou des jours précédents, permettant de l’incriminer. Pendant la réunion du comité de crise à l’état-major dans le camp Kigali le soir du 6 avril, les colonels
Laurent Serubuga, ancien chef d’état-major adjoint et Pierre-Célestin Rwagafilita, ancien chef d’état-major de la gendarmerie téléphonent pour proposer leur
service. 76
Entendu par le juge Bruguière, Laurent Serubuga déclare que les tubes lancemissiles ont été convoyé vers le Zaïre par le colonel Aloys Ntiwiragabo, chef des
services de renseignement. 77
Selon un témoin de la région de Gisenyi, le rôle de Serubuga est largement
sous-estimé. Il serait l’inspirateur du colonel Bagosora.

9

Son rôle dans le génocide

Durant la réunion à l’Etat Major dans la nuit du 6 au 7 avril, Serubuga fait
des offres de service :
C’est le colonel Bagosora, en tant que remplaçant du ministre
de la Défense, qui dirige la réunion. Au cours de celle-ci, le colonel
Laurent Serubuga, ancien chef d’Etat Major de l’armée téléphone
pour proposer ses services ainsi que ceux du colonel Pierre-Célestin
Rwagafilita, ancien chef d’Etat Major de la gendarmerie. 78
Le 7 avril à 16 h et 20 h, trois coopérants belges sont assassinés à Rambura,
village natal du Président Habyarimana. 79 Ils étaient enseignants à l’école secondaire, mis par l’ONG Nord-Sud-Coopération à la disposition d’une association
74. Déposition de Massimo Pasuch, auditorat militaire belge, 9 mai 1994. http://www.
francegenocidetutsi.org/Pasuch9mai1994.pdf
75. Guy Artiges, Audition de Jacques Duvivier, Auditorat militaire, PV No 684, 10 mai
1994. http://www.francegenocidetutsi.org/Duvivier10mai1994.pdf
76. F. Reyntjens [20, p. 52] ; A. Guichaoua [13, p. 249]
77. J.-L. Bruguière, Ordonnance, [5, p. 37]. http://www.francegenocidetutsi.org/
OrdonnanceBruguiere.pdf#page=37
78. F. Reyntjens [20, p. 52].
79. Commission d’enquête parlementaire du Sénat belge [22, 1-611/7, section 3.5.3, p. 462]
http://www.francegenocidetutsi.org/SenatBelgique-r1-611-7.pdf ; [22, CRA 1-2, 19 février 1997, p. 12].

9

SON RÔLE DANS LE GÉNOCIDE

18

présidée par Noël Mbonabaryi. Le colonel Serubuga en est vice-président et le
colonel Théoneste Bagosora la représente dans les passations de marché. Il en
serait devenu le président à la mort de Noël Mbonabaryi début 1994. Ils ont été
tués par balles par un commando hutu d’un autre village.
Serubuga serait à Gisenyi après le 13 avril avec Félicien Kabuga et Augustin
Ngirabatware, puisque des chambres à l’hôtel Méridien leur sont réservées. 80
Bertin Makuza, survivant de l’hôtel 1000 Collines, était associé en affaires
avec Serubuga :
J’avais une usine de matelas en mousse à Kigali. J’étais associé à Serubuga. Il fallait au Rwanda s’associer à un militaire pour
pouvoir travailler. Serubuga était un extrémiste du CDR convaincu.
J’ai entendu dire que Serubuga a repris du service après l’attentat
du 06.04.94. De toute façon j’ai demandé l’aide de Serubuga pour
sortir de chez moi et aller à l’hôtel des 1000 Collines et il n’a rien
fait pour m’aider. [...] Ce que je peux dire c’est que directement
après l’attentat c’est Bagosora qui donnait les instructions. C’est un
homme de l’aile dure du CDR.
Comme dirigeants du CDR, je connais le Président Barayagwiza
Jean-Bosco, Bagosora, Serubuga, Uwilingiyimana Juvénal, Musabe
Pasteur, Kabuga Félicien (RTLM). 81
Serubuga exigea de Makuza la cession de toutes ses parts dans cette société
Rwandafoam, alors qu’il était en danger de mort. Celui-ci obtempéra, mais craignant d’être éliminé, il sollicita l’aide d’un autre de ses associés, le major Pascal
Ngirumpatse, qui avec le véhicule Mercedes 4 x 4 de Laurent Serubuga, récupéra
Makuza à Remera et le déposa avec 24 autres membres de sa famille à l’hôtel
des Mille Collines. 82

9.1

Le rappel du colonel Serubuga

Dans la nuit du 6 au 7 avril, Bagosora demande le rappel de Serubuga et de
Rwagafilita à Jacques-Roger Booh-Booh. 83 Cette information paraît douteuse
car Booh-Booh ne semble pas concerné par cette affaire.
Le 8 avril, le colonel Bagosora envoie depuis le ministère de la Défense un
télégramme à l’armée et à la Gendarmerie rappelant sous les armes les officiers
qui ont été mis à la retraite l’année précédente en 1993, en particulier les colonels
Serubuga, Rwagafilita, Nshizirungu et Gasake. 84
80. Rwanda : Death, Despair and Defiance [1, p. 553].
81. Guy Artiges, Audition de Makuza Bertin , Auditorat militaire belge, PV No 1022, 29
juin 1994. http://www.francegenocidetutsi.org/MakuzaBertin29juin1994.pdf
82. A. Guichaoua [13, p. 298].
83. G. Prunier [18, p. 270].
84. Selon Bagosora, il aurait fait cette « manœuvre de diversion » le 6 avril, au moment
où le Comité de crise voulait l’exclure. De retour le 9 avril, le ministre Bizimungu aurait
fait annuler cette décision. Le télégramme de Bagosora aurait donc été envoyé le 8 au matin
quand il quitte le Comité de crise après que la présidence de ce Comité lui ait été refusée. Cf.
Déclaration du colonel Bagosora, TPIR, Affaire No ICTR-98-41-T, Bagosora..., audience du 10

9

SON RÔLE DANS LE GÉNOCIDE

19

Le 8 avril, avant 16 h, Paul Kagame a fait savoir à Henry Anyidoho de la
MINUAR qu’il acceptait d’assister à une réunion du « Comité de crise » à Kigali.
Ce comité était composé d’officiers supérieurs de l’armée et de la gendarmerie.
Parmi eux, il y avait les colonels Serubuga, Rwagafilita et Bagosora :
The horrendous atrocities which had been going on elicited a
response from Major General Paul Kagame of the RPF. On 8 April
1994, at 1600 hours, he relayed a message to me indicating his intention to despatch a battalion to Kigali to assist government forces
in preventing further bloodbath by renegade forces. Meanwhile he
had communicated to us his acceptance of an invitation to attend a
meeting of the “Crisis Committee” in Kigali. The comittee consisted
of a number of senior military officers from the RGF and the gendarmerie. Notable among them were colonels Serubuga, Rwagafilita
and Bagosora. 85
Le 16 avril 1994, Serubuga est rappelé en service actif :
Le ministère de la Défense rappela également des officiers qui
avaient été contraints de prendre leur retraite quelques temps auparavant. Il s’agissait notamment de Bagosora puis des colonels Rwagafilita, Serubuga et Gasake, qui étaient tous des partisans de Bagosora. Gatsinzi signa l’ordre de rappel peu avant sa destitution, il
essaya ensuite de l’annuler après avoir appris qu’il pouvait le faire,
en s’appuyant sur des vices de forme. Son communiqué à la radio
annulant le rappel fut apparemment ignoré. 86
Le 30 avril, un message flash du Ministère de la Défense prie les chefs d’état
major et les commandants opérationnels de demander à une liste d’officiers,
dont le colonel Serubuga « s’ils veulent et se sentent aptes pour la mobilisation
partielle en cours. Réponse avant le 04 mai 94 » 87
Le 2 mai 1994, un message du ministère de la Défense adressé au commandant du secteur opérationnel de Gisenyi, le colonel Anatole Nsengiyumva, avec
copie au colonel Serubuga a pour objet son rappel et son affectation à la défense civile de sa préfecture. Il contient la phrase : « LUI DEMANDER UNE
RÉPONSE DÉFINITIVE QUANT À SA VOLONTÉ D’ÊTRE MOBILISÉ. » 88
Serubuga aurait été nommé responsable de l’autodéfense civile pour la préfecture de Gisenyi, mais il aurait, semble-t-il, refusé. 89
novembre 2005, Interrogatoire principal de la défense de Théoneste Bagosora par Me Constant.
http://www.francegenocidetutsi.org/TPIRmilitairesI-10novembre2005.pdf#page=14
85. H. Anyidoho [2, p. 30].
86. Aucun témoin ne doit survivre [10, p. 311].
87. DE MINADEF POUR EM AR - EM GD N - COMDT OPS TOUS - CAMPS TOUS
AR ET GD N, Message à des officiers pour mobilisation partielle en cours, ADM/94/956,
30 avril 1994. Case No : ICTR 98-41-T Exhibit No : DNS 114A1 Date admitted : 14-102005 Tendered by : Defende Name of witness : LE1. http://www.francegenocidetutsi.org/
RappelOfficiersRetraites30avril1994.pdf
88. De MINADEF à COMDT OPS GIS. ICTR 98-41-T, exhibit DNS 114 B1. http://www.
francegenocidetutsi.org/RappelSerubuga.pdf
89. Aucun témoin ne doit survivre [10, p. 329].

10

ASILE EN FRANCE

20

Dans sa confession au TPIR, Jean Kambanda, Premier ministre, affirme que
Serubuga est un des cinq officiers qui ont pu s’occuper de la défense civile dans
la préfecture de Gisenyi. 90
Richard Mugenzi, qui est à Gisenyi, dit avoir vu Serubuga au camp militaire de Gisenyi pendant le génocide, mais il ne semble pas lui accorder un rôle
important. 91

9.2

Il introduit Barril auprès du GIR

François Nzabahimana, le futur président du RDR, interrogé le 2 septembre
1994, laisse entendre que le colonel Serubuga a des relations particulières avec
le capitaine Barril :
Je viens de me rendre au Zaïre (Goma et Bukavu) pour une
mission d’information afin de discuter des conditions d’un retour au
Rwanda. À cette occasion j’ai rencontré et discuté avec les généraux
Kabiligi (chef d’EM adjoint) et Bizimungu (chef d’EM).
Par ces personnes, j’ai appris que le capitaine français Barril a
rencontré des membres du Gouvernement rwandais à Gisenyi vers la
fin mai - début juin 94. Il a été introduit par le colonel E.R. Serubuga.
Barril était accompagné de 3 personnes de race blanche dont un
spécialiste du tir mortier. Barril avait été chargé du recrutement de
mercenaires. Il a été conduit au front où il a constaté que la situation
était quasi désespérée et que les FAR étaient quasi encerclés. Barril
est parti en annonçant qu’il reviendrait. Il a abandonné sur place ses
trois compagnons.
Pour ces deux généraux, Barril a été considéré comme un farceur
et un escroc. Il semblerait que Barril ait reçu une forte somme mais
ce n’est pas le Gouvernement rwandais le bailleur de fond. J’ai entendu citer le montant de un million de dollars. C’est Serubuga qui
aurait transmis l’argent. Barril aurait été engagé apparemment par
la famille Habyarimana elle-même. 92

10

Asile en France

Il fait une demande d’asile au titre de la convention de Genève. Cette demande est rejetée, en application de l’article 1er, F, par une décision de la
Commission des recours des réfugiés en date du 16 juillet 2002. Le requérant
aurait essayé de minimiser son rôle alors qu’il avait des fonctions importantes. 93
90. Audition de Jean Kambanda, TPIR T2-K7-18, 27 septembre 1997, p. 3. Cf. A. Guichaoua
[13, p. 339]. http://www.francegenocidetutsi.org/KambandaK7-18-27septembre1997.pdf
91. J.-F. Dupaquier [8, p. 305].
92. Guy Artiges, Audition de François Nzabahimana, Auditorat militaire belge, 2 septembre
1994. http://www.francegenocidetutsi.org/ArtigesNzabahimana2septembre1994.pdf
93. Michel Laurain, Note sur la mise en œuvre, dans la jurisprudence française, des clauses
d’exclusion contenues à l’article 1F de la convention de Genève, Groupe de travail sur les
causes d’exclusion du comité ad hoc d’experts sur les aspects juridiques de l’asile territorial,

11

DÉNÉGATION

21

Serubuga est suspecté d’avoir couvert des massacres d’octobre 1990 à juin
1994. En effet, dans le rejet de la demande de K. de Nyabikenke, responsable
du MDR, la Cour nationale du droit d’asile dit :
que celui-ci était professeur et préfet des études à l’EFOTEC de
Kigali de 1983 à 1991, établissement sur lequel il apparaît que les
colonels Laurent Serubuga et Théoneste Bagasora [Bagosora] exerçaient une influence et une autorité directes ; qu’il est constant que
ces mêmes personnalités ont couvert de leur autorité des massacres
perpétrés à l’encontre de la communauté tutsie et des opposants politiques pendant la période allant du mois d’octobre 1990 au mois
de juin 1994 ; que M. Laurent Serubuga a été exclu du bénéfice de
la convention de Genève en application de l’article 1er, F, a [sic] par
une décision de la Commission des recours des réfugiés en date du
16 juillet 2002 ; [...] 94
Serubuga a résidé en 2001 dans un foyer de jeunes travailleurs, 24 rue de Mâcon à Strasbourg. Il était toujours accompagné de 7 ou 8 hommes semblant être
ses gardes du corps. À une personne qui s’étonnait de sa présence, le directeur
du foyer a répondu qu’il n’y avait rien à craindre, que Serubuga était inoffensif,
qu’il passait son temps à l’église, qu’il était surveillé par les services spéciaux et
qu’il n’obtiendrait jamais le statut de réfugié de l’OFPRA. Ce directeur a confié
qu’il travaillait depuis 33 ans pour le ministère des Affaires étrangères dont 3
ans au Rwanda. Serubuga a disparu depuis.
Le témoignage du colonel Serubuga était prévu au procès du major Ntuyahaga le 26 avril 2007 à Bruxelles. Il ne s’est pas présenté.

11

Dénégation

Mis en cause par la publication d’une note de la DGSE par France Inter et
Médiapart, Serubuga fait publier le droit de réponse suivant :
Dans votre article publié le 6 février 2019 intitulé Génocide au
Rwanda : une note confidentielle contredit la version officielle signé
de Benoît COLLOMBAT, vous reprenez des extraits d’une note de
la DGSE m’accusant d’être l’un des principaux commanditaires de
l’attaque contre l’avion du Président HABYARIMANA.
Je conteste ces accusations que je qualifie de gravissimes.
J’affirme que j’ai quitté mes fonctions de chef d’État-Major des
armées en 1992 ; ayant pris ma retraite j’ai quitté la vie militaire pour
la vie civile. Je n’ai joué aucun rôle dans l’assassinat du Président
HABYARIMANA.
des réfugiés et des apatrides. (CAHAR-EX), p. 42. http://www.francegenocidetutsi.org/
ExclusionAsile13novembre2003.pdf#page=27
94. CNDA, 9 avril 2008, 552782, K. Cf. Cour nationale du droit d’asile, Contentieux des
réfugiés, Jurisprudence du Conseil d’État et de la Cour nationale du droit d’asile, Année 2008,
p. 80. http://www.francegenocidetutsi.org/CNDA2008.pdf

12

POURSUITES JUDICIAIRES

22

De surcroît l’article me définit comme “un acteur clé du génocide”.
Je précise en effet que je n’ai jamais été poursuivi par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et que dans le cadre
d’une enquête judiciaire menée en France suite à des plaintes déposées contre moi pour crime contre l’humanité, j’ai d’abord bénéficié
d’un classement sans suite, puis, dans le cadre d’une information,
j’ai été entendu en simple qualité de témoin assisté, sans être mis en
examen.
Je conteste vigoureusement sans réserve les accusations infondées
contenues dans votre article et dans le document que vous citez. 95

12

Poursuites judiciaires

Il fait partie des personnalités accusées par le FPR d’être responsables des
massacres. 96
Il est recherché par le Rwanda (Parquet Kigali, RMP no 823).
- En janvier 2000, la FIDH et la LDH ont déposé des plaintes simples auprès
du Procureur de la République du Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris
demandant l’ouverture d’une information judiciaire contre Laurent Serubuga.
- Le 22 mai 2001, transféré au Parquet de Strasbourg, le dossier visant le
colonel Laurent Serubuga est classé sans suite pour défaut de preuve. 97
- Le 10 décembre 2001, la FIDH, Survie et la Communauté Rwandaise de
France se constituent parties civiles devant le doyen des juges d’instruction près
le TGI de Strasbourg. 98
- Le 28 juin 2002, une information est finalement ouverte contre lui des chefs
de génocide et de complicité de crimes contre l’humanité. Laurent Serubuga n’a
toujours pas été mis en examen. 99
- Le 13 juillet 2007, le Collectif des parties civiles rwandaises (CPCR) se
porte partie civile contre le colonel Serubuga.
- Le 17 mai 2013, le Procureur général du Rwanda émet un mandat d’arrêt
international contre le colonel Serubuga, pour génocide, complicité de génocide,
participation à une organisation criminelle en vue de commettre un génocide et
meurtre, en 1994.
95. Laurent
Seubuga.
Droit
de
réponse
à
Benoît
Collombat,
Génocide
au
Rwanda
:
une
note
confidentielle
contredit
la
version
française,
France
Inter,
6
février
2019.
https://www.franceinter.fr/monde/
genocide-au-rwanda-une-note-confidentielle-contredit-la-version-francaise
96. J.-M. Marlaud, Note du ministère des Affaires étrangères, 12 juillet 1994 ; Note du
ministère des Affaires étrangères, 21 juillet 1994. Cf. Enquête sur la tragédie rwandaise
1990-1994 [19, Tome II, Annexes, pp. 513, 517]. http://www.francegenocidetutsi.org/
Marlaud21juillet1994.pdf
97. FIDH, La répression des présumés génocidaires rwandais devant les juridictions françaises : Etat des lieux, 6 avril 2004. http://www.francegenocidetutsi.org/FIDH6avril2004.
pdf
98. FIDH, ibidem
99. FIDH, ibidem

13

CONCLUSION

23

- Le 11 juillet 2013, il est arrêté à Escaudœuvres près de Cambrai et incarcéré
en exécution de ce mandat d’arrêt international émis par la justice rwandaise. 100
- Le 12 septembre 2013, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de
Douai (Nord) rend un avis défavorable à la demande d’extradition de Laurent
Serubuga, que le Rwanda souhaite juger pour crimes de génocide. Elle a estimé
que les faits de meurtres entre avril et juillet 1994 pour lesquels est poursuivi
Serubuga étaient prescrits, le mandat d’arrêt ayant été délivré le 17 mai dernier,
soit plus de dix ans après et sans qu’aucun acte d’instruction n’ait été produit.
La cour d’appel ordonne sa remise en liberté. 101
- Le 17 septembre 2013, le parquet de Douai décide de se pourvoir en cassation suite à l’avis défavorable rendu par la Cour d’appel dans l’affaire concernant
la demande d’extradition de Laurent Serubuga. Le procureur Olivier de Baynast
considère que « les crimes visés par les autorités rwandaises sont d’une gravité
telle que les règles du droit commun gouvernant la prescription ne devaient pas
recevoir application ». 102

13

Conclusion

Le colonel Serubuga a activement participé à la planification et à la préparation du génocide des Tutsi. Il a participé à l’organisation de massacres qui
préfiguraient ce génocide, ceux de Kibilira en octobre 1990, des Bagogwe début 1991, des Tutsi du Bugesera au printemps 1992. Ces massacres n’étant pas
reconnus comme génocide, ces délits sont prescrits.
Il a certainement participé au génocide en 1994. Il aurait dirigé la défense
civile dans la région de Gisenyi sans pourtant qu’il y en ait des preuves formelles.
Il n’y a pas de charges précises contre lui pendant le génocide.
L’inimitié de Serubuga pour le président Juvénal Habyarimana s’est aggravée
quand ce dernier a entériné la décision gouvernementale de le mettre à la retraite. Des accusations sérieuses sont formulées contre le colonel Serubuga pour
avoir commandité l’attentat contre le président Habyarimana avec d’autres officiers mis également à la retraite. Fait troublant, en 1992, il tenait à équiper le
bataillon anti-aérien de l’armée rwandaise en missiles sol-air de type SAM 16.
Même si cette commande n’a pas été exécutée, on se demande dans quel but elle
a été formulée, puisque le FPR ne disposait pas d’aviation. Le colonel Bagosora
commandait ce bataillon en 1992. Comme celui du camp Kanombe, il doit ce
commandement au colonel Serubuga. Celui-ci disposait donc d’un ascendant sur
100. Claire
Chevallier,
Un
Rwandais
soupçonné
d’avoir
participé
au
génocide
des
Tutsis
arrêté
à
Cambrai,
France
3,
16
juillet
2013.
http://nord-pas-de-calais.france3.fr/2013/07/16/
un-rwandais-soupconne-d-avoir-participe-au-genocide-des-tutsis-arrete-cambrai-288687.
html
101. Génocide rwandais : la justice française rend un avis défavorable à l’extradition
d’un ex-colonel, France 24, 12 septembre 2013. http://www.francegenocidetutsi.org/
SerubugaArret12septembre2013.pdf
102. Avis défavorable à l’extradition du colonel Serubuga : le Parquet saisit la Cour de
cassation, Agence Hirondelle, 17 septembre 2013. http://www.francegenocidetutsi.org/
SerubugaExtraditionParquetSaisitCassation17septembre2013.pdf

RÉFÉRENCES

24

Bagosora. Le lieutenant-colonel Jean-Jacques Maurin, attaché militaire adjoint
et conseiller du chef d’état-major des FAR, avait des relations étroites avec le
colonel Bagosora. Il n’est pas exclu qu’il en ait gardé avec le colonel Serubuga,
dont il fut le conseiller en 1992. Ayant probablement ordonné l’assassinat du président Habyarimana, le colonel Serubuga est un des principaux commanditaires
rwandais du génocide des Tutsi.

Références
[1] African Rights : Rwanda : Death, Despair and Defiance. African Rights,
P.O. Box 18368, London EC4A 4JE, 1995. 1re édition, septembre 1994.
[2] Henry Kwami Anyidoho : Guns over Kigali. Woeli Publishing services,
1997. The rwandese civil war–1994 (a personal account), Accra.
[3] Shyirambere J. Barahinyura : 1973-1988 Le Général-Major Habyarimana - Quinze ans de tyrannie et de tartuferie au Rwanda. Éditions Izuba,
Frankfurt am Main, 1988.
[4] Diogène Bideri : Le massacre des Bagogwe. Un prélude au génocide des
Tutsi (1990-1993). L’Harmattan, février 2009.
[5] Jean-Louis Bruguière : Délivrance de mandats d’arrêts internationaux Ordonnance de soit-communiqué. 17 novembre 2006.
[6] Jean-Pierre Chrétien, Jean-François Dupaquier, Marcel Kabanda et
Joseph Ngarambe : Rwanda : Les médias du génocide. Karthala, 1995.
[7] Comité indépendant d’experts chargé de l’enquête sur le crash
du 06/04/1994 de l’avion Falcon 50 immatriculé No 9XR-NN :
Rapport d’enquête sur les causes, les circonstances et les responsabilités de l’attentat du 06/04/1994 contre l’avion présidentiel rwandais Falcon 50 No 9XR-NN. République du Rwanda, 20 avril 2009. http:
//mutsinzireport.com/.
[8] Jean-François Dupaquier : L’agenda du génocide. Le témoignage de Richard Mugenzi, ex-espion rwandais. Karthala, septembre 2010.
[9] FIDH, Africa Watch, UIDH et CIDPDD : Rapport de la Commission internationale d’enquête sur les violations des Droits de l’Homme au
Rwanda depuis le 1er octobre 1990 ; 7 -21 janvier 1993. Mars 1993.
[10] Alison Des Forges : Aucun témoin ne doit survivre. Le génocide au
Rwanda. Karthala, Human Rights Watch, Fédération internationale des
Droits de l’homme, avril 1999. Traduction de Leave None to Tell the Story.
[11] James K. Gasana : Rwanda : Du Parti-État à l’État-Garnison. L’Harmattan, 2002.
[12] André Guichaoua : Rwanda 1994 - Les politiques du génocide à Butare.
Karthala, 2005.
[13] André Guichaoua : De la guerre au génocide. Les politiques criminelles
au Rwanda (1990-1994). La Découverte, 2010.

RÉFÉRENCES

25

[14] Valens Kajeguhakwa : Rwanda. De la terre de paix à la terre de sang et
après ? Éditions Remi Perrin, 2001.
[15] Vénuste Kayimahe : France-Rwanda : Les coulisses du génocide. Dagorno,
2002.
[16] René Lemarchand : The Dynamics of Violence in Central Africa. University of Pennsylvania Press, 2009.
[17] Linda Melvern : Conspiracy to Murder. The Rwandan Genocide. Verso,
2006. Fully updated.
[18] Gérard Prunier : Rwanda : le génocide. Dagorno, 1997. Traduction de
The Rwandan Crisis, History of a Genocide, Hurst and Co, Londres, 1995.
[19] Paul Quilès : Enquête sur la tragédie rwandaise 1990-1994. Assemblée nationale, rapport no 1271, http://www.assemblee-nationale.fr/
dossiers/rwanda.asp, 15 décembre 1998. Mission d’information de la
commission de la Défense nationale et des Forces armées et de la commission des Affaires étrangères, sur les opérations militaires menées par la
France, d’autres pays et l’ONU au Rwanda entre 1990 et 1994.
[20] Filip Reyntjens : Rwanda, trois jours qui ont fait basculer l’histoire.
Cahiers africains - L’Harmattan, Vol. 16, 1995. Dépôt légal : février 1996.
[21] Général Léonidas Rusatira : Rwanda, Le Droit à l’Espoir. L’Harmattan,
Paris, 2005.
[22] Sénat de Belgique - Commission des Affaires étrangères : Commission d’enquête parlementaire concernant les événements du Rwanda 1611/(7-15) 1997/1998. Sénat belge, 6 décembre 1997.

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