Fiche du document numéro 18297

Num
18297
Date
Mardi 4 avril 2017
Amj
Taille
419534
Titre
L'intervention de Bruno Delaye au secours des réfugiés de l'hôtel Mille Collines
Nom cité
Nom cité
Résumé
Bruno Delaye, adviser to François Mitterrand for African Affairs, intervened by telephone in Kigali in 1994 to prevent an attack on refugees at the Hotel Mille Collines. This event is not precisely dated by the journalists who report it and the accounts of the refugees are quite confused, as they suffered so many attacks. The testimony of one of them, the prosecutor Nsanzuwera, places this aborted transfer of refugees on May 3, 1994. André Guichaoua, who collected his testimony, affirms that, when asked, Bruno Delaye brought in the Head of State- Major Augustin Bizimungu. Communication with Kigali was probably done through the secure line that General Huchon had. This intervention shows that Paris could put an end to the massacres in Rwanda.
Type
Note
Langue
FR
Citation
L’hôtel des Mille Collines, qui appartient à la Sabena, abrite pendant le génocide de cinq cents à
sept cents personnes menacées de mort par l’armée gouvernementale et les milices. Elles sont gardées
par quelques Casques bleus tunisiens commandés par le major congolais Victor Moigny de la MINUAR. 1
Bruno Delaye, conseiller de François Mitterrand pour les Affaires africaines, a obtenu par un simple
coup de téléphone l’arrêt d’une attaque contre les réfugiés de l’hôtel Mille Collines à Kigali. C’est ce que
rappelle le journaliste Alain Frilet qui a été lui-même témoin de cette intervention de Delaye sans donner
toutefois de date précise :
Je me souviens être dans le bureau du conseiller de Mitterrand [Bruno Delaye] au moment
où une attaque à la grenade s’est déclenchée sur l’Hôtel des Mille Collines dans lequel s’étaient
réfugiés des Tutsi. Le conseiller a pris son téléphone devant moi pour appeler Kigali puis il a
raccroché en disant : L’opération est stoppée. C’était incroyable : on était dans le bureau du
conseiller de François Mitterrand, responsable des affaires africaines, qui prend son téléphone
et interrompt une attaque des miliciens sur l’Hôtel des Mille Collines à cinq mille kilomètres
de Paris ! 2
Alain Frilet avait écrit dans Libération que, selon un fonctionnaire du Quai d’Orsay, Bruno Delaye est
intervenu pour empêcher un massacre vers le 3 mai 1994 :
A Paris, on se déclare impuissant face aux tueries en cours. Mais on ne conteste pas que le
patron de la cellule africaine de l’Élysée, Bruno Delaye, ait réussi, il y a moins de quinze jours,
à faire intervenir personnellement le chef d’état-major des forces armées rwandaises pour qu’il
empêche les miliciens hutus de massacrer les personnalités réfugiées à l’hôtel Mille Collines.
« Une intervention ponctuelle, mais qui montre à quel point Paris peut encore peser dans le
déroulement des événements », confie un fonctionnaire du Quai d’Orsay qui, dégoûté, trahit
pour la première fois le devoir de réserve. 3
Cette intervention de Bruno Delaye est relatée également par Vincent Hugeux qui la date du 2 mai :
Reste, de l’aveu même d’un haut fonctionnaire écœuré, que François Mitterrand porte dans
ses errements une « responsabilité directe, totale et écrasante ». Peut-il aujourd’hui plaider
l’impuissance ? Non. Le lundi 2 mai, une intervention de Bruno Delaye, chef de la cellule
1. Roméo Dallaire [7, p. 346].
2. Interview de Alain Frilet par Sylvie Klinkemallie, Paris, 18 avril 2005 [11, p. 317].
3. Alain Frilet, La France prise au piège de ses accords, Libération, 18 mai 1994, p. 3. http://www.francegenocidetutsi.
org/Liberation1994-05-18FriletFrancePriseAuPiegeDeSesAccords.pdf

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africaine à l’Élysée, auprès du patron des FAR, le général Augustin Bizimungu, fit avorter la
tuerie des Tutsi réfugiés à l’hôtel des Mille-Collines. 4
Selon la commission Mucyo, Bruno Delaye est intervenu le 2 mai :
Il convient de préciser que le téléphone n’était pas coupé dans Kigali pendant l’opération
Amaryllis. Pendant cette période, des anciens employés tutsi des institutions françaises l’ont
utilisé et ont communiqué avec leurs employeurs français comme nous allons le voir plus loin.
La principale centrale téléphonique du pays avait été déplacée à l’hôtel des Mille collines et
était sous la surveillance de militaires français. Elle permit des échanges entre le colonel JeanJacques Maurin et l’état-major des FAR, et c’est sur cette même centrale que le 2 mai 1994,
Bruno Delaye eut un échange avec le patron des FAR, le général Bizimungu, pour l’empêcher
d’exécuter les personnes réfugiées dans cet hôtel. 5
Les sources de cette information ne sont pas indiquées. La commission Mucyo tient du colonel belge
Jean-Loup Denblyden que les Français avaient laissé à disposition des FAR un système de télécommunication à l’hôtel Mille Collines :
Le troisième point, je peux vous faire part des conversations des officiers français. Nous
parlions de la sécurité de « Mille Collines » [hôtel] et des gens qui y allaient vers le « Mille
Collines ». Ils nous disaient qu’il n’y avait pas de problème au « Mille Collines » parce qu’ils
avaient une cellule de communication. Je ne sais pas, j’ai retenu une suite dans le cinquième
étage, je n’ai pas été au « Mille Collines », je n’ai pas vu une cellule française. Je peux dire
que des officiers français à Kanombe parlaient de ça. Et on se posait la question est-ce que le
« Mille Collines » est vraiment une vraie zone de refuge ou pas ? Ce n’est qu’une appréciation,
on s’est demandé après les visites régulières du général Bizimungu au « Mille Collines » que
peut-être il pouvait avoir accès aux communications. Mais c’est une appréciation. [...] Le
commentaire que j’ai retenu, c’est « nous avons une cellule de communication », a dit un
officier français. Je crois que c’est le colonel Maurin mais je ne peux pas le garantir. 6
La présence de cette cellule de communication expliquerait les visites fréquentes d’Augustin Bizimungu, chef d’état-major des FAR, à l’hôtel.
Interrogé sur la présence d’un système de transmission installé par les Français à l’hôtel Mille Collines,
Tatien Ndolimana Miheto 7 déclare d’abord ne pas en être informé. Réinterrogé, il précise ceci :
Le major Cyiza avait une chambre à l’hôtel au 2e étage qu’il partageait avec le lieutenant
Iradakunda, également juriste et agent de renseignement. Ils n’y vivaient pas. Ils avaient
une chambre qu’ils utilisaient. Ils y avaient des équipements militaires genre radio, audio,
communication. Ils faisaient des va et vient avec l’hôtel pendant tout mon séjour du 12 avril
au 29 mai. 8
Tatien Ndolimana Miheto n’a pu dire s’il y avait des antennes sur le toit de l’hôtel raccordées à ce
matériel.
Le major de gendarmerie Augustin Cyiza est président du Conseil de guerre. Durant l’opération
Turquoise, il a collaboré avec les Français pour rétablir une administration dans la préfecture de Cyangugu
après le 18 juillet puis il a demandé son intégration dans la nouvelle armée rwandaise (RDF). 9
Paul Rusesabagina, gérant de l’hôtel par interim, 10 cite ce lieutenant Iradakunda qui l’aurait prévenu
d’une attaque de l’hôtel le 13 mai. 11 Jean-Baptiste Iradukunda, lieutenant de gendarmerie, est juge au
4. Vincent Hugeux, La mort crie victoire, L’Express, 2 juin 1994, p. 82. La date du 2 mai est une erreur de Hugeux. Il n’y avait pas que des Tutsi à être menacés : voir le cas de Nsanzuwera. http://www.francegenocidetutsi.org/
Hugeux2juin1994.pdf
5. Rapport Mucyo, [4, p. 146].
6. Audition de Jean-Loup Denblyden par la Commission Mucyo, 19 décembre 2006 [4, Témoin no 51, Annexes, pp. 121122]. Denblyden fait remarquer que l’hôtel Mille Collines n’a que 4 étages.
7. Tatien Ndolimana Miheto était coordinateur du comité de crise des réfugiés à l’hôtel Mille Collines en avril-mai 1994.
8. Tatien Ndolimana Miheto, entretien avec l’auteur, Kigali, 18 octobre 2011.
9. Thierry Cruvelier [6, p. 106-109].
10. Paul Rusesabagina est le héros du film Hôtel Rwanda, qualificatif qui lui est contesté par les personnes réfugiées
àl’hôtel.
11. Paul Rusesabagina [14, pp. 160-161].

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Conseil de guerre. Il est affecté au service G3 (Opérations) de l’état-major de la Gendarmerie, sous les
ordres du major Paul Rwarakabije. 12 Selon Filip Reyntjens, Jean-Baptiste Iradukunda est un « jeune
juriste affecté au service de renseignement de la Défense ». Il aurait appelé des officiers à une réunion chez
le Premier ministre, Agathe Uwilingiyimana « le 1er et ou 4 avril », où selon Radio Rwanda et la RTLM,
aurait été préparé un coup d’État contre le président Habyarimana. 13 Le même lieutenant Iradukunda
vient prévenir le 13 mai Paul Rusesabagina qu’une attaque contre l’hôtel aura lieu le jour même à seize
heures. 14
Il semble donc que l’information rapportée par Denblyden ne soit pas fausse.
Le 3 mai, la MINUAR et des gendarmes rwandais organisent l’évacuation de 62 réfugiés de l’hôtel vers
l’aéroport. Le convoi est attaqué par des miliciens Interahamwe. 15 L’incident est signalé par l’AFP. 16
Le général Dallaire le relate ainsi :
Durant l’après-midi [2 mai], j’ai reçu une lettre du gouvernement intérimaire signée par
Bizimungu. Il déclarait être d’accord pour les transferts de réfugiés des Mille Collines et ceux
du stade d’Amahoro. L’équipe de la MINUAR, conduite par Henry [Anyidoho] avec l’aide
de Yaache et de deux autres membres de sa cellule d’action, le major Don MacNeil et le
capitaine André Demers (deux nouveaux arrivants canadiens), rencontrait concurremment les
états-majors de la milice et de l’AGR [FAR] pour régler quelques détails concernant le transfert
prévu le jour suivant : nous commencerions par déplacer quelques individus pro-FPR des Mille
Collines jusqu’à l’arrière des lignes du FPR, à l’extérieur de Kigali. Ce premier test permettrait
de constater si les belligérants hutus contrôlaient vraiment la situation. Cet après-midi du 3
mai, il s’est produit une quantité incroyable d’échanges d’artilleries et d’attaques au mortier
et même à la roquette sur tout Kigali. [...]
La première tentative de transfert s’est compliquée juste à la sortie des Mille Collines, et
ce problème a failli coûter la vie à soixante-dix membres de l’intelligentsia tutsi assis dans
nos camions. Pour les protéger, Don MacNeil s’est placé entre les camions et les miliciens
menaçants, manquant de se faire tuer comme tous les Ghanéens qui accompagnaient le convoi.
Au moyen de la radio, j’ai rappelé à MacNeil qu’il pouvait utiliser la force. Il m’a déclaré
préférer négocier avec eux afin qu’ils ne tirent pas. [...] Ils ont dû battre en retraite aux Mille
Collines, devenu de ce fait un lieu beaucoup moins sécuritaire puisque la milice et l’AGR
connaissaient désormais l’identité de quelques personnages importants qui s’y trouvaient. Je
craignais qu’on ne donne l’assaut à cet hôtel pendant la nuit. Au coucher du soleil, il a
été la cible de bombardements mais, à part quelques fenêtres cassées et la destruction de
l’emplacement de la piscine, les dommages avaient été minimes. Toute la nuit, j’ai gardé la
ligne de radio ouverte avec le major Moigny, qui était à l’intérieur du bâtiment en compagnie
d’une demi-douzaine d’observateurs et les Tunisiens. 17
Selon le témoignage du procureur François-Xavier Nsanzuwera, qui faisait partie de cette évacuation, le
chef d’état-major des FAR, le colonel Bizimungu, est venu à l’hôtel dire que le convoi ne pouvait pas partir.
La MINUAR rétorqua que le gouvernement avait déjà donné son accord. Bizimungu accepta le départ
du convoi. Mais celui-ci a été arrêté plus loin par la garde présidentielle rejointe par des Interahamwe.
Nsanzuwera suspecte le capitaine Gaspard Hategekimana, qui était présent avec Apollinaire Hakizimana
à l’hôtel lors du départ, d’être à l’origine de l’attaque de la garde présidentielle. Nsanzuwera est gravement
blessé, ainsi que sept autres personnes. Un Interahamwe qui l’a reconnu a voulu l’abattre, mais a mal
visé et a tué un garde présidentiel. C’est le préfet de Kigali, Tharcisse Renzaho, qui est intervenu et a
12. Le major Paul Rwarakabije était chef des opérations de la gendarmerie rwandaise. Cf. Gendarmerie nationale rwandaise, Ordre de bataille Officiers et Élèves Officiers arrêté au 15 février 1993, p. 1. http://www.francegenocidetutsi.org/
OrganigrameGDR15fev1993.pdf Ayant fui au Congo, il est devenu chef de la branche militaire des FDLR, mais il s’est rallié
au gouvernement de Kigali en novembre 2003.
13. Filip Reyntjens [13, pp. 33-34].
14. Paul Rusesabagina, op. cit., pp. 160-161.
15. Le major canadien Don MacNeil, adjoint du colonel ghanéen Yaache, chef de la cellule humanitaire de la MINUAR, participe à cette évacuation et en témoigne le 23 novembre 2005 au TPIR. Cf. TPIR, Affaire No ICTR-98-41-T,
Procès Bagosora, Transcription de l’audience du 23 novembre 2005, pp. 49-51. http://www.francegenocidetutsi.org/
BagosoraTranscript23novembre2005.pdf#page=48
16. Annie Thomas, Three UN soldiers wounded in Rwanda, AFP, 4 mai 1994.
17. Roméo Dallaire [7, pp. 441-442].

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fait remonter les passagers dans les camions et les a renvoyés à l’hôtel. Dans son témoignage, Nsanzuwera
souligne que c’est la seule fois où la France est intervenue. C’est lui ou Rusesabagina ou d’autres réfugiés
à l’hôtel qui ont envoyé un fax à Paris. La date de cette évacuation avortée, le 25 mai, est une erreur. 18
Philip Gourevitch relate ces heures dramatiques du 3 mai mais ne s’explique pas « clairement pourquoi,
en fin de compte, le convoi fut autorisé à regagner l’hôtel. » 19
Le commandement des FAR se défend dans une note. Il reconnaît que le gouvernement avait donné
le 2 mai son accord formel pour cette évacuation mais que les autorités militaires ont déconseillé cette
évacuation vu que « les autorités préfectorales n’avaient pas eu le temps de sensibiliser les différents
barrages routiers sur la pertinence du problème et que des combats violents se déroulaient dans les quartiers
Kicukiro-Kimihurura où passe la route vers l’aéroport. » 20
Monique Mas, qui publie ce texte, explique que la MINUAR a été discrète sur la liste des personnes à
évacuer car c’était une question de vie ou de mort. Elle souligne que les barrages tenus par les Interahamwe
étaient bien sous le contrôle des autorités civiles et militaires du gouvernement intérimaire. 21
André Guichaoua, qui a fait de vaines démarches durant Amaryllis pour faire évacuer le procureur
Nsanzuwera, relate cette évacuation du 3 mai. Selon lui, c’est l’intervention de Bruno Delaye qui a obtenu
que ce transfert ne se termine pas dans un bain de sang :
La tentative suivante aura lieu le 3 mai pour 62 réfugiés de l’hôtel Mille Collines parmi
lesquels bien entendu F.X. Nsanzuwera et son épouse Immaculée, François Habiyakare (exministre de la Fonction publique), la famille du directeur de l’hôtel... Le convoi, malgré la
double protection de la MINUAR et des FAR-Gendarmerie, sera attaqué par des miliciens
Interahamwe devant la station d’essence ERP vers le quartier industriel au coin de la route à
quatre voies qui passe devant le Kigali Night. Le général Dallaire avait pourtant, semble-t-il,
donné des instructions précises de riposter en cas d’attaque. Tous les passagers sont descendus
et assis au sol sous la menace des miliciens. Aux différents appels que recevra le QG de la
MINUAR la même réponse sera donnée : le convoi est en route vers l’aéroport où un avion
est prêt à décoller pour Nairobi... Les informations transmises par Paul Rusesabagina contredisent l’optimisme affiché. Sollicité, M. Bruno Delaye, responsable de la cellule africaine de
l’Élysée fera joindre par un général et un colonel français de l’état-major, le général Augustin
Bizimungu, commandant des FAR à Kigali. Vers 19 heures, les 62 personnes regagneront l’hôtel, « sauvées in extremis » par l’intervention d’A. Bizimungu qui accompagnera lui-même le
convoi. Sept d’entre elles ont été blessées, dont F. X. Nsanzuwera à la tête. 22
Suite à cet incident, la MINUAR a négocié avec le FPR 23 et les FAR 24 un accord fixant les modalités
de ces évacuations.
André Guichaoua ne dit pas qui a demandé à Bruno Delaye d’intervenir et comment celui-ci a pu
agir en un temps aussi bref. À le relire, il semble sous-entendre que c’est Paul Rusesabagina qui a appelé.
Celui-ci raconte dans son livre que sa femme et ses enfants faisaient partie du convoi et qu’il s’est inquiété,
car dès le départ il a entendu la Radio RTLM qui disait : « Les cafards s’échappent, empêchez tous les
cafards de quitter les Mille Collines » et la liste des noms des personnes évacuées a été lue à la radio dont
ceux de son épouse et de ses enfants. Il comprend qu’il y avait eu une fuite. « Une fois de plus, écrit-il, je
n’avais que le téléphone pour agir. » 25 Ce n’est probablement pas Paul Rusesabagina qui a saisi Bruno
Delaye. Mais il se pourrait que ce soit Guichaoua lui-même.
18. Interview de François-Xavier Nsanzuwera, 28 mai 1994 à Kabuga in Rwanda : Death, Despair and Defiance [1, pp. 722723] http://www.francegenocidetutsi.org/DeathDespairHotelMilleCollines.pdf ; Paul Rusesabagina [14, pp. 154-159].
19. Philip Gourevitch [8, p. 163].
20. Echec MINUAR pour l’évacuation des personnes réfugiées à l’hôtel des Mille Collines, FAR, 3 mai 1994. http:
//www.francegenocidetutsi.org/EchecMinuarEvacuationHotelMilleCollines3mai1994.pdf
21. Monique Mas [12, p. 394].
22. André Guichaoua, Les crises politiques...
[9, pp. 707-708]. http://www.francegenocidetutsi.org/
GuichaouaHotelMilleCollinesEnOtage.pdf ; André Guichaoua De la guerre au génocide, [10, pp. 477-478]
23. Paul Kagame, An agreement concerning the safe passage of displaced persons from UNAMIR protected camps, 5 mai
1994. http://www.francegenocidetutsi.org/doc71315.PDF
24. Augustin Bizimungu, Accord concernant la sécurité en déplacement des personnes déplacées devant être évacuées sous
le contrôle de la MINUAR, 7 mai 1994. http://www.francegenocidetutsi.org/doc48350.pdf
25. Paul Rusesabagina [14, p. 157]. Voir aussi le témoignage du journaliste Thomas Kamilindi, évacué ce jour-là qui
entend RTLM dire son nom et celui de sa fille de 2 ans et appeler les Interahamwe à empêcher cette évacuation car « ils
vont revenir les armes à la main ». Cf. Thomas Kamilindi, Journalism in a Time of Hate Media [3, p. 137].

RÉFÉRENCES

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Qui sont ce « général » et ce « colonel français de l’état-major » qui seraient intervenus à la demande
de Bruno Delaye ? Seraient-ce le général Huchon et le colonel Delort au ministère de la Coopération ? La
réponse est donnée par le rapport Rwabalinda. « Le téléphone sécurisé permettant au Général Bizimungu
et au Général Huchon de converser sans être écouté (cryptophonie) par une tièrce personne a été acheminé
sur Kigali. » 26
Ce moyen de communication est confirmé par ce que dit Jean Kambanda le 3 mai à Kibuye : « La
communication avec l’étranger a été rendue possible grâce à l’assistance de nos amis qui ont permis au
Rwanda d’accéder à la ligne de communication par satellite que l’ennemi ne sera plus en mesure de
détruire ». 27
Un tableau de Pierre Galand signale un versement le 5 mai 1994 de 435.000 FF à Alcatel France. 28
Laurent Sebapira, chef des achats et de la prévision à RWANDATEL déclare :
J’ai également voyagé à plusieurs reprises à Goma où j’ai eu du contact avec un fournisseur
français de ALCATEL concernant l’achat de satellites portables pour les communications
téléphoniques internationales. [...]
Je déclare également qu’en date du 3 mai 1994, je me suis annoncé auprès de l’ambassade
de la France à Bonn où j’ai obtenu un visa pour la France sur l’invitation de ALCATEL pour
un séjour de 15 jours. Le lendemain, j’ai pris l’avion pour la France. J’étais seul. Les autres
sont restés à Bonn.
Du 29 avril jusqu’au 3 mai, j’étais en compagnie de Nkezabera Ephrem et des autres
et chaque jour nous nous sommes rendus à l’ambassade ruandaise à Bonn. Pendant cette
période j’ai appris que la mission de Ephrem et des autres était d’effectuer des opérations
bancaires. Pendant cette période ils ont également effectué le paiement des satellites portables
de ALCATEL. C’est après le paiement que sur base de l’invitation de ALCATEL que j’ai
obtenu mon visa pour la France. 29
Les faits concernant le transfert avorté de 62 réfugiés de l’hôtel Mille Collines vers l’aéroport le 3
mai 1994 paraissent établis. L’intervention de la France est attestée par le procureur Nsanzuwera. Il sera
évacué le 27 mai. Son témoignage est recueilli à chaud le 28 mai à Kabuga à l’est de l’aéroport en zone
FPR. Il reconnaît qu’il n’est pas sûr des dates car, pour sa sécurité, il n’a pris aucune note sur papier. Il
dit que c’est le préfet de Kigali, Tharcisse Renzaho, et non Augustin Bizimungu qui a ordonné leur retour
à l’hôtel. C’est André Guichaoua qui atteste l’intervention de Bruno Delaye. Guichaoua était à Kigali
au début du génocide et il a tenté d’obtenir de l’ambassadeur Marlaud l’évacuation de Nsanzuwera. En
vain. Il reçoit un fax de Nsanzuwera le 30 avril qui lui dit : « Continuez à intervenir pour nous ». Il est
possible que ce soit Guichaoua qui ait téléphoné au QG de la MINUAR le 3 mai et ai appris par le gérant
de l’hôtel, Paul Rusesabagina, que la situation du convoi de réfugiés était critique. Il est possible qu’il ait
demandé soit directement, soit par un intermédiaire, l’intervention en urgence de Bruno Delaye. Celui-ci
ne serait pas intervenu directement mais par l’intermédiaire d’un général qui, à la lecture du rapport
Rwabalinda, ne peut être que le général Jean-Paul Huchon.

Références
[1] African Rights : Rwanda : Death, Despair and Defiance. African Rights, P.O. Box 18368, London
EC4A 4JE, 1995. 1re édition, septembre 1994.
[2] Agir Ici et Survie : L’Afrique à Biarritz - Mise en examen de la politique française. Karthala,
janvier 1995. Contre-sommet de Biarritz, 9 novembre 1994.
26. Lettre du lieutenant-colonel Ephrem Rwabalinda au ministre de la Défense, au chef d’état-major de l’armée rwandaise,
Gitarama, le 16 mai 1994. Objet : Rapport de visite fait auprès de la Maison militaire de Coopération à Paris. Cette lettre
a été ramenée de Kigali durant l’été 1994 par la journaliste belge Colette Braeckman. Cf. L’Afrique à Biarritz [2, p. 129].
http://www.francegenocidetutsi.org/RapportRwabalinda16mai1994.pdf
27. Clément Kayishema, Lettre datée du 8/6/1994 à son Excellence Monsieur le Premier ministre. Objet : Transmission
du procès-verbal de la réunion du 3 mai 1994, 8 juin 1994. http://www.francegenocidetutsi.org/doc84194.PDF
28. L’horreur qui nous prend au visage [5, p. 524].
29. Jim Antoni De Groot, Exécution d’une demande d’entraide judiciaire, Audition de Laurent Sebapira en présence de
Pascal Remy, Rotterdam, 20 décembre 2004.
http://www.francegenocidetutsi.org/RemyAuditionSebapira20decembre2004.pdf

RÉFÉRENCES

6

[3] Allan Thompson : The Media and the Rwanda genocide. Pluto Press, 13 March 2004. London,
2007.
[4] Commission Nationale Indépendante chargée de rassembler les preuves montrant
l’implication de l’État Francais dans le génocide perpétré au Rwanda en 1994 : Rapport. République du Rwanda, 15 novembre 2007.
[5] Laure Coret et François-Xavier Verschave : L’horreur qui nous prend au visage - L’État français
et le génocide au Rwanda. Karthala, janvier 2005. Rapport de la Commission d’enquête citoyenne,
22-26 mars 2004.
[6] Thierry Cruvellier et al. : Augustin Cyiza, un homme libre au Rwanda. Karthala, 2004.
[7] Roméo Dallaire : J’ai serré la main du diable - La faillite de l’humanité au Rwanda. Libre
expression, 2003. Traduction de : Shake Hands with the Devil.
[8] Philip Gourevitch : Nous avons le plaisir de vous informer que, demain, nous serons tués avec
nos familles. Denoël, 1999. Mai 1995-avril 1998, Farrar, Straus and Giroux, New York, 1998.
[9] André Guichaoua : Les crises politiques au Burundi et au Rwanda (1993-1994). Université des
Sciences et Techniques de Lille - Karthala, 2e édition, 1995.
[10] André Guichaoua : De la guerre au génocide. Les politiques criminelles au Rwanda (1990-1994).
La Découverte, 2010.
[11] Sylvie Klinkemallie : Rwanda. La presse en question. Golias, 2007.
[12] Monique Mas : Paris-Kigali 1990-1994 ; Lunettes coloniales, politique du sabre et onction humanitaire pour un génocide en Afrique. L’Harmattan, 1999.
[13] Filip Reyntjens : Rwanda, trois jours qui ont fait basculer l’histoire. Cahiers africains - L’Harmattan, Vol. 16, 1995. Dépôt légal : février 1996.
[14] Paul Rusesabagina : Un homme ordinaire. Buchet-Chastel, 2006.

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