Fiche du document numéro 16906

Num
16906
Date
Dimanche 10 juillet 1994
Amj
Taille
140418
Titre
Conférence de presse du Président de la République, M. François Mitterrand, à l'issue du sommet de Naples du G7
Source
Type
Conférence de presse
Langue
FR
Citation
(Naples, 10 juillet 1994)

Mesdames et messieurs,

Sommet de Naples du G7 - participation de la Russie



Comme vous le savez, nous avons eu hier une réunion à sept, sans oublier le
représentant de la Communauté européenne. Aujourd'hui, nous étions huit, en raison de la
présence du Président russe et les conversations ont été essentiellement politiques. Vous avez
pu prendre connaissance des différents sujets traités et la déclaration de M. Berlusconi,
président du Sommet, a déjà dû vous parvenir. Donc, ce tour d'horizon politique a été
consacré à bon nombre de grands problèmes du moment. J'attirerai votre attention sur la
manière dont ont été traités les problèmes de la Bosnie et du Rwanda, et également sur ce que
j'avais annoncé comme objectifs cibles : l'Afrique du Sud, ou les questions touchant à la sûreté
nucléaire et, particulièrement, avec la disparition du Président Kim Il-Sung, l'état éventuel des
négociations avec la Corée du Nord.

La Russie a pleinement participé à la discussion. Son avis était utile en tous domaines
mais particulièrement sur ce qui touchait à l'ancienne Yougoslavie. Nous avons tous été
d'accord pour estimer qu'il ne devait plus y avoir de dérobade. Les parties prenantes au conflit
sont saisies d'une proposition de règlement. Nous pensons tous qu'elles doivent y donner
réponse dans les délais impartis.

Yemen - Algérie



Il a été question du Yémen, dans le cadre de l'unité de ce pays ; de l'Algérie : accueil
positif pour les réformes économiques en cours et appel à la poursuite du dialogue avec les
forces démocratiques - mais la poursuite du dialogue est un terme qui aurait évidemment
besoin d'être précisé.

Rwanda



Sur le Rwanda, vous savez que la France fait face à ce problème, avec bien peu de
concours, à l'exception des Sénégalais, par la création des zones humanitaires de sécurité. Et
il y a ce problème prévu, évidemment, mais qui se pose d'une manière plus pressante chaque
jour, celui des personnes déplacées devant l'évolution du front dans la guerre civile qui se
déroule là-bas. Il s'agit de 850.000 à plus d'un million de personnes qu'il faudra savoir et
pouvoir aider pour éviter un nouveau drame de grande ampleur. C'est une situation de
détresse et nous souhaitons vraiment que des organisations internationales, des organisations
humanitaires se mobilisent. La France continue sa mission, en conformité avec le mandat qui
lui a été fixé par les Nations unies. Elle attend la relève. Elle a d'ailleurs annoncé ce qu'elle
entendait faire et il nous semble, à l 'issue de cette réunion et au vu des informations reçues,
qu'il y aurait peut-être un peu plus de sentiment d'urgence qu'il n'y en avait ces derniers jours.

J'ai observé, tout de même, avec intérêt, et même avec une certaine satisfaction, que ce
que l'on appellera le G8, a tenu à marquer une reconnaissance particulière des efforts
accomplis par la France, qualifiés de méritoires.

Voilà, je vais m'arrêter là. Vous avez la déclaration présidentielle. Elle comporte douze
points. Selon le degré d'intérêt que vous portez à tel ou tel de ces points, je suis à votre
disposition.

Yemen



Q - Monsieur le Président, Je vais vous reposer la même question que je vous ai posée,
sur le Yémen, à Corfou. En quels termes, avez-vous évoqué la question du Yémen et quelles
sont les exigences auxquelles le gouvernement de Sanaa devrait se plier ?

R - Nous attendons de Sanaa, qui semble avoir remporté un succès militaire, de ne pas
en tirer avantage au-delà de ce qui est convenu d'appeler un comportement humanitaire et
unitaire, puisque sa position était de défendre - et on le conçoit - l'unité de son pays. Il ne faut
pas que cette unité soit altérée par des comportements qui pourraient lui nuire. Donc, nous
encourageons le gouvernement du Yémen à rechercher toutes les possibilités d'entente et de
dialogue avec les populations qui, hier, se combattaient.

Evolution des sommets du G7



Q - Monsieur le Président, Naples était votre quatorzième Sommet des Sept, sauf erreur.
En quatorze ans, est-ce que vous avez trouvé une évolution à ces Sommets ? Est-ce que votre
jugement sur eux a été modifié en quoi que ce soit ?

R - Une évolution certainement, malgré les changements de gouvernements ou de
présidents qui se produisent rituellement dans les pays démocratiques.

Une certaine continuité de climat s'est instaurée et les relations humaines sont beaucoup
plus faciles. On sent véritablement que chacun cherche la conciliation lorsque les points de
vues divergent. Je trouve que c'est très convivial. La tendance à la prolifération du nombre
des collaborateurs, des fonctionnaires, a quand même été freinée ; elle paraît encore excessive.
Je crois savoir que M. Chrétien, qui recevra les Sept et les Huit à Halifax l'an prochain, au
Canada, a l'intention d'imprimer comme cela s'est fait d'ailleurs de temps à autre, depuis 14
ans, une nouvelle façon de faire, disons un peu plus simplifiée.

J'aurai peut-être l'occasion de vous confier quand viendra le temps, lorsqu'on sera moins
nombreux, ce que je pense de cette évolution en quatorze ans. De toute manière, l'évolution
humaine part du commencement - pardonnez-moi de parler comme le faisait Joseph
Prudhomme - et va toujours vers sa fin : donc, c'est sans mélancolie particulière que je
participe aujourd'hui à mon dernier Sommet, comme vous l'avez dit d'ailleurs, et je vous
remercie de votre comptabilité si précise.

Italie - présidence italienne du G7



Q - Monsieur le Président c'est la deuxième fois, je crois, que vous avez l'occasion de
rencontrer M. Berlusconi, à Corfou et ici, à Naples ; alors est-ce que vous avez un jugement
maintenant sur le gouvernement italien que vous aviez accueilli, disons, fraîchement ?

R - Je n'ai pas d'opinion à exprimer sur le gouvernement italien. Tout au plus je
pourrais exprimer une opinion sur la présidence italienne du Sommet. C'est le deuxième
Sommet auquel je participe qui se soit déroulé en Italie : le premier était à Venise, le
deuxième est donc à Naples. Les Italiens sont des gens très experts en matière politique, qui
ont l'habitude de traiter collectivement des grandes affaires. La présidence a bien fait son
travail, c'est tout ce que je peux en dire. Quand aux capacités de M. Berlusconi comme
Président du Conseil des ministres italien, c'est un autre sujet, sur lequel je n'ai pas à
m'exprimer d'ailleurs. Que cela ne soit pas considéré comme une réserve supplémentaire :
simplement, ce n'est pas le sujet. On a été très bien reçus, je dois le dire, par le Président
Scalfaro également.

Rwanda - soutien du G7 à l'action de la France



Q - En quels termes avez-vous souhaité qu'un hommage soit en quelque sorte rendu
dans le communiqué final à l'action de la France au Rwanda ?

R - Le texte qui nous a été soumis, celui de la présidence, n'était pas du tout négatif,
mais il était atone, et j'ai souhaité qu'on puisse constater quand même que la France avait
rempli un rôle positif dans le déroulement de cette affaire. Je dois dire que cela n'a pas fait la
moindre difficulté et qu'au fond c'était une question de rédaction. Naturellement, nous
Français, nous étions plus sensibles que d'autres à cette rédaction. En terme de pure analyse
des termes, il n'y avait rien à redire au texte précédent qui était passé, d'ailleurs, par les
ministres des Affaires étrangères. Un petit quelque chose de plus, cela nous a fait plaisir parce
que cela a marqué une solidarité sur l'opportunité de notre intervention.

Relais avec la MINUAR II - solution politique - aide humanitaire



Q - Monsieur le Président, le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères se
rendent demain à New York pour rencontrer le Secrétaire général des Nations unies et les
membres du Conseil de sécurité. Qu'est-ce que la France attend de ce contact avec les
Nations unies ? Est-ce que la France attend que la Minuar 2 se déploie très vite au Rwanda ?
Qu'est-ce que la France va dire aux Nations unies ?

R - La France a indiscutablement besoin de fournir des explications. Cette affaire du
Rwanda a été présentée dans une première phase d'une telle manière que la France s'est
trouvée en situation je ne dis pas d'accusée, mais l'expression la plus habituelle, c'était : la
France n'était pas la mieux placée pour
, etc. Cela reposait sur une analyse que je crois
infondée de la position de la France qui était à l'origne des accords d'Arusha. Ces accords
avaient prévu, d'ailleurs, la désignation d'un Premier ministre ; cela, c'était au mois d'août
1993, et c'est ce Premier ministre qui vient de prendre ses fonctions maintenant, dans un
rapport de force inversé à l'issue des combats naturellement.

Donc, la France a besoin de continuer à bien expliquer le processus historique qui l'a
conduite à intervenir, jusqu'à envoyer 2 500 hommes et à instaurer des zones humanitaires de
sécurité, avec le soutien des Nations unies. Elle doit rappeler qu'elle n'est venue que pour des
raisons humanitaires et donc circonstancielles, qu'elle souhaite retirer ses troupes comme elle
l'avait d'ailleurs elle-même sollicité des Nations unies, l'an passé.

Car les accords d'Arusha conclus, je le répète, en août 1993, comportaient - et c'est ce
qui s'est produit - l'arrivée d'une force de Casques bleus se substituant aux forces françaises
qui ne désiraient aucunement rester sur place. Puis par la suite, l'assassinat du Président
Habyarimana et du Président du Burundi, qui se trouvait avec lui, la période de grands
désordres, de grandes peurs, de grands massacres - jusqu'au génocide - a fait que les Français
se sont remis à la disposition de tous pour rapatrier les étrangers civils et militaires, désireux
de quitter ce pays. Ce n'est qu'un peu plus tard que nous avons, devant une situation d'horreur,
décidé d'envoyer la troupe d'élite, qui se trouve là-bas sur le terrain.

Afrique du Sud - Territoires palestiniens



Q - Monsieur le Président, vous avez rencontré successivement M. Mandela et
M. Arafat qui tous les deux vous ont parlé du G7 en vous disant : il serait bien que le G7
s'occupe un peu de nos problèmes
. Maintenant que les travaux sont terminés, est-ce que
vous pensez qu'ils sont satisfaits de la manière dont le G7 a traité leurs problèmes ?

R - Ce qu'ils en penseront ? D'abord ils penseront qu'on ne les a pas oubliés puisque l'un
des paragraphes est spécialement consacré à l'Afrique du Sud et qu'il est rappelé que l'aide aux
Palestiniens doit être mise en oeuvre sans délai. En tout cas, une réponse déjà satisfaisante
leur a été apportée. Je crois qu'ils attendent plus que les propos que nous tenons ici : ils
attendent qu'effectivement, les moyens économiques et financiers dont ils ont besoin leur
soient remis. Pour les Palestiniens, c'est une question de semaines : je crois que les accords
évoquent le mois d'août. Pour l'Afrique du Sud, c'est nouveau d'une certaine manière : mais la
situation dramatique de ce pays ne permet pas d'attendre longtemps. Je pense que cette
réunion de Naples aura permis d'avancer et de raccourcir les délais d'une façon utile.

Participation de la Russie - évolution vers un G8



Q - Monsieur le Président, c'est le troisième Sommet auquel assiste, M. Boris Eltsine,
c'est vrai avec un statut un peu modifié. Quelle est la contribution de la Russie aux
discussions des Occidentaux ? Et deuxième question : quand pensez-vous que la Russie
pourra véritablement faire partie du G7 et donc que le G7 devienne le G8 ?

R - Moi, je commence à avoir pris l'habitude de rencontrer M. Eltsine à la fin des
Sommets des 7, ou à la fin, ou au début, des réunions européennes. Mais ce qui est vrai, c'est
que jusqu'alors, nous discutions avec M. Eltsine des problèmes de la Russie ; cette fois-ci
M. Eltsine a pris part aux discussions politiques sur toutes les questions figurant dans la
déclaration présidentielle qui vous a été remise. Il y a donc un changement de nature. Il est
tout à fait probable que désormais on ne parlera plus, sur les questions politiques, que des
sommets des huit. Mais, je ne peux pas vous le garantir, je pense qu'il s'écoulera encore un
peu de temps avant que l'on puisse parler de sommets des huit sur le plan économique.

Algérie



Q - Monsieur le Président, est-ce que l'aide occidentale à l'Algérie n'est pas finalement
trop tardive, est-ce que dans les rangs occidentaux l'on ne se fait pas à l'idée de voir très vite
venir au pouvoir les islamistes ?

R - C'est l'histoire qui le dira. La France, elle, n'a pas cessé, sans se considérer comme
engagée dans ce conflit, de souhaiter la fin de la violence. Elle n'a jamais cessé ensuite
d'apporter l'aide qu'elle considérait devoir à l'Algérie, quels que soient ceux qui la gouvernent,
pour que la situation économique de ce pays, si proche de nous pour bien des raisons,
enregistre une amélioration telle que s'apaisent aussi certaines passions politiques. Car les
deux questions ne peuvent pas être séparées l'une de l'autre : il est certain que la violence se
nourrit aussi de la misère, du mécontentement. Non, je crois que l'aide apportée, par la France
en particulier, mais également par d'autres que par nous, peut contribuer, il n'est pas trop tard
pour cela, pour réduire ce brasier, ce foyer de tensions.

France - Etats-Unis - commerce international - GATT



Q - Monsieur le Président, la presse américaine a ce matin parlé du retrait de
l'initiative Clinton sur le commerce international en termes de défaite pour le Président
américain, et peut-être de défaite face à la France. Est-ce que vous pensez que c'est une
analyse juste de la situation ? Est-ce que vos objections à l'initiative Clinton portaient
uniquement sur le calendrier ou aussi sur le contenu de sa proposition ?

R - Je n'ai pas remarqué que j'avais participé à un combat ! J'en ai entendu parler... C'est
vrai qu'il y avait un souhait d'accélérer une négociation plus approfondie sur certains secteurs
du commerce international. Ce voeu s'est tout de suite heurté à la position de la France, qui
consistait à dire : on n'en a pas fini avec la phase dont nous avons déjà pendant longtemps
parlé - quelques huit à neuf ans. Ce n'est pas encore ratifié. Ne compliquons pas les choses !
Laissons souffler quand même les Parlements, les opinions publiques et prenons le temps de
réfléchir ! Nos amis américains avaient certainement déjà beaucoup réfléchi à la chose. Mais
enfin, c'est une réflexion collective. Cela ne s'est pas du tout présenté comme un duel. Cette
position que j'ai exprimée au nom de la France, elle a été tout de suite partagée par d'autres, en
particulier par l'Allemagne, et par d'autres encore. Elle n'a pas été combattue par M. Clinton.
Nous sortons de ce sommet, M. Clinton et moi-même, indemnes de toute égratignure. Mais
quant au GATT, il y aura bien, l'année prochaine, après ratification, à voir par quoi il faudra
commencer.

Moi, personnellement, je conseille de commencer par ce qui avait été décidé dans la
phase précédente et qui n'a pas encore été abordé. Il y a, au moins, trois grands secteurs qui
doivent être l'objet de négociations. Je pense, en particulier, à celui de l'acier. C'est une
question à voir. Nous sommes au mois de juillet 94 ; on n'en parlera plus - je veux dire entre
responsables politiques - avant l'année prochaine. Je ne peux porter mon diagnostic au-delà.

Algérie - positions française et américaine



Q - Monsieur le Président, entre la France et les Etats-Unis, est-ce qu'il y a une
différence d'appréciation sur le danger de la situation en Algérie. Et la deuxième chose,
quelles sont ces forces démocratiques, avec lesquelles on appelle le dialogue en Algérie ?

R - Je me suis posé la question moi-même... Vous voulez dire par là qu'il est difficile
d'engager un dialogue, une négociation avec des gens dont la tactique est de tuer, de tuer des
étrangers ? En quoi fait-on avancer l'affaire algérienne, en assassinant sept marins italiens, par
exemple ? Et je ne compte pas les victimes françaises. La France ne procède pas à des
condamnations de fond sur les positions idéologiques - même si elle a son sentiment - mais
elle estime qu'on ne peut discuter de l'installation et de la mise en place d'une démocratie
qu'avec des forces qui la désirent. C'est, en tout cas, le sentiment qui s'est dégagé autour de la
table des Huit, ce matin.

Ce n'est pas un texte français ; la proposition italienne a été faite sur la base des
conversations menées avec l'ensemble des pays participants et sans doute aussi des
négociations qu'ont dû avoir les ministres des Affaires étrangères avant nous. Or, que peut-
être l'appel aux forces démocratiques ? C'est, peut-être un rite, une nécessité de principe. Je
crois qu'il appartient aux différentes tendances de l'opinion algérienne de se définir par rapport
en cela. Ce n'est pas à nous de dire : ceux-là sont démocratiques et ceux-là ne le sont pas,
même si certains agissent de telle sorte qu'on puisse douter de leur sincérité dans ce domaine.
Mais, c'est à eux à se définir. Est-ce qu'ils acceptent le dialogue autour de la constitution, de
la construction d'une Algérie démocratique, qui devra se terminer, en tout cas, par des
élections, et des élections libres ? Moi, c'est tout ce que je peux vous dire là-dessus.

Union européenne - Présidence de la Commission



Q - Monsieur le Président, le gouvernement danois a suggéré un Danois comme
Président de la Commission européenne. On parlait de M. Schlueter. Qu'est-ce que vous
pensez de lui ?

R - Moi, j'apprécie beaucoup les Danois, mais cela dit les Danois n'étaient pas à l'ordre
du jour... pas plus que le choix d'un Président de la Commission européenne ! Donc, c'est tout
à fait hors sujet. Peut-être qu'il y a des gens qui en ont parlé, ils ne m'en ont pas fait la
confidence ! Donc, considérez que ce problème se posera en termes très concrets à partir des
jours qui viennent et devra trouver une solution le 15 juillet prochain.

Pour ce qui concerne la France, nous n'avons pas d'a priori. Nous n'avions même pas d'a
priori négatifs.

Evolutions du G7



Q -- Monsieur le Président, que pensez-vous de l'idée d'institutionnaliser et de rendre
permanente la consultation entre les Huit, idée avancée par le Président Eltsine et qui a
l'appui assez décidé des Italiens ?

R - Le G7 est une organisation un peu à part, ce n'est pas une institution. Elle a
quelquefois un peu tendance à se transformer en institution mais nous sommes, quelques-uns
pour rappeler que tel ne doit pas être le cas. Ce n'est pas une institution, c'est une rencontre
d'hommes, de femmes -quand Madame Thatcher voulait bien y participer- de bonne volonté.
Il y a des gens responsables, naturellement.

Mais votre expression n'est pas fausse non plus, si on donne au mot institutionnaliser
le sens, disons, d'une tradition à établir, - tradition qui prenait forme timidement à Tokyo, à
Munich, ou à Bruxelles, et qui a tendance maintenant à s'établir d'une façon permanente avec
M. Eltsine. Je serais très étonné que l'on put revenir en arrière. Prenons donc le mot
institutionnaliser dans le sens d'instauration d'une tradition, c'est-à-dire institutionnaliser une
présence au sein d'un organisme qui n'est pas une institution, si vous voulez que je raffine un
peu les termes.

Oui, on reverra le Président russe dans les prochaines rencontres sur le plan politique, le
reste viendra, sans doute, ensuite.

Japon- commerce international



Q - Monsieur le Président, pendant le Sommet, vous avez rencontré le nouveau Premier
ministre japonais, M. Murayana. Comment jugez-vous sa capacité, sa volonté de continuer à
réformer, à faire les ouvertures du marché japonais qui sont exigées par les autres pays du
G7 ?

R - C'est un homme extrêmement sympathique et très ouvert qui, pour moi d'ailleurs, a
des mérites tout à fait particuliers, qui ne sont pas habituels à la direction de ce pays ! C'est
quelque chose de frais pour moi ...

Mais quant à l'ouverture du Japon, ça fait quatorze ans que j'entends exprimer les
meilleures intentions du monde à ce sujet. Je n'ai aucune raison de douter de la sincérité de
ces déclarations. Mais, je trouve qu'on se répète un peu. Bon, cela dit, il y a des progrès. Je
crois que nos yoghourts se vendent de mieux en mieux. M. Juppé ajoute que pour les
pommes, en revanche, cela pourrait aller mieux !

Avenir de la Bosnie - action de la Russie - négociations de Genève



Q - Monsieur le Président, vous avez fait mention de la contribution de M. Eltsine, en
particulier dans la conversation concernant l'ex-Yougoslavie. Pourriez-vous nous dire, un
peu plus en détails, quelle a été sa contribution dans ce domaine et, le cas échéant, M. Eltsine
vous a-t-il donné des indications sur ce que serait son attitude si la partie serbe devait rejeter
le plan du groupe de contact ?

R - Ce qui est écrit dans le texte final engage tous les participants. C'est-à-dire que les
différentes parties sont liées par ce texte. Nous insistons, tous ensemble, pour que les parties
en présence respectent les délais qui leur ont été fixés, en sachant que le refus ou l'acceptation
par tel ou tel, entraîne des conséquences soit favorables par le desserrement, la réduction, ou
même la liquidation des sanctions, soit défavorables pour la partie qui se rendrait responsable
de la continuation du conflit, et qui se verrait exposée à un durcissement de la part de la
société internationale. Là-dessus, M. Eltsine n'a montré aucune différence d'appréciation par
rapport aux autres participants. Donc, je crois qu'il y a là un tout. Notre engagement est
mutuel et solidaire, comme on ne peut séparer un article d'un contrat des autres.

M. le ministre des Affaires étrangères va se rendre aux Nations unies lundi avec M. le
Premier ministre pour présenter la position de la France au Rwanda et faire sentir aux Nations
unies l'urgence qu'il y a d'une relève. Ce sera, sans doute, difficile de ne pas aborder
également le problème de la Bosnie.

Ensuite, M. le ministre des Affaires étrangères se rendra à Belgrade et à Pale pour faire
bien comprendre aux autorités serbes l'importance de l'enjeu.

Q - Monsieur le Président, est-ce que le plan de Genève pour la Bosnie et l'Herzégovine
signifie la fin de la Bosnie-Herzégovine ? Qu'est-ce que cela signifie pour les frontières
extérieures de Bosnie-Herzégovine ?

R - Ce que moi j'ai toujours compris et ce qui a été confirmé, c'est que la Bosnie est
restée un Etat souverain. L'Allemagne est un pays de type fédéral. Personne ne met en doute
l'existence de l'Allemagne. Il y a des pays moins décentralisés. C'est encore le cas de la
France qui n'a pas les mêmes nécessités historiques. D'ailleurs, la question ne se pose pas.
Maintenant, pour ceux qui aiment discuter droit : les Etats-Unis d'Amérique ont une
Constitution extrêmement fédéraliste. Vous connaissez les limites du pouvoir du Sénat, de la
Chambre des Représentants et du Président lorsqu'il s'agit de dicter telle ou telle disposition
dans l'un des Etats. Pourtant, nul ne songe à douter de l'existence des Etats-Unis d'Amérique.

Au temps de la Yougoslavie, la Bosnie disposait déjà d'un statut particulier puisque les
décisions les plus importantes ne pouvaient être prises qu'avec le consentement des trois
communautés.

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