Fiche du document numéro 1566

Num
1566
Date
Mercredi 29 juin 1994
Amj
Taille
134081
Sur titre
Rwanda
Titre
La controverse suscitée par les déclarations de l'ex-capitaine Barril
Sous titre
Le doute subsiste sur la présence d'une « boîte noire » dans l'avion abattu du président rwandais
Nom cité
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Y avait-il oui ou non une « boîte noire » à bord du Falcon 50 du
président rwandais Juvénal Habyarimana, abattu le 6 avril au-dessus de
Kigali par deux missiles d'origine inconnue ? Les informations relatives
à cet attentat, publiées dans le Monde du 28 juin, indiquaient que
l'ancien capitaine Paul Barril était en possession de la fameuse « boîte
noire
 » ainsi que de la totalité des enregistrements de la tour de
contrôle de Kigali. L'ex-capitaine Barril affirme avoir été mandaté par
la famille du président Habyarimana pour découvrir « les coupables et
les commanditaires
 » de l'attentat.

Ces informations n'avaient suscité mardi 28 juin en fin de matinée aucun
démenti officiel. Seuls les services d'entretien de Dassault Falcon
Service, qui assuraient la maintenance de l'avion présidentiel offert
par la France au Rwanda en 1990, ont indiqué qu'ils n'avaient « jamais
vu d'enregistreur de conversation (Cockpit Voice Recorder, ou CVR) à
bord, lors des révisions annuelles de cet appareil
 ».

Les représentants de la société ont toutefois précisé que « le client
pouvait monter facilement ce type de boîte noire, l'avion disposant d'un
prééquipement pour CVR
 », tout en indiquant que la description de
l'objet détenu par Paul Barril et détaillée dans le Monde ne
correspondait pas aux modèles connus. La société Litton, mentionnée par
le Monde, nous a indiqué que « les dimensions de l'objet présenté par M.
Barril ne [lui] semblent pas correspondre à celles d'un appareil
commercialisé par [sa] firme
 ». Invité du « Club de la presse » d'Europe
1, lundi 27 juin, le ministre des affaires étrangères, Alain Juppé, a
déclaré qu'il ignorait où se trouvait la « boîte noire » de l'avion
rwandais, mais qu'il demanderait, s'il se confirmait qu'elle était entre
les mains de l'ancien gendarme de l'Elysée, « que cette fameuse boîte
noire et tout autre élément qui permettrait de faire la lumière sur les
circonstances de l'attentat soient immédiatement et impérativement
communiqués au secrétaire général des Nations unies, qui a reçu mission
d'enquêter officiellement, au nom de la communauté internationale, sur
cet attentat
 ». Cette enquête ne semble avoir connu jusqu'ici aucun
développement. Pour sa part, la France n'a pas entrepris
d'investigations, en dépit des décès de six de ses ressortissants : les
trois membres de l'équipage du Falcon 50 ainsi que deux gendarmes en
poste à Kigali et l'épouse de l'un d'entre eux, tués dans leur maison
moins d'une heure après l'attentat.

Interrogé hier sur La Chaîne info (LCI), l'amiral Jacques Lanxade, chef
d'état-major des armées, s'est déclaré « favorable » à l'ouverture d'une
enquête sur l'ensemble de ces faits. La veuve du président rwandais,
pour sa part, est décidée à déposer « dans les prochaines semaines » une
plainte pour assassinat devant la Cour internationale de justice de La
Haye, sur la base notamment des éléments d'enquête découverts à Kigali
par l'ex-capitaine Barril.

Dans une note adressée le 15 avril à l'ensemble de ses missions
diplomatiques dans le monde, le ministère rwandais des affaires
étrangères évoquait l'arrestation, sur les lieux du crash de l'avion, de
« trois supects » belges au moment où ceux-ci auraient tenté de « récupérer par la force la boîte noire sur l'épave de l'avion ».

Certaines sources militaires indiquent par ailleurs que des « soldats
français
 » auraient récupéré ladite « boîte noire ». Il reste dès lors à
savoir comment cet enregistreur de vol, qui n'existe pas pour les uns et
pourrait exister pour les autres, aurait finalement atterri entre les
mains de Paul Barril.

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