Fiche du document numéro 15154

Num
15154
Date
Jeudi 24 janvier 2008
Amj
Taille
133982
Titre
Exclusif : Kouchner se rend à Kigali samedi
Sous titre
Objectif du chef de la diplomatie française : officialiser la normalisation des relations entre la France et la dictature rwandaise. Sans aucun débat.
Nom cité
Source
Type
Langue
FR
Citation
On se souvient que le Rwanda avait rompu, à la fin de l'automne 2006, ses relations diplomatiques avec la France lors de la publication du rapport du juge Bruguière lequel avait conclu à la responsabilité de l'actuel chef de l'Etat rwandais dans l'attentat perpétré contre son prédécesseur Juvénal Habyarimana en avril 1994. L'attentat avait joué un rôle primordial dans le déclenchement de la guerre civile génocidaire dans le pays. Son enquête a abouti à la délivrance de neuf mandats d'arrêt internationaux contre des proches du président Kagame, mandats qui n'ont pas pu être mis à exécution.

En riposte à Bruguière, les autorités rwandaises ont initié une vaste enquête tendant à démontrer la responsabilité de l'armée française dans la tentative génocidaire contre les Tutsis, par son soutien aux milices hutus. La justice du Rwanda, dictature avérée, a publié en 2006 une liste de 93 ressortissants partis du Rwanda qu'elle suspecte de génocide, liste transmise à Interpol et au Tribunal pénal international sur le Rwanda (TPIR). Sur cette liste, neuf personnes vivent en France.

« On discute avec tout le monde »



La question rwandaise divise profondément la diplomatie française. La hiérarchie militaire, et un certain nombre d'hommes politiques en activité au moment du génocide Alain Juppé, Édouard Balladur, Hubert Védrine sont convaincus de la pertinence du rapport Bruguière. Ils demeurent méfiants à l'égard d'un régime suspecté d'utiliser à des fins politiques et financières la conscience anti-colonialiste et anti-génocidaire (Kagame exige de la France, et de la France seule, qu'elle fasse repentance).

Mais le chef actuel de la diplomatie française est favorable à une réconciliation avec la dictature rwandaise. Il a récemment trouvé dans la logique sarkozyste « anti-tabou » « On discute avec tout le monde » matière à confirmer sa campagne insistante pour normaliser les relations entre la France et le Rwanda.

Avant même le voyage de Bernard Kouchner à Kigali, un geste « de bonne volonté » envers le régime de Kagame a été fait avec l'arrestation de trois Rwandais suspectés de génocide et présents sur le sol français. L'arrestation, le 10 janvier dernier, de Marcel Bivugabagabo, l'une des neuf personnes vivant en France qui figurent sur la liste noire établie par la justice rwandaise, semblait confirmer ce tournant implicite, en tout cas jamais exposé, de la diplomatie française. Cet ancien militaire se défend de toute participation au génocide. Le Rwanda exige à présent son extradition, ce qui ne laisse pas d'inquiéter tous ceux qui doutent de l'impartialité d'une justice rwandaise aux ordres.

Le voyage de Bernard Kouchner n'est pas officialisé par le Quai d'Orsay, qui confirme pourtant un voyage dans plusieurs contrées africaines du ministre des Affaires étrangères.

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