Fiche du document numéro 13672

Num
13672
Date
Samedi 28 mai 1994
Amj
Taille
83555
Titre
La panique de tout un peuple
Cote
no 15485
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
ALORS que tous les témoignages confirmaient encore hier la lourde responsabilité des autorités françaises qui ont soutenu le régime Habyarimana et formé, durant les trois dernières années, les tueurs de la dictature rwandaise, le ministre de la Coopération français, Michel Roussin, a prétendu hier que « la France n'avait pas armé les auteurs des massacres » et que « son seul souci était de rechercher la voie du dialogue ». Et, a-t-il affirmé, « nous avions des relations convenables avec un président légitimement élu et nous avons récupéré sa famille qui a demandé notre aide dans le cadre de la tradition de la République française ». Habyarimana est arrivé au pouvoir en 1973 à la faveur d'un coup d'Etat qu'il avait organisé. Comme son compère et voisin zaïrois, l'autre « grand ami de la France », Mobutu, le général-président s'est maintenu au pouvoir selon la méthode habituelle du parti unique.

Le génocide qui continue d'être perpétré au Rwanda par les miliciens et les restes de l'armée du dictateur défunt tué dans l'explosion de son avion, le 6 avril dernier, a plongé la population dans une immense panique. Dans les zones qui ne sont pas encore contrôlées par les forces du Front patriotique rwandais (FPR), dans l'ouest et le sud du pays, des dizaines de milliers de personnes appartenant -- selon leur carte d'identité -r- à la communauté tutsie sont prises en otages, regroupées dans des camps. La nuit venue, les tueurs « sélectionnent » des victimes pour les assassiner.

Dans le même temps, ceux qui appartiennent à la communauté hutue, pris dans l'horreur des massacres dont ont été victimes les opposants au régime et les Tutsis, fuient devant l'avancée des forces du FPR. Le Rwanda n'est aujourd'hui qu'un entrecroisement de routes de l'exode.

A Kigali, des centaines de Tutsis qui ont survécu, jusqu'à présent, aux massacres cherchent protection auprès des casques bleus et des organisations humanitaires, redoutant d'être massacrés par les miliciens avant leur défaite. Seule lueur d'espoir, les soldats de l'ONU ont pu libérer vendredi 120 personnes otages des miliciens dans l'hôtel des Mille-Collines. Les rescapés ont été conduits dans un secteur sous contrôle du FPR. En échange, 120 autres habitants de la capitale ont été amenés, à leur demande, vers les lignes de l'armée. Cette dernière continue à reculer, tandis que les désertions se multiplient, les soldats et les miliciens se mêlant au flot des réfugiés.

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