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Les autorités rwandaises ont instauré, mardi 2 octobre, un couvre-feu
jusqu'à nouvel ordre sur tout l'étendue du territoire à la suite de
l'incursion depuis l'Ouganda, la veille, d'un groupe de rebelles, près
de Mutara, dans le nord-est du pays. Des centaines de civils,
essentiellement des femmes et des enfants, fuyant la zone des combats,
sont déjà arrivés à Kigali. La situation a été jugée suffisamment grave
pour obliger le chef de l'Etat, le général Juvénal Habyarimana, au
pouvoir depuis 1973, à écourter un séjour aux Etats-Unis. Dans un
communiqué lu à la radio, le ministère de la défense nationale a invité
« la population à rester vigilante pour identifier et, surtout, dénoncer
tous ceux qui se seraient infiltrés parmi elle ».
L'armée a immédiatement dépêché des renforts sur place et, a-t-on appris
de source officielle, les soldats auraient réussi à contenir l'avance
des rebelles. Mais, d'après des informations recueillies à Nairobi, ces
derniers, quelque deux mille hommes puissamment armés, se seraient
emparés de la ville de Gabiro, au bord du parc national de l'Akagera, à
une centaine de kilomètres au nord-est de Kigali.
Le gouvernement ougandais a condamné « l'action de ces réfugiés rwandais
qui ont profité de l'hospitalité de l'Ouganda depuis plus de trente ans ». Officiellement, quelque quatre-vingt-quatre mille Rwandais, d'origine
tutsie pour la plupart, ont trouvé refuge en Ouganda après les massacres
inter-ethniques de 1959, qui ont permis aux Hutus (90 % de la
population) de prendre le pouvoir jusque-là aux mains de la minorité
tutsie.
Des milliers de ces réfugiés se sont engagés dans l'Armée nationale de
résistance (NRA) de M. Yoweri Museveni, qui, après des années de
guérilla, s'est rendue maître du pays en janvier 1986. Certains
détiennent, aujourd'hui, des postes-clés dans le gouvernement ougandais,
mais les hommes qui ont pénétré au Rwanda ne bénéficieraient d'aucun
soutien des autorités de Kampala. Selon une source américaine, Fred
Rwigyema, leur commandant, un ancien officier supérieur de la NRA, avait
été limogé, à la fin de l'an dernier, par le président Museveni, pour
cause de corruption.
Un mouvement contestataire qui milite pour le retour au pays et la
défense de la minorité tutsie du Rwanda s'est développé ces derniers
temps parmi les réfugiés de la deuxième génération, affirment certains
observateurs à Kampala. Il pourrait avoir pris l'initiative de cette
« invasion » du Rwanda.
