Fiche du document numéro 10382

Num
10382
Date
Samedi 2 mai 2015
Amj
Auteur
Taille
56780
Titre
Histoire des plaintes des femmes tutsi contre les militaires français de l'Opération Turquoise
Mot-clé
Type
Langue
FR
Citation
j

Histoire des plaintes des femmes Tutsi contre les militaires français de
l’Opération Turquoise

Docteur Annie Faure. Médecin Pneumologue. Présente au Rwanda du 28 avril au 23 juillet
1994 avec Médecin du Monde. Auteur de « Blessures d’humanitaire » Balland 1994 ;
Représentante et ressource financière des plaignantes auprès de leur avocate.
En 2004, 10 ans après le génocide des Tutsi au Rwanda, l’association Ibuka (association de
rescapés à Kigali) alerte l’association Survie de témoignages de femmes Tusti sur les violences sexuelles
exercées par les militaires français de l’Opération Turquoise. Elles désirent porter plainte contre les
auteurs de sévices.
Ces femmes Tutsi se disent victimes de viols et de tortures multiples lors de leur séjour dans les
camps de réfugiés de Murambi et Nyarushishi, où elles avaient trouvé refuge après l’extermination de
leur famille en juillet et aout 1994.
Mai 2004 : Survie dépêchent rapidement 2 personnes Assumpta Mugarineza
enseignante0 L4université à Paris, et moi-même.

rwandaise,

Juin 2004 trois plaintes de femmes Tutsi victimes, 2 témoignages des militaires des Forces
Armées Rwandaises (acteurs du génocides) visités en prison, et un témoignage d’un jeune rescapé sont
recueillis et confiés à l’avocat de Survie.
Juillet 2009, Cinq ans après le dépôt de plainte, l’instruction judiciaire étant au point mort,
j’estime nécessaire de reprendre en charge ces plaintes et de les confier à un autre avocat.
Dans un premier temps, je sollicite le député Noël Mamère depuis toujours dénonciateur de la
complicité d’une poignée de décideurs politiques français au génocide des Tutsi. Mais sa fonction de
député lui interdisant d’attaquer l’Etat français, je me tourne vers Maitre Laure Heinïch, avocate réputée,
journaliste à Rue 89, auteur de « Porter leur voix » édition Fayard, très au fait de la spécificité de la
cruauté et du déni du crime de viol.
Après un premier entretien avec son assistante Clotilde Lepetit, la machine judiciaire se met en
marche.
Deux avril 2010, la juge d’instruction du Tribunal aux Armées de Paris (le TAP) Florence
Michon décide d’instruire ces plaintes pour viols et tortures perpétrées par les militaires de
l’Opération Turquoise .
Il s’agit d’une plainte contre X de l’armée Française pour :
« Crime contre l’humanité »,
« Participation à une association de malfaiteur en vue de la préparation d’un crime contre
l’humanité »
Mai 2010, le Parquet fait appel.
Treize septembre 2010 : la Chambre d’instruction rejette l’appel.

Juin 2011 : les 3 plaignantes Olive* Diane* et Françoise* sont convoquées à Paris pour une
audition avec le Juge Frédérique Digne du Tribunal aux armées de Paris. Malheureusement le lendemain
de leur arrivée, le juge Digne est hospitalisé et les auditions sont annulées. Les 3 femmes sont
entendues par les Docteurs Caroline Eliacheff, et Jacqueline Augendre, psychiatres, médecins expertes
auprès des tribunaux. L’entretien est long, épuisant moralement pour les 3 femmes, les médecins et
l’interprète Espérance Patureau. Les conclusions sont formelles sur la crédibilité des plaintes : ces 3
plaignantes ne sont « ni manipulées, ni manipulables ».
Elles profitent de leur semaine pour voir longuement leur avocate et sont reçues dignement à
l’Assemblée Nationale par Christiane Taubira alors député investie dans la cause et Noël Mamère. Ces
trois plaignantes mesurent à Paris l’indignation et le soutien de français autour d’elles représentée par
notamment l’association Ibuka, le collectif féministe (contreviolsrwanda@yahoo.fr), les journalistes
Décembre 2011, les 3 plaignantes sont de nouveau officiellement convoquées par le Tribunal aux
Armées de Paris par le Juge Digne.
Deux d’entre elles Diane* et Olive*sont auditionnées par le Juge Frédéric Digne. Leurs auditions
convainquent le juge de poursuivre l’instruction sur les chefs d’accusation retenues par la juge Florence
Michon.
Lors de ce second séjour en France, elles sont entendues à l’Assemblée Nationale par la député
PS du XVII du PS Annick Lepetit. La, encore Olive* et Diane* vivent le soulagement puissant d ’être
reconnues comme des victimes à part entière et le regard posé sur elles mêlent compassion et admiration.
La troisième plaignante Françoise* empêchée de se déplacer à Paris en novembre 2011 sera
auditionnés au Rwanda en juin 1012.
Par la suite, le Tribunal aux Armées de Paris a fermé. Les plaintes des femmes sont maintenant
instruites par la structure judicaire « le Pole génocide », les juges chargés du dossier sont le juge
Claude Choquet et Emmanuelle Ducos.
Septembre 2012 Trois nouvelles plaintes de femmes Tutsi ont rejoint les 3 premières. L’une
déposée en septembre 2012, la plaignante a été auditionnée à Kigali.
Juin 2014 Les 2 dernières plaintes par les femmes Tutsi ont déposées en juin 2014 ont été
acceptées en janvier 2015 et jointes aux plaintes précédentes. A l’heure actuelle, à ma connaissance elles
n’ont pas encore été auditionnées par les juges du Pôle Génocide, ni fait l’objet d’expertise médico
psychologique. .
Janvier 2015 La Licra se constitue partie Civile sous l’impulsion d’Alain David et du Président
de la Licra, maitre Alain Jakubowicz
L’évolution de ces plaintes est intimement liée à l’identification des militaires français par leurs
victimes et à la détermination sans faille des juges face à l’Armée française et aux Mitterrrandistes
inquiets.
L’enjeu de ce procès est historique, grave, inédit et crucial : il ne s’agit pas moins de
reconnaitre la complicité active de l’armée française donc de son chef en 1994, le Président François
Mitterrand et du gouvernement Balladur au génocide des Tutsi du Rwanda.
Pour le moment l’armée se refuserait à fournir aux juges du Pole Génocide qui le réclament le

trombinoscope des soldats de la Légion étrangère notamment présents dans les camps concernés de
Murambi et Nyarushishi. Or sans cette étape indispensable, c’est à dire sans la possibilité d’identifier un
seul des accusés le procès ne pourra pas avoir lieu.
Cette affaire a intéressé quelques journalistes dont :
Benoit Collombat, et David Servenay Interview France inter juin 2011.
Maria Malagardis, www.slatefrique.com/7829/lfrance, au rwanda une seconde guerre d’ algérieChristophe Rigaud afrikarabia@gmail.com, 27 06 20111 Marie Kostrz rue 89 « génocide rwandais :
« trois tutsi accusent les français de viols ». Presse écrite Sarah Halifa Legrand pour le nouvel
Observateur, Laurent Larcher « la Croix, « Trois femmes Tutsi accusent des soldats français de viols lors
du génocide rwandais, Leila Minano et Julia Pascual, Causette 2012 « de nouvelles victimes accusent
des soldats français »Sophie Bouillon Causette 2012 « Des affaires judiciaires en terrain miné »
France 2 s’est déplacée pour interviewer Diane et Olive en novembre 2011; l’équipe de caméraman et
de journalistes ont assuré les femmes de leur protection télévisuelle : visages floutées, noms cachés,
lieux transformés. L’interview a duré longtemps. Je n’ai pas assisté à l’entretien ; Il a été terriblement
éprouvant. Il n’a jamais été diffusé sur France 2. Lorsque j’ai appelé la journaliste, j’ai appris que des
militaires français interrogés avaient niés les allégations de viols. La direction d’Antenne 2 s’est
rangée du côté des militaires.

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024