Fiche du document numéro 5606

Num
5606
Date
Samedi 15 novembre 2008
Amj
Fichier
Taille
27796
Pages
2
Urlorg
Titre
Mayotte : la justice refuse l'extradition du « génocidaire » rwandais
Sous titre
Pascal Simbikangwa, alias Safari Senyamuhara, ne sera pas renvoyé au Rwanda, où il est poursuivi pour génocide et crime contre l'humanité. La justice française a refusé la demande d'extradition formulée par Kigali.
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Mot-clé
Mot-clé
Source
Type
Langue
FR
Citation
Interpellé le 28 octobre dans le cadre du démantèlement d'un réseau de fabrication de faux papiers, Pascal Simbikangwa, qui vit à Mayotte depuis 2005, fait l'objet d'une demande d'extradition de la part de Kigali. Il est poursuivi par son pays pour crime de génocide, crime contre l'humanité avec association et extermination, et "crimes ordinaires". Les faits qui lui sont reprochés se seraient déroulés de 1990 à 1994, période durant laquelle a été préparé et perpétré le génocide des Tutsi rwandais.

La demande de la justice rwandaise a été examinée vendredi 14 novembre par la Chambre d'instruction du Tribunal supérieur d'appel (TSA) de Mamoudzou. Le président a débuté l'audience en rappelant au prévenu que "nous sommes ici non pour vous juger, mais pour voir si les conditions formelles pour autoriser une mesure d'extradition sont réunies". Après avoir énoncé les faits reprochés à "Safari Senyamuhara, alias Pascal Simbikangwa", il a mis en doute l'impartialité des juridictions et le respect des droits de l'Homme au Rwanda. "Il n'est pas forcément possible de faire comparaître des témoins à décharge dans votre pays. Certains prisonniers ont tendance à se retrouver avec une balle dans le dos s'ils tentent de s'enfuir. D'ailleurs, le Tribunal pénal international pour le Rwanda lui-même refuse d'extrader des prisonniers vers le Rwanda."

Quant à la "réclusion totale" en cellule d'isolement qu'encourt pour ses crimes présumés Pascal Simbikangwa, le président de la cour a estimé qu'elle n'était pas "conforme aux droits de l'Homme". "Je ne parle même pas des gacaca, qui constituent une justice populaire à l'état pur", a-t-il poursuivi en référence aux tribunaux populaires mis en place pour juger les milliers d'exécutants du génocide.

Dans sa réquisition, le Procureur général a invoqué des arguments similaires pour demander un complément d'informations censé permettre à la partie rwandaise, qui n'avait pas envoyé d'avocat, de démontrer sa capacité à juger le prévenu dans des conditions équitables.

"Les droits de l'homme ne sont pas respectés au Rwanda, ce n'est un secret pour personne", a pour sa part soutenu Me Sylvie Prat, l'avocate du prévenu qui s'est référée à d'autres demandes d'extraditions de Rwandais traitées par la justice en France hexagonale. "Dans tous les autres dossiers, les demandes d'informations supplémentaires n'ont strictement rien changé", a-t-elle affirmé.

L'avocate a également évoqué les "gros problèmes de santé" de son client. "Il a un traitement médical à prendre en permanence, sinon il encourt la mort. Depuis plusieurs années, plus de 100.000 personnes sont incarcérées au Rwanda dans des conditions épouvantables. S'il est renvoyé là-bas, j'ai peur qu'il ne voit jamais son procès."

Après quelques minutes de réflexion, la cour a opposé un avis défavorable à la demande d'extradition. Le Parquet a cinq jours pour se pourvoir en cassation. Marc Brisset-Foucault, le procureur, a indiqué à l'AFP qu'aucune décision n'avait encore été prise.

Pascal Simbikangwa a toutefois été reconduit à la maison d'arrêt : il lui reste à répondre de son implication dans deux affaires de faux papiers.

LG
Haut

fgtquery v.1.9, 9 février 2024