Fiche du document numéro 33805

Num
33805
Date
Friday 1er mars 2024
Amj
Auteur
Fichier
Taille
463084
Pages
12
Urlorg
Surtitre
Crime
Titre
Des faits sur le rôle du président Habyarimana dans la planification et l'exécution du génocide contre les Tutsi entre octobre 1990 et mars 1994 [Traduction française]
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Article de journal
Langue
EN
Citation
Juvénal Habyarimana fut le second président du Rwanda de 1973 à 1994. Sa responsabilité dans la préparation du génocide de 1994 contre les Tutsi repose sur le fait qu'il a planifié sa conception et l'a soutenu  dans tous les domaines social, politique et militaire, entre 1990 et 1994

Des faits sur le rôle du président Habyarimana dans la planification et exécution du génocide contre les Tutsi entre octobre 1990 et mars 1994


Le génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda, il y a de cela trente ans, entre avril et juillet 1994 fut le résultat d’une implication individuelle des autorités politiques et militaires à la tête desquelles se trouvaient le président de la République, le général major Juvénal Habyarimana et son entourage le plus proche constitué autour de sa femme Agathe Kanziga. C’est un génocide d’Etat, un génocide de proximité commis sur des voisins par des voisins sur instigation des plus hauts responsables du pays. Dans cette première série inaugurale des podcasts préparant la 30ème commémoration du génocide commis contre les Tutsi, nous allons commencer par démontrer le rôle du président Habyarimana dans la planification et l’exécution de ce génocide.

Le conflit armé engagé par le Front patriotique rwandais, FPR, le 1er octobre 1990 en vue de libérer le pays d’un régime criminel notoirement connu, a servi de prétexte à la bande de dignitaires du président Habyarimana pour préparer et d’exécuter un plan d’extermination systématique totale de tous les Tutsi du Rwanda et une liquidation des Hutu opposés au plan génocidaire. La mise en œuvre de ce plan d’élimination des tutsi n’était un secret pour personne car les officiels rwandais l’évoquaient sans se cacher. Les ambassades et chancelleries occidentales présentes à Kigali l’ont mentionné à leurs Etats respectifs, en particulier les diplomates français pourtant très proches du régime Habyarimana. La responsabilité personnelle du Président Habyarimana dans la préparation du génocide est situé dans le fait d’avoir planifié lui-même sa conception et de l’avoir soutenu dans tous les secteurs de la vie civile, politique et militaire entre 1990 et 1994. L’existence de ce plan était déjà signalé en 1990 par des ambassades occidentales dont voici trois exemples :

Le 13 octobre 1990, le colonel René Galinié, Attaché de défense à l’ambassade de France au Rwanda, a envoyé à ses supérieurs en France une Dépêche confidentielle, visé par l’ambassadeur Georges Martres, où il notait la gravité du génocide qui avait commencé à Kibilira, District de Ngororero, en ces termes : « Les paysans hutus organisés par le MRND ont intensifié la recherche des Tutsi suspects dans les collines. Des massacres sont signalés dans la région de Kibilira au nord-ouest de Gitarama. Le risque de généralisation déjà signalée, de cette confrontation, parait ainsi se concrétiser. »

Le 15 octobre 1990, l’ambassadeur de France au Rwanda, Georges Martres adressa un Télégramme au Ministère des affaires étrangères français et au chef d’Etat major des Armées, l’Amiral Lanxade, qui est en même temps chef d’état-major particulier du Président Mitterrand, dans lequel Martres utilise l’expression « génocide » en qualifiant les tueries qui se commettaient au Rwanda sur autorisation du président de la République Juvénal Habyarimana. Voici un extrait de ce télégramme : « La population rwandaise d’origine tutsi pense que le coup de main militaire a échoué dans ses prolongements psychologiques parce qu’il n’a pas obtenu des résultats assez rapides pour prévenir la mobilisation des Hutu contre la perspective de retour de l’ancienne monarchie. Elle compte encore sur une victoire militaire grâce à l’appui en hommes et en moyens venus de la diaspora, cette victoire militaire, même partielle, lui permettrait d’échapper au génocide. »

En 1998, lorsque l’ambassadeur Martres était auditionné par la commission parlementaire française dirigée par le député Paul Quilès il apporta de plus amples explications de ce plan génocidaire en révélant que le colonel Laurent Serubuga, chef d’Etat major adjoint de l’armée rwandaise qui était le numéro deux du Président Habyarimana lui avait annoncé que le pouvoir rwandais était prêt à éliminer les Tutsi : « le génocide était prévisible dès cette période (1990). Certains Hutus avaient d’ailleurs eu l’audace d’y faire allusion. Le colonel Serubuga, Chef d’Etat-major adjoint de l’armée rwandaise, s’était réjoui de l’attaque du FPR, qui servirait de justification aux massacres des Tutsis. Le génocide constituait une hantise quotidienne pour les Tutsis. Dès le début du mois d’octobre 1990, plusieurs milliers de personnes ont été emprisonnées à Kigali, la plupart en raison de leur appartenance à la minorité tutsie ou parce qu’elles avaient des sympathies ou des communautés d’intérêts avec les Tutsis. »

Quatre jours plus tard, le 19 octobre 1990, le Colonel Galinié envoya une nouvelle dépêche diplomatique en France dans laquelle il évoque l’existence d’un plan plus généralisé de tuer des Tutsi sur tout le territoire rwandais. Il l’a écrit en ces termes : « Il existe des possibilités de déclenchement de graves exactions à l’encontre des populations tutsi de l’intérieur, qui seraient soit spontanées, soit directement encouragées par les plus durs du régime actuel, jouant ainsi leur va-tout ». 

Un document du 19 novembre 1990 émanant de la direction du service de renseignements au niveau de la sous-préfecture de Ngororero donne le détail de ces pogroms :

• Commune de Kibilira : 352 personnes tuées, dont 345 Tutsi et 7 Hutu. 45 Tutsi ont été blessés, 423 maisons ont été brûlées, 124 ont été détruites. 387 vaches et 173 petits bétails ont été abattus. 3 365 Tutsi se sont réfugiés à la paroisse de Muhororo ;

• Commune de Satinskyi : 20 Tutsi tués, 8 blessés. 7 maisons brûlées, 92 détruites. 112 vaches abattues. 915 Tutsi ont quitté leurs biens ;

• Commune de Ramba : on a déploré aucun mort mais 7 maisons ont été brûlées et 17 autres ont été détruites. Également 17 vaches ont été abattues. 200 Tutsi ont quitté leurs biens.

On ne peut pas scrupuleusement se fier à ces chiffres fournis par le service de renseignements car le régime Habyarimana recourait à diverses astuces afin de minimiser le nombre de personnes tuées et de biens détruits dans le but de ne pas révéler leur intensité et de protéger les auteurs de ces horreurs. Ces données révèlent tout de même que les Tutsi de Ngororero ont été cruellement persécutés.

Aucun de ses assassins n’a été traduit en justice. Le premier et plus haut responsable de cette impunité de fait est le président de la République, Juvénal Habyarimana, chef suprême de la magistrature du Rwanda à l’époque des faits.

Un autre fait marquant qui montre la responsabilité du président Habyarimana dans le plan génocidaire au début de sa conception en octobre 1990 a été la traque aux civils Tutsi qui a débuté dans la nuit du 4 au 5 octobre 1990. Pour ce faire, le régime du président Habyarimana a monté une mise en scène d’attaque du FPR en tirant dans la ville de Kigali. Après cela, les gendarmes, les militaires, les bourgmestres, les conseillers de secteurs, les agents du service de renseignements ont perquisitionné des résidences et ont arrêté de nombreuses personnes, majoritairement tutsi. Le nombre de personnes arrêtées se situait autour de 10 000. Aucune d’entre elles n’avait commis d’infraction : il s’agissait simplement de Tutsi qu’on accusait d’être complices des Inkotanyi ou de Hutu soupçonnés d’être de connivence avec des Tutsi.

A titre d’exemple, le regretté abbé Modeste Mungwarabera, qui était alors directeur du petit séminaire de Karubanda (Butare) et professeur de chimie à l’université nationale du Rwanda, a été l’un de ceux qui ont été détenus à la prison de Butare. Il a donné quelques informations sur ce qui lui est survenu, notamment dans une interview qu’il a accordé au Journal français La Croix le 4 juillet 1994. Il l’a dit en ces termes: « En 1990, au début de la guerre, j’ai été arrêté et détenu. J’ai passé six mois en prison sans savoir pourquoi j’étais détenu. Ils avançaient que j’avais eu des relations avec le FPR parce que je suis Tutsi. Pourtant, je ne savais rien du FPR. »

Le 18 octobre 1990, le ministre de la Justice Théoneste Mujyanama a tenu une conférence de presse sur l’arrestation et la détention de ce qu’il appelait les « Ibyitso » (complices). Pour justifier le grand nombre de Tutsi arrêtés et détenus, il a déclaré que « le fait d’appartenir à la même ethnie que ceux qui ont attaqué le pays les place dans la catégorie de ceux qui doivent être plus soupçonnés que les autres1 ». Le montage des accusations sur base ethnique a été source de déni de justice à l’encontre de plusieurs personnes.

L’on ne peut parler du rôle du président Habyarimana dans la préparation du génocide en laissant de côté le terrible discours tenu le 17 novembre 1992 dans un meeting de ses partisans au Stade de Ruhengeri dans lequel il annonçait clairement le génocide en demandant au secrétaire général du MRND d’acheter des uniformes nouveaux pour les miliciens Interahamwe, de les habiller comme il faut, en prenant soin de dire publiquement que le moment venu, le président donnera des ordres lui-même pour faire la descente avec ses miliciens. Cette expression « descendre avec les Interahamwe » visaient en premier lieu le fait de s’en prendre aux Tutsi qui étaient alors considérés indistinctement comme ennemis de la République.

Le 25 novembre 1992, le parti MDR a adressé une lettre au président Habyarimana dans laquelle le MDR dénonçait une attaque perpétrée dans la commune Shyorongi le 15 novembre 1992 par les Interahamwe accompagnés de militaires en tenues civiles. Cette attaque était dirigée par le bourgmestre de Shyorongi, Alexandre Hitimana, qui avait distribué des fusils. Six personnes ont été tuées et plus de 500 personnes ont abandonné leurs biens avant de s’enfuir. Les Interahamwe étaient appuyés par leurs camarades qui étaient venus du quartier de Remera à Kigali sous la conduite du beau-frère du président Habyarimana, Aloys Ngirabatware. Le parti MDR affirmait que de telles exactions étaient soutenues par le ministre de l’Intérieur, Faustin Munyazesa, le préfet de Kigali-rural, Côme Bizimungu, le bourgmestre de Shyorongi, Alexandre Hitimana, et le député Bonaventure Habimana qui fut secrétaire général du MRND et qui était originaire de Shyorongi.

Cette lettre se terminait en signalant au président Habyarimana que ces assassinats étaient en relation avec son discours prononcé à Ruhengeri une semaine auparavant, dans lequel il avait déclaré qu’il ne croyait pas aux accords d’Arusha, et que le moment venu, il mobiliserait ses Interahamwe. Ces paroles ont galvanisé ses partisans. La lettre recommandait au président Habyarimana de réintégrer les déplacés de guerre dans leurs biens, d’assurer la sécurité de tous les Rwandais et de sanctionner tous ceux qui avaient participé à ces actes de violence. Elle était signée par : Bonaventure Ubalijoro, président du MDR à Kigali ; André Rwajekare, vice-président du MDR à Kigali ; Anastase Gasana, secrétaire du MDR à Kigali et Juvénal Banzamihigo, trésorier du MDR à Kigali.

En janvier 1993, une Commission internationale d’enquête conduite par la fédération internationale des ligues des droits de l’homme a mené ses investigations au Rwanda et a découvert plusieurs fosses dans lesquelles étaient enterrés les corps de victimes Tutsi Bagogwe tués par le régime Habyarimana dans les préfectures de Ruhengeri et Gisenyi. Cette commission était composée de 10 experts provenant de différents pays: Jean Carbonare (France) Président du groupe ; Philippe Dahinden (Suisse) ; René Degni-Ségui (Côte d’Ivoire) ; Alison Des Forges (États-Unis d’Amérique) ; Éric Gillet (Belgique) ; William Schabas (Canada) ; Halidou Ouedraogo (Burkina Faso) ; André Paradis (Canada); Rein Odink (Pays Bas) et Paul Dodinval (Belgique). Les fouilles effectuées par des enquêteurs ont pu établir un bilan total de 277 personnes tuées pour le seul mois de mars 1991. La Commission a noté que la majorité des victimes était des hommes jeunes et qu’ils étaient morts de fractures multiples du crâne et de la face, dues à des instruments contondants. Ces massacres ont eu lieu dans plusieurs Communes de Ruhengeri (Nkuli, Kinigi, Mukingo) et Gisenyi (Gaseke, Giciye, Karago, Mutura, Kanama, Rwerere).

La Commission a établi qu’étaient impliquées dans ces tueries les autorités locales civiles et militaires dont le préfet de Ruhengeri, Charles Nzabagerageza et celui de Gisenyi Come Bizimungu, ainsi que les bourgmestres des Communes concernées. Le préfet Nzabagerageza était le cousin du Président Habyarimana et avait épousé la cousine de sa femme Agathe Kanziga. La Commission a également relevé l’implication directe d’autres dignitaires du régime dont le ministre des travaux publics Joseph Nzirorera, le Colonel Elie Sagatwa, conseiller du Président Habyarimana et Protais Zigiranyirazo, beau-frère du Président.

Dans la soirée du 28 janvier 1993, Jean Carbonare, président de la Commission, juste de retour du Rwanda, était invité par le présentateur Bruno Masure au journal télévisé de France 2 et fondait en larmes, en direct, en dénonçant « l’ampleur, la systématisation des massacres de civils » qui n’avaient rien à voir avec « des affrontements ethniques » mais plutôt relevaient d’« une politique organisée » dans laquelle « l’implication du pouvoir est frappante, jusqu’à un niveau élevé, dans ce génocide, ce crime contre l’humanité – nous insistons sur ces mots ».

L’intervention de Jean Carbonare était ponctuée d’images d’un charnier d’ossements humains retrouvés par les enquêteurs dans les communes Mutura (Gisenyi) et Kinigi (Ruhengeri).

Au Rwanda, Carbonare avait été reçu par l’ambassadeur Martres à qui il avait décrit en détails la gravité des faits constatés par la Commission qu’il présidait. A l’issue de cet entretien, Martres adressait un courrier au Conseiller du président Mitterrand chargé des affaires africaines, Bruno Delaye, qui montre la gravité des violations des droits humains qui prévalait au Rwanda sous la responsabilité du président de la République Juvénal Habyarimana. Il l’a dit en ces termes :

« Monsieur Carbonare […] m’a tenu au courant des résultats obtenus jusqu’ici par cette mission […] elle a collecté une quantité impressionnante de renseignements sur les massacres qui se sont déroulés depuis le début de la guerre d’octobre 1990 et plus particulièrement sur ceux des Bagogwe (groupe de l’ethnie tutsi) après l’attaque de Ruhengeri en janvier 1991. Sur le plan des faits, poursuit l’ambassadeur français, le rapport […] ne fera qu’ajouter l’horreur à l’horreur déjà connue. […] Les massacres auraient été déclenchés par le président Habyarimana lui-même au cours d’une réunion de ses proches collaborateurs. […] Au cours de cette réunion, l’opération aurait été programmée, avec l’ordre de procéder à un génocide systématique, en utilisant, si nécessaire, le concours de l’armée et en impliquant la population locale dans les assassinats, sans doute pour rendre celle-ci plus solidaire dans la lutte contre l’ethnie ennemie ».

Les résultats de cette Commission ont provoqué la réaction de la Commission des Nations Unies pour les droits de l’homme qui a décidé d’envoyer au Rwanda son rapporteur spécial chargé des exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, M. Bacre Wally Ndiaye, de nationalité sénégalaise. Celui-ci a rendu son rapport, le 11 août 1993, dans lequel il établit que « la population tutsi est la cible d’attaques et de massacres à grande échelle menés par des éléments des FAR, des autorités administratives et des milices du MRND et de la CDR. Ces tueries posent clairement la question du génocide », a conclu l’expert.

Bacre Wally Ndiaye indiquait que ces massacres étaient organisés par le pouvoir et visaient les Tutsi en leur qualité de leur groupe ethnique, et ajoutait qu’un risque de génocide existait au Rwanda si rien n’était fait par les Nations Unies pour le prévenir.

En effet, au moment où Ndiaye et son équipe effectuaient leur enquête au Rwanda, tout un programme de préparation du génocide était mis en œuvre par le régime du président Habyarimana : création des radios et des médias prêchant la haine, recrutement et entraînement militaire des milices et leur armement, création des partis politiques extrémistes, distribution des machettes et armes dans la population choisie sur une base ethnique, établissement des listes de personnes à tuer,…

Durant la période du 31 janvier 1993 au 13 février 1993, sur ordre du Président Habyarimana, lui-même sous la pression du Colonel Bagosora, il fut signifié au Ministre des Affaires Etrangères Boniface Ngulinzira, issu de l’opposition, qu’il était relevé de ses fonctions de Chef de la délégation du Rwanda aux négociations de paix, et il fut remplacé par le Ministre de la Défense, James Gasana, du Parti Présidentiel MRND. Cette décision a été fortement dénoncée par le Premier Ministre Dismas Nsengiyaremye. A cette époque, les négociations devaient aborder la question de la fusion des deux armées et les extrémistes ne voulaient plus de Ngulinzira à cause de sa probité. Cette décision démontre à souhait que le Président Habyarimana et ses extrémistes ont voulu écarter le Ministre Ngulinzira des négociations de paix d’Arusha parce qu’ils n’appréciaient pas le fait que l’intéressé était favorable à ces négociations, l’accusant même d’avoir vendu le pays parce qu’il était pour le partage du pouvoir entre le MRND et son opposition.

De façon générale, l’année 1993 est marquée par l’intensification des entraînements militaires dispensés aux Interahamwe, mais des réunions qui préparaient le Génocide. Quelques-unes de ces réunions connues sont les suivantes : L’année 1993 est marquée par l’intensification des entraînements militaires dispensés aux Interahamwe, mais des réunions qui préparaient le Génocide. Quelques-unes de ces réunions connues sont les suivantes :

Le 17 novembre 1993, le chef d’état-major de l’armée, le colonel Déogratias Nsabimana, a dirigé une réunion au camp militaire de Byumba qui comprenait des officiers originaires de cette préfecture. À l’issue de cette réunion, il a été décidé que tous ces officiers devaient mobiliser leurs troupes ainsi que la population pour venger leurs frères massacrés par les Inkotanyi. Le communiqué du journal Le Flambeau n° 0003 du 6 décembre 1993 mentionne des massacres de grande envergure et note : « Ce qui est honteux, c’est qu’ils ne prévoient pas de se venger du FPR, mais plutôt de se venger en massacrant les Tutsi de l’intérieur du pays » ;

Le 18 novembre 1993, Joseph Nzirorera, secrétaire général du MRND, a dirigé une réunion qui s’est tenue à Remera (Mwufe), dans la ville de Kigali-rural, qui regroupait tous les chefs des Interahamwe. Cette réunion a décidé le lancement d’une guerre civile dans l’ensemble du pays, à commencer par Kigali et ses environs, puis dans les villes de Gitarama, Nyanza, Butare et Rwamagana. Ces villes étaient ciblées en priorité parce qu’elles étaient densément peuplées de Tutsi et de Hutu de l’opposition2 ;

Le 20 novembre 1993, le président Juvénal Habyarimana a dirigé une réunion à son hôtel Rebero L’horizon à Kigali. Elle clôturait les réunions précédemment évoquées. Il y a été décidé de distribuer aux milices Interahamwe et Impuzamugambi des armes (notamment grenades, fusils et machettes) qui devaient être utilisées pour exterminer les Tutsi et les Hutu de l’opposition. La distribution de ces armes se faisait à l’aide des bus publics de l’Onatracom, sous la supervision du ministre des Transports et de la Communication, André Ntagerura ;

Le 21 novembre 1993, le président Habyarimana a dirigé une réunion de même nature à l’état-major de l’armée rwandaise. Elle avait pour objectif de mobiliser les officiers à s’engager davantage dans la lutte contre les Inkotanyi et les Belges. On y cherchait un prétexte pour faire échouer la mise en place du gouvernement de transition ;

Au début de l’année 1994, les extrémistes qui préparaient le Génocide se sont de nouveau rencontrés et ont peaufiné le plan de dissémination des armes au sein des Interahamwe en milieu rural. Ils ont publié un manuel de procédure intitulé « Organisation de l’auto-défense civile3». Ce manuel fait partie des nombreux documents saisis par les policiers du TPIR dans les effets personnels de Jean Kambanda, lors de son arrestation en 1997 à Nairobi. Il ne mentionne pas les noms de ses auteurs ni même la date de sa publication, mais il a été confirmé par Jean Kambanda dans son procès au TPIR qu’il s’agissait d’un document confidentiel. Les chercheurs qui l’ont analysé l’ont comparé avec d’autres écrits datant de la même époque et ont conclu qu’il avait été écrit entre mi-février et début mars 19944. Ce document renseigne sur les résolutions de cette réunion : doter la population des moyens de la « résistance populaire » sous la supervision de l’armée, en commençant par les régions frontalières de l’Ouganda. Les premiers à recevoir les armes étaient les policiers des communes, les réservistes, les politiciens convaincus de défendre les acquis de la démocratie et de la République, en d’autres termes les adeptes du Hutu Power. La mise en exécution de ce plan a été placée sous la responsabilité du ministre de l’Intérieur et de celui de la Défense. Le Premier ministre, Agathe Uwilingiyimana, n’a pas été informé car les membres de cette réunion s’étaient rendu compte qu’elle n’adhérait pas à la mouvance Hutu Power. Ce document révèle que 4 995 fusils et 499 500 cartouches étaient nécessaires pour chaque commune. Cet arsenal devait être appuyé par les armes traditionnelles (flèches, lances, etc.) ;

Le 7 janvier 1994, une réunion s’est tenue au siège du MRND présidée par le président de ce Parti, Mathieu Ngirumpatse dans laquelle participaient le ministre de la défense Augustin Bizimana, le chef d’Etat major des Forces armées rwandaises, le général Déogratias Nsabimana, celui de la gendarmerie le général Augustin Ndindiriyimana et le président des milices du MRND les Interahamwe Robert Kajuga. Dans cette réunion de haut niveau révélé par les services de renseignements belges, il a été décidé de contrecarrer les fouilles d’armes qu’envisageait la MINUAR et déplacer les armes dans d’autres caches5. Une telle opération de caches d’armes destinées à commettre le génocide ne pouvait en aucun cas se faire sans la connaissance et l’aval du président de la République, Juvénal Habyarimana ;

La preuve est en que le lendemain 8 janvier 1994, l’armée rwandaise a procédé à la distribution d’armes aux miliciens Interahamwe dans les préfectures du Nord du pays, Gisenyi et Ruhengeri6. Le même jour à Kigali, une manifestation violente des milices Interahamwe armés de grenades entourés de paracommandos du camp Kanombe et de militaires de la garde présidentielle en civil ont bloqué l’accès au Parlement où devait avoir lieu une tentative d’assermentation du Gouvernement de transition. La gendarmerie rwandaise n’est guère intervenue, ni même la MINUAR ;

Le 11 Janvier 1994, le général Dallaire commandant en chef de la MINUAR prévient par fax le général Maurice Barril chef de la division militaire du Département onusien des opérations de maintien de la paix que la MINUAR disposait d’informations précises sur les caches d’armes dans la capitale Kigali et les entraînements des milices ayant une capacité de tuer plus de 1000 personnes par jour. Ce texte fut également transmis aux ambassadeurs accrédités à Kigali. L’ONU refusera d’accorder l’autorisation de saisie de ces armes ;

Le 12 janvier 1994, le général Dallaire et Jacques Roger Booh Booh Représentant spécial de l’ONU au Rwanda informent les ambassadeurs de France, des Etats Unis et de Belgique sur l’existence de ces armes et la volonté des milices de procéder aux massacres. Dallaire et Booh Booh rencontrent le même jour le président Habyarimana pour lui demander de faire en sorte qu’il soit mis immédiatement fin à toute activité subversive de ce genre. Ils rencontrent le même jour les dirigeants du MRND, mais rien de concret ne fut fait pas ces différentes autorités, à commencer par le chef de l’Etat en personne. A cette date, l’Ambassadeur de France au Rwanda, Jean Michel Marlaud, a transmis au Ministre des Affaires Etrangères un télégramme relatif à la situation au Rwanda dans lequel il expliquait avoir reçu des informations sûres et secrètes provenant de bonne sources et dont il détenait des preuves solides, attestant de la planification des massacres systématiques et généralisés dans le pays. L’Ambassadeur Marlaud a expliqué qu’il y aura d’abord des provocations visant les troupes du FPR postées à Kigali pour les inciter à réagir pour se défendre, après quoi le prétexte sera trouvé pour massacrer les Tutsi en commençant par ceux qui vivaient à Kigali. L’Ambassadeur a ajouté que les militaires rwandais qui avaient préparé ce plan ont prévu de collaborer avec 1700 miliciens Interahamwe postés à Kigali qui avaient reçu entrainement et armes pour tuer les Tutsi, avec la capacité d’en tuer au moins mille (1000) dès la première heure des massacres.

Le 15 Janvier 1994, les ambassadeurs de Belgique, de France et des Etats Unis font une démarche commune auprès du président Habyarimana pour lui demander de faire cesser ces préparatifs, mais encore une fois, ces démarches ne sont guère suivies d’effet concret7.

Le 16 janvier 1994, le MRND avec les partis membres du Hutu Power MDR et PL, tient un important meeting au Stade de Nyamirambo au cours duquel des armes sont distribuées.

Le 19 janvier 1994, le premier ministre Agathe Uwilingiyimana adresse une lettre aux ministres du MRND accusant le ministre de la défense Augustin Bizimana de distribuer des armes à la population et leur enjoignant de les récupérer, mais toujours aucun effet.

Le 17 février 1994, le Président Habyarimana a dirigé une réunion des officiers supérieurs de la gendarmerie nationale commandée par le Général Augustin Ndindiriyimana. Il les entretient, entre autres, sur le blocage en cours de la mise en place des institutions de transition à base élargie prévues par l’Accord de paix d’Arusha et de la possibilité de reprise de la guerre. Habyarimana les alerta en ces termes: « Si le FPR commence la guerre, nous avons des projets de nous occuper de leurs complices. »

Dans ces propos, le génocide est annoncé en termes très clairs, tuer les Tutsi était devenu une affaire d’Etat, ce qui permettait aux gendarmes chargés normalement d’assurer la sécurité, de massacrer les Tutsi dès que les autorités leur auront donné l’ordre de commencer à le faire.

En date du 18 février 1994, la direction générale de la sécurité extérieure des services de renseignements français (DGSE) établit une note secrète faisant état de véritables massacres ethniques ayant coûté la vie à plus de 300 morts dénombrés dans les semaines précédentes tuées par l’armée rwandaise et les milices avec la participation ou l’encouragement des autorités locales. Dans cette note, la DGSE annonce que ces massacres s’inscrivent dans un plan visant l’extermination totale des Tutsi: « Il s’agirait d’un élément d’un vaste programme de purification ethnique dirigé contre les Tutsis ».

Le lendemain, 19 février 1993, le général Christian Quesnot, chef d’Etat-major particulier du Président Mitterrand ainsi que Dominique Pin qui est le numéro deux du Département Afrique de la présidence française (Elysée), présentent deux principales options au Président Mitterrand concernant le Rwanda.

La première consiste à évacuer les ressortissants français et à retirer le dispositif militaire de l’opération Noroît, mais en même temps Quesnot et Pin la rejettent en conseillant au Président Mitterrand de ne pas la considérer: « C’est l’échec de notre présence et de notre politique au Rwanda. Notre crédibilité sur le continent en souffrirait ».

La deuxième option est celle dans laquelle Dominique Pin pense à la prise de Kigali par le FPR ; aussitôt il assure qu’en pareil cas, les massacres ethniques s’amplifieront et qu’en conséquence il faut que la France accroisse l’effort de soutenir le régime plus que jamais pour que le FPR ne prenne pas Kigali. Au clair, les autorités françaises savent que le régime du Président Habyarimana envisage le génocide, mais persistent dans leur volonté de l’appuyer inconditionnellement.

Tous ces signes avant-coureurs montrent à suffisance que le génocide commis contre les Tutsi résulte d’un plan finement élaboré par le pouvoir du Président Habyarimana.

Le 20 février 1994, le chef d’État-major de l’armée rwandaise, le Général Nsabimana Deogratias, a montré à son cousin Birara Jean Berchmans, qui fut Gouverneur de la Banque Nationale du Rwanda, une liste de 1500 Tutsi qui devaient être assassinés. Dans un journal belge daté du 24 mai 1994, Birara révèle avoir transmis cette information aux membres d’une délégation que l’Union Européenne avait envoyée au Rwanda, ainsi que spécialement à l’Ambassade de Belgique. De sa part, le rapport du Senat belge de 1997 précise que celui qui était alors ambassadeur de la Belgique au Rwanda, Johann Swinnen, a confirmé cette information lors d’une audience devant le Sénat belge.

Les rapports des ambassades étrangères en poste au Rwanda en 1994 indiquent la concordance de plusieurs éléments d'incitation directe au génocide en mars 1994. A titre d'exemple, un télex du 1er mars 1994 envoyé aux autorités belges par l'ambassadeur de Belgique au Rwanda, Johann Swinnen dans lequel il indiquait que la RTLM diffusait « des déclarations inflammatoires appelant à la haine, voire même l'extermination de l'autre composante de la population ».

Un document des services de renseignements belges du 02 mars 1994 indiquait qu'un informateur du MRND avait révélé aux autorités belges que le MRND avait élaboré un plan d'extermination de tous les Tutsi de Kigali au cas où le FPR ouvrirait des hostilités. L'informateur précisait : « Si les choses tournent mal, les Hutu les massacreraient sans pitié » et ajoutait que « les divisions régionales n'existent plus et le moral de l'armée n'a jamais été aussi élevé ».

Le 03 mars 1994, le major Podevijn de la MINUAR informa Dallaire que des armes étaient distribuées aux milices dans le quartier de Gikondo qui était l'un des fiefs importants de la CDR. Le 10 mars, la MINUAR découvrit plusieurs quantités d'armes lourdes destinées à l'armée rwandaise et signala l'accroissement du recrutement des milices et des militaires. Dallaire sollicita l'autorisation de l'ONU de saisir ces armes et réclamait des renforts des casques bleus ; il n'obtiendra jamais de réponse positive.

C'est aussi au cours de ce mois de mars 1994 que les dernières commandes de machettes effectuées par Félicien Kabuga chez la société britannique Chillington ont été livrées. Quelques semaines après, elles servaient d'instrument de perpétration du génocide.

La MINUAR a noté qu’au mois de mars 1994, d’importantes quantités de munitions avaient été extraites clandestinement des armureries du camp militaire de Kanombe et distribuées à l’insu de la MINUAR dans les différents camps militaires de l’intérieur du pays, notamment celui de Gitarama. Ces distributions d’armes visaient la préparation de la guerre, stopper les accords de paix d’Arusha et distribuer les armes qui serviront pendant le Génocide.

L’adjudant belge Benoit Daubie qui était chargé de la maintenance des armes au camp militaire de Kanombe, a témoigné devant l’auditeur militaire belge :
« J’ai eu accès à tous les magasins munitions à Kanombe avant l’attentat. (…) Une grande partie du dépôt avait été vidée de son contenu. Les quantités de munitions extraites étaient très importantes. Je prends pour exemple la distribution de 1000 obus de mortiers 120 mm sur Gitarama. Il est resté à peu près 20% des munitions dans le dépôt. Cela se passait environ un mois avant l’attentat sur l’avion d'Habyarimana et il a fallu toute une semaine pour les transports. Un lieutenant des FAR m’a dit que c’était en prévision d’une attaque FPR mais je pense pour ma part que cette action était faite pour échapper au contrôle des observateurs de l’ONU. Je sais que les chiffres fournis par l’Etat-major des FAR à l’ONU étaient faux car ils ne tenaient pas compte de ce qui avait été distribué en masse. Seule comptait la situation dans le magasin quasi vidé. Beaucoup de déplacements de munitions ont été faits pendant la nuit m’a révélé coopérant militaire allemand. »

Le fait de cacher des armes à la MINUAR avait pour but d’empêcher celle-ci à en contrôler l’utilisation, pour que l’armée rwandaise puisse les utiliser pour des massacres qui ne pouvaient pas être empêchés par la MINUAR dont le mandat demandait à celle-ci à se concentrer essentiellement sur la ville de Kigali.

Le 29 mars 1994, les commandants militaires de l’armée rwandaise se sont de nouveau rencontrés et ont déterminé la stratégie de « défense des quartiers de Kigali [et] la traque et la neutralisation d’infiltrés dans différents secteurs de la ville ». Dans le rapport de cette réunion destinée au ministre de la Défense et au chef d’état-major de l’armée, il a été décidé que certains militaires et réservistes auront la responsabilité de dispenser les entraînements aux civils en étroite collaboration avec les autorités administratives. Le rapport notait que le ministre de l’Intérieur et celui de la Défense devaient rassembler rapidement les armes à distribuer aux civils qui exécuteront l’opération. Le commandant des armées de la ville de Kigali a porté à la connaissance des participants que, dans la plupart des quartiers de la ville, la mise en place des groupes d’exécution du plan avait été achevée, qu’ils attendaient seulement dans les plus brefs délais la distribution des armes et d’autres équipements. Cependant, ils ont évoqué au cours de cette réunion l’insuffisance des armes – qui de surcroît nécessitait une formation des civils – ainsi que les problèmes liés au maniement des armes traditionnelles (épées, lances, tir à l’arc, machettes et couteaux). Il a alors été ordonné au commandant militaire de la ville de Kigali de dresser en urgence la liste des militaires qui n’étaient pas dans la caserne. Le préfet de la ville de Kigali, le colonel Tharcisse Renzaho, avait également reçu l’ordre d’en faire autant pour les réservistes et de donner des informations sur les civils dignes de confiance. Le lendemain, le préfet a envoyé au chef d’état-major de l’armée une liste sur laquelle figuraient de nombreux noms de réservistes et de civils susceptibles d’être recrutés pour la mise en application du plan. La liste mentionnait le nom, la cellule, le secteur et la commune de résidence de chaque personne retenue.

Le Lieutenant-Colonel Beaudouin Jacques-Albert qui était coopérant technique belge au Rwanda en qualité de conseiller du général Gratien Kabiligi G3 de l’Etat-major des FAR a été entendu par l’auditorat militaire belge le 05 mai 1994, dans son enquête sur l’assassinat des dix casques bleus belges et il a révélé que le ministre rwandais de la défense a publiquement annoncé qu’il y aura un génocide si jamais le FPR n’arrêtait pas la guerre : « Un mois ou deux avant l’attentat, j’ai participé à une soirée chez le Général Nsabimana, avec l’ambassadeur de Belgique, le Colonel Vincent, le Colonel Marshal (UNAMIR), le Colonel Le Roy, le Président Habyarimana, Augustin Bizimana (MINADEF) et encore quelques officiers rwandais. En fait, à cette occasion, il est apparu ou plutôt cela a été réaffirmé qu’ARUSHA ne pouvait être accepté par les Rwandais. Bizimana m’a dit, après quelques verres de champagne, qu’il était prêt à engager l’armée rwandaise si le FPR ne jouait pas le jeu. Dix jours avant l’attentat, le dernier vendredi de mars, le Colonel Vincent [Chef de la coopération militaire belge au Rwanda] a invité chez lui le général Nsabimana et le G3 le Colonel Kabiligi, et lors de cette réunion, ils ont encore clairement affirmé qu’Arusha n’était pas possible, qu’éventuellement, ils accepteraient des élections anticipées et que si on voulait absolument imposer ARUSHA, il leur était possible d’éliminer le FPR et les Tutsis et que cela prendrait une quinzaine de jours au maximum. Ils semblaient sûrs d’eux. »

La somme de tous ces faits démontre que le génocide perpétré contre les Tutsi entre avril et juilllet 1994, a bel et bien débuté en octobre 1990 sous la responsabilité directe du président Habyarimana et que ce génocide procédait d’une organisation méthodique bien élaborée sous l’autorité du général Habyarimana et qui atteignit son comble en 1994.

La matérialité de ce plan a été confirmé par le premier ministre Jean Kambanda au moment du génocide lorsqu’il a plaidé coupable devant le Tribunal Pénal International pour le Rwanda, en avouant je cite : « il y a eu au Rwanda en 1994 une attaque généralisée et systématique dirigée contre la population civile tutsi, dans le dessein d’en exterminer les membres » (§ 39, i).

Le président Juvénal Habyarimana en poste entre le 5 juillet 1973 et le 6 avril 1994, quoique décédé le soir de ce 6 avril 1994 lors d’un attentat contre son avion exécuté par des extrémistes de son régime qui ont tiré sur son avion à partir du camp militaire de Kanombe, avant la mise en œuvre totale de ce plan, en est le plus haut responsable en tant que supérieur hiérarchique tenant la plus haute autorité de l’Etat.

Son successeur Dr Théodore Sindikubwabo, son mentor Jean Kambanda et plusieurs génocidaires tel le colonel Bagosora de triste mémoire, et bien d’autres assassins reconnus coupables par le Tribunal pénal international pour le Rwanda, détiennent la responsabilité de la poursuite exécutoire du plan génocidaire préparé du vivant de Juvénal Habyarimana et pleinement mis en œuvre en accompagnant sa brutale disparition qu’ils ont programmé et exécuté.

A l’approche de la 30ème commémoration du génocide commis contre les Tutsi au Rwanda en 1994, souvenons-nous des victimes en continuant d’œuvrer pour que la devise du Plus jamais ça ne soit plus un vœu pieux, mais une véritable réalité pour les générations futures du Rwanda et du monde.


L'auteur est ministre de l'Unité nationale et de l'engagement civique


1- La Relève n° 143-144, 19-25 octobre 1990.

2- Le Flambeau, communiqué n° 0003, 6 décembre 1993.

3- Commandement des Forces armées rwandaises en exil, Contribution des FAR à la recherche de la vérité sur le drame rwandais, 1995, chapitre V, « L’auto-défense populaire ».

4- Linda Melvern, Conspiracy to murder. The rwandan genocide, éditions Verso, 2004.

5- Rapport du Sénat de Belgique 1997, 52, 1-611/8, § 4.3

6- Michel Cuignet, Mission française d’information parlementaire (MIP), Tome III, Auditions Vol.1, 171

7- MIP, Tome 1, Rapport, p.203
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