Fiche du document numéro 33185

Num
33185
Date
Dimanche 19 novembre 2023
Amj
Auteur
Fichier
Taille
1926304
Pages
8
Urlorg
Titre
Génocide au Rwanda : Dafroza et Alain Gauthier face à un nouvel accusé de crime contre l'humanité
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FR
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Alain et Dafroza Gauthier assistent au procès de Sosthène Munyemana, le CPCR est partie civile au procès. • © Isabelle Forboteaux - France Télévisions Reims Marne Grand Est Champagne-Ardenne

Mardi 14 novembre a débuté à Paris le sixième procès en France d'un Rwandais accusé de génocide des Tutsi du Rwanda. Sosthène Munyemana, l'accusé, habite le Lot-et-Garonne depuis des dizaines d'années. Les Rémois, Alain et Dafroza Gauthier, fondateurs du Collectif des parties civiles pour le Rwanda, représentent, à travers leurs associations, de nombreuses parties civiles lors de ce procès.

Ils sont à nouveau mobilisés pendant près de deux mois. Mobilisés comme jamais et comme depuis près de trente années d'ailleurs.

Les Rémois Alain et Dafroza Gauthier vont passer ces prochaines semaines à Paris sur les bancs de la cour d'assises de Paris faisant face à un nouvel accusé de crime contre l'humanité et de complicité de génocide des Tutsi du Rwanda.

Le procès de Sosthène Munyemana a débuté mardi 14 novembre au tribunal judiciaire de Paris. C'est le 6e procès et le 7e accusé rwandais face à la justice française. Rappelons que la France n'extrade pas au Rwanda et doit donc juger elle-même les Rwandais accusés du crime des crimes. Le génocide des Tutsi du Rwanda a fait plus d'un million de morts entre avril et juillet 1994.

Le génocide des Tutsi, c'est leur histoire



Dafroza et Alain Gauthier habitent Reims depuis près de 30 ans. A leur domicile, dans leur quotidien, pas une journée sans parler, commenter, travailler sur le génocide des Tutsi du Rwanda. Une histoire devenue leur. Une histoire qui débute dans les années 50 lorsque les Tutsi, dont fait partie la famille de Dafroza Gauthier, deviennent les cibles des Hutu. Tutsi, Hutu, Twa, trois classes sociales devenues ethnies, races, à l'arrivée des colons européens. Les Tutsi, les éleveurs, deviendront les ennemis des Hutu, les agriculteurs. Une haine raciale entretenue ensuite par des politiques bien ciblées pour arriver à l'avènement final : le génocide des Tutsi.

Le 6 avril 1994, lorsque l'avion du président du Rwanda Juvénal Habyarimana explose en plein vol au-dessus de Kigali, Alain et Dafroza Gauthier savent que l'extermination, bien préparée depuis si longtemps, va débuter. Partie en mars 1994 à Kigali voir sa maman Suzanna, Dafroza, revient en urgence. La capitale du Rwanda est déjà à feu et à sang. La Rémoise, franco rwandaise, le répète depuis inlassablement : "j'ai sauvé ma peau ce jour-là". Sa maman et presque toute sa famille vivant au Rwanda sont assassinées pendant le génocide. Il faut alors vivre avec cette culpabilité qui vous ronge chaque jour. Dafroza et Alain Gauthier ont décidé de consacrer leur vie à traquer les présumés génocidaires vivants en France. Le Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda est ainsi né en 2001.

Sosthène Munyemana et une de ses avocates à l'entrée du Tribunal judiciaire de Paris. • © ALAIN JOCARD / AFP

Une plainte datant de 1995



35 personnes, rwandaises d'origine, parfois naturalisées françaises, ont fait l'objet d'une plainte en France et sont soupçonnées de génocide, de crime contre l'humanité ou de complicité. 7 d'entre elles ont été jugées et trois définitivement condamnées. Claude Muhayimana, Laurent Bucyibaruta, habitant dans l'Aube à Saint-André-les-Vergers, et Philippe Hategekimana Manier dit Biguma condamné en 2021, 2022 et 2023 ont fait appel et restent présumés innocents.

Une situation longue et difficile pour toutes les familles des victimes et les rescapés du génocide des Tutsi du Rwanda. Des délais interminables en France. Depuis la création en 2013 de l'Office central contre les crimes contre l'humanité et le rétablissement des relations diplomatiques entre la France et le Rwanda, des procès, deux par an, se tiennent devant la cour d'assises.

Mais le retard est inextricable.

« J'ai recueilli pas mal de documents et en particulier une lettre que Munyemana avait écrite à un rescapé pour lui dire de plutôt témoigner en sa faveur. »

Alain Gauthier, co-fondateur du Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda

Le procès de Sosthène Munyemana qui se déroule cette fin d'année 2023 fait suite à une plainte du 18 octobre 1995. "Le dossier Munyemana fait partie des six dossiers antérieurs à la création du Collectif des Parties Civile pour le Rwanda (CPCR), explique Alain Gauthier cofondateur du CPCR. Des plaintes avaient été déposées par d'autres associations ou des personnes physiques et Munyemana c'est le plus ancien des dossiers". Dès la création du CPCR, Dafroza et Alain Gauthier, via leur association, rejoignent la plainte et se constituent partie civile. "Quand on s'est constitués partie civile, nous avons nourri le dossier des éléments que nous avions recueillis à Butare (ville du sud ouest du Rwanda), sur place au Rwanda. J'ai tenté de retrouver, non pas des tueurs parce que la plainte était déposée, mais surtout des rescapés. Et je me souviens les avoir rassemblés un jour à Butare, peut-être une dizaine, ou plus je ne sais plus et ils m'ont confié leurs témoignages et le mandat pour l'avocat."

Un non-lieu pour certains faits



Dafroza et Alain Gauthier partagent leur vie entre Reims et le Rwanda. Leur mission : trouver des preuves qui permettent de déposer plainte contre des Rwandais vivant en France et soupçonnés d'avoir participé au génocide des Tutsi du Rwanda. Ces preuves, elles peuvent être du côté des tueurs incarcérés dans les prisons rwandaises. Le Rwanda a jugé plusieurs millions de personnes parfois à perpétuité. Et puis, la parole des rescapés et des familles des victimes est essentielle.

"J'ai fait au moins deux missions concernant le dossier Munyemana, assez vite après la constitution de partie civile du CPCR qui a eu lieu fin 2001, reprend Alain Gauthier. Une fois en octobre où j'ai recueilli pas mal de documents et en particulier une lettre que Munyemana avait écrite à un rescapé pour lui dire de plutôt témoigner en sa faveur. Malheureusement, trois mois après, quand je suis retourné au Rwanda en février, le jeune rescapé était mort subitement et donc on a jamais su ce qui s'était passé. La lettre est dans le dossier. Elle était pliée en douze dans son petit porte-cartes. Je l'ai mise à l'envers, je l'ai recollée parce qu'elle était en mauvais état. Je l'ai rapportée et Dafroza l'a traduite. Elle a été versée au dossier et nos avocats vont demander des comptes à Munyemana sur cette lettre."

« On ramène les témoignages, mais si les juges estiment qu'ils ne sont pas concordants entre eux, s'il n'y en a qu'un qui accuse, les juges ne le retiennent pas. »

Alain Gauthier, co-fondateur du Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda

C'est pour cela qu'ils consacrent autant de temps. Pour ces preuves qu'ils accumulent au fil du temps. Des preuves précieuses pour le dossier de plainte et pour les enquêteurs de l'Office Central de lutte contre les crimes contre l'humanité.

"Sur le terrain, j'ai rencontré pas mal de familles de victimes, des rescapés qui accusaient Sosthène Munyemana, poursuit Alain Gauthier. Et pas que dans les faits qui ont été retenus contre lui. Il est poursuivi pour trois séries de faits : avoir organisé des rondes autour de chez lui à Butare sur la colline de Tumba, il a signé aussi une motion de soutien au gouvernement génocidaire avec le cercle des intellectuels de Butare et puis il a détenu les clés du bureau de secteur où les Tutsi étaient enfermés. Mais on avait recueilli aussi d'autres témoignages pour lesquels il a bénéficié d'un non-lieu."

"Sosthène Munyemana était médecin gynécologue à Butare au Rwanda. Lui dit qu'il n'est pas allé à l'hôpital et qu'il n'a pas travaillé de fin mars jusqu'au 9 mai et cela nous n'avons pas eu les moyens de vérifier. Mais il y a des témoins qui disaient qu'ils avaient tué à l'hôpital et dans d'autres endroits de Butare mais il a bénéficié d'un non-lieu pour toutes ces accusations. Nous n'avions pas les moyens d'aller plus loin. Des limites humaines et des limites de moyens d'enquête. On ramène les témoignages, mais si les juges estiment que ces témoignages ne sont pas concordants entre eux, s'il n'y en a qu'un qui accuse, les juges ne le retiennent pas. Un seul témoignage ça ne vaut rien en cour d'assises. Ça à un peu fragilisé le dossier. Maintenant, si au cours du procès, les témoins arrivent à convaincre les jurés qu'il a commis les crimes qu'on lui reproche..."

C'est tout l'enjeu de ces procès oraux. La parole des témoins est essentielle. Et quand le procès se déroule 28 ans après les faits... "Les témoignages ont été recueillis bien avant, précise Alain Gauthier. Ce qui a traîné ce sont les procédures judiciaires. Il a été mis en examen en 2011 et la clôture de l'instruction c'est en 2017. Toute l'information judiciaire s'est faite entre 2010, car avant, il y avait une rupture des relations diplomatiques entre la France et le Rwanda entre 2006 et 2009. Vous vous rendez compte, depuis 2017, l'instruction est clôturée, soupire le président du CPCR. 2018 il est renvoyé aux Assises par le Parquet, après il y a l'ordonnance de non-lieu partiel et la requalification de mise en accusation. Ensuite l'accusé a fait appel, s'est pourvu en cassation, cassation qui a été rejetée en 2022. Il y a tellement de procédures possibles pour les accusés tant avant les procès qu'après. S'il est condamné, il fera appel. Et il faudra recommencer, ce qui s'est passé sur tous les procès. Tous."

C'est au Tribunal judiciaire de Paris dans le 1er arrondissement que se déroule le 6e procès aux Assises jugeant un rwandais soupçonné de crime contre l'humanité. • © Isabelle Forboteaux - France Télévisions

Verdict le 19 décembre



"Ça peut prendre du retard, dit encore Alain Gauthier. Marc Sommerer, qui préside le procès, a quand même une petite marge. Il s'impatiente d'ailleurs, il trouve que l'on n’interroge pas suffisamment de témoins par jour. Il connaît bien le dossier, et sa technique, c'est d'interroger très souvent l'accusé. Tous les jours pratiquement. Dès que des témoins viennent, il lui demande sa réaction. Et il parle. C'est une réaction à chaud et c'est intéressant. Si vous faites venir un témoin et que vous interrogez l'accusé à ce propos 15 jours, trois semaines après, ça perd un peu d'intérêt". Pour l'heure, en ce début de procès, ce sont les témoins de contexte qui défilent à la barre. Appelés par le parquet général, la défense ou les parties civiles. "Ils ne connaissent pas forcément l'accusé Sosthène Munyemana".

« Une des jurés a tenté de parler avec la femme de Munyemana au moment de la pause de midi, le président l'a exclue du jury tout de suite. »

Alain Gauthier, co-fondateur du Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda

Six jurés, trois femmes, trois hommes, ont été tirés au sort et constituent le jury, accompagnés de six jurés supplémentaires en cas de défaillance de l'un d'entre eux. Neuf associations et 101 personnes physiques se sont constituées parties civiles et plus de 60 témoins cités se présenteront à la barre.

Au 4e jour du procès un incident est venu animer cette première semaine. "Une des jurés a tenté de parler avec la femme de Munyemana au moment de la pause de midi, explique Alain Gauthier. Cela a créé un incident et le président l'a exclue du jury tout de suite. Ils savent qu'ils n'ont pas le droit de parler avec les parties civiles ou les témoins de la défense".

Ce dernier jour de la première semaine de procès a aussi été marqué par les témoignages de trois personnes citées par la défense, deux politiques rwandais et un ancien membre de Reporters sans Frontière. "L'ancien Premier Ministre du Rwanda, du même parti politique que l'accusé, a commencé sa déposition en disant que Munyemana est innocent, il n'a pas commis de crime de génocide, reprend le président du CPCR. Et puis après, il raconte sa carrière politique, mais c'est très loin de l'affaire qui nous occupe et donc ça n'éclaire pas le rôle de Munyemana pendant le génocide. Plus que deux jours de témoins de contexte et ensuite ce seront les témoins des faits et on va entrer dans le vif du sujet."

Les Rémois s'attendent aux attaques



Médecin gynécologue au Rwanda, puis médecin en France pendant des dizaines d'années jusqu'à sa retraite il y a 6 mois, Sosthène Munyemana a passé une vie sereine dans l'ouest de la France, à Bordeaux d'abord, puis à Villeneuve-sur-Lot dans le Lot-et-Garonne. Le dépôt de plainte contre lui déposé très vite à son arrivée en France, ne l'a pas empêché de poursuivre sa carrière médicale ni de vivre sa vie de famille.

"Il est détendu, reprend Alain Gauthier en parlant de l'accusé. Comme il comparaît libre, on est parfois l'un devant l'autre lorsque l'on entre au tribunal, au 10 boulevard du Palais. Il nous salue. C'est particulier, c'est toujours un peu gênant. Et le fait qu'il comparaisse libre, il est assis devant, sur une chaise, et n'est pas dans le box fermé des accusés. Il nous tourne le dos tout le temps et on ne peut pas voir ses réactions. C'est un peu gênant aussi. On l'a déjà côtoyé lors de sa demande d'extradition à Bordeaux. Nous y étions allés et cela s'était passé d'une manière un peu tendue. Là, cela se passe relativement bien mais vous avez d'un côté l'accusé et de l'autre les parties civiles... qui se côtoient et ce n'est pas toujours confortable".

Une situation détendue côté accusé qui contraste avec le stress permanent des Rémois. Eux, vivent ces moments violemment. Touchés de tellement près par le génocide des Tutsi du Rwanda que chaque témoignage les renvoie vers leur famille disparue, mais aussi vers tous les rescapés et familles des victimes rencontrées depuis près de 30 ans. Dafroza le dit souvent : elle n'a aucun plaisir à voir condamner un homme. Mais il faut que ceux, Rwandais soupçonnés de crimes de génocide ou de complicité, et qui vivent en toute impunité en France, sachent que la justice fait son œuvre et condamne.

« On nous reproche la chasse aux Hutu, c'est ce qui revient sans arrêt. Dans notre esprit, ce n'est pas cela du tout. Ceux que l'on juge ce sont des préfets, des maires, des médecins, des prêtres, ce sont des intellectuels. Alors, ils sont Hutu... C'est le génocide des Tutsi quand même. »

Alain Gauthier, co-fondateur du Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda

Dafroza et Alain Gauthier, représentants le CPCR, espèrent qu'une vérité judiciaire émergera. "Une vérité judiciaire qui condamne l'accusé. Car dans nos pensées, nous avons toujours les victimes", précise Alain Gauthier. Les avocats de Sosthène Munyemana, eux, vont plaider l'acquittement. "Ils ont commencé à lancer quelques piques sur nous, notamment quand ils évoquent lors de l'audience que des associations se permettent d'aller au Rwanda chercher des témoignages. Ça va se préciser, encore plus, dans les jours à venir. Notre avocat nous a dit qu'ils avaient déposé de nouvelles pièces. Un des avocats de Sosthène Munyemana a versé des photos de notre décoration par Kagame (président du Rwanda), donc là je vois bien où il veut en venir". Alain et Dafroza Gauthier ont reçu en 2017, l'Ordre national d’amitié exceptionnelle de la part du gouvernement rwandais.

"C'est sûr qu'ils vont nous attaquer là-dessus. Mais ce n'est pas nouveau pour nous. J'aurais la même réaction. À chaque procès, on nous reproche le fait que nous allons au Rwanda, que nous rentrons dans les prisons. Parce qu'on a demandé et que l'on obtient l'autorisation. Moi je leur réponds que peut-être qu'en France on ne pourrait pas faire un travail comme ça. C'est possible. Mais au Rwanda, on demande et on nous accorde. Et puis, il faut quand même être réalistes. Si on n'avait pas fait ce travail-là, aucun des génocidaires aujourd'hui en France n'auraient été jugés. On nous reproche la chasse aux Hutu, aux intellectuels Hutu, c'est ce qui revient sans arrêt. Dans notre esprit, ce n'est pas cela du tout. Si ce sont des intellectuels, c'est parce qu'ils ont eu les moyens de fuir. On a très peu de miliciens à juger. Ceux que l'on juge ce sont des préfets, des maires, des médecins, des prêtres, donc ce sont des intellectuels. Alors, ils sont Hutu... C'est le génocide des Tutsi quand même".

Au mémorial de Nyanza, les vêtements des Tutsi assassinés ont été exposés précieusement. • © Isabelle Forboteaux - France Télévisions

Prochains procès



Une vingtaine de dossiers de plainte sont soit à l'instruction, soit en attente de jugement. Les trois derniers condamnés ont fait appel de la décision et reviendront devant la cour d'assises de Paris dans les prochains mois.

"Nous savons déjà que pour Philippe Hategekimana Manier dit Biguma, l'appel est déjà fixé, précise encore Alain Gauthier. Ce sera le 12 novembre 2024. L'accusé est incarcéré depuis plusieurs années, c'est pour cette raison que son procès en appel devance les deux autres dossiers jugés avant lui. Le premier semestre 2024, c'est la 30e commémoration du génocide des Tutsi du Rwanda. Ce n'est pas sûr que la justice française se lance dans un procès à cette date. Mais il y a quand même un autre médecin qui est déféré devant la cour d'assises. Le docteur Eugène Rwamucyo, comme il était aussi de Butare, nous aurions aimé que son dossier et celui de Sosthène Munyemana soient joints. On aurait gagné du temps. Et c'est possible." Ce fut d'ailleurs le cas lors du deuxième procès aux assises en 2016, celui de deux bourgmestres rwandais, Octavien Ngenzi et Tito Barahira. "Ils ont été jugés ensemble même si ce n'était pas les mêmes faits qui leur étaient reprochés", reprend Alain Gauthier.

Quant aux enquêtes, elles continuent. Une des dernières plaintes déposées en septembre 2021 par le CPCR est contre Pierre Kayondo, préfet de Kibuye. Ce Rwandais vit en France, au Havre, depuis des années. Un an après, le 19 septembre 2023, Pierre Kayondo était mis en examen et placé en détention provisoire. L'ancien préfet est soupçonné d'avoir activement participé à l'organisation du génocide des Tutsi du Rwanda. "Toutes les nouvelles plaintes sont à l'instruction, explique Alain Gauthier. On va se constituer partie civile bientôt dans une autre. J'y ai consacré deux journées lors de ma dernière mission au Rwanda en octobre novembre. J'ai rencontré déjà une dizaine de parties civiles toujours du côté de Kibuye, au bord du lac Kivu. Ce dossier fait partie des instructions judiciaires ouvertes par le Parquet depuis 2019. On essaie de trouver des parties civiles dans ces dossiers. Ça aide la justice aussi. Et le jour où nous allons nous constituer partie civile, nous leur apportons toutes nos informations et témoignages récoltés".

Au mémorial de Murambi au Rwanda, les noms des Tutsi assassinés lors du génocide s'affichent à l'infini sur des stèles. • © Isabelle Forboteaux - France Télévisions

Dafroza et Alain Gauthier passeront donc toutes ces semaines avant Noël aux assises de Paris. Ils témoigneront aussi, comme à chaque procès.

Un autre procès intéresse les deux Rémois. D'ailleurs Dafroza Gauthier s'y est rendue et y retournera pour le verdict. Il s'agit du procès de deux Rwandais qui se tient actuellement à Bruxelles en Belgique. Pierre Basabosé et Séraphin Twahirwa sont accusés de crime de guerre et de crime de génocide. Il s'agit, comme en France, du 6e procès aux assises en Belgique lié au génocide des Tutsi du Rwanda. Comme la France, la Belgique juge.

Dafroza et Alain Gauthier se battront jusqu'à leur dernier souffle pour que ceux qui, au Rwanda en 1994, ont commis le pire crime qui existe, soient jugés. La France les a accueillis. La France doit les juger.

Un combat pour la justice. Un combat pour la mémoire des Tutsi assassinés et des rescapés.
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024