Fiche du document numéro 32945

Num
32945
Date
Dimanche 17 septembre 2023
Amj
Auteur
Fichier
Taille
1314484
Pages
2
Titre
Les rencontres qui deviennent passerelles
Sous titre
Déclaration de Marguerite Carbonare à Dieulefit devant la stèle aux victimes du génocide des Tutsi et en mémoire de son mari Jean Carbonare.
Nom cité
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Lieu cité
Lieu cité
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Lieu cité
Type
Discours
Langue
FR
Citation
Les rencontres qui deviennent PASSERELLES

Notre vie est faite de rencontres.

Aujourd'hui, encore une rencontre. Nous nous retrouvons à nouveau, chers amis de IBUKA-Lyon pour faire mémoire de ce million de Tutsi tués pendant le génocide dont font partie des membres de vos familles. Nous nous retrouvons aussi en mémoire de mon mari, Jean Carbonare. Vous vous demanderez pourquoi.

La rencontre qui fut le départ de notre engagement avec le Rwanda, ce fut en octobre 1975. Nous venions d'arriver à Dakar.

Lors d'une rencontre, deux étudiants, François Ndatinya et Ezéchias Rwabuhihi, se présentent comme des réfugiés obligés de quitter leur pays, le Rwanda. Nous nous regardons avec Jean, gênés ! Nous ignorions complètement ce petit pays qui ne figurait pas sur la carte de nos colonies françaises !

C'est seulement en 1989, nous sommes à la retraite à Dieulefit, que notre engagement se précise car les étudiants rwandais « osent » à Dakar : lors du sommet de la francophonie, ils distribuent, dans toutes les boîtes aux lettres des participants, une lettre ouverte Monsieur le Président de la République Rwandaise, un texte dénonçant la politique de Habyarimana, signée par 27 étudiants bien courageux !

C'est alors en 1989, c’est à dire 3 ans et demi avant le génocide, que nous décidons de nous associer à leur combat : nous créons à Dieulefit le GRAD, groupe de réflexion et d’Action de Dieulefit. Nous alertons, sur la situation rwandaise, nos journaux, nos députés, même Mme Mitterrand. Grand silence : le Rwanda n’intéresse personne !

En janvier 1993, Jean participe à une enquête de la FIDH sur les violations des Droits de l’Homme au Rwanda. A son retour il a la possibilité d’alerter au Journal télévisé sur la chaîne 2 : un génocide se prépare au Rwanda et notre gouvernement est impliqué.

En décembre 1996, une autre rencontre nous permet de prendre conscience physiquement, et pas seulement à la télévision, de l’horreur d’un génocide : à Nyange, une esplanade vide, une belle cathédrale avait été rasée au bulldozer sur l’ordre d’un prêtre, ensevelissant dans les décombres deux milliers de Tutsi qui s’y étaient réfugiés, le 15 avril 1994.

Et surtout à Bisesero, nous rencontrons trois hommes en train de ramasser des ossements épars ; ils les mettaient en tas : ici un tas de tibias, là un tas de crânes : des grands, des tout petits de bébés.

Amis rescapés, vous connaissez tout cela, mais, vous, amis français, vous comprendrez mieux pourquoi, tant d’années après, les blessures ne sont pas encore cicatrisées.

Grâce à une autre rencontre, un lien d’amitié et de solidarité s’est établi avec Bisesero : Anne-Marie Truc rencontre chez nous Ezéchias Rwabuhgihi. Rencontre qui la bouleverse. Elle crée l’association « Intore za Dieulefit ». Nous organisons des colloques, pour informer sur ce qui s’est passé au Rwanda, des voyages au cours desquels un lien spécial nous lie à Karongi, à Bisesero, auquel nous apportions un soutien moral et matériel.

Maintenant, voici une autre rencontre qui nous amène aujourd’hui ici. À l’origine : une rencontre à Dieulefit avec Jacques Morel, chercheur.

Après avoir lu le Rapport de Vincent Duclert « Le Rwanda, la France et le génocide des Tutsi », j’envoie un mail à Jacques Morel pour lui dire que, en septembre 1999, Rocard avait bien rencontré Kagamé. J'avais une photo le montrant avec Kagamé et Jean, tous les trois ensemble. Il me donne alors les coordonnées de Vincent Duclert auquel j’envoie la photo. La rencontre avait bien eu lieu, mais très officieuse, Kagamé était souffrant. Nous échangeons avec lui et sa collaboratrice, Chantal Morelle, beaucoup d’informations.

Des liens d’amitié se nouent, liens qui vont nous amener à être ensemble aujourd’hui.

Et voici que se noue la gerbe, grâce à l'engagement de notre maire, de sa compagne Cécile, à Agnès Gahigi, présidente de IBUKA-Lyon, à vous tous ici présents, grâce au soutien de mes filles, de mon petit-fils Antoine, qui s’est beaucoup investi dans la préparation de ces journées.

Merci ! Et merci « au grand chef », comme l’appelait Jean, en pointant son index vers le ciel !!
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024