Fiche du document numéro 31611

Num
31611
Date
Vendredi 27 mai 1994
Amj
Hms
20:00:00
Auteur
Fichier
Taille
25756
Pages
4
Surtitre
Journal de 20 heures
Titre
André Glucksmann : « Si nous ne mettons pas en question la politique de François Mitterrand qui donne des armes au gouvernement fasciste du Rwanda, jamais ça ne changera ! »
Nom cité
Nom cité
Nom cité
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Mot-clé
Résumé
- Bernard Kouchner: "You know in Rwanda, there are a lot of people dying. And then elsewhere too. And we also have to intervene. So please consider not only that the emergency is Sarajevo but that the urgency is to build a system of prevention which is called the right of interference, over which we have all been fighting for years […] I do not accept this 'you' of the intellectuals who one shot would separate because they would have the truth. It's a little easy to attack his closest friends. François Mitterrand, who has done a lot alongside the UN for what happened in Sarajevo, is not the designated enemy. It is not he who carries out the massacres".

- André Glucksmann: "If we do not question the policy of François Mitterrand who gives arms to Rwandans, whom you yourself describe as 'fascists', to the government of Rwanda, and who refuses arms to those who defend their life, their wives against rape in Bosnia, if we do not question the policy of François Mitterrand for three years, that will never change! You are preparing for the presidential elections and that prevents you from questioning the policy of François Mitterrand".
Source
Commentaire
The 20 o'clock news of France 2 of May 27, 1994 is visible in its entirety here: https://www.youtube.com/watch?v=Hzcmpydl5p8
Type
Transcription d'une émission de télévision
Langue
FR
Citation
[Bruno Masure interviewe Bernard Kouchner (en duplex) et André Glucksmann (en plateau).]

Bernard Kouchner : […] Et deuxièmement, ne vous spécialisez pas. Je suis d'accord avec l'urgence, bien entendu. Mais vous savez au Rwanda, y'a plein de gens qui meurent. Et puis ailleurs aussi. Et il faut intervenir aussi. Alors s'il vous plaît, considérez… non seulement que l'urgence c'est Sarajevo mais que l'urgence c'est de bâtir un système de prévention qui s'appelle le droit d'ingérence, sur lequel nous nous battons tous depuis des années. Et ceci figure dans la liste de Michel Rocard. Et je pense que si au Parlement européen il y a une majorité de gauche, ce droit d'ingérence européen existera. Au niveau de l'ONU, pas tout seuls ! Mais en tout cas ça fera une vraie différence…

Bruno Masure : Mais…

Bernard Kouchner : Parce que il faut absolument que cette Europe qui s'est effacée, qui n'a pas été présente, malgré les efforts de la France, soit présente demain pour éviter le pire et pour éviter que ça se reproduise, y compris -- André Glucksmann a raison -- avec Monsieur Jirinovski et les autres.

Bruno Masure : André Glucksmann.

André Glucksmann : Oui, j'veux…, je ne veux pas couper du tout, euh, Bernard Kouchner avec qui je suis d'accord. Je pense que nous avons décoincés les politiques…

Bernard Kouchner : C'est vrai… Et avec toi.

André Glucksmann : Hein, que, euh, il a essayé au gouvernement de faire passer cette…, cette position qui est la nôtre. Il n'y a pas réussi. Il a essayé dans sa liste de faire passer…

Bernard Kouchner : Ah ben, faut pas exagérer ! André, faut pas exagérer [sourire]. Les résolutions…

André Glucksmann : Non, laisse-moi parler [il lève la main droite].

Bernard Kouchner : Ouais [sourire]. Il me glace quand il fait un signe comme ça.

André Glucksmann : Aujourd'hui un électeur doit savoir pour qui il vote : est-ce qu'il vote pour Rocard ? Est-ce qu'il vote pour Mitterrand ? Est-ce qu'il vote pour Jack Lang qui a la position de Mitt'rrand ? Est-ce qu'il vote pour Kouchner qui a le…, la position de Rocard ?

Bernard Kouchner : S'il vous plaît…

André Glucksmann : Donc nous mettons les choses au clair ! C'est tout ce que nous voulons faire.

Bruno Masure : Ça sera le mot de la fin, s'il vous plaît.

Bernard Kouchner : Oui mais [sourire]… André…, André Glucksmann : ne vous trompez pas d'adversaire. Ne faisons pas d'épuration ethnique dans les listes s'il vous plaît.

André Glucksmann : Absolument pas, absolument pas ! Je suis…, je pense que la vraie liste, ç'aurait été la liste Rocard-Giscard puisque tous les deux sont d'accord avec nous. Au lieu de préparer les présidentielles, arrêtons le massacre !

Bernard Kouchner : D'accord. Ça c'est vrai sur ce sujet. Mais pardon de vous signaler qu'il y a d'autres sujets sur l'Europe et qu'il y a d'autres dangers dans le monde…

André Glucksmann : Oui mais…

Bernard Kouchner : Et que donc ces gens, que l'on met ensemble sur ce…, sur cette question, n'auraient peut-être pas été d'accord. Ou alors il faut re…, transformer la politique nationale, ce dont je suis plutôt partisan.

André Glucksmann : Mais Bernard…

Bernard Kouchner : Attend, une petite seconde. Oui, pas de terrorisme, André, laisse-moi finir !

André Glucksmann : Tu sais très bien que si nous ne mettons pas en question la politique de François Mitterrand qui donne des armes aux Rwandais, que tu qualifies toi-même de "fascistes"…

Bernard Kouchner : Attendez ! Je…, je ne doute pas que François Mitterrand soit l'ennemi désigné des intellectuels

André Glucksmann : Au gouvernement du…, du Rwanda, et qui refuse les armes à ceux qui défendent leur vie, leurs femmes contre des viols en Bosnie, si nous ne remettons pas en cause la politique de François Mitterrand depuis trois ans, eh bien, jamais ça ne changera ! Or vous préparez les élections présidentielles et ça, ça vous empêche de remettre en cause la politique de François Mitterrand.

Bruno Masure : Bernard Kouchner, s'il vous plaît, juste un mot de conclusion. Je crois qu'y'a, y'a un problème de son…

Bernard Kouchner : Je n'admets pas ce "vous" des intellectuels qui d'un seul coup se sépareraient parce qu'ils auraient la vérité. Non ! "Nous sommes", pas "vous" ! Et deuxièmement, c'est un peu facile d'attaquer ses ennemis les plus proches, qui de… -- ou ses amis les plus proches. François Mitterrand qui a fait beaucoup pour ce qui s'est passé aux côtés de l'ONU à Sarajevo, ainsi que la France, n'est pas l'ennemi désigné. C'est pas lui qui fait les massacres.

André Glucksmann : C'est lui qui bloque.

Bernard Kouchner : Ne confondons pas les débats, ne confondons pas ! Y'a bien des choses à reprocher aux politiques de la France. Mais en particulier là, y'a aussi des choses à lui… créditer !

Bruno Masure : Merci Messieurs. Nous serons…, nous aurons l'occasion…

Bernard Kouchner : Non mais attendez, une seconde encore une fois.

Bruno Masure : Oui. Non, non, s'il vous plaît. Il faut que nous…, il faut que nous…

Bernard Kouchner : Bon. Que ce débat n'ait pas lieu entre deux personnes qui sont pratiquement d'accord, hein.

Bruno Masure : Merci.

Bernard Kouchner : Qu'ils aient lieu plus…, plus largement. Et ce sera un des centres de l'Europe, de…, du débat européen qui n'est pas le seul centre.

André Glucksmann : Moi je…, je pense que nous ferons un comité ensemble, hein.

Bruno Masure : Nous verrons cela. Nous serons amenés à en reparler bien évidemment, euh, puisque vous allez… déposer une liste et que vous allez rentrer officiellement dans la campagne. Merci beaucoup Bernard Kouchner d'avoir été avec nous.
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