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Au procès de l’ancien préfet rwandais Laurent Bucyibaruta, accusé de génocide, complicité de génocide et crime contre l’humanité, la journée de ce mardi est consacrée aux témoins des massacres de l’église de Kibeho, dans la préfecture de Gikongoro que dirigeait l’accusé au moment du génocide.
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Ce mardi matin, ils étaient deux à témoigner, tous deux agriculteurs, tous deux employés à temps partiel à l’usine de thé locale, tous deux témoins des massacres de l’église de Kibeho, mais pas dans le même camp.
Le premier, Théoneste Bicamumpaka, est interrogé en visio depuis Kigali. Il est toujours détenu à la prison de Gikongoro. Il a participé aux massacres des Tutsis dans cette paroisse entre le 13 et le 15 avril, mais il insiste : « le préfet nous a donné des instructions ».
Il raconte avoir été témoin de l’altercation entre le sous-préfet Damien Biniga, dit « l'étrangleur de bébés », et l’abbé de Kibeho qui refusait de livrer les Tutsis qui s’étaient réfugiés dans sa paroisse. « Les gendarmes ne vous ont-ils pas repoussés alors que vous tentiez d’attaquer l’église ? », tente un avocat de la défense. « Comment pouvaient-ils nous repousser puisque nous étions là pour les aider ? » – sous-entendu « à tuer » –, répond ce premier témoin.
Le deuxième témoin, Callixte Gatete, était présent à l’audience sans être partie civile. Ce rescapé tutsi a vu des civils parmi ses collègues de l’usine de thé se mettre à manier des armes après une formation sur la colline avoisinante. Et il a dû se réfugier à l’église de Kibeho avec sa famille. Au troisième jour des massacres, les gendarmes sont arrivés avec des fusils, raconte-t-il. L’église a été brûlée. Environ 40 000 personnes ont été tuées, dont sa sœur et ses cinq neveux.
« Petit à petit, le rôle de Laurent Bucyibaruta sera éclairci »
Alain Gauthier, co-fondateur du Collectif pour les parties civiles pour le Rwanda, confie : « Aujourd'hui, ce qui était important pour le juré, c'était qu'il prenne conscience de l'ampleur des massacres qui ont eu lieu dans cette église et autour de l'église de Kibeho. On a encore de nombreuses semaines à entendre de nombreux témoins. Et je pense que, petit à petit, le rôle du préfet sera éclairci. »
Laurent Bucyibaruta qui, selon Me Richard Gisagara, avocat de 13 parties civiles, a manqué totalement d'empathie : « Je rappelle que la dernière personne que l'on a entendu est un rescapé qui n'a pas pu parler puisqu'on lui a montré des photos de l'église. Il a pu seulement dire qu'il se rappelait de sa famille et de ceux qui sont morts là-bas. Et quand on demande à l'accusé quelle est sa réaction, il ne parle que de lui, sans aucun mot sur les parties civiles qui étaient pourtant ses administrés dont il avait la charge d'assurer la sécurité. »
Les avocats de la défense ont souhaité garder le silence.
