Fiche du document numéro 3013

Num
3013
Date
Jeudi 8 octobre 2009
Amj
Fichier
Taille
103528
Pages
2
Titre
Fin de cavale pour le tueur de Butare
Nom cité
Nom cité
Lieu cité
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Alphonse Higaniro, l'homme d'affaires, Vincent Ntezimana,
l'intellectuel...Lorsque ces accusés des massacres de Butare comparurent
devant la justice belge, un homme manquait à l'appel, Ildephonse
Nizeyimana, le militaire. Ce capitaine de l'ancienne armée rwandaise,
chargé du renseignement, se trouvait alors au Congo et semblait se
moquer du mandat d'arrêt émis par le Tribunal pénal international pour
le Rwanda et des cinq millions de dollars que les Américains avaient
promis à qui le capturerait.

Depuis lundi, la cavale de Nizeyimana est terminée : capturé dans un
petit hôtel de Rubaga, l'un des faubourgs de Kampala, la capitale
ougandaise, l'homme a immédiatement été transféré à Arusha où il a
rejoint un autre « gros poisson » Grégoire Ndahimana, un
administrateur de territoire, récemment capturé par les troupes
congolaises opérant au Kivu. A la suite de des deux arrestations, la
liste des criminels les plus recherchés se réduit désormais à deux
personnes, l'homme d'affaires Félicien Kabuga et Protais Mpiranyia.
Les deux dernières « prises » des policiers du TPIR sont tellement
importantes qu'elles pourraient inciter le Conseil de Sécurité à
prolonger de quelques mois les travaux du Tribunal, qui en principe ne
prend plus de nouveaux cas avant sa fermeture, prévue pour 2010.
En effet, le seul nom de Nizeyimana remplit d'effroi les survivants de
Butare. Dans cette ville universitaire, la deuxième du Rwanda, les
massacres avaient mis du temps à démarrer et il fallut que le préfet
Jean-Pierre Habyarimana soit assassiné, pour que les équipes de
tueurs, aidés par des réfugiés hutus du Burundi, aient le champ
libre. Prenant la tête des opérations, le capitaine veilla à organiser
les massacres dans le centre de la ville et dans le secteur
résidentiel de Huye: aux barrages, les Tutsis furent systématiquement
massacrés et leur carte d'identité mentionnant leur ethnie était
remise au capitaine, comme preuve du travail accompli.

A l'hôpital, les tueurs procédèrent avec méthode, passant de salle en
salle pour massacrer malades et blessés tutsis, à la grande horreur
des équipes de MSF présentes sur place. Et à l'Université, sur base de
listes soigneusement dressées, plus de 600 étudiants et professeurs,
l'élite intellectuelle du pays, furent éliminés.

Mais dans le coeur des Rwandais, une mort pesa plus encore que toutes
les autres : celle de la vieille reine Rosalie Gicanda, 80 ans, veuve
du roi Mutara Rudahigwa, détrôné en 1959. Depuis trente ans, la tante
de l'actuel président Paul Kagame vivait dans une modeste maison de
Butare, entourée du respect de tous. Très croyante, espérant être
protégée par les autorités, elle ne tenta même pas de fuir lorsque
Nizeyimana ordonna à un détachement de soldats d'envahir sa maison. En
compagnie de six autres personnes, la reine fut violentée, traînée
derrière le musée de Butare et sauvagement abattue. Le message des
tueurs était clair : si la reine elle-même pouvait être mise à mort
comme du gibier, plus personne n'était à l'abri.

Après que le Front patriotique rwandais eut mis fin au génocide,
Ildephonse Nizeyimana prit la route du Zaïre en compagnie des
miliciens et des militaires de l'ancienne armée. Il y est resté durant
quinze ans, se livrant à des activités militaires dans le Masisi, au
Nord Kivu. Le trafic de coltan et de cassitérite lui assurait moyens
de subsistance et complicités locales.

« Se saisir de lui a été le résultat d'un long travail, fait de
patience, de renseignements
 » assure l'enquêteur du TPIR qui guette
l'homme depuis plus de sept ans « il arrive toujours un moment où le
suspect baisse la garde, s'imaginant que, le temps ayant passé, il ne
lui arrivera plus rien.
 »

Cette semaine, Nizyimana avait une fois de plus utilisé de faux
papiers, établis au nom de Hitamana Samuel Kadogo et, après avoir
franchi la frontière entre le Congo et l'Ouganda à Bunagana le 3
octobre, il se préparait à gagner le Kenya, sans se douter du fait
qu'il se trouvait dans la ligne de mire de la police
ougandaise. Interpol Ouganda et l'équipe du TPIR vinrent le cueillir
dans sa chambre d'hôtel avant de l'envoyer par vol spécial vers Arusha
où l'attend une cellule climatisée...
Haut

fgtquery v.1.9, 9 février 2024