Fiche du document numéro 29002

Num
29002
Date
Mardi 21 juin 1994
Amj
Hms
13:00:00
Auteur
Auteur
Auteur
Fichier
Taille
28135
Pages
3
Sur titre
Journal de 13 heures
Titre
Les rebelles rwandais ne veulent pas entendre parler de l'intervention française. Ils accusent la France d'avoir soutenu et de continuer à soutenir, par des livraisons d'armes par exemple, les Hutu coupables de tant de massacres
Sous titre
Jean-Michel Marlaud est de retour à Kigali pour convaincre le FPR de la bonne foi humanitaire du gouvernement français.
Nom cité
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Lieu cité
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Résumé
- France is still waiting for a response from the UN to send its soldiers to Rwanda. For now, the reception still seems quite mixed. In the Security Council, consultations will continue.

- The French soldiers are ready: they are waiting in Bangui in the Central African Republic and the operation is called "Turquoise".

- The staff headed by General Lafourcade is still expected in the coming hours as well as the green light from the UN. The bulk of the troops would be made up of naval regiments, a good part of which is usually already pre-positioned in this region.

- This morning in Kigali, the fighting resumed after a few hours of calm. The situation is therefore still very difficult for civilians and especially for the wounded at the Red Cross hospital bombed on Sunday [June 19]. Some humanitarian organizations do not hesitate to denounce the initiatives of the French government. Because the opposition of the RPF rebels to France, which has long been the ally of the Rwandan forces, has serious consequences for humanitarian aid. According to Jean-Louis Machuron of Pharmaciens sans frontières, "It is not by sending French forces, which are intimately involved in this conflict, that we will resolve the problem. […] Everything is called into question. trusts the French more".

- About twenty humanitarian associations - including Pharmaciens sans frontières, but many others such as Médecins du monde, SOS Racisme, Handicap International - are also opposed to the French intervention. "The French government, say these associations, cannot intervene directly. Its past in the country is too heavy. It is unacceptable that France is on the front line. This would trigger situations of guerrilla warfare and explosions throughout the region".

- The Rwandan rebels do not want to hear about this French intervention either. They said they would oppose it by all means. They in fact accuse France of having supported and of continuing to support - by deliveries of arms for example - the Hutus guilty of so many massacres.

- From October 1990 to March 1993, France maintained a contingent which had reached 700 men in Rwanda. Official mission: to protect the French community which numbered 350 people, which makes two paratroopers for one national. In fact, the presence of these professional and well-armed soldiers was enough of a deterrent to stop and prevent any offensive by the Patriotic Front of Rwanda, which was operating from neighboring Uganda.

- The very close links between the African cell of the Elysee and the regime of President Habyarimana, a loan which would have been granted by Crédit Lyonnais in 1992 for the purchase of 18 million francs of weapons for the Rwandan Armed Forces, so many arguments used by the RPF to oppose a return of the French army to Rwanda. Jacques Bihozagara, "Representative F.P.R." : "If they come to occupy the land, if they come without consulting us and if, as it turns out, they come in fact to attack Rwanda, we are ready to defend Rwanda".

- The French soldiers, of course, withdrew to make way for the peacekeepers within the framework of the application of the Arusha agreements signed in August 1993. But 25 of them remained under cooperation to train and supervise the Rwandan army, which is predominantly Hutu. They were evacuated, along with the French ambassador, a few days after the attack which killed President Habyarimana on April 6.

- Jean-Michel Marlaud is back in Kigali today. It will take a lot of diplomacy to convince the Patriotic Front of Rwanda of the good humanitarian faith of the French government.
Source
TF1
Fonds d'archives
INA
Type
Transcription d'une émission de télévision
Langue
FR
Citation
[Jean-Pierre Pernaut :] À l'étranger maintenant, la France attend toujours une réponse de l'ONU pour envoyer… ses militaires au Rwanda. L'Italie se dit prête à fournir une aide logistique. Pour l'instant, l'accueil semble quand même assez missi…, mitigé. Au Conseil de sécurité, les consultations vont continuer. Mais les soldats français sont prêts : ils attendent à Bangui, en Centrafrique, et l'opération s'appelle "Turquoise". Sur place, au téléphone, Marine Jacquemin.

[Marine Jacquemin :] L'état-major dirigé par le général Lafourcade est toujours attendu dans les heures qui viennent ainsi que le feu vert de l'ONU [une incrustation "Bangui, Centrafrique" s'affiche à l'écran]. Et tout bouge très lentement. Ce que l'on peut dire pour l'instant, c'est que le gros des troupes serait constitué par des régiments de marine dont une bonne partie est déjà d'ordinaire prépositionnée dans cette région [diffusion d'images d'archives montrant des soldats français en train d'embarquer dans des gros-porteurs]. Ainsi le RICM, spécialisé pour l'intervention outre-mer -- et dont nous avons vu hier soir une colonne de 80 véhicules et blindés légers --, entrait en ville en provenance de Bouar, à 450 kilomètres de la capitale centrafricaine [diffusion d'une carte de la Centrafrique avec indication de la capitale Bangui]. Nous avons croisé également quelques équipages de Transall arrivés dans la nuit. Mais personne actuellement n'est en mesure d'avoir une vue concrète de la situation pour les heures qui viennent tant les lignes directrices en provenance de Paris semblent divergentes [diffusion d'images d'archives montrant un gros-porteur en train de décoller].

[Isabelle Marque :] Ce matin à Kigali, les combats ont repris après quelques heures d'accalmie [diffusion d'images de combat dans Kigali]. La situation est donc toujours très difficile pour les civils et notamment pour les blessés de l'hôpital de la Croix-Rouge bombardé dimanche [19 juin]. Certaines organisations humanitaires n'hésitent pas à dénoncer les initiatives du gouvernement français. Car l'opposition des rebelles du FPR à la France, qui a longtemps été l'alliée des forces rwandaises, a des conséquences graves sur l'aide humanitaire. C'est ce que déclare Jean-Louis Machuron de Pharmaciens sans frontières interrogé ce matin sur RTL [diffusion d'images de gens en train de se faire soigner dans un hôpital de la Croix-Rouge].

[Par téléphone, Jean-Louis Machuron : "Ce n'est pas en envoyant des forces françaises, qui sont intimement mêlées dans ce conflit, qu'on va résoudre le problème. Et je crois que…, à l'heure actuelle, euh, on met en péril des populations civiles, des orphelins qui sont, euh, par milliers…, pour lesquels on avait commencé à faire des transactions. Tout est remis en cause. Et on ne fait plus confiance aux Français" [diffusion d'images montrant des gens blessés dans un hôpital de la Croix-Rouge de Kigali].]

C'est dans ce contexte extrêmement tendu que les 450 Casques bleus africains se préparent à toute éventualité. Ceux des pays francophones ont été menacés par les rebelles [diffusion d'images de réfugiés dans le stade Amahoro].

[Jean-Pierre Pernaut :] J'ajoute qu'une vingtaine d'associations humanitaires -- dont celle que vous venez d'entendre, mais beaucoup d'autres comme Médecins du monde, SOS Racisme, Handicap International --, une vingtaine s'oppose aussi à l'intervention française. "Le gouvernement français, disent ces associations, ne peut pas intervenir directement. Son passé dans le pays est trop lourd. Il est inacceptable que la France soit en première ligne. Cela déclencherait des situations de guérillas et d'explosions dans toute la région".

Les rebelles rwandais ne veulent pas entendre parler non plus de cette, euh…, intervention française. Ils ont affirmé qu'ils s'y opposeraient par tous les moyens. Ils l'ont réaffirmé ce matin. Ils accusent en fait la France d'avoir soutenu et de continuer à soutenir -- par des livraisons d'armes par exemple -- les Hutu coupables de tant de massacres. Alors quelle est la position française au Rwanda ? Loïck Berrou.

[Loïck Berrou :] D'octobre 1990 à mars 93, la France a entretenu un contingent qui avait atteint 700 hommes au Rwanda. Mission officielle : protéger la communauté française qui comptait 350 personnes, ce qui fait deux parachutistes pour un ressortissant. En fait la présence de ces soldats professionnels et bien armés était suffisamment dissuasive pour arrêter et prévenir toute offensive du Front patriotique du Rwanda qui opérait depuis l'Ouganda voisin [diffusion d'images d'archives montrant des soldats français au Rwanda entre 1990 et 1993].

Les liens très étroits entre la cellule africaine de l'Élysée et le régime du Président Habyarimana [diffusion d'images d'archives de la réception du Président Habyarimana par le Président Mitterrand à l'Élysée le 2 avril 1990], un prêt qui aurait été consenti par le Crédit lyonnais en 92 pour l'achat de 18 millions de francs d'armement pour les Forces armées rwandaises [on les voit à l'entraînement], autant d'arguments utilisés par le FPR pour s'opposer à un retour de l'armée française au Rwanda [deux articles de presse, "Rwanda : les faux pas de la France" et "Rwanda : la France au banc des accusés", apparaissent à l'écran].

[Jacques Bihozagara, "Représentant F.P.R." : "Euh…, si ils viennent pour occuper le terrain, euh…, s'ils viennent sans nous consulter et si, comme ça s'annonce, euh, ils viennent en fait pour attaquer, euh, le Rwanda, nous sommes prêts à défendre le Rwanda".]

Les soldats français, certes, se sont retirés pour laisser la place aux Casques bleus dans le cadre de l'application des accords d'Arusha signés en août 93. Mais 25 d'entre eux sont restés au titre de la coopération pour former et encadrer l'armée rwandaise à majorité hutu [diffusion de la photo d'un militaire français en train de conseiller un soldat des FAR, publiée dans Libération du 20 juin 1994]. Ils ont été évacués, ainsi que l'ambassadeur de France, quelques jours après l'attentat qui a coûté la vie le 6 avril dernier au Président Habyarimana [diffusion d'images de l'épave de l'avion abattu].

Jean-Michel Marlaud est de retour aujourd'hui à Kigali [diffusion d'images d'archives du 12 avril 1994 montrant Jean-Michel Marlaud en train de quitter le Rwanda]. Il lui faudra beaucoup de diplomatie pour convaincre le Front patriotique du Rwanda de la bonne foi humanitaire du gouvernement français.
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