Fiche du document numéro 28581

Num
28581
Date
Mars 1995
Amj
Auteur
Fichier
Taille
451355
Pages
2
Titre
Où se trouvent les criminels ?
Nom cité
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Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
ALORS que le gouvernement de Kigali s'apprête à publier une liste de deux cents noms de responsables présumés du génocide, et que le tribunal international se prépare lentement à entamer ses travaux, il est évident que le temps qui passe est le meilleur allié des coupables.

Si, dans un premier temps, les dignitaires du régime, dont l'épouse et les enfants du défunt dictateur, ont été évacués vers la France et accueillis sur le budget de la coopération française, des havres moins compromettants leur ont été trouvés et la famille du président serait actuellement en Centrafrique. Les ministres du "gouvernement intérimaire" mis sur pied au lendemain de l'attentat se trouvent en principe toujours au Zaïre, à Goma et à Bukavu, mais plusieurs d'entre eux (le "ministre" des affaires étrangères, M. Bicamumpaka notamment) se sont vantés d'avoir été reçus à Paris au cours des derniers mois. Si le journal extrémiste Kangura a recommencé à paraître dans les camps du Zaïre, les animateurs de Radio des Mille Collines sont partis plus loin : Georges Ruggiu, un citoyen belge gagné à la cause hutue, aurait été vu dans le camp de Benaco, en Tanzanie, tandis que Ferdinand Nahimana, fondateur de la radio et idéologue des extrémistes, se trouvait jusqu'il y a peu au Cameroun (1). Centrafrique, Tchad, Cameroun : plusieurs pays de la "famille" franco-africaine ont accepté d'accueillir des auteurs intellectuels du génocide et dirigeants de l'ancien régime, et il sera sans doute difficile de les extrader.

LA Belgique, quant à elle, abrite au moins quatre personnalités importantes du régime Habyarimana : le général de gendarmerie Augustin Ndindiliyimana, l'homme d'affaires Séraphin Rwabukumba, l'un des financiers de Radio des Mille Collines, un ancien ministre et plusieurs officiers de l'ancienne armée, tandis qu'au moins une religieuse hutue qui aurait pris part au massacre de ses sœurs se trouve dans un couvent de Wallonie. Un ancien étudiant de l'université catholique de Louvain, accusé d'avoir pris part aux tueries de Butare, a retrouvé sa place dans son ancienne faculté. En outre, dotés de sauf-conduits et de billets d'avion fournis par des ONG catholiques et soutenus par le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies, de nombreux cadres gagnent l'Europe ou Nairobi. Le Zaïre étant trop incertain, c'est dans la capitale Kenyane que des responsables de l'ancien régime veillent sur leur trésor de guerre : les caisses de la Banque nationale qu'ils ont emportées en quittant le pays.

COLETTE BRAECKMAN
* Journaliste, Le Soir (Bruxelles).

(1) Cf. l'éloquent et remarquable reportage diffusé par la chaîne française TF1, le 6 février 1995, dans le cadre de son journal de 20 heures, sur Ferdinand Nahimana, ancien étudiant de Paris-VII (Jussieu), auteur d'une thèse (Le Rwanda, émergence d'un Etat) parue chez L'Harmattan en 1993 qui annonçait déjà ses projets criminels, et l'un des principaux responsables intellectuels du génocide.
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