Fiche du document numéro 27654

Num
27654
Date
Jeudi 21 février 2008
Amj
Auteur
Fichier
Taille
153757
Pages
1
Surtitre
Rwanda / Le président américain reçoit tous les honneurs à Kigali
Titre
L'enfant chéri de l’Oncle Sam
Soustitre
La tournée de « Bush l’Africain » est passée, de façon très intéressée, à Kigali. Où sécurité et business font bon ménage.
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Malgré les embarras de
circulation, la présence
de militaires à tous les
carrefours sans parler des policiers
en civil qui quadrillaient la
ville, les habitants de Kigali ont
vécu la visite de George W. Bush
comme un moment historique.
Pour la circonstance, la ville s’est
présentée sous son meilleur
jour : elle étincelait de propreté,
avec ses parterres de fleurs, ses
ronds points rehaussés par des
statues. Dans le district de Kicukiro,
proche de l’aéroport, maisons
et boutiques ont été repeintes
de frais, les propriétés sont désormais
entourées de murs de briques
et non plus de haies vives.
Bien avant l’arrivée de l’illustre
visiteur, les sans papiers avaient
été écartés, les marchands ambulants
priés de disparaître, les enfants
des rues devenus invisibles.
Kigali, vitrine d’un Rwanda en
plein développement, cache ses
pauvres et s’enorgueillit de son
golf, de son lac artificiel, de ses
immeubles flambant neufs qui
pourraient accueillir des institutions
internationales chassées de
Nairobi et rassurées par la sécurité
du pays. « Nous sommes honorés
par toutes ces visites », dit Koko,
un jeune chauffeur né au Burundi,
qui rappelle que depuis
janvier, Kigali a accueilli le président
allemand, Horst Köhler, le
secrétaire général de l’ONU Ban
Ki moon et le chef de la diplomatie
française, Bernard Kouchner.
Mais pour Koko, « Bush, c’est différent,
il vient ici en ami, et ne dit
que de bonnes choses sur nous »…
Gratien, sociologue, est moins
enthousiaste : « Les Américains
sont partout. Bill Gates se serait
acheté une maison au bord du lac
Mwazi, Bill Clinton rend régulièrement
visite à son ami Kagame,
une station a été installée au-dessus
du mont Karisimbi, qui peut
écouter toute l’Afrique, un nouvel
aéroport sera bientôt construit
dans le Bugesera, afin de désengorger
Kanombe qui deviendra
un aéroport militaire… » Comme
pour confirmer ces dires, le
président Bush a inauguré la nouvelle
ambassade de son pays, une
véritable forteresse qui domine
la ville, avec, sur la colline d’en face,
l’imposant bâtiment du ministère
de la Défense, que chacun appelle
déjà… le « Pentagone ».
Visiblement à l’aise et détendu,
frappant le président Kagame
dans le dos, s’installant presque
au ras du sol dans une école pour
mieux écouter les enfants, George
Bush a fait bonne impression
au Rwanda. Sa simplicité d’allure,
la gentillesse de son épouse
Laura ont été appréciés tandis
que des officiels comme le député
Denis Polisi, relevaient que
« lui au moins ne nous fait pas la
leçon et n’assortit pas ses propos
de critiques et de réserves comme
le font si souvent les Européens…
» Visitant à Gisozi le mémorial
du génocide, George Bush
s’est longuement attardé dans
une petite pièce sombre, où ont
été entassés des crânes et des ossements
de victimes. Contrairement à son prédécesseur Bill Clinton,
qui avait demandé pardon
pour l’inaction de son pays en
1994, Bush, après avoir affirmé
que ce lieu touchait « les émotions
au plus profond », n’est pas
revenu sur le passé. Il a préféré
souligner qu’il fallait plutôt
veiller à ce que des actions de ce
genre ne se reproduisent plus et
aider les Rwandais à se réconcilier
et à avancer.
En fait, le Président américain
a été très touché par le fait que le
Rwanda a été le premier pays à
envoyer un contingent militaire
dans le Darfour, où il a été le fer
de lance de la force d’intervention
africaine. Les Etats-Unis
ont participé à la formation et au
transport des troupes rwandaises
– dont les premiers éléments
ont toutefois été acheminés
par les C130 belges – et ils envisagent
une aide supplémentaire
de 100 millions de dollars
pour les soldats de la paix.
La lutte contre le sida a également
été au centre des entretiens
de George Bush. Le Rwanda est
en effet l’un des treize pays d’Afrique
bénéficiaires des 15 milliards
de dollars libérés par les Etats-
Unis dans le cadre du plan présidentiel
d’urgence dans la lutte
contre le sida, le Pepfar, et Bush
vient de demander au Congrès de
doubler ce montant.
Kagame et Bush ont ceci de
commun qu’à l’aide et à la philanthropie,
ils préfèrent les engagements
d’ordre commercial. Ils
ont donc signé un important traité
d’investissements, qui garantira
les initiatives privées. Le
Rwanda mise sur le grand marché
américain et, par exemple, a
conclu un accord de commercialisation
de son thé avec Starbucks,
le plus grand distributeur de thé
et de café aux Etats-Unis. En outre,
Kigali se portera peut-être
candidat pour accueillir Africom,
le centre de commandement
américain en Afrique aujourd’hui
basé à Stuttgart. A Kigali, il
se chuchote que le pays, chouchouté
par un Oncle Sam qui a
ignoré le Congo voisin, a vocation
de devenir une « base américaine
». Mais le sujet demeure tabou…
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