Fiche du document numéro 26890

Num
26890
Date
Jeudi 12 janvier 2012
Amj
Auteur
Fichier
Taille
199728
Pages
2
Sur titre
 
Titre
Rwanda : les vérités gênantes des juges français
Sous titre
DÉCRYPTAGE - L'enquête des juges Marc Trévédic et Nathalie Poux établit que l'avion présidentiel n'a pas été abattu par des extrêmistes hutus [sic].
Tres
 
Page
 
Nom cité
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Mot-clé
Cote
 
Résumé
The investigation carried out by judges Marc Trévédic and Nathalie Poux made it possible to clarify the conditions and establish the responsibilities of the attack which cost the life of Rwandan President Juvénal Habyarimana. The experts' report scientifically establishes that the missiles started from Kanombe Hill and a FAR military camp. This report also raises the question of France's involvement, and of its level of knowledge, in the planning of a genocide and then of the possible manipulation of justice.
Source
Extrait de
 
Commentaire
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Type
Article de journal
Langue
FR
Declassification
 
Citation
Enfin, la vérité éclate. L'enquête diligentée par les juges Marc Trévédic et Nathalie Poux a permis de tirer au clair les conditions et établir les responsabilités de l'attentat qui coûta la vie au président rwandais Juvénal Habyarimana. Le rapport des experts établit de manière scientifique que les missiles sont partis de la colline de Kanombé et d'un camp militaire des forces armées rwandaises (FAR). Il éclaire d'un jour irréfutable l'histoire du génocide rwandais, la pire tragédie de la fin du XXe siècle. Car dès lors, les missiles ne peuvent avoir été tirés que par des militaires hutus, des extrémistes proches de l'Akazu, un groupe de fanatiques pilotés par le colonel Théoneste Bagasora qui prônait ouvertement l'assassinat en masse des Tutsis. Et l'attentat contre le chef d'État, réputé hostile à l'idéologie de l'Akazu, n'est plus un simple meurtre mais un coup d'État pour s'emparer du pouvoir et mettre en oeuvre un génocide planifié. Non, les 800.000 morts, pour la plupart des Tutsis et des opposants hutus ne sont pas tombés au cours d'un immense pogrom spontané provoqué par la peur qui a suivi le décès du président Habyarimana mais ils sont bien les victimes d'une machinerie froidement réfléchie que l'on peut rapprocher de celle de la «solution finale».
Pour arriver à ce résultat, dont beaucoup de spécialistes se doutaient, il aura fallu attendre plus de dix-sept ans. Pourtant, ces conclusions ne sont ni le fruit d'un miracle ni de «nouveaux éléments», juste celui du travail et de l'honnêteté intellectuelle de magistrats. Du courage aussi. Les affirmations sont en effet aux antipodes de celles des premières investigations de la justice française, saisie du dossier dès 1996 par l'épouse de l'un des
deux pilotes français du Falcon présidentiel, mort lui aussi dans l'attentat. C'est là la seconde grande vérité livrée par les expertises, une vérité qui dérange la France. Preuves biaisées Dans cette première enquête française, le juge Jean-Louis Bruguière s'est lourdement trompé. Ce magistrat avait impliqué dans l'attentat le Front patriotique rwandais (FPR), le mouvement rebelle d'alors, un groupe majoritairement tutsi conduit par Paul Kagamé et désormais à la tête du Rwanda. Pour ce faire, Jean-Louis Bruguière, qui ne s'est jamais rendu au Rwanda au contraire de ses successeurs, s'appuyait sur des messages émanant du FPR, qui se sont révélés être des faux grossiers, et des témoignages pour le moins bancals. Ces preuves biaisées ne devaient pas empêcher le lancement en 2006 de neuf mandats d'arrêts contre des proches du président Kagamé, décision qui allait entraîner la rupture des relations diplomatiques entre Paris et Kigali trois ans durant. Comment un tel contresens a-t-il été possible? Dans ce dossier, la France, il est vrai, n'a jamais été un simple observateur. Dans les années 1990, l'armée française était très impliquée aux côtés des FAR dans leur combat contre le FPR. Des conseillers tricolores entouraient aussi le gouvernement rwandais. Une volonté de François Mitterrand et de certains de ses proches qui avaient fait du Rwanda un cas d'école pour le maintien de l'influence française en Afrique. Des officiers français y voyaient un terrain où exercer leurs «savoir-faire» en matière de contre-guérilla. Durant la cohabitation, entre 1993 et 1995, une partie de la droite française a adhéré à ces conceptions d'un autre temps. Le génocide n'y changera rien. La France continuera de défendre ses ex-alliés, par tous les moyens. Les exemples sont nombreux. Certains militaires, parfaitement au courant que les messages attribués au FPR étaient des faux, se sont tus. Abdul Ruzibiza a ainsi reconnu avoir été influencé dans ces déclarations par la DGSE. Jean-Louis Bruguière, dont d'autres enquêtes internationales ont déjà été remises en cause, ne pouvait que difficilement l'ignorer. C'est ce que pense le gouvernement rwandais qui mercredi a encore dénoncé une «manipulation volontaire» de la vérité par la France. Les avocats des mis en examen, envisagent de porter plainte contre Paris pour «escroquerie en bande organisée». Il faudra l'élection de Nicolas Sarkozy à l'Élysée, qui a fait du rapprochement avec le Rwanda un axe majeur de la politique africaine pour que la politique française change et que la vérité soit connue. Le rapport des experts ne met pas un point final au dossier, bien au contraire. S'il ouvre une voie royale à une réconciliation totale entre Paris et Kigali, il pose la question de l'implication de notre pays, et de son degré de connaissance, dans la planification d'un génocide puis de l'éventuelle manipulation de la justice.
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024