Fiche du document numéro 2592

Num
2592
Date
Samedi 25 juin 1994
Amj
Auteur
Fichier
Taille
129576
Pages
2
Surtitre
 
Titre
Le sentiment antifrançais domine toujours Kigali
Soustitre
Si le FPR, qui gagne du terrain dans la capitale, semble assouplir sa position, des réfugiés ont manifesté contre l'intervention de la France.
Tres
 
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Nom cité
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Résumé
 
Source
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Commentaire
 
Type
Article de journal
Langue
FR
Declassification
 
Citation
Les diatribes antifrançaises lancées par le Front patriotique rwandais
(FPR) depuis le début de l'opération Turquoise ont considérablement
perdu de leur vigueur hier. « S'ils s'en tiennent à la mission
humanitaire promise, alors on jugera sur pièces,
a déclaré le colonel
Franck Mugambage, commissaire politique de l'Armée patriotique
rwandaise. Nous n'écartons pas pour autant la possibilité d'un plan
secret français visant à rétablir au pouvoir le gouvernement
précédent
 », a précisé l'officier. Il a cependant refusé de dire si le
FPR avait assoupli sa position à la suite de la visite, jeudi, de deux
émissaires français, dont l'ancien ambassadeur au Rwanda, Jean-Michel
Marlaud, reçus par le président du FPR, Alex Kanyarengwe.

A Kigali pourtant, le sentiment antifrançais domine. Que ce soit dans
la zone gouvernementale ou dans les quartiers conquis par le FPR, il
faut désormais justifier de sa nationalité. Dans le centre de la
capitale, toujours sous contrôle gouvernemental, les interahamwe, ces
miliciens hutus responsables de la plupart des massacres de Tutsis et
d'opposants hutus, arrêtent désormais tous les véhicule des Nations
unies et réclament qu'on leur livre les ressortissants
français. Ceux-ci ne doivent leur salut qu'à la présence - non armée -
des Casques bleus de la Mission des Nations unies pour l'assistance au
Rwanda (Minuar).

Du côté du FPR, le franchissement des barrages routiers, qui relevait
jusqu'à présent de la formalité, tient aujourd'hui du pari. Hier
matin, plusieurs milliers de réfugiés hutus et tutsis de la banlieue
est de Kigali ont formé un long cortège entre les camps de Ndera et de
Kabuga, deux villages abandonnés dans lesquels le FPR a installé les
réfugiés recueillis par la Minuar à l'hôtel des Mille Collines et à
l'église de la Sainte-Famille. « Le FPR nous a sauvés et les Français
veulent maintenant nous tuer
 », pouvait-on lire (en anglais) sur une
pancarte brandie par la foule. En tête de cortège, un immense portrait
de François Mitterrand, auquel les manifestants avaient accolé les
mots de «traître, tueur, truand et marchand de drogue» (allusion aux
rumeurs qui courent à Kigali, selon lesquelles le fils du président
français, Jean-Christophe Mitterrand, aurait été impliqué dans
l'exploitation de champs de haschisch dans l'Est du pays).

Sur le parcours, les quelques soldats du FPR qui traversaient le
cortège dans leurs camions étaient vivement applaudis et le passage
(inopiné) du général Paul Kagame, chef d'état-major de l'armée
rebelle, provoquait une explosion d'applaudissements suivis de danses
et de chants.

A quelques kilomètres, de là, les rebelles ont poursuivi leur lente
progression sur la capitale. Ils auraient conquis cinq nouvelles
positions, au terme d'une des journées de combats les plus sanglantes
de ces dernières semaines. Les tirs de mortiers et de l'artillerie
rebelle, qui ont commencé dès le milieu de la nuit et n'ont pris fin
qu'en milieu d'après-midi, n'ont laissé aucun répit aux forces armées
rwandaises et à la garde présidentielle, condamnées à se terrer sans
pouvoir riposter. En fin de matinée, un des obus tirés par le FPR a
transpercé le toit de l'hôpital de la Croix-Rouge, pour la troisième
fois en trois semaines, et tué au moins sept personnes parmi les
blessés qui se trouvaient dans la salle des urgences.

Alain FRILET
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024