Fiche du document numéro 2548

Num
2548
Date
Samedi 16 avril 1994
Amj
Auteur
Fichier
Taille
3265568
Pages
1
Titre
Les premières négociations s'engagent à Kigali
Sous titre
Alors que les rebelles du Front patriotique rwandais s'enlisent dans les combats de rue avec l'armée dans la capitale, l'ONU a réussi à organiser hier après-midi une rencontre avec les belligérants
Nom cité
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Alors que les rebelles du Front patriotique rwandais s'enlisent dans
des combats de rue avec l'armée dans la capitale, l'ONU a réussi à
organiser hier après-midi une rencontre entre les belligérants.
Les factions antagonistes se sont rencontrées vendredi pour la
première fois dans la capitale rwandaise sous les auspices de
l'ONU. Aucune trêve n'a pu être conclue, mais un nouveau rendez-vous
était pris pour samedi. La réunion a duré un peu plus d'une heure à
l'hôtel Méridien. Le FPR, le mouvement de rébellion armée de la
minorité tutsi, était notamment représenté par le lieutenant-colonel
Charles Kayonga, et les forces gouvernementales par «une coalition
d'officiers». Kayonga a déclaré à l'issue de l'entretien avoir posé
des «préconditions». Le FPR a jusqu'à présent rejeté les offres de
trêve faites par le gouvernement. Selon l'envoyé spécial du quotidien
espagnol El Pais, 1180 Tutsis ont été massacrés, mercredi, par les
combattants hutus à Gikoro, un village proche de la frontière
tanzanienne.
Kigali, correspondance
Coup de poker hier à Kigali: les forces armées rwandaises tentent de
bloquer les derniers soldats belges sur l'aéroport. Objectif: les
garder comme boucliers face aux rebelles du FPR. Dans la matinée, des
soldats rwandais installent un lance-roquettes multiples sous le nez
de l'état-major belge, juste devant l'entrée de l'aérogare, et
commencent à tirer de là sur les lignes rebelles. Le piège est un peu
gros. Le colonel Roman, commandant le détachement belge, envoie
ultimatum et tirs de sommation. La batterie rwandaise se retire. Deux
heures plus tard, les Rwandais tirent au mortier sur la piste pour
empêcher les avions belges de décoller. L'état-major belge ne veut
toujours pas céder. Il demande au pilote de prendre le risque de
décoller. Hier soir, l'évacuation devait être terminée.
Reste encore les 400 Casques bleus belges de la mission de l'ONU
(Minuar). Mais après l'assassinat de dix des leurs par la garde
présidentielle la semaine dernière, ils sont nerveusement à
bout. «Dites à tous ceux que vous voyez que je veux partir», confie un
Casque bleu de 23 ans qui a les larmes aux yeux. Le Conseil de
sécurité lui donnera peut-être satisfaction ce week-end.
Désormais, les forces armées rwandaises vont donc se retrouver face à
face avec les rebelles du FPR. En terrain découvert, sur l'aéroport,
par exemple, elles auront du mal à résister. En revanche, dans le
centre-ville, elles risquent de vendre chèrement leur peau. En effet,
après trois jours de progression spectaculaire dans les collines des
environs de Kigali, les rebelles n'ont pas totalement réussi leur
«guerre éclair». Dès leur arrivée dans la capitale, ils se sont
enlisés dans des batailles de quartier, et désormais ils s'enterrent
pour se protéger des tirs de l'artillerie adverse. Des tranchées
recouvertes de rondins de bois, des mitrailleuses en position de loin
en loin, c'est le dispositif FPR dans le quartier de l'ancien
Parlement. Maintenant, après une semaine de combat, les rebelles ont
deux options. Prendre la ville d'assaut avec l'appoint de renforts
venus du Nord. Se sera sans doute un bain de sang. Car beaucoup de
civils hutus, qui considèrent l'arrivée des rebelles comme une
invasion tutsi, ont érigé des barrages en ville. Ou bien négocier leur
entrée en force dans un futur gouvernement d'union nationale. C'est
peut-être le souhait du représentant du secrétaire général de l'ONU,
Jacques-Roger Booh Booh, et le commandant en chef de la Minuar, le
général Dalaire, qui ont réussi hier après-midi à organiser une
première rencontre entre les belligérants à l'hôtel Méridien de
Kigali. «Je ne crois pas que le FPR parviendra à prendre Kigali, et
même s'il y arrive, je ne crois pas qu'il pourra contrôler longtemps
une ville à très forte majorité hutu», affirme le commandant des
forces années rwandaises à l'aéroport. «Et je lui souhaite bien du
plaisir face à nos forces retranchées dans les grandes villes du
Nord», ajoute-t-il. Enlisement ou négociation. Guerre ou paix. La
première rencontre d'hier soir est peut-être le signe que certains
Rwandais, des deux côtés, sont désireux d'arrêter là le massacre.
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024