Fiche du document numéro 22228

Attention : ce document exprime l'idéologie des auteurs du génocide contre les Tutsi ou se montre tolérant à son égard.
Num
22228
Date
Mardi 19 mai 1998
Amj
Auteur
Fichier
Taille
1041941
Pages
29
Titre
Interrogatoire de Jean Kambanda - Cassette # 66 [Aloys Ntabakuze, Théodore Sindikubwabo et Agathe Uwilingiyimana]
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Source
Type
Audition judiciaire
Langue
FR
Citation
Face A de la cassette # 66.

PD -Toujours la même mise en garde, Mardi le 19 mai 1998, nous poursuivons l’interview avec Monsieur
Jean Kambanda.

MD -Toujours dans la même salle, au centre de détention.

PD -Toujours, puis nous allons poursuivre avec le sujet... au moment où nous avions été interrompus nous traitions du sujet, du chapitre 8.4.10, un major Ntabakuze, on était à poser quelques questions relativement à ses connaissances. Les connaissances de Monsieur Kambanda face à cet individu.

MD -Si on commence en disant qu’il était proche d’Haby... du Président, Habyarimana, il. est-ce que
vous savez de quelle façon, est-ce qu’il y avait un lien particulier entre eux ?

JK -Je ne le sais pas mais les gens disaient qu’il était de sa famille proche. C’est comme ça que...

MD -Les familles auraient été proches ?

JK -Oui.
MD -Il venait de la même région ?
JK -Oui.

MD -On dit que c’était l’étoile montante de sa région et de sa famille, c’était un homme qui avait une...
beaucoup d’ambition ?

JK -C’est le seul, disons parmi la génération qui montait au niveau de, de la région du président
Habyarimana, parce que les autres étaient des vieux qui, qui étaient plutôt à l’âge de la retraite. Lui il était
encore jeune, il pouvait espérer aller le plus loin possible.

MD -Alors ce qui l’aidait c'était, c’était qu’il était de la région du Président et, étant le seul sur le rang ou
presque.

JK -Oui, oui, disons parmi les gens de sa génération.

MD -C'est ça.

PD -Lorsque vous dites qu’il était originaire de la même région que le Président, c’était la région de
Ruhengeri ?

JK -Non, c’est Gisenyi.

PD -Gisenyi ?

JK -Oui. Gisenyi et plus particulièrement le Bushiru [phonétique].

PD -Précisément là.

MD _-On dit qu’il commandait le... un bataillon d’élite. Et qu’il se retrouvait toujours dans les situations



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les plus difficiles. C’était… son bataillon d’élite était employé... à votre connaissance est-ce que, est-ce qu’il
y a des missions que vous connaissez que ces gens-là ont été appelés à couvrir ?

JK -Non, quand je parle de missions c’était des missions de combat, je ne parle pas d’autres missions. C'est que comme bataillon para-commando, c’est le bataillon chaque fois qu’il y avait un front qui se défonçait c’est le bataillon qu’on envoyait là-bas. Depuis toujours. dès que la guerre a commencé.

MD -Alors on parle, on parle depuis le début de la guerre ?

JK -Oui.

MD -Monsieur Alfred qui a travaillé sous ses ordres, dans son bataillon, est-ce qu’il a... est-ce qu’il vous a raconté qu’il avait participé à des missions avec lui, dans, avec, des missions particulières ?

JK -Non, pas des missions particulières, mais des missions de combat oui.

MD -Des missions de combat.

JK -Oui. .

MD -Au mois d'avril, au début des événements... heu, vous racontez que ce bataillon aurait été impliqué dans des missions très spéciales.

JK -C’est ce que m’a rapporté ce Alfred.

MD -Alfred qui était un membre du bataillon, qui était bien placé pour le savoir ?

JK -Oui.

MD -C'est une personne en qui vous avez confiance Alfred ?

JK -Je n’avais pas de raison de ne pas avoir confiance en lui. Sinon je ne l'aurai pas pris pour me garder.

PD -On a établi ce matin que... vous aviez confirmé aussi ses propos par des, des mêmes propos tenus par votre belle-famille, des gens de votre belle-famille.

JK -Ça ça ne justifiait pas ma confiance en lui.

PD -Non.

MD -Alors une des fonctions qu’ils avaient remplies c’était de sortir les corps de l’avion ?

JK -En, en, en... avec des gens de la garde présidentielle qui étaient.

MD -De la garde présidentielle.

JK -.. accompagnés de la garde présidentielle qui était déjà basée dans la, à la résidence du président Habyarimana. Ils ont été appelés en renfort.

MD -La différence entre la garde présidentielle et eux, la garde présidentielle avait une tâche bien spécifique, gardé le président ?



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JK -La garde présidentielle servait à garder le Président et sa femme.

MD -Mais ces gens-là pouvaient à l’occasion, pouvaient être appelés à porter assistance ?

JK -Je n’ai pas été informé d’autres occasions où ils ont été appelés à porter assistance à la garde présidentielle, mais ce cas précis, oui, pour ce cas précis oui.

PD -Leur base était-elle aussi à Kanombe ?

JK Qui?

PD -Les para-commandos ?

JK -Non. Plutôt, il faudrait plutôt poser la question inversement, puisque la base des, de la garde présidentielle.

PD -Des GP était.

JK -Etait à Kimihurura et non pas à Kanombe. Par contre les para-commandos, leur base, oui, était à Kanombe.

MD _-Etait à Kanombe.

PD -A Kanombe.

MD -A Kanombe. Si on parle de la deuxième mission qu’ils ont eu à remplir, il y a eu un tri de... Monsieur Alfred vous a expliqué que il y a des personnes qui ont été triées pour aller faire cette mission-là, remplir cette mission ?

XK Oui, oui.

MD -Pourquoi lui, est-ce qu’il savait pourquoi lui n’avait pas été choisi ?

JK -Non, il ne Le savait pas.

MD -Il ne le savait pas. L

JK -Puisque dans l’armée on peut prendre des gens pour les envoyer à une mission particulières sans que ce soit nécessairement toute la compagnie ou tout le bataillon ou tout le monde.

PD -Est-ce qu’il a identifié une constante dans le choix, à savoir comme une, une région ou quelque chose comme ça, quand il a discuté avec vous est-ce qu'il disait c’était les gens de telle région qui ont été choisis, les gens de telle autre qui ont pas été choisis ?

JK -Il n’a pas poussé son analyse jusqu’à là.

PD -Ok. A tout le moins lui a pas été choisi ?

JK -Non.

PD -Il venait de quelle région Monsieur Alfred ?



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JK -Il est de Gikongoro.

PD -Parce que vous inscrivez ici dans votre déclaration qu’il était normal qu’il ne soit pas assigné ou choisi pour des missions spéciales. Le régionalisme étant très présent et très puissant dans l’armée. C’est pas quelque chose qu’il vous a dit, c’est quelque chose que vous vous avez...

JK -C’est une interprétation que j’ai faite, donc que s’il n’a pas été choisi pour des missions particulières c’est, c’est... ça ne serait pas anormal ou pour la première fois que ça se ferait.

PD -Ok. C'est une... c’est quelque chose qui a, qui arrivait dans votre armée ça ?

JK Qui pouvait arriver.

PD -Oui, ok.

MD - [inaudible]. Ce qu’on vous a raconté sur la mission qu’ils auraient heu été remplir c’est que
immédiatement, est-ce que ça serait les mêmes, les mêmes qui auraient participé à la première, à la première,
première opération de sortir les corps de l’avion et ensuite aller heu, de sortir heu, d’aller éliminer les, des
apposants? | - . dun Mo acr ue e Le ui

JK -Ça n’a pas été établi.

MD -Ça n’a pas été établi. Alors ils sont partis, par contre ça s’est passé immédiatement après ?
Immédiatement après le.

JK -Le retour, quand ceux qui étaient partis chez le Président étaient revenus.

MD -Le deuxième groupe était formé. _
JK -Plutôt la deuxième mission.

MD -La deuxième mission.

TK -Je ne sais pas si c’est le même groupe ou si...

MD -Ok.. la deuxième mission s’est mise en branle pour...

JK -Oui.

MD -Et ça c'était, lui il l’a appris à leur retour que c’était pour éliminer les opposants.

JK -Oui.

MD -. du MRND.

JK -Oui.

MD -Selon une liste que détenait le major ?

JK -Oui, puisque il ne s’agissait pas d’aller éliminer n’importe qui, c’était des noms bien précis, donc des

gens bien précis qu’ils devaient éliminer.



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MD -Est-ce que lui, ce qu’il a appris c’est que on les identifiait les gens à éliminer, on les identifiait comme

des opposants au MRND ?

JK Oui.

MD -C’est comme ça qu’on les a identifiés ?
JK -Oui.

MD . -Est-ce que ça peut correspondre aux premières personnes qu’on sait qui ont été heu, qui ont été
éliminées ?

JK -Oui ça correspond aux premières personnes qui ont été éliminées.

MD -Parce que les personnes, les premières personnes qui ont été éliminées n’étaient pas nécessairement,
ont pas été éliminées nécessairement par, par, à cause de leur ethnie ?

JK -Ise fait que la plupart était de l’ethnie Tutsi, mais ils n’étaient pas nécessairement tous de l’ethnie
Tutsi. | | | |

MD -Oklyena eu d’autres aussi ?

JK -Oui.

MD _-Dont des hommes politiques ?

JK -Oui.

MD -Des personnages politiques ?

JK -Oui.

MD -Qui étaient clairement identifiés heu. comme n’appartenant, comme n’appartenant pas au MRND.

JK -Oui. Je crois il faut préciser, n’appartenant même c’est plus vague, ne soutenant pas disons le
président Habyarimana. Parce qu’il y en avait qui n’appartenait pas au MRND et qui pourtant étaient pointés
comme des soutiens au président Habyarimana.

PD -Alors…. est-ce qu’il. pour être éliminé si vous n’étiez pas un Tutsi vous deviez être un, reconnu
comme étant quelqu’un qui était près du FPR, donc anti-Habyarimana ?

JK -Oui.

PD -Ok, c'était la façon, si vous n’étiez pas heu. si vous n’étiez pas quelqu’un d’origine ethnique Tutsi.
cette liste-là, est-ce que c’est quelque chose auquel vous avez déjà tenté de, de savoir, vous avez déjà tenté
de creuser pour savoir comment elle avait été constituée, qui avait remis ça, comment. avez-vous déjà eu
des informations plus précises sur cette liste-là ou des. avez-vous déjà réfléchi à propos de cette liste-là ?

TK -J'ai, j'ai simplement réfléchi mais je n’ai pas eu des informations précises. C’est à dire que les... en



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ce qui me conceme si. les premières heures après l’attentat contre le président Habyarimana il y a eu des
gens qui ont été sélectivement tués, c’est que il y avait quelqu’un qui détenait une liste pour savoir qui devait
être tué, qui ne devait pas l’être, puisque ce n'était pas systématique.
MD -C'est ça. |
JK -Ça c'était, c’est un fait. Donc, même dans ma propre région, où j’habitais, à Kaciyru, on allait dans
certaines familles, pas dans toutes les familles, et toutes ces. heu. toutes ces familles qui ont été visitées
entre guillemets, à cette époque avait la caractéristique soit d’être Tutsi ou alors de ne pas appartenir au
courant qui soutenait le président Habyarimana. L'ensemble est à considérer comme opposé au président
Habyarimana.
PD -Ceux qui étaient pro-FPR ou Tutsi ?
JK -Le fait d’être Tutsi vous rangeait d'office...
PD -OuFPR?
IK -… du, d’être pro-FPR, considéré comme tel.
PD -Doncil existait un plan ?
JK -Je ne peux pas le confirmer, je cite les faits que j’ai vus.
PD -Vous, vous ce que vous analysez de ce que vous avez vu, de ce que Monsieur Alfred vous a dit.…
JK -Oui.
PD -Il existait un plan prévu, suite au décès du Président, il y avait une action à poser, il y avait des
représailles à faire qui ont été prises contre une classe spécifique d’individus ?
JK -Je ne parle pas de plan puisque le plan je n’ai jamais vu ce plan, mais je parle de faits que j’ai, j’ai
constatés, et je me pose des questions. Donc comment se fait-il que aussi rapidement des gens identifiés ont
été éliminés, c’est. la conclusion à laquelle j’aboutis c’est que il devait y avoir des... une liste de gens à
éliminer dans des circonstances décrites ou bien définies. Comme, comme celles qui ont, celles qui ont
succédé à la mort du président Habyarimana. J’évite le mot, exprès, le mot plan parce que je n’ai pas envie
de rentrer dans le mot plan.
PD -Ok. C'est ça, ce que je dis moi, c’est que si les gens ont été tués à partir d’une liste constituée, cette
liste-là n’a pas été constituée après le... le temps de réaction entre l’écrasement de l’avion puis le début des
tueries a pas permis aux gens de constituer une liste ?
TK -Je ne crois pas.

PD -Ok. C’est ça, c’est ça moi je dis dans le sens plan. Ça... les listes étaient faites, il y avait des, il y avait



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des opposants connus, des cibles.

JK -Oui.

PD -Parce que le, le... pardon, l’avion s’écrase à quelle heure, selon vous ?

JK -20 heures 30.

PD -Ok. A quelle heure les tueries auraient commencé ?

TK -Dans la nuit, dans la même nuit, je, j’imagine, je présume autour de minuit.

MD -Alors quelques heures, à peine quelques heures.

TK -En tous cas c’est dans la même nuit.

PD -Vous, chez vous, autour de chez vous ça a commencé...

JK -Vers minuit, une heure.

PD -Vers minuit. Donc à peu près trois heures, quatre heures, on peut dire quatre heures après
| l'écrasement de l'avion. Est-ce que ça laissait suffisamment de temps aux gens pour constituer la liste des

opposants, des citoyens Tutsi et tout ça, puis de a transmettre aux forces armées puis dire c’est ceux-là que

vous aller abattre ?

JK -Non.

PD -Alors si on travaillait à partir de liste, c’est là que moi j’ai tiré le mot plan. Et je comprends que vous,

ça vient pas de vous, ça vient de moi. C’est pour ça que je disais ça.

MD -Parce qu’Alfred vous confirme qu’ils ont, qu’il, que le major détenait une liste, ils sont allés éliminer des personnes selon une liste que détenait le major Ntabakuze ?

JK Oui. C’est ce qu’il m’a dit lui, mais cette information je l’ai prise comme il me l’a dit, donc j'essaye de prendre toutes les réserves, sachant que c’est une information qui est capitale, s’il y a eu un plan, faut que je sois à même de démontrer que, où je tire l'information du plan, pour moi il y a pas de plan.

PD -Non.

JK -Il y a que les faits que j’ai vus.

PD -Ce que vous avez c’est dans un premier temps Alfred vous dit ça, dans un premier temps vous avez constaté que trois heures et demi après la chute de l'avion, il y a des personnes ciblées en vertu de leur ethnie ou de leur opposition politique qui ont été tuées ?

JK -Oui.

PD -Puis, Alfred vous confirme que il y aurait eu une liste, que c’était des gens ciblés à abattre.

JIK Oui.



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PD -Parles forces armées rwandaises.
JK -Oui.

PD -Mais vous pouvez pas aller plus loin parce que vous avez jamais été capable d’aller plus loin.

JK -Non je ne suis pas capable d’aller plus loin.

PD -Et ça a jamais été discuté Ça, au niveau de vos conseils des ministres, disons, la proximité que vous
aviez avec le ministre de la Défense. vous avez, vous êtes Jamais heu. interrogé avec lui heu, relativement
à ces listes-là, dire ‘écoute, j’ai eu des informations à l’effet puis vous croyez pas que..”, non ?

JK -Non.

PD -Jamais vous avez heu.

JK -J'ai pas dit, j’ai pas... voulu discuter de... avec lui sur, de cette question. J'ai évité de discuter avec
_ lui de cette question.

PD -Ça m’amène à me poser des questions, pourquoi avez-vous évité justement de jui poser ces
questions-là ? LL |
JK -Parce que je, je trouvais que c'était un sujet qui pouvait m’apporter des, des difficultés sur le plan
personnel. Je n’ai pas voulu discuter de ce sujet avec lui.

PD -A ce moment-là, si vous aviez demandé à Monsieur Bizimana, si vous aviez commencé à gratter
un peu ce sujet-là, selon vous vous auriez eu des difficultés personnelles ?

JK “Oui.

PD -C’était un sujet qu’on... qu’on devait pas ouvrir ?

JK -Je ne l’ai pas abordé, je ne voulais pas l’aborder avec lui.

PD -Avec personne d’autre non plus ?

TK -Non. C’est... peut-être avec, plus tard, avec d'au. comme je l’ai fait avec Alfred. Mais je... très
discrètement aussi, disons amicalement. Mais avec les gens qui auraient dû ou pu répondre aux questions
précises que j’avais je n’ai pas voulu aborder le sujet.

PD -Si vous aviez eu à interroger des gens à l'exception du ministre de la Défense, qui... vers qui vous
seriez vous tourné, est-ce qu’il y avait un parti politique vers lequel vous vous seriez tourné ou des membres
d’un parti politique particulier vous vous seriez tourné ?

JK -Bien entendu, j'aurai discuté ça avec le MRND. Si j'avais eu le courage de... d'ouvrir ce dossier.
MD -En faisant une analyse, quand même, des faits, en regardant ça, on ne peut pas arriver à une autre

conclusion que celle-là, on ne peut pas vraiment dire que des gens ont été, qu’il y a eu des actions aussi. des



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actions qui devaient être planifiées, on ne peut pas partir au hasard de cette façon-là et aller, aller éliminer
des gens qui sont tout à coup, qui sont, qui s’avère être tous des, des heu, des opposants politiques ou
ethniques ou... quelques heures plus tard, comme... est-ce qu’on peut arriver à une autre conclusion que celle-
là ?

JK -Non c’est. on peut arriver à toutes les conclusions qu’on veut, mais moi je ne veux pas arriver à
cette conclusion dans la mesure où je ne sais pas, je n’ai pas eu le temps ou la possibilité d’approfondir pour
dire ‘voilà ça c’est ma conclusion et j'arrive à cette conclusion’.

MD -Selon vos observations. que quelques heures après la mort du Président, qu’on soit déjà sur la rue

en train d’éliminer des gens. qui sont. c’est confirmé ce sont des opposants... il fallait, il fallait qu’on soit

prêt.

JK -Non c’est à dire que je donne les faits. Je laisse aux autres de tirer la conclusion qu'ils veulent tirer.
Les faits sont là.

MD Les faits sont là. |

JK -Is sont là.

MD _-Et vous avez une personne qui vous dit que les linaudible] soldats lui ont dit avoir éliminé pendant
la nuit des gens que le major leur identifiait.

JK -Oui.

MD -C'est quand même clair ça. Et quand on dit aussi qu’ils sont partis avec, avec une liste de personnes,
et puis on regarde les événements, puis on se dit mais ça peut pas être autrement. Ça peut pas être autrement
que des, que les, que des actions, que les actions qui ont suivi ne soient pas préparées, on n’est pas parti au
hasard, on est parti. les gens qui ont été éliminés sont pas des gens qui ont été éliminés au hasard, c’est pas
n’importe qui, c’est pas des gens qu’on a rencontré sur la rue puis qu’on a fait disparaître, on est allé dans
différents quartiers de la ville chercher spécifiquement des, des cibles.

JK -Ça c’est un fait. Et c’est ça le fait que je, je décris, il y a effectivement des gens qui ont été éliminés
dès le départ. Parce qu’ils étaient clairement identifiés, que ce n’était pas un hasard comme... puisque même
chez moi, dans mon propre quartier ils ne passaient pas dans toutes les, tous les foyers, on passait dans
certaines familles. Donc c’est... les faits c’est ça.

PD -Il ya eu une sélection ?

JK -Il y a eu une sélection oui.

MD -Oui. Il y a eu une sélection de faite. Puis ça s’est fait très très rapidement. on pourrait. on peut pas



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le confirmer mais on pourrait penser que ces gens-là étaient pas mal prêts. On pourrait penser ça en regardant
les événements, on pourrait penser que ces gens-là étaient drôlement prêts à agir.
JK -Oui, qu’ils soient prêts ça c’est un fait aussi. De toutes façons ça s’est fait très rapidement donc il
n’a pas fallut de, des réunions ou des meetings pour préparer ça, ça, c’est comme si c’était déjà prêt, chacun
était déjà à son poste.
MD -Etle, la personne qu’on a choisi comme responsable était pas n'importe quelle personne non plus,
Nitabakuze, on démontre qu’il était une personne de confiance, une personne qui avait des responsabilités,
et à qui on faisait confiance.
JK -Ça c’est dans le quartier en question oui, mais est-ce que la même personne était responsable dans
tous les autres quartiers que j’ai décrits, qui ont, qui ont également été concernés tels que Remera, tels que
Kaciyru, Kimihurura, je ne le sais pas. Parce que je ne sais pas qui commandait à l’époque...
MD -Parce que ces gens-là auraient agi dans un quartier en particulier ° ? |
TK -Non, ce que lui, la question. qui nous concerne C’est... ça concerne Kanombe, mais je: sais que les
mêmes opérations ont eu lieu dans le même temps dans les autres quartiers tels que Kimihurura, tels que
Kaciyru où j’habitais, tels que Remera. Est-ce que c’est la même personne qui donnait les mêmes ordres aux
mêmes gens, je ne le sais pas, je ne peux pas le confirmer.
MD -Oui….
PD -L'individu qui heu. qui habillait son chien en... aux couleurs du MRND, est-ce que cet individu-là
avait trouvé refuge près de votre belle-famille ou.
K -Non.
PD -Non?
JK -Non, parce que c’est quelqu'un qui habitait à Kanombe, c'est une histoire qu’on avait déjà raconté.

PD -C'était connu ça ?

JK -C’était connu.

PD -Puis c’est aussi connu qu’il a été tué le soir du.

JK -Ça je n’ai pas pu le vérifier, c’est juste le Monsieur qui m’a donné l’information, mais je n’ai pas pu
vérifier si c’est exact ou pas.

PD -Ok. Dans votre belle-famille, c’était des, c’était des individus Tutsi qui avaient trouvé refuge là ?
TK -Oui, il y a des individus Tutsi qui avaient trouvé refuge là.

PD -Est-ce que c'était des gens qui étaient connus d’eux, c'était des gens qui... c’était des voisins ou...



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JK -C’était les voisins, ils habitaient le même quartier.
PD -Le même secteur ?
JK -Le même secteur. C’était des voisins.
PD -Ils avaient trouvé refuge chez votre belle-famille ?
JK -Oui.
PD -Etils sont demeurés seulement quelques heures là...
JK Ils sont demeurés seulement quelques heures puisque les, la, le quartier a été investi par les gardes,
les GP, les soldats de la garde présidentielle puis ils ont fouillé quartier. maison par maison.
PD -Est-ce que c’était les GP à cet endroit-là ou si c’était les, les para-commandos qui ont agi ?
TK Eux ils m'ont dit que c'était les GP.
PD -Ok.
JK “Puisque ils étaient habitués à les voir, de chez le Président, eux ils m'ont parlé de GP mais la
différence entre un GP et un para-commando c’est difficile à à savoir pour un civil. Parce que la différence entre
un officier de la garde présidentielle et un officier de para-commando, pour un civil, aller la chercher, moi je
ne la vois pas. Pour lui, les militaires qui sont autour du Président sont des GP, point.
PD -Ok. Puis, ces gens-là sont allés. est-ce que votre belle-famille vous ont décrit [sic] s’ils ont abattu
les gens chez eux ou si ils les ont emmenés et puis ils sont jamais revenus ?
JK -Je. heu. ils m’ont pas dit qu’ils auraient abattu quelqu’un chez eux, dans leur foyer.
PD -Aïlleurs, dans le quartier, est-ce que ça s’est produit ?
JIK -Qu'ils aient abattu des gens chez eux, dans leur maison, oui, ça s’est produit.
PD -Ça s’est produit. Est-ce qu’il y a des survivants de ça dans votre belle-famille ? Est-ce qu’il y a des
gens qui ont survécu à ça ?
JK -Des gens de ma belle-famille, oui.
PD -Oui ? Qui sont toujours heu... qui étaient toujours vivants selon ce que vous vous... vous connaissez
d'eux ?
JK -Oui.
PD -Ok. Est-ce que précisément vous avez en mémoire une personne qui vous aurait confié ces choses-là
qui serait toujours vivante ?
JK -Je ne sais pas si elle est vivante parce que les dernières informations que j’ai c’est que lui, il n’a pas

pu... il n’est pas rentré au Rwanda alors que les autres de sa famille étaient rentrés.



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PD -Ok. C’était qui cette personne-là ?

TK -Ils ont tous le même nom, ils s'appellent Ndahitegeye [phonétique], mais lui c’est un jeune homme,
je ne me rappelle plus de son prénom. Mais le nom c’est Ndahitegeye.

PD -C’est ça. Moi j’ai terminé avec ce chapitre-là

MD -Mais l’histoire des listes, est-ce que vous avez déjà entendu, est-ce que c’est des choses que vous
avez entendues, par d’autres personnes que Alfred, qu’il y aurait eu des listes de prêtes et qu’on sait que...
de, de gens à éliminer ? Est-ce que c’est un sujet que vous avez déjà entendu discuter, que vous avez déjà
entendu ailleurs ?

JK -Oui, c’est un sujet que j’ai entendu ailleurs dans d’autres quartiers, puisque dans d’autres quartiers
ça se faisait pratiquement de la même façon. Puisque dans d’autres quartiers, notamment dans mon quartier,
ça se faisait sur des noms, donc sur des... sélectivement, ce qui suppose qu’il y ait une liste préalable.

MD -Parce que c’était aussi très rapide ? Très rapidement après la mort du Président ?

K “où . un ea

MD -Ona réagit de façon très rapide, et selon ce qu’on disait il y avait des listes de préparées ?

JK -Oui.

MD -De gens ?

JK -Oui.

MD -Sélectionnés, à éliminer ? _
JK -Oui.

PD -Ila déjà été porté, je crois, à votre attention qu’il y a déjà eu un accident impliquant un officier des
FAR dans lequel, dans son auto, il y avait des listes de gens aussi, des gens qui auraient subi des
entraînements du FPR ?

TK -Je comprends pas bien.

PD -Vous avez pas déjà. on n’a pas déjà discuté ensemble qu’un officier des forces armées rwandaises
ou quelqu’un du gouvernement vous a déjà amené des listes, qui avaient été retrouvées lors d’un accident
d’automobile ou quelque chose comme ça ?

JK -Çaje ne me rappelle plus.

PD -Vous vous rappelez plus, ok.

MD -Mais l’histoire de, l’histoire de listes. est-ce que, est-ce que c’est quelque chose, quand vous étiez

au gouvernement qui a déjà été discuté, est-ce qu’il y a des gens déjà qui ont discuté de cette chose-là ?



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JK -Non.

PD -Pendant que vous étiez à Gitarama, votre service de renseignement vous a jamais apporté des listes
des gens qui auraient été entraînés ?

JK -C’est autre chose. |

PD -Ce sont aussi des listes ?

JK -Oui, mais ça, ça j’ai vu, oui.

PD -Ok. Ce sont aussi des listes qui étaient en possession du gouvernement ?

TK -Oui, ça j'ai vu, oui.

PD -Ok. C’est. ça c’est. c’est ces listes-là que je parlais.

JK Ça c’est pas. ça c’est... il ne s’agit pas des mêmes militaires qui étaient, qui avaient fait un accident,
ce sont des listes qu’on a retrouvées chez certaines personnes pendant le. que nous étions à Gitarama, et
| c'était des longues listes, donc il ne s’agissait pas de petites listes, c'était de longues listes, surtout des jeunes
qui, qui avaient fait des entraînements militaires. Co |

PD -Ou des gens qui avaient donné, des donateurs pour le FPR, ou des choses comme ça.

JK “Oui.

MD -On avait aussi parlé de listes... on, on, est-ce qu’on ne fabriquait pas des listes en identifiant les gens
qui participaient à des réunions politiques ?

PD -C’est cette liste-là.…

MD -Oui, c’est ça. Aussi là, des gens qui participaient à des réunions politiques, qui heu... on listait, on
listait les gens qui assistaient à ces réunions.

JK -C’est.… je dois préciser que ces listes ne..., d’après nous, n’avaient pas été faites par le côté du
gouvernement à l’époque, cela avait été fait directement par le FPR. Donc ces listes dont moi je parle.
MD -Ok, mais on a pa... on a discuté aussi de listes que les, que les militaires. que les militaires détenaient
de gens du, de, de, de sympathisants du FPR qui se réunissaient, de réunions poli... des réunions politiques

qu’on faisait ?

JK -Ça je ne suis pas au courant. Je parlais de liste qui ont été trouvées sur les gens du FPR..
MD -Oui.
TK -. qui avaient établi par eux-mêmes. pour eux-mêmes.

MD -Pour eux-mêmes, des listes de sympathisants, qu'ils avaient, à eux...

JK -Des listes pour eux-mêmes.



T2Kk7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h44) 13
{ANSS8TE
MD -Oui.
JK -Et qui ont été retrouvés sur eux. Ce qui est différent de, de, d'établir des listes des gens que vous
soupçonnez qu’ils participent à des réunions.
MD -Mais on a déjà discuté de listes que les FAR composaient à partir de, d'identité de gens qui
assistaient à des réunions politiques ?
PD -Je pense que c’est ces listes-là qu’on discute, là, ça... on discute exactement de la même chose. Ces
listes-là je crois qui étaient constituées, c’est ça, c’est les militaires qui avaient trouvé ça lors des saisies, des
perquisitions qu’ils avaient faites à Gitarama, je crois ?
JK -Oui.
PD -Puis, ces listes-là comprenaient les donateurs au FPR, les gens qui avaient subi des entraînements,
les gens qui, qui assistaient aux meetings puis les gens qui étaient de près ou de loin au FPR.
MD -Oui | .
+ | Avec la précision que ces listes n'ont pas été établies par les militaires, qu’elles avaient été établies
par les gens.
MD -Par le FPR ?
JK -… eux-mêmes qui étaient en réunion. Que c’était sur des, des. des formulaires pré-dactylographiés
sur lesquels on remplissait les noms de ceux qui ont participé à leurs réunions.

PD -Puis on avait établi lorsqu'on en avait discuté que c’était des listes qui avaient été en possession du

gouvernement …
JK Oui.
PD longtemps avant les événements de 94.

MD -Oui, oui c’est ça. Est-ce qu’on avait pas mentionné que des gens employaient des noms, des surnoms
pour cacher leur identité ?

JK -Moi j'ai précisé que je ne les ai vues que quand j’étais à Gitarama.

PD -C'est ça.

JK Que si, si le gouvernement avait fait ce qu'il avait à faire, c’est à dire si, s’il avait fait, si son service
de renseignement avait suivi les activités qui se faisaient dans le pays, il aurait pu être en possession de ces
listes, mais je n’ai pas confirmé que le gouvernement était en possession de ces listes avant 94, avant avril
94.

MD _-Bon, ça termine...



T2k7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h44) 14
KON565816

PD -Avez-vous besoin de vous absenter ?
JK -Non.
PD -Non, on va tourner le ruban.

Fin de la face A de la cassette # 66.



T2k7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h44) 15
ENANESRTT
Face B de la cassette # 66.
PD -Ok. Moi j'ai pas...
MD -Moi non plus, j'ai terminé sur ça.
PD -Heu.…. on pourrait peut-être passer au chapitre suivant, si vous voulez, s’il vous plaît ?
TK -C’est le 8.4.11. Ça concerne le président Sindikubwabo. Il a effectué des visites à Butare pendant
les massacres. Le président Sindikubwabo se rendait régulièrement à Butare où il demeurait, même que sa
femme l'a rejoint à Gitarama après la réunion du 19 [297] avril 1994. Il a été vu au... après cette période du
19 avril 94, visitant au moins trois communes de la préfecture pendant que les massacres des Tutsi avaient
lieu. Ce sont les communes de Gishanvu [phonétique], de Rwaninya [phonétique] qui toutes trois [?] étaient
fortement peuplées par les Tutsi qui ont pratiquement tous été éliminés. Dans chaque commune il devait tenir
une réunion et rencontrer les responsables comme son rôle de président de la République l’exigeait. J’ai en
mémoire une partie de son discours prononcé le 19 avril 1994 Jors de l'assemblée de nomination du nouveau
préfet de Butare. Les Tutsi se rassemblent dans les paroisses où on leur sert de la bouillie de sorgho pendant
que les Hutu chassés de leurs biens par le FPR restent dehors sous la pluie ou ils meurent de faim et de soif
Les gens se sont attardés à travailler alors que moi je considère cette dernière phrase beaucoup plus
importante, car pour la première, la première phrase il est possible d’avoir une équivoque mais pour celle-ci
c’est impossible. Le... le cas du nommé Karangano Emile [phonétique] qui est le frère du gendre du docteur
Sindikubwabo me [inaudible], au cours de la période après le 20 avril 1994, cet homme Tutsi qui avait obtenu
la protection du ca. d’un garde présidentiel via les recommandations du président Sindikubwabo continua
à vaquer à ses occupations commerciales, en se rendant au Burundi il fut intercepté sur une barrière et tué
avec son garde du corps. Ceci amena le président Sindikubwabo à écrire une lettre menaçante au ministre de
la Défense Bizimana, dans laquelle il expliquait que lui il se dévouait du mieux qu'il pouvait, que pendant
ce temps sa famille était massacrée. F’ai reçu copie de cette lettre.
PD -Le premier paragraphe s'adressant au Président. c’est, il a prononcé ça lors de la nomination du,
du nouveau préfet ?
JK -Oui.
PD -Vous dites, l’explication, vous dites ‘les gens se sont attardés au mot à travailler”, qui lui peut être
interprété de différentes façons ?
JK -Oui.

PD -L’interprétation qu’on lui donnait à ce moment-là, en avril 94, c’était quoi travailler ?



T2K7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h44) 16
KONSSETR

JK -Je dis que il pouvait recevoir plusieurs interprétations.

PD -Ok.

JK -Dont travailler, puisqu’effectivement il l’a, il l’a placé dans un contexte où les gens heu devaient
continuer à vaquer à leurs occupations habituelles, mais qui pouvait, la deuxième interprétation pouvait être
de dire de tuer les Tutsi. Donc il y avait deux interprétations possibles si on place le mot dans un contexte
donné.

PD -Ok. Ce mot-là, travailler.

JK -Oui.

PD -.. est-ce que c’était une utilisation récente, c'était. la première utilisation, s’il avait déjà été utilisé
précédemment au Rwanda ?

JK -Il avait déjà été utilisé au Rwanda.
PD -Dans quel titre ?

JK -Dans le sens de tuer les Tutsi.

PD -Est-ce que vous savez à qui heu... à qui, qui, qui, à qui incombe le, l’idée d’utiliser ce terme-là ?
JIK -Non je ne le sais pas.

PD -On remonte à quelle époque quand on utilisait le terme, la première qu’on a utilisé le terme travailler, que vous vous connaissez ? La première fois que travailler, non pas vous en 94, mais auparavant, la première fois qu’il a été prononcé le mot travailler c’est. en 59 ?

JK -C’est en 59.

PD -C'est en 59 ?

TK Oui.

PD -En 59, le mot travailler avait aussi la signification de tuer les Tutsi ?

JK -Oui.

PD -En 59, c'était une autre période trouble opposant les deux ethnies rwandaises ?
JK -Oui.

PD -Ilya des gens à ce moment-là qui ont utilisé travailler ?

JK “Oui.

PD -C’était qui qui utilisait le mot travailler ?

JK -C’était les Hutu.

PD -Les Hutu utilisaient le mot travailler envers l’ethnie Tutsi pour les éliminer ?



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KONS5819

JK -Oui.
PD -Quand le Président, le Président est un Hutu ?
JK -Oui.

PD -Quandil utilise le mot travailler dans la période qu’on connaît à ce moment-là, quand on arrive à
Butare, qu’il utilise ce mot-là, quelle. quelle interprétation voulez-vous que les gens donnent à ça ?

JK -Moi je ne lui donne pas nécessairement l’interprétation que les gens ont donnée. J'étais là, j'étais
présent, il a parlé, et j'étais. je l’écoutais.….

PD -Ok.

JK -. il a dit “vous, vous, vous ne pensez qu’à la guerre mais vous n’oubliez pas que vous mourir de
faim, si vous ne continuez pas à travailler, vous allez tous mourir de faim”. C’est.

MD -De faim ? |

JK Oui. C est pour ça que je m oppose au mot travailler qui a été, qu’on a voulu exploiter de travers,

à travers disons une déformation en remontant tout le temps et en allant à 59. pour justement appuyer. Il y |
a eu certainement de, de... dans le discours d’autres mots qui me semblent plus importants, et plus directs que
d’aller chercher des choses en fait qui n’ont rien à voir avec ce, le discours. Le mot travailler était placé dans
le sens de. vous devez continuer à vaquer à vos occupations, les soldats sont, sont sur le front, vous vous
devez continuer à travailler.

PD -Ok. Alors, vous le, le, le point fort du discours fut ce que vous citez ?

JK -Oui. Parce que les gens ils ont exploité un mot qu’ils savaient qu’il serait bien sûr facilement
interprétable, que les gens comprendront plus facilement dans la mesure où dans l'Histoire on l’avait déjà
utilisé.

PD -Je vous demanderai là de préciser, les gens ?

JK -Les.. j'ai écouté la, {es radios extérieures.

PD -Ok.

JK -F’ai écouté les, le FPR quand il accusait le docteur Sindikubwabo de dire voilà lui il a incité aux
massacres. Ils ont relevé ce mot et je dis ce mot n’a rien à voir avec. du moins dans le contexte qu’il l’a
prononcé, n’a rien à voir avec les massacres. Que s’ils avaient effectivement voulu analyser son discours, il
y avait d’autres morceaux de discours qui me semblaient beaucoup plus importants à relever qu’à relever le
mot travailler dans le contexte qu’il lui a donné.

PD -Ok. L'interprétation que vous vous donnez de travailler prononcé par le docteur Sindikubwabo est



T2k7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h44) 18
109:5890

pas la même interprétation que le FPR a donné
JK -Non, pas du tout.
PD -Par contre, vous, vous arrivez avec des propos comme “les Tutsi se rassemblent dans les paroisses
où on leur sert la bouillie de sorgho pendant que les Hutu chassés de leurs biens par le FPR restent dehors
sous la pluie et meurent de faim et de soif”.
JK -Oui.
PD -Les gens ils peuvent interpréter quoi de ça ?
JK -Parce que là c’est, c’est assez précis.
PD -Ça c’est plus direct ?
TK -C’est direct, c’est plus, c’est précis, donc si, si vous vous prenez deux groupes de gens, que vous
dites que certains sont. |
PD -Privilégiés ? |

CIK privilégiés, qu'on leur sert de la bouillie et que d’autres sont en train de mourir de faim, c’est, c’est
beaucoup plus précis, c’est beaucoup plus incitatif que de dire travailler dans un contexte où vous leur
demandez d’aller, de continuer à vaquer à leurs occupations.
PD -C’est de là que vous. vous dites que peut-être il y a des gens qui ont interprété les mots en
particulier dans un discours, puis les ont mis plus forts qu’ils devaient être, puis qu’ils ont laissé passer les
mots, les passages qui, vous vous interprétez comme étant plus incitatifs encore.
JK -Oui.
PD -Ok.
MD -Est-ce que, est-ce que le discours dans son ensemble n’a pas été un discours très dur de la part du
Président ? |
JK -C'’était un discours très dur, mais justement c’est pour ça que je... je lai... je ne comprends pas
comment ils ont pu relever un seul mot qui n’était que. placé dans un contexte, dans son contexte qui ne
voulait que dire, le mot travailler qui ne voulait que dire ce qu’il devait vouloir dire, puis qu’on a dit “il a fait
un discours dur” sans relever effectivement les passages, les vrais passages qui étaient les plus durs. Donc
je crois si, si on veut être juste, il faut, disons, remettre chaque chose à son, en son temps, et à sa valeur.
MD -Est-ce qu’il employait le mot travailler seulement qu’à une occasion ?

tr sc

ce contexte-là.



T2k7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h44) 19
FT,

HNNn:5321

MD -{n’apas, à votre connaissance, il n’a pas employé le mot travailler dans, dans d’autres phrases qui
auraient pu être interprétées de la façon, de la façon qu’on l’a fait ici ?

JK -Je n’ai pas en mémoire de, disons, d’autres phrases où, où il aurait pu utiliser le mot travailler lui-
même, donc le mot travailler pour, en guise d’incitation à la violence.

MD -Alors dans ce discours, dans ce discours-là, il y avait des phrases qui selon vous étaient clairement

.… incitatives ?

JK -J'ai. j'en ai donné une, dont...

MD -Ça, ça c’en est une aussi ?

JK -Oui.

MD -Etça ne pouvait pas, il ne pouvait pas y avoir d’équivoque, c'était clairement un appel à la violence?
JK “Oui.

MD -Est-ce que c ’était dans ses habitudes de, le Président, là, de parler de cette façon ?

JK -Detoutes façons moi je ne l'avais j jamais entendu parler, puisque lui. à part le, les discours en tant
que président du CND, ce n’était pas quelqu'un qui m'était familier. Ce n’était pas quelqu'un que je
connaissais.

MD -Pour quelle raison cette journée-là il aurait, il aurait employé un langage aussi heu, aussi clair pour
inciter, est-ce que c'était, est-ce qu’à Butare à ce moment-là, on dit que c’était à l’occasion là de la
nomination du nouveau, du nouveau préfet, est-ce que à Butare, à cette période-là, les massacres étaient déjà
commencé ?

JK -Dansles coins éloignés de la préfecture, dans la ville de Butare non.

MD -Dans la ville de Butare, ça n’avait pas commencé.

JK -Mais dans les coins des communes, dans certaines communes oui.

MD -Et on, on changeait de préfet et heu. le but de changer de préfet je pense, avec, si, si on fait une
association avec le discours, ça ne laissait plus beaucoup de doute sur la, sur le résultat qu’on voulait ?
JK -Non.

MD -C’était vraiment... on s’est... on a... on a pris une action politique qui était de changer le préfet, et
on a le Président qui vient là, sur place, et puis qui de façon assez claire incite la population à... à la violence?
C’était, c'était. c'était comme ça qu’on le voyait ? On voulait vraiment, on voulait vraiment heu. qu’il se
passe des choses à Butare ? C’était ça le but de... le but de changer le préfet et de, de, de, d’arriver avec un

discours de cette nature ? C’était de, d’avoir un, d’avoir des résultats, qu’on commence à travailler ?



T2k7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (1 1h44) 20
KONSE58929

JK -Je ne peux pas confirmer si c’était le but maïs le résultat fut celui-là, oui.
MD -Le résultat fut celui-là. Est-ce que vous vous avez pris la parole à cette occasion ?
JK -Oui.
MD _-Et quelle, quelle a été le ton de votre discours à vous ?
JK -Je ne me rappelle pas de, disons du ton du discours que j’ai prononcé, mais je ne dois pas être, m’être
éloigné de la ligne.
MD -De la ligne qui avait été établie ?
JK -Oui.
MD -Le Président, qui heu. est-ce que vous savez qui écrivait ses discours ?
TK -Non.
MD -Vous savez pas ?

T JK -Non.

MD -Dans une situation comme ça, vous est-ce que les, les, vos discours c’est vous-même qui les aviez

écrits ou... ?
JK -Moi je n’ai pas, ce n’était pas un discours comme tel, parce que c’est juste quelques mots que j’ai
placés, mais je n’ai pas fait de discours. Parce que je ne me rappelle pas avoir préparé un discours comme tel.
MD -Alors, après cette visite, après cette nomination, après cette visite, à Butare, les massacres ont
commencé, c’était clair ?
JK -Oui.
MD -Sindikubwabo était pas connu comme heu... un personnage qui prenait beaucoup de, qui prenait
beaucoup d’espace, qui s’impliquait beaucoup dans ces choses-là ?

7 JK -Dans quoi ?
MD -Dans, dans. sa présence politique était plutôt effacée ? C’était pas un homme d’envergure ?

| JK -Pas.. peut-être pas à son âge.

MD -A cause de son âge ?
JK -Oui.
MD -Est-ce que c'était avant la retraite ?
JK -Oui.
MD -C’était avant la retraite. Est-ce qu’il faisait souvent des discours ?
JK -Chaque fois qu'il avait l’occasion il le faisait, oui.



T2k7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h44) 21


K0955823

MD -Est-ce qu’à votre connaissance il a. vous avez entendu dire qu’il aurait tenu ces propos-là à d’autres

occasions ?

TK -Non, j'ai pas entendu dire qu’il aurait tenu d’autres. ces propos-là à d’autres occasions mais j’ai
entendu dire qu’il a visité d’autres communes, comme [inaudible], et que dans ces communes, dans ces

communes il a nécessairement rencontré les responsables. Sans nécessairement rencontrer toute la population,

mais il rencontrait les responsables de ces communes-là.

MD -Etil a pu prendre la parole aussi ?

JK -Ila pu. Je ne vois pas comment il aurait pu passer dans une commune et renconirer les responsables

sans prendre la parole.

MD -Est-ce qu’il se servait des médias pour communiquer, radio, heu. journaux ?

JK -De temps en temps il communiquait à la radio oui.

MD -Est-ce que vous l'avez déjà entendu tenir des propos de cette nature à la radio ?

K -Non. Je n’ai i pas en mémoire disons des discours à la radio de cette nature-là. Mais il a fait des

discours à la radio.

MD -La deuxième partie.

PD -As-tu d’autres choses que tu veux à ajouter là-dessus ?

MD -Non, pour les discours heu... je sais pas...

PD -Vous, il y avait autre chose que vous aimeriez ajouter ?

JK -Non.

PD -Ça nous amène à parier de. du frère du gendre de Sindikubwabo. Cet homme-là avait, était Tutsi,

commerçant, il avait la garde de, il avait un garde présidentiel qui l’accompagnait toujours ?

JK -Oui.

PD -Ça c’est après le... c’est après le 20 avril ?

JK -Oui.

PD -C’est après votre passage à...

JK -Butare, oui.

PD -Vous est-ce que vous êtes relié de près ou de loin à... au fait qu’il y ait eu un, un garde présidentiel

avec lui ? La demande vous avait été faite à vous ou si...

JK -Non c’est que lui, quand il s’est adressé au. au ministre de la Défense, il m’a donné une copie.

PD -Lorsque, lorsque Monsieur le Président s’est adressé au ministre de la Défense, il vous a donné une



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Via Ra n RP e 25 nn MAR SRE D ES

KOUS5 824

copie ?

JK -Oui.

PD -Ok. C’était une lettre de protestation, suite au meurtre de ce...
JK -Oui.

PD -.… de cette personne-là.

JK -Oui.

PD -C’est comme ça, c’est pour ça que vous dites Ça, c’est pour ça que vous en venez à en parler dans
votre déclaration ?

JK -Oui.

PD -Parce que vous parlez de Sindikubwabo, et Monsieur Sindikubwabo, vous parlez de... de [inaudible].
MD -Moi j'ai pas de...

PD -Est-ce qu’il y a d’autres informations qui vous sont parvenues relativement à cette. ce meurtre-là?
JK -Non. | |

PD -Non ? C’est les seules que vous avez eues ?

JK -Ce sont les seules, oui.

PD -C’est ce qui aurait causé un froid ou un... un problème entre Monsieur Bizimana puis Monsieur
Sindikubwabo ça ?

JK -Sûrement. Et ça. c’est pas, ça a pas transpiré jusqu’à moi, mais c’est... le ton de la lettre nous
montre qu'il y a déjà un problème entre les deux.

MD -C'’était dur la lettre, le ton de la lettre était assez sévère ?

JIK -Oui.

PD -Vous vous aviez ça, cette lettre-là, chez vous, dans vos papiers ?
JK -Oui.

PD -C’est pour ça que vous nous en parlez dans votre déclaration ?
JK -Oui.

PD -Ok.

MD -Non, j'ai pas d’autres questions, d’autres questions.

PD -Je vous demanderai à parler du chapitre suivant, s’il vous plaît.

JK -C’est la mort d’Agathe Uwilingiyimana, c’est le 8.4.12. J'ai téléphoné à Karangwa Evariste qui est Tutsi, gendre du docteur Sindikubwabo, parrain de mon fils, et qui réside aux Etats-Unis actuellement,



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KONS5828

il occupait l'immeuble de son beau-père, l’immeuble du CND, car menacé chez lui à Gikondo. Moi, vers 11 heures, le 7 avril 94, j’ai vu et entendu des mouvements et des coups de feu chez Agathe Uwilingiyimana. Je lui ai téléphoné car voisin d’elle. On se sauvait tous, se demandant lequel serait le suivant. Il me confirma les coups de feu chez la première ministre. J'ai vu le blindé de la MINUAR descendre de la colline de Kimihurura et remonter sur la colline de Kiyovu, il était en direction de chez Agathe Uwilingiyimana. Les responsables des partis politiques et le comité militaire de crise étaient en réunion non loin de là. Impossible qu’ils n’aient rien entendu, il y eut plusieurs coups de feu, moi je les ai, je les entendais. Le général-major Ndindilimana aurait réagi, originaire de la même commune qu’ Agathe Uwilingiyimana, en démontrant son incapacité à réagir. Karamira, vice-président du MDR, m'a dit, je me rappelle très bien, quand il est venu me chercher chez moi à Kacyiru, “Ibya Agatha byabaye ngombwa ko tubi.. tubirangiza ngo tubone uko dushyiraho guverinoma”, traduction libre : “il a été nécessaire d’en terminer avec Agathe Uwilingiyimana afin de pouvoir mettre en place notre gouvernement”. Il m'a dit ceci car c'était pour lui et moi, croyait-il, une bonne nouvelle car je pouvais enfin accéder au poste de premier ministre. Je ne ressentais pas nécessairement la même joie que lui, car j'avais peur, lorsque j’ai vu arriver chez moi le véhicule militaire je me suis caché jusqu’à ce que mon escorte vienne me dire que c’était Karamira. Il est entré dans la maison, avec moi, car il disait quelque chose à m’annoncer, que nous devions être à l’écart pour qu’il me le dise. A l’intérieur il m'a dit qu’il m’attendait à l’école supérieur militaire, que j’étais nommé premier ministre et que je ne devais pas avoir peur, que tout était arrangé. Après il m’a informé sur Agathe Uwilingiyimana, mais moi j'avais déjà tiré mes conclusions, qu’Agathe Uwilingiyimana était morte suite à ma conversation avec Karangwa Evariste.
Selon ma conclusion, il a dû y avoir un consensus entre les chefs des partis et le comité militaire de crise sur
son assassinat.

PD -Quels liens aviez-vous avec Monsieur Evariste ?

TK -C'’est ce que je viens d’expliquer, il était le parrain de mon fils.

PD -Comment est-il venu à être parrain de votre fils, est-ce que ce serait un ami d’enfance, c’est un...?
JK _-C’est quelqu'un que je connaissais, qui habite la même région que moi, dans Butare, et puis que...
qui a fait les études en même temps que moi en Belgique. C’est quelqu’un que je connaissais depuis très
longtemps.

PD -C’est un ami qui... de longue date ?

JK -Oui.

PD -Ilya beaucoup de... il y a beaucoup d’informations dans le court texte que vous [inaudible], on va



T2k7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h44) 24


K0N55826

essayer de, de les diviser. Le 7 avril c’est le matin, à onze heures, que vous heu, vous voyez les mouvements
puis des coups de feu chez Agathe ?

JK -Oui.

PD -Est-ce que vous pouvez voir la maison, chez Agathe, de chez vous ?

JK -Peut-être pas la maison, maïs le quartier oui.

PD -Le quartier ?

JK “Oui.

PD -Vous saviez... vous saviez où demeurait Agathe ?

JK -Oui, puisque j'avais été chez elle plusieurs fois.

PD -Ok, c’est comme ça que vous pouvez situer dans le quartier, elle demeurait dans quel quartier ?
JIK “Elle demeurait tout près de l’école supérieure militaire. C’est dans Kiyovu.

PD -Ok.

JXK -Heu... je crois avoir dessiné où se trouvait sa maison.
PD -C'était pratiquement face à chez vous ?

TK -Pas vraiment en face, puisque c'était heu, disons en face mais un peu vers la gauche.

PD -Ok. Mais sur une autre colline ?

TK -Sur une autre colline, c’est la colline d’en face.

PD -Ok. Vous voyez ces mouvements-là, puis vous entendez des coups de feu ?

JK -Oui.

PD -Vous téléphonez à Monsieur Evariste ?

JK -Oui.

PD -Lui vous confirme quoi ?

JK -Ilme.. c’est à dire qu’il me confirme que les... les coups de feu viennent de chez la première ministre.
PD -Ok. À ce moment-là, c’est là que vous, vous interprétez, dans cette conversation-là, qu’il a dû arriver
malheur à elle ?

JK -Oui. Parce que de toutes façons, si on... à ce moment-là, à cette époque-là, si on disait qu’il y a des
coups de feu, qu’il y a des militaires qui sont entrés dans une résidence, qu'ils tirent, ça veut dire que la
personne était complètement morte.

PD -Est-ce que beaucoup d’interventions menées par les militaires furent faites de jour ?

JK -Je crois que les interventions n’avaient pas de limites de temps. Elles se faisaient de jour comme de



T2k7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (1 1h44) 25


KON55827

nuit. Donc il n’y avait pas, il y avait pas eu des interventions où les gens devaient se cacher ou attendre la
nuit, non, les interventions se faisaient de jour comme de nuit. Donc c’est, c’était…

PD -A 11 heures le matin, le fait d'entendre des coups de feu.

JK -Ce n’était pas quelque chose d’anormal ou d’extraordinaire, c’était, c’était en période de guerre, où
il y avait des coups de feu à gauche à droite, donc la question était de savoir d’où ça venait, d’où ça venait
c’est tout, la question n’était pas savoir les coups de feu, on entendait des coups de feu, mais la question de
savoir, elles sont. ils sont chez qui ces coups-là.

PD -Quand vous avez identifié que les coups de feu. vous étiez chez vous, à votre maison ?

JK -Oui.

PD -A Kaciyru ?

JK -Oui. |

PD -Vous avez entendu les coups de feu qui venaient de la colline d’en face ?

PD -Vous avez vu les mouvements ?
JK -Oui.

PD -C’est pas personne qui vous a appelé, c’est vous qui avez appelé quelqu’un ?

JK -C’est moi qui ait appelé.

PD -Vous communiquez avec Monsieur Evariste ?
JK -Oui.

PD -Qui vous confirme, lui, il peut voir visuellement, est-ce qu’il peut voir le, le...

JK -Il habitait tout près. Il habitait tout près. C’était quelques maisons par rapport à La résidence de la
première ministre. |

PD -Ok. Là hi il vous confirme qu’effectivement c’est chez Madame Agathe qu'il y avait les problèmes”?
JK -Oui.

PD -Vous voyez, par la suite, le blindé de la MINUAR ?

JK -Oui.

PD -C'est longtemps après ?

JR -Je ne peux pas préciser, dire... parce que je n’ai plus disons en mémoire le temps qui s’est écoulé
entre les coups de feu, entre tous ces mouvements, mais j’ai décrit seulement les événements tels que je les

ai vécus.



T2k7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h44) 26


KONS5828

PD -Ok.

JK -Je n’ai pas... à les placer dans le temps.

PD -Ok. Chronologiquement vous êtes pas capable d'établir le temps qui existe entre les deux.

K -Non. |

PD -Mais vous avez identifié le, blindé se rendant dans le quartier, chez Agathe ?

JK _-Oui. Puisqu'il était facilement identifiable, dans la mesure où il était tout blanc. Avec les inscriptions
UN, de façon très visible. Donc il n°y avait pas d’autres blindés blancs dans la ville.

PD -Etle… ce blindé-là se... par la suite, est-ce que vous avez su qui il transportait ?

JK -Non.

PD -Vous avez jamais, vous vous êtes jamais informé à savoir... quand vous avez rencontré d’autres
personnalités ou d’autres responsables, à savoir, même plus tard, lorsque vous étiez premier ministre, à savoir
qui s’était rendu dans ce quartier là ?

K -Non, je, je présume que ça doit être le général Dallaire dans la mesure où je sais qu’il a assisté à
une... il assistait à la réunion qui a eu lieu à l’école supérieure militaire, et que dans tous les cas, les. il se
déplaçait, tel que moi je l’ai vu, dans un véhicule blindé chaque fois qu’il se déplaçait. J’ai, je peux dire,
sachant qu’il a assisté à une réunion dans ce quartier, et que je l’ai vu, personnellement, se déplacer dans un
véhicule blindé, blanc, qu’il est probable que ce soït lui qui faisait ce déplacement-là.

PD -Selon vous, cette réunion-là se serait tenue après la mort d’Agathe ?

JK -Non, la mort... Agathe est morte pendant que la réunion se tenait. Donc la, la... les coups de feu,
donc là se sont des informations que j’ai eues par des gens qui étaient en réunion, qui ont entendu les coups
de feu pendant que la réunion se tenait. |

PD -Auquel [sic] assistait le général Dallaire ?

JIK “Oui.

PD -Ok. Ça c’est, c’est heu. qui vous a dit ça ? C’est. est-ce que c’est Monsieur Karamira qui vous
rapporte ça ?

JK -Oui, il me l’a dit, mais d’autres personnes qui étaient en réunion me l’ont dit aussi, dont le général
Ndindilimana lui-même.

PD -Vous ont dit que pendant qu’ils étaient en réunion, les. ça c’est à proximité, là...

JK Oui.

PD -..onest tout près. Ils entendent des coups de feu chez Agathe ?



T2k7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (1 1h44) 27
10055826

JK -Oui.

PD -Leur réaction a été quoi ?

JK -Ily a pratiquement pas eu de réaction. Ils ont laissé faire.
MD -Sion…

PD -Vas-y, vas-y.

MD -Si on, si on situe votre maison, vous êtes beaucoup plus loin que le comité qui est réuni ?

JK -Il y a aucune mesure, il y a aucune distance.

MD -Et vous, vous êtes en mesure d’entendre les coups de feu ?

JK -Oui.

MD _-Et de déterminer la direction, de dire ça vient de cette région-là, à un tel point que vous appelez un
voisin pour confirmer ?

JK -Oui.

MD _ -Parce que vous êtes là...vous pouvez. .

JK -Oui.

MD -Alors, les autres, l’autre groupe qui est, qui est à côté, qui est voisin, ne peut pas ne pas avoir
entendu.

TK -Non, ils l’ont entendu, ils savaient.

MD -Et ils savaient d’où ça venait ?

JK -Ce n’est pas possible de toutes façons de ne pas entendre ces coups, si on est...

MD -Et de ne pas déterminer la direction ?

JK -. à quatre ou cinq kilomètre à vol d’ oiseau et puis qu’on pouvait les entendre, que les autres sont
à deux cent, trois cent mètres, je ne vois pas comment ils n’auraient pas pu entendre ça.

MD -Est-ce que vous ça vous a surpris d’entendre les coups de feu qui venaient de chez Agathe ?

TK -Non. Non.

MD -Comment se fait-il que ça vous ait pas surpris ?

TK -Comment voulez-vous que ça me surprenne puisque je savais que les, les gens qui, les opposants au
président Habyarimana étaient en train d’être tués ?

MD -A ce moment-là vous saviez ça, ça avait été.

JK -Oui.

MD -C'était publié ?



T2Kk7#66 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h44) 23


KOU5S5620
TK -Ça n’aurait pas été publié, mais nous, l'information.
MD -Mais dans les. à la radio est-ce que...
JK -Non, à la radio, non, pour l'information que nous avons eue nous n’avons pas utilisé la radio ni la

télévision ni les journaux. Nous nous communiquions les informations. moi j'avais un téléphone chez moi,
je téléphonais pour savoir ce qu’il se passait dans la ville de Kigali. Donc je savais exactement ce qu'il, ce qui
était en train de se passer, pour [inaudible].

PD -On va devoir interrompre le temps de changer les rubans. Est-ce que vous devez vous absenter ?
JK -Non.

PD -Non?

Fin de Ia face B de la cassette # 66.



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