Fiche du document numéro 22227

Attention : ce document exprime l'idéologie des auteurs du génocide contre les Tutsi ou se montre tolérant à son égard.
Num
22227
Date
Mardi 19 mai 1998
Amj
Auteur
Fichier
Taille
1007586
Pages
26
Titre
Interrogatoire de Jean Kambanda - Cassette # 65 [André Rwamakuba et Aloys Ntabakuze]
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Source
Type
Audition judiciaire
Langue
FR
Citation
K0055776

Face A de la cassette # 65.

PD -Alors 10 heures 46, toujours le 19 mai, nous reprenons, nous poursuivons le cas de Félicien Kabuga.
MD _-En ce qui me concerne j’avais terminé, j'avais pas d’autres choses.

PD -A votre connaissance Monsieur Kabuga occupait-il une fonction au sein d’un parti politique ?
JK -Non, c’est à dire peut-être pas une fonction formelle mais compte-tenu de son influence il avait une
respectabilité heu. pour le parti MRND.

PD -Sans lui connaître de fonction officielle ?

JK -Je ne lui connaît pas de fonction officielle.

PD -Ok. Avez-vous autre chose à ajouter aujourd’hui sur Monsieur Kabuga ?

TK -Non.

PD -La dernière fois que vous l’avez vu Monsieur Kabuga, il était à quel endroit ?

JK -Il était à Nairobi.

PD -A Nairobi. Il vivait là ? ‘

JK -Oui.

PD -Est-ce que vous avez eu à le rencontrer quelques fois le temps que vous étiez là ou. ?

K -Non, à part les fois que j’ai relatées je n’ai pas eu d’autres contacts avec lui.

MD -Est-ce qu’il a des activités commerciales à Nairobi ?

JK -Je pense que oui.

MD -Quelles seraient ses heu. est-ce qu’il a des relations à Nairobi, est-ce que vous connaissez des gens
avec qui. est-ce qu’il a... est-ce qu’il maintient des contacts avec la, avec les milieux rwandais ?

JK -Sûrement.

MD -Ok. Donc le prochain sujet.

PD -Ce chapitre c’est le 8...

JK -8.4.9. Il s’agit de Rwamakuba André [phonétique], ministre de l’Enseignement primaire et

secondaire. J'ai vu, pour la première fois, Rwamakuba André lors de l’assemblée du comité national

provisoire du MDR. Alors que ceci représentait l’organe suprême de ce parti. Il faisait des apports remarqués

lors de cette assemblée tenue en 91-92, si bien qu'il fut élu membre du comité préfectoral pour sa préfecture

de Kigali-rural en août 92. I occupait aussi un des quatre postes de direction de ce bureau mais je ne peux

préciser lequel. A ce titre il devait aussi occuper un poste au sein du bureau politique national du parti, qui

était l'organe exécutif de celui-ci. J’émets cette dernière hypothèse sous réserve de vérifier dans mes notes



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que vous avez saisies la validité de mon énoncé. Faisant référence à la scission dans notre partie le MDR en
fin 1993, Rwamakuba s’associe à la majorité que l’on identifia plus tard comme MDR-Power. Et à ce titre
il fut proposé par Froduald Karamira, deuxième vice-président du MDR au niveau national pour occuper
un poste de ministre dévolu à sa préfecture de Kigali-rural. L'opposition de Nsengaremye Dismas alors
premier vice-président du MDR au niveau national à sa candidature fera que sa candidature sera rejetée au
niveau national, au niveau du bureau politique national. Il demeura actif dans le parti au point que le 8 avril
94, il sera présenté par Karamira et Murego en tant que représentant du MDR pour entrer dans le
gouvernement intérimaire. A ce titre il fut nommé ministre de l’Enseignement primaire et secondaire, un
ministère qui m'était dévolu avant que je ne sois nommé premier ministre. Ce cheminement est particulier
sinon... si on le compare au mien et à ceux de Jérôme Mujamunyaka [phonétique] et Eliezer Niyitegeka.
Nous nous étions proposés pour occuper un ministère depuis la signature des accords de mise en place d’un
gouvernement transitoire à base élargie à à Arusha en août 1993, tandis que lui sa candidature lui avait été
| refusée à ce moment-là pour finalement hui être ‘offerte par la vacation causée par ma nomination au poste
de premier ministre. Comme individu, ce que je connais de Rwamakuba je l’ai appris depuis 1991-92, dans
le cadre de la formation du parti MDR. Je sais qu’il s’agit d’un homme marié, père d’enfants dont j'ignore
le nombre, qu’il occupait un poste de directeur de projet de santé familiale au ministère de la Santé. Il
s’agissait du plus important projet au sein du ministère. Les discussions que j’ai eues avec [nom inaudible]
m’ont permis de constater qu’il était très apprécié par celui-ci et que sa compétence ne faisait aucun doute.
Cette dame, Rudakubana Spéciose [phonétique], une infirmière originaire de Butare, que j’ai rencontrée
à Nairobi en 1997 n’avait aucun intérêt à vanter ses mérites. Donc je crois que son appréciation doit être
juste. Le docteur Rwamakuba bégayait légèrement. Ses interventions sont toujours directes au but et sans
détour, et généralement à propos. Il habitait dans le voisinage de Froduald Karamira en 1994, dans le secteur
de Nyamirambo. Au sein du gouvernement intérimaire il lui fut confié la tâche de tenter d’organiser
l’enseignement malgré la guerre, en particulier il devait permettre aux finalistes des écoles secondaires de
parachever leur formation en organisant des sessions dans des endroits considérés comme sécuritaires, pour
ce faire un budget spécial lui sera attribué. Cette décision prise par le gouvernement au mois d’avril 1994 doit
apparaître dans les procès-verbaux des conseil des ministres qui sont demeurés en partie à Bukavu et en partie
à Goma. Cette décision ne précisait aucun endroit. On devait trouver des endroits sécuritaires, comme
gouvernement nous entendions par sécuritaires les endroits contrôlés par notre force armée, donc dans les

préfectures de Gitarama, Butare, Gisenyi, Gikongoro, Cyangugu, Ruhengeri et une partie de Kigali-rural.



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Pour accomplir la tâche, il avait, que lui avait confiée le gouvernement il a été amené à circuler dans ces
régions. Il n’avait pas à rendre compte des moyens qu'il utilisait mais devait nous aviser des résultats obtenus.
Je sais que des résultats furent obtenus car des jeunes furent diplômés. Concernant la tenue de réunions à des
endroits et à des moments précis, il m'est difficile de préciser les activités du Docteur Rwamakuba.

A cette époque d’avril 1994, les discours tenus par des politiciens sont considérés aujourd’hui comme enflammés, par contre si on se replace dans le contexte de 1994 il était impossible de tenir d’autres propos. Ces discours étaient axés sur des valeurs sur lesquelles une majorité de la population était menée. Ces valeurs étaient les suivantes : préserver les acquis de la révolution de 1959 [inaudible] que celle-ci évoque, la démocratie par opposition à la féodalité, à savoir le pouvoir de la majorité de la population, la république en lieu et place de la monarchie, à savoir que le FPR représentait la monarchie et la féodalité et le refus de la révolution sociale de 59. Ces trois volets se voulaient être défendus par le gouvernement et les FAR. Ces trois valeurs étaient celles véhiculées depuis plus de trente ans. Depuis la mise en place de la république rwandaise en 1961. Ces valeurs sont le squelette de tous les discours politiques de tous les politiciens, qu’ils soient tendance dite modérée ou dite extrémiste, à partir de ces trois thèmes des personnes publiques ont décidé selon les circonstances et leurs convictions personnelles d’aligner leurs discours et selon moi des vrais extrémistes ont, dans leurs discours, fait comprendre qu’une ethnie, en l’occurrence l’ethnie Tutsi, voulait leur faire perdre leurs acquis. Ceux-ci sont les purs extrémistes. Par contre dans le contexte de la guerre le seul pouvant faire perdre ces acquis ne pouvait être que celui qui avait pris les armes, en l’occurrence le FPR. Jusqu’à son
départ vers la fin de mai, Rwamakuba participait aux réunions du gouvernement comme les autres ministres.
Son départ fut précédé par sa prise dans une embuscade survenue à Gatagara, située entre Nyanza et
Gitarama, alors qu’il revenait de Gikongoro par la route de Butare. Il réussit à prendre la fuite avec un de ses
gardes du corps et à regagner Gitarama. Il a quitté le pays sans avertir personne du gouvernement. Son
épouse avait déjà quitté le pays et avait trouvé refuge auprès du frère de son mari à Addis Abebe en Ethiopie,
diplomate à l'OUA. Concernant les massacres survenus à l’hôpital de Kigali connu sous le nom de Centre
hospitalier de Kigali, il m'a été rapporté, alors que j'étais premier ministre, que des gens d’ethnie Tutsi, tant
du personnel soignant que les malades, y avaient trouver refuge. Des gens que je ne peux identifier les ont
pourchassé à cet endroit, dans le but de les éliminer. La morgue de l’hôpital aurait été tellement pleine que
des cadavres auraient été gardés à l’extérieur. J’ai appris ces informations après les discussions avec Monsieur
Gaillard de la Croix-Rouge, sur des problèmes d’ensevelissement des corps. Il avait été décidé, dès le début,
tout... dès le tout début de rassembler les corps des politiciens et des grands à la morgue afin de pouvoir leur



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donner des obsèques dignes de leur rang lorsque l’occasion se présenterait. Cette décision fut prise avant ma
nomination car la majorité de ces personnes ont péri le 7 avril 1994. Je crois que cette décision était connue
du général Ndindilimana, responsable de l’Etat-major de la gendarmerie. Je tiens cette impression d’une
rencontre que j’ai eue avec lui au cours de cette période. Certains corps s'y trouvant ont même été déplacés.
Je prends l’exemple du corps du premier ministre Agathe Uwilingiyimana qui fut déplacé jusqu’à Butare où il fut retrouvé à la morgue. Comme médecin, le docteur Rwamakuba pouvait se rendre à ce centre hospitalier, de plus sa responsabilité du projet de santé familiale le rattachait à cet hôpital. Il n’y avait pas eu de transfert de ses pouvoirs à ce projet. La preuve étant que même comme ministre il utilisait toujours le
véhicule de ce projet. La présence à un endroit où se tenaient des massacres d’une personnalité politique telle
un ministre est aujourd’hui interprétée comme une participation directe à ces gestes, et ces massacres furent
commis avec ou sans son consentement.

PD -Il y a le, il y a l’épisode de sa nomination là qui est un peu heu... qui est un peu difficile à expliquer,
pourquoi avez-vous décidé de nous entretenir sur cette nomination-là, la façon dont il a été nommé ? Quelle
importance ça peut avoir, c’est. au niveau de la formation de votre gouvernement ?

JK -C’est la... la légitimité des nominations au sein du gouvernement que j’ai dirigé. Parce que la plupart
du temps les, les gens disent, j’ai déjà entendu parler de ça, que des. des personnes ont été choisies par
hasard ou alors parce qu’ils avaient des allégeances particulières avec le MRND. Alors qu’il y a eu tout un
processus pour arriver à ces nominations, en ce qui concerne mon parti notamment. J’ai, j’essaye d'expliquer
que le fait que je me sois retrouvé... j’essaye d’expliquer indirectement que le fait que je me sois retrouvé
premier ministre en avril 94 n’était pas le fruit d’un hasard effectivement puisque j'étais déjà sur la liste de
ceux qui étaient proposés par le parti pour occuper ce poste, bien avant les événements d’avril 94. Et que je
n’étais pas le seul dans ce cas. C’est pour cela que j’amène le cas d’André Rwamakuba pour le situer, puisque
lui il avait été refusé, à une certaine époque, comme candidat du parti à un poste de ministre, et que malgré
tout il a été repris, notamment par le fait que moi le poste que je devais occuper était libéré.

PD -Ok. Lui fut pressenti ou mit sa candidature, déposait sa candidature pour obtenir un... pour être
ministrable ?

JK -Oui.

PD -Ila été refusé par ?

TK -C’est à dire, [inaudible]

PD -L'’assemblée générale ?



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JK -Oui.
PD -Par une intervention d’une personne dirigeante de votre parti ?
TK -C'’est ça. Qui a expliqué au niveau de l'assemblée que... pourquoi on ne devait pas retenir cette

candidature, effectivement la candidature n’est pas passée, mais par l'intervention d’une personnalité
importante au sein de notre parti.

PD -Pouvez-vous la nommer cette personne-là, là qui est intervenue ?

TK -C’est Nsengaremye Dismas.

PD -Ok. Monsieur Dismas est intervenu, ça l’a fait que l’assemblée a rejeté la candidature de cet individu-
là.

JK “Oui.

PD -C'’était quoi l’idée d’aller le récupérer ?

K -Ça c’est pas à moi de répondre, peut-être les. quand on l’a récupéré on ne m’a pas demandé mon
avis. | LL |
PD -Ok. Il a été nommé en même temps que vous ?

TK -Oui.

PD - Alors quand vous êtes arrivé, au gouvernement, à la nomination, à la mise en place du gouvernement
intérimaire, à l’école militaire, il était là ?

JK -I était là, oui.

PD -Ilétait….il vous a précédé à cet endroit là ?

JK -Je ne sais pas s’il m’a précédé ou si je l’ai précédé mais je sais que il était là.

PD -Ilétait là.

JK -Oui.

PD -Est-ce que vous avez eu à discuter avec lui pendant le temps qu’il avait occupé des fonctions

parallèles. de sa nomination, qui l'avait récupéré lui, puis comment ça c'était produit ?

K -Non, je crois que je... ça aurait été de ma part indécent de, d’aller discuter de, avec lui, de cette
nomina… de comment il a été récupéré. Et d’ailleurs je n’y ai pas pensé. Je n’ai pas discuté avec lui de ça.
PD -C'’est pas quelque chose qui vous a effleuré l’esprit de savoir comment se fait-il que lui il soit ministre
dans mon, dans mon gouvernement.

JK -Non. Parce que je ne m'étais pas posé les mêmes questions pour d’autres hommes dans d’autres

partis.



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PD -Vous parlez du cheminement que vous... ce cheminement est particulier si on le compare au mien,
à ceux de Jérôme, à ceux d’Eliezer.. Vous il y a longtemps que vous postuliez des postes sur les rangs, c’est
ça ? Vous étiez sur les rangs pour postuler un poste ?

JK -Oui.

PD -Lui non?

JK -Il avait été, mais il avait été écarté par l’organe habilité à le faire.

PD -Ok, contrairement à vous trois.

MD -Quandil a été nommé en 94, c’était par les mêmes personnes qui vous avaient, qui vous ont proposé,
qui vous ont nommé aussi ?

JK -Oui.

MD -Au sein du parti...

JK -C est à dire oui et non. Les personnes qui m “ont proposé au sein du parti ne font, n "ont fait que
exécuter une décision qui avait été prise par un organe qui leur est supérieur, donc ils étaient chargés
effectivement d’exécuter une décision du bureau politique qui me proposait comme ministre, comme premier
ministre. Alors ils ont exécuté la décision. Mais par contre, ils ont pris sur leur responsabilité la proposition
du docteur Rwamakuba. C’est ça la différence.

MD -Alors c’est... c’est heu. alors vous reliez vous le fait que vous avez été nommé premier ministre
au fait que vous aviez déjà été proposé ?

JK -Oui. Par mon parti.

MD -Par votre parti.

JK -Oui.

MD -Par contre dans son cas, lui-même, s’il n'avait pas été proposé, il a été aussi nommé.

JK -Oui.

MD -On avait déjà discuté le fait que avant que ces gens-là aillent vous chercher, qu’on avait... cette
chose-là avait sûrement été discutée avec le comité de crise à ce moment-là, les gens, les gens qui ont été,
qui ont été identifiés, et heu. sûrement que leur candidature devait être approuvée.

JK -Certainement, parce que... le. de toutes façons le gouvernement était formé bien avant que nous,
les candidats ne soient convoqués.

MD -Ok.

TK -Donc ça, le gouvernement n’a pas été formé, contrairement à ce qui a été dit quand nous sommes



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arrivés au, à l’école supérieure militaire, il était déjà formé, puisque on a convoqué des individus bien
particuliers. On n’a pas convoqué tout le monde pour décider de la mise en place du gouvernement.

MD -Mais vous nous dites que cette personne-là au début, heu, lors de l'assemblée de comité, heu. il
faisait des apports remarqués lors de ces assemblées. Ces apports remarqués, est-ce qu’ils. c’était quoi, il

prenait, il prenait position, il... il faisait des propositions, c’est. qu'est-ce que vous voulez dire par apports

remarqués ?

TK -Non, c’est. l’histoire du Rwanda ne se limite pas aux massacres et.

MD -Non, d'accord.

TK -.. au génocide en 94. Nous avons créé un parti entre 91 et 92 et dans les discussions que nous avons

eues, au niveau de l’opposition, parce que nous étions connus comme le plus grand parti d’opposition, on
devait prendre des... on devait se démarquer par rapport à la situation qui prévalait dans le pays à cette
époque-là, et c’est dans ce sens R que j “ai dit que le docteur Rwamakuba faisait des apports remarqués.
Comme un parti d'opposition, « comme quelqu’ un qui, qui veut fonder un parti d'opposition.

MD -Il s’est impliqué, il s’impliquait.

TK -Oui.

MD -C'est un homme qui avait des idées.

TK -Oui.

MD -Qui avait, qui arrivait avec des, des, des propositions ? _
JK -Oui.

MD -Est-ce que lorsqu'il fut. lorsqu'il est devenu ministre dans votre gouvernement, est-ce que c’est un
homme qui a continué à se faire remarquer lors des conseil des ministres, lors des..., lors des réunions que
vous aviez ? |

TK -Je dois dire qu’il a assisté à très peu de réunions. Compte-tenu peut-être de son calendrier, puis il
faut dire qu’il est parti relativement tôt, et. mais le temps qu’il était là, il se faisait remarquer oui. Il prenait
position.

MD -Il prenait position.

JK -Mais dans le contexte qui était le nôtre. C’est. c’est. c’était un contexte particulier, ce n’était pas
un contexte comme on l’avait connu avant.

MD -On lui a confié une tâche, tenter d'organiser l’enseignement, ça c’était pendant la guerre ?

TK -Oui.



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MD -On lui a confié une tâche, le, le gouvernement, c'était... c’était un projet ça qui a été, qui a été
discuté?

TK -Oui, c’est un projet qui a été discuté au niveau du gouvernement.

MD -Est-ce qu’on lui a voté un budget ?

JK -Le, le budget je ne me rappelle du montant, mais les possibilités d’avoir de l’argent pour cette action,
oui, on lui a donné cette possibilité mais je ne peux pas préciser c’était un tel montant, une telle somme. Mais
on lui a ouvert, disons, le coffre pour qu’il tire l’argent nécessaire à son action.

PD -Est-ce que déjà au sein de votre gouvernement il incitait les autres, il avait pris une politique
d’ethnisme en vue de... d'enseignement comme ça, des examens ?

JK -Pardon ?

PD -Est-ce qu’il y avait de l’ethisme qui était, qui était heu. qui était déjà. est-ce que dans les décisions
que vous aviez prises, est-ce qu’il était ciblé, il était dit ‘bon, faut que les gens de l” ethnie Hutu puissent
passer P examen, faut que les gens de lethnie ne puissent pas passer les examens” ?

TK -Non pas du tout.

PD -Ok. Est-ce qu’il y a des examens qui se sont faits... ça c’est pas comme ça que ça avait été discuté?
TK -Non, pas du tout.

PD -Ok, puis les examens est-ce qu’il y en a qui se sont faits, qui permettaient aux gens d’origine Tutsi
de les passer ? _
JK Ça je ne peux pas préciser. Puisque les, les. quand nous nous avons pris cette décision c’était tout
au début, quand nous étions arrivés à Gitarama. L’intention était de faire marcher le pays le mieux que nous
pouvions. Donc il n’était, il n’était nullement question d’éliminer une partie des élèves, d’éliminer une partie
des professeurs etc. |

PD -Ok. C’est plus tard que ça s’est développé comme ça ?

JK -Ça s’est développé plus tard, oui, mais la, la, cette décision quand on l’a prise c’était de faire marcher
ce qui peut encore l’être.

PD -Pendant le temps que lui avait été là, est-ce que cette décision-là s’était développée ?

TK -Je n’ai pas vu... je n’ai pas eu cette impression.

PD -Ok.

MD -A ce moment-là dans les écoles est-ce qu’il y avait encore des, des élèves Tutsi ?

JK -I y avait pas d’écoles parce que c’était les vacances. Donc on devait organiser le retour des élèves.



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C9
£=

MD -Il fallait organiser le retour des élèves, pour les examens ?

JK -Oui.

MD -Leur faire passer les examens ?

TK Pour faire, leur, d’abord enseigner, puis leur faire passer les examens après.

MD -A ce moment-là le pays était quand même, dans le pays il y avait... la guerre était commencée ?
TK -Oui, la guerre avait déjà commencé.

MD -L’élimination des Tutsi était déjà commencée ?

JK -Oui.

MD -C'était, c'était clair dans la tête de tout le monde que il y avait, il y avait heu. il y avait une action
là très très précise qui était en cours dans le pays, qui était l’élimination d’une ethnie ? C’était, c’était clair
cette chose-là. Est-ce qu’on pouvait penser au gouvernement que cet argent-là pouvait servir à aider les Tutsi
à retourner à l’école ? | .

K_ Quand on a pris cette décision, il n’était nullement. nulle part, personne. en tous cas en ce qui me
concerne je n’avais pas en tête qu’il fallait qu’une partie des élèves ne puissent pas retourner à l’école. C'était
sans distinction que les élèves pouvaient retourner à l’école.

MD -Vous avez raconté que dans le passé du Rwanda il y avait eu des, il y a eu des incidents déjà quand
vous étiez vous-même étudiant où les Tutsi étaient déjà. avaient déjà certains problèmes ?

JK -Oui.

MD -Dans les écoles ?

JK -Oui.

MD -Est-ce que ces problèmes-là se répétaient à... vers la, vers la fin est-ce que c’est des problèmes qui
se sont. qui ont perduré, qu’on a vu se... dans les écoles du Rwanda.

XK -Non.

MD -Un peu avant [inaudible] ?

TK -Non. Parce que à partir de 93 [sic] jusqu’en 90 il y avait plus jamais ces problèmes, je ne les avais
plus jamais entendus.

PD -De 73 à 90 vous avez jamais vu d’ethnisme dans les écoles, c’est à dire qu’on identifiait une ethnie
pour dire ‘vous devez... vous avez plus le droit de vous instruire” ?

JK -Non. Je n’ai pas vu ça.

PD -Ok En 93 c’est quelque chose qui s’est développé, en 94, 90 c’est quelque chose qui a commencé



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à se développer ou quoi ?

JK -Non, comme en 90 c’était déjà la guerre, donc il y a pas eu comme tel de, de mesures qui auraient
été prises à l'encontre d’une ethnie mais c'était... mais le déplacement des populations avait déjà commencé.
C’est à dire qu’à ce moment-là on... déjà le droit à l’instruction n’était pas garanti pour la population. Que
ce soit des Hutu ou des Tutsi. En tous cas à l’époque, les gens qui étaient, notamment dans le nord du pays,
ils ont commencé à chasser les. non à être chassés de leurs biens et donc à ne plus pouvoir étudier.

PD -Ils devaient se réfugier.

TK -Tls devaient, ils devaient se déplacer en fonction de la guerre, donc ce qui fait que sur 4 ans on avait
des générations d’enfants qui n’ont pas pu fréquenter l’école que ce soit Tutsi ou Hutu. A cause de la guerre.
PD -Ok. C’est la guerre qui a causé ça.

JK -Il y a pas eu une mesure ou, ou une intimidation qui aurait été faite sur une ethnie à cette époque-là.
Mème entre 90 et 94, pour empêcher d'aller à l’école. Mais la guerre a fait que une bonne partie des enfants
du nord n’ont même pas fréquenté l’école.

PD -Ensuite, ça nous amène plus près de, des événements qui nous concernent, en 94, vous vous dites
que vous instituez cette mesure-là dans le but que tout le monde passe les examens.

JK -Oui.

PD -Vous savez à ce moment-là qu’il y a une partie du pays que vous contrôlez pas ?

JK -Oui.

PD -Alors, est-ce que... est-ce qu'il est juste de croire que vous saviez que de toutes façons ça

s’appliquerait pas à cette partie du pays-là ?

XK -Ça on le savait.

PD -Cette partie du pays-là était contrôlée par le FPR ?

JK -Oui.

PD -Donc les Tutsi qui pouvaient s’y réfugier étaient là.

JK -De même que des Hutu y étaient.

PD -Ok. C'était pas... à quel moment s’est développé le, le. l’idée de l’ethnisme, de dire ‘bon, ben il faut
pas que les Tutsi réussissent à l’école, faut pas qu’il y ait.….”, est-ce que c’est plus vers la fin du gouvernement
ou si c’est plus vers.

JK -Ù n’y a pas. cet ethnisme dont vous parlez que ça serait développé, ça ne s’est pas développé de

cette manière-là puisque ça s’est. si ce n’était que ça, de ne pas réussir l’école tout en restant vivant pour



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étudier plus tard...

PD -C’était plus drastique que ça, c’était plus... la solution était plus radicale ?

JK -C'était l'élimination donc l’élimination physique, ça n’était plus de dire on ne veut pas permettre aux
enfants Tutsi d’aller à l’école. Je n’ai jamais entendu parler de cette idéologie d'empêcher des enfants Tutsi
d’aller à l’école.

PD -Ça avait dépassé. tout de suite ça avait passé du stade de dire ‘ok, l’école pour tout le monde,
l'élimination pour tout le monde”.

JK -Oui.

PD -Ok. La. le déclenchement exact, au sein de votre gouvernement, vous estimez ça quand ?

JK -Je ne peux pas le situer, je n’ai pas. ça s’est fait plutôt de façon évolutive, donc il y a pas eu un point
qui a déclenché, je crois que ça s’est fait.

PD -Cette idéologie-là existait à la formation de votre gouvernement puis s’est développée de plus en
plus, est devenue de plus en plus efficace. a

JK -Ça a été une évolution en fonction de l’évolution de la situation dans le pays.

PD -Ok. La situation existait, l’idée existait à la formation de votre gouvernement mais elle s’est
développée avec la guerre qui existait dans le pays à ce moment-là. Ok.

MD -Quelle était la position du docteur Rwamakuba sur... concernant le, les événements, concernant la guerre, est-ce qu’il se prononçait, est-ce qu’il prenait position ?

JK -Non, je n’ai pas à le relier directement aux massacres, je ne peux pas dire Rwamakuba disait “il fallait éliminer les Tutsi’, mais Rwamakuba était un opposant au FPR. Il le déclarait comme tel, il se déclarait comme tel.

MD -Un opposant au FPR... On a vu que les opposants. le FPR ça pouvait englober beaucoup de monde ça. Le FPR et ses des... les... et ses supporters, le FPR et ses heu... quelle était la. à lui sa définition de l'ennemi ?

TK -L’ennemi c’était l'ennemi armé.

MD -L’ennemi armé ?

TK Oui.

MD -Et ses supporters ?

JK -Ses supporters ça c’est venu après, mais je ne l’ai pas entendu de sa bouche ou de, de... disons de sa ligne de conduite, de dire l’ennemi et ses supporters. L'ennemi c’était l'ennemi armé.

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PD -Comme médecin lui, ayant accès au Centre hospitalier de Kigali...

JK -Oui?

PD -Où on. vous décrivez ici le problème.

JK -Oui.

PD -.. qui est, il y avait tellement de cadavres qui étaient... la morgue suffisait plus à les contenir.
JK -Oui.

PD -Luiil devait s’apercevoir que... ça devait être difficile pour lui de pas s’apercevoir qu'est-ce qu'il se
passait dans le pays.
JK -Il peut. j'ai... même... en dehors de lui, quiconque aurait été là aurait remarqué ce qu’il se passait
dans le pays. Lui, en tant que médecin, il a, il a certainement pu voir ce qu’il se passait là.
PD -C'’est une connaissance de plus qu’il avait que les autres avaient pas.

JK Oui.
PD Vous savez, il avait accès lui à la morgue mais. facilement, c'est pas quel... c'est pas tous les gens
qui se plaisent à visiter les morgues. Et lui c’était à même son hôpital alors il connaît le, il connaît l’endroit.

De plus, est-ce que ce ministre-là assistait à la réunion des préfets ?

JK “Oui.

PD -Donc il a cette connaissance-là aussi des faits ?

TK “Oui.

PD -Ça m’amène à vous demander, sa situation de l’ennemi, sa connaissance de l'ennemi, at-elle elle

aussi évoluée comme l’idée d’élimination des Tutsi ?

XK -Ça je ne peux pas préciser si. puisque je ne l’ai pas remarqué.

PD -C'est pas quelque chose qu’il vous a dit ?

JK -Non, il me l’a pas dit, je ne l’ai pas vu dans les faits, donc si, s’il a évolué que les, pour lui Pidée de
l'ennemi est passée de, de l’ennemi armé à l’ensemble de ses supporters ou à l’ensemble de la population
Tutsi, ça je ne. c’est une définition que je ne, à laquelle je ne peux pas lui faire allusion.

PD -Comme ministre, membre du même parti que vous, il pouvait facilement avoir accès à vous ?

JK -Oui.

PD -C’était facile pour lui d’aller vous voir ou vous convoquer un rendez-vous ou.

JK -Oui.

PD -Ça c'était quelque chose d’autant plus facile qu’il était membre du même parti ?



T2k7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00) 12


KON ::/

C9
C5)

JK -Oui.

PD -Est-ce qu’il y a une occasion que vous avez en mémoire, s’il vous a approché en vous disant ‘écoutez
Monsieur le premier ministre faudrait faire quelque chose’ ?

JK -Je ne m’en rappelle pas.

PD -Vous vous rappelez pas. Est-ce que vous avez besoin de vous absenter ?

JK -Non.

PD -Non. On va tourner le ruban, on va recommencer.

Fin de la face A de la cassette # 65.



T2K7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00) 1




k 0 n: L sb f 8 9
Face B de la cassette # 65.
PD -Nous redébutons l’enregistrement de...
MD -65.
PD -. du ruban numéro 65, la face B. Toujours en poursuivant sur le... le cas du ministre de l'Education.

L'enseignement ?

JK -L’enseignement primaire et secondaire.

PD -Enseignement, c’est ça. On avait terminé en disant que jamais ce ministre-là est venu vous faire part
de...

JK -Non.

PD -. d'une demande ou d’une observation vous laissant croire qu’il était contre ces... les événements
qui se produisaient au pays.

TK -Non, je ne l” ai pas vu. :

PD -Ok. De plus, il avait à circuler dans des. toutes les parties c qui étaient contrôlées par les FAR ?
JK -Oui.

PD -Donc, toutes les parties du pays où sévissaient les plus grands massacres ?

JK -Oui.

PD -Connus de votre gouvernement ?

JK -Oui. -

PD -Lui là, vous décrivez à un moment donné un... une situation qui se serait produite, l’impliquant, dans
laquelle il aurait réussi à... à s’ échapper d’une attaque ou quelque chose comme ça qu’il aurait... suite à ça,
ça aurait précédé tout simplement sa fuite du pays ?

JK -Oui.

PD -Pouvez-vous me décrire un peu ce que vous savez vous de cet événement-là ?

K -Il serait. il serait tombé dans une embuscade entre Gitarama et Nyanza. Au lieu-dit Gatagara. Ça

se situe plus du côté de Nyanza que du côté de Gitarama.

PD -Il serait possible de situer à peu près l’époque, si vous avez en mémoire, la date de ça ?
JK -Ça doit être au mois de mai.

PD -Enmai.

TK -Au début. Lorsqu'on était encore à Gitarama.

PD -Ok.



T2K7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (1 1h00) 14
KON:5,;90

TK -Alors, le, son véhicule a été la cible de, des gens qui l'ont mitraillé, il a réussi à sortir, avec son garde
du corps et ils sont rentrés à Gitarama [inaudible]. De là il a perdu tout le courage et est parti.

PD -C’est immédiatement après cet événement-là, il a quitté le pays ?

JK -Il a quitté le pays, on n’a jamais su quand et comment.

PD -C’est inexpliqué pour vous la façon qu’il a quitté le pays ?

JK -Non.

PD -Ila pas laissé heu de message à votre gouvernement, il a pas...

JK -Ii y a pas eu de message, il y a pas. on... il n’a pas donné des raisons qui ont fait qu’il parte. Mais
on a compris que ça devait être après cet incident.

PD -Ce départ-là, est-ce que vous savez vers où il est parti ?

JK -Je n’ai aucune idée.

PD -Vous n’avez aucune idée où il est parti ?

K Non | _

PD -Aujourd’hui savez-vous... aujourd’hui, lors de votre arrestation l’année dernière est-ce que vous

aviez une idée où il se trouvait ?

JK -Je ne savais pas où il était.

PD -Vous saviez pas où il était. Aujourd’hui vous savez où il est ?

TK -Je sais qu’il est en prison. _

PD -C'’est ça. Alors, cet individu-là après son départ du Rwanda, est-ce qu’il était porté à votre attention
qu’il a pu se prononcer contre les massacres qu’il y avait eu au Rwanda ?

JK -Je n’ai plus entendu parler de lui.

PD -Ok. Jamais il a été porté à votre attention personnelle, ou à l’attention de votre gouvernement.
JK -Non.

PD -.. que cet individu-là s’est... avait fui le pays pour s’opposer à ce qu’il se passait dans le pays ?
TK -Je n’ai pas. je n’ai plus jamais entendu parler de lui.

PD -Ok. La raison, vous, pour laquelle... vous expliquez son départ, suite à l’attentat qu’il a subi, il a
manqué de courage puis il a dû quitter ?

TK -C’est la seule. c’est la. disons le... cette fois-là qu’il est parti. Sinon il aurait pu partir avant.
Donc... il n’avait.. ce n’était pas parce qu’il revenait à Gitarama, et puis il se faisait attaquer qui aurait pu

motiver son refus de ce qu’il se passait, s’il avait refusé ce qu’il se passait, il aurait peut-être pu choisir



T2Kk7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (1 1h00) 15


KON557/97

d’autres moyens, et non pas attendre qu’il tombe dans une embuscade. Pour moi, ce... c’est la...

PD
TK
PD
JK
PD
TK
PD
JK

-C’est l’effet déclencheur ?
-C'est, c’est le seul effet que j’ai retenu.
-Ok. Est-ce que, est-ce qu'il était possible pour vous de recevoir des communications de l'extérieur?

-Difficile mais possible oui.

. «Possible.

-Oui.
-Alors il aurait été possible pour lui d’entrer en communication avec vous s’il l’avait désiré ?

-Difficilement. C’est pas nécessairement facile. Surtout s’il était heu... en Afrique, c'était plutôt

difficile.

PD

-Plutôt difficile. Mais il aurait été possible pour lui de communiquer avec des médias internationaux

pour laisser savoir son désaccord avec.

JK

-Les médias, les médias ne demandaient que ça. Ils étaient à la recherche de déclarations, donc s’il

avait fait une déclaration je crois que les médias seraient sautés, auraient sauté dessus.

PD
K
PD
JK
PD
TK
PD
JK
PD
TK

-Ok. Est-ce que cet individu-là était menacé par votre gouvernement ?

-À ma connaissance non.

-Ok. Est-ce que l’attentat dont il a été victime origine de votre gouvernement ?
-Non, pas du tout. _

-Pas du tout ?

-Non. C’est lors d’une attaque du FPR dans la région.

-Ok. Il est tombé dans une embuscade du FPR ?

Oui.

-Ça c’est des informations que vous tenez de ?

-Non là, c'est de la situation globale que j’avais eu sur la guerre, puisque quelques jours après cette

embuscade la route était déjà coupée.

PD
TK
PD
JK
PD

-Ok.

-Je crois il a été le dernier, sinon parmi les derniers, à pouvoir passer sur cette route.
-Ok. Mais votre gouvernement a pas à voir directement dans cet attentat-là ?

-Non. Notre gouvernement n’a rien à voir avec cet attentat.

-Vous avez pas planifié d’attentat pour cet individu-là ?



T2k7465 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00) _ 16
KO0557/92

JK -Non.

PD -Ok.

MD -Les massacres du Centre hospitalier de Kigali, vous les situez à peu près à quelle, à quelle. vers
quelle période ?

TK -Tout au début.

MD -Tout au début ?

JK -Oui. Avant même que je ne sois nommé, puisque les informations que je donne je les ai eues quand
J'étais à Kigali, par Monsieur Gaïllard de la Croix-Rouge.

MD -Vous nous dites que le docteur Rwamakuba avait accès à ce moment-là au Centre hospitalier.

JK -Oui.

MD -Comme médecin et aussi comme responsable d’un projet ?

XK : -C’est surtout comme responsable du projet, donc le... c'était un projet qui est en rapport avec la
santé, c’est pas un projet qui est détaché de la santé, c’est plutôt comme responsable de ce projet qu’il avait
accès à cet hôpital.

MD -Le massacre de l'hôpital, du Centre hospitalier de Kigali, c’est quelque chose qui était bien connu,
qui était bien connu, qui a été, qui a été heu. rapporté, qui a été publicisé, qui a été discuté ?

JK -Ça je ne peux pas dire. IL... c’est une information que moi j'ai eue, peut-être la première information
que j’ai eue sur les massacres, elle me vient de cet endroit.

MD -Est-ce que le nom du docteur Rwamakuba était, a été heu. relié de près ou de loin à cette, à cet
événement ?

JK -Non.

MD -Vous nous dites que ‘aujourd’hui on interprète comme participation directe à ces gestes, le fait qu’il
ait été ou qu'il avait accès à cet. à l’hôpital”, est-ce que, parce que... est-ce que vous avez entendu parler
de choses, son nom était, a été associé ?

TK -Non, j'ai jamais entendu parler de ça.

MD -Est-ce que il pouvait, d’une façon ou d’une autre ne pas savoir ce qu’il se passait là ? C’est une
personne qui avait accès, avec. le rang qu’il occupait, ou les fonctions qu’il occupait, est-ce qu’il pouvait
ne pas savoir ce qu’il se passait ?

JK -Non, vous ne pouvez pas forcer quelqu'un à savoir s’il ne veut pas savoir. Mais il avait tous les

moyens pour savoir.



T2k7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (1 1h00) 17


,

KON557/93

MD -Mais là on parle, on parle pas d’une chose qui est très commune, là, on élimine les, le personnel et
les malades qui sont d’une ethnie particulière, c'est pas commun là ça.

TK -Mais si vous ne voulez pas savoir, vous pouvez dire que vous ne savez pas. Mais pour moi vous ne
pouvez pas, si vous y allez, que vous êtes sain d'esprit, vous ne pouvez pas ne pas remarquer ça.

MD -Les corps de toutes façons ont été, ont été gardés à la morgue de l'hôpital ? C’est à ce moment
qu’on... qu’on est. qu’on est arrivé à... à... à en avoir tellement sur les bras qu’on sait plus quoi faire avec?
C’est à ce moment ?

JK Oui.

MD -Quand... dans vos, les informations que vous avez eues de Monsieur Gaillard, est-ce que cette chose-
là a été discutée ? Le, le... le fait que plusieurs personnes de l’hôpital-même étaient décédées ?

JK -Non, pas directement. C'était que la question qui nous préoccupait quand j’ai eu des, ces rencontres

avec Gaillard, ce n’était pas. plusieurs personnes de l’hôpital étaient. avaient été tuées, c’est, c'était de,

ensevelir les corps qui se trouvaient dans l’hôpital. Donc c'était ça sa préoccupation, c’est de ça que nous

avons discuté.

MD -Pas de savoir d’où ils provenaient ?

JK -D'où les corps provenaient, ça ce n’était pas son, sa préoccupation.

MD _-Et vous, le massacre du Centre hospitalier c’est quelque chose que vous avez connu, vous en avez
_entendu parler, vous étiez au courant ?

JK -Oui, j'avais entendu parler de ça.

MD -Comme premier ministre ?

JK -Oui. De toutes façons, toute la période de guerre je suis resté premier ministre donc avant je n’en
avais pas eu, entendu parler.

MD Selon vous cet, cette chose, ça ça s’est produit vraiment dans les premiers temps, dans les premiers
jours ?

JK -Oui. Selon moi les, la plupart des gens ont été tués dès les premiers, les premières journées.

MD -Est-ce qu’il y a eu d’autres... est-ce que c’est arrivé, ça s’est produit par la suite encore ou on 2...
il y a pas eu d’autres Tutsi qui ont été, heu, les Tutsi n’étaient pas admis à cet hôpital-là, les Tutsi qui étaient
malades ou blessés ?

JK -Je ne sais pas si, s’il y a eu un décret qui empéchait les Tutsi d’y être admis, mais je ne... compte-tenu
de la situation physique et géographique de l’hôpital, ça me surprendrait qu’il y ait eu beaucoup de Tutsi qui



T2k7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00) 18
KON557/94

soient venus à cet hôpital.
PD -Ça peut-être que si vous expliquiez justement la situation de cet hôpital.
JK -C'est en face d’un camp militaire de, de Kigali, au centre-ville, donc je ne vois pas les, les gens venir
de Nyamirambo ou de Gikondo pour aller à l’hôpital, au Centre hospitalier de Kigali.
PD -C’était près de l’hôtel des Diplomates aussi ?
K -C’était juste en face de l’hôtel des Diplomates.
PD -Tout…. tout ça... le dessus de la colline-là, c’est ça, est occupé par les militaires des FAR ?
JK -C’est ça.
MD -Est-ce que vous avez déjà discuté avec lui, le docteur, de cette chose-là, de ce qu’il s’était passé ?
JK -Non.
MD -Est-ce que vous avez déjà discuté avec lui des, des massacres en général, de ce qu’il se passait dans

le pays ?
JK -Non.
MD -Est-ce que vous étiez près de lui ? Est-ce que c’est une personne avec qui vous avez eu des, vous
aviez des contacts réguliers ?
JK -Non. C’était quelqu'un de mon parti, mais sans plus.
MD -Comme premier ministre est-ce que vous avez eu à intervenir auprès de lui pour lui, lui demander
des, des comptes-rendus, officiellement, officieusement ?
JK -Non, les, le seul sujet que, la seule mission qu'il a eue, comme ministre, c’est la mission pour
l’enseignement. Donc ça n’avait rien à voir avec la santé. Ce n’était pas de son ressort.
PD -Dans quel cadre cet, ce docteur-là aurait été amené dans ce cas-là à faire des discours ? C’est comme
ministre de l'Enseignement, c’est. ou pendant les visites qu’il effectuait ? |
JK -S’il a fait des discours, puisque j’ai émis des réserves sur les discours qu'il aurait tenus, ça serait
comme ministre de l'Enseignement. Donc je ne vois pas, il n’a, il n’a pas agi, entre avril et juillet 94, comme
médecin, il a agi comme ministre de l’Enseignement primaire et secondaire.
PD -Ok. Alors vous... les moments précis, les réunions, c’est impossible. Vous savez que comme tous
ministres il a eu à se prononcer, mais comment, où exactement, vous avez pas été témoin de discours que lui
aurait fait précisément ?
JK -Je n’ai pas été témoin d’aucun de ses discours.

PD -Ok. Est-ce que par la voie de la radio, vous auriez pu l’entendre ?



T2k7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00) 19
K0N55/95

JK -Non.

PD -Non plus ?

JIK -Non plus.

PD -Alors vous dites qu’il s’est tenu à la ligne du parti concernant les, les choses qu’on a, qui devaient

être établies dans un discours.

JK -Oui.

PD -Vous dites qu'il... qu'il devait avoir un discours enflammé, est-ce que c’est parce que lorsqu'il
s’adressait au conseil des ministres il tenait des propos enflammés ? Est-ce que dû à un problème de langage,
ça compliquait son, son élocution au point où il devait aller right to the point ?

JK C’est, disons c’est peut-être plus par son caractère qu’il aurait pu faire un discours enflammé, dans
la mesure où ce n’était pas quelqu’un qui avait un verbe facile. Donc qui pouvait manipuler ou manier les
mots, s’il avait un mot à dire, il le disait comme il, comme il l’avait en tête. Donc il ne pouvait pas l’entourer
comme ça se faisait par, par d’autres politiciens à l’époque.

PD -Alors, privément, quand il discutait avec les gens, c’était quelqu’un qui avait des propos directs ?
JK Oui.

PD -Sans interprétation ?

JK -Non.

PD -Ok. Vous avez assisté à des discussions privées, c’est ça, que vous avez eues avec lui ?

TK Discussions privées dans le cadre de mon parti politique.

PD -Ok. C’est à ce moment-là que vous avez... vous, vous, vous déterminez que ses propos étaient
enflammés ?

JK C’est bien avant 94. Cela s’entend, parce que je n’ai pas eu de discussions comme telles avec lui éntre
avril et juillet 94. Je n’ai.. je ne me souviens pas m'être assis avec lui pour discuter d’aucun sujet avec lui.
Mais avant, ma connaissance de lui c’est que quand vous discutez il vous dit des choses telles que lui il les
pense, il ne passe pas à côté.

PD -OK, déjà avant 94 il avait des propos directs. ok. Ces propos-là visaient, comme vous disiez tout
à l'heure, qu’ils étaient heu. qui étaient anti-FPR.

JK Oui.

PD -Ok. Vous mentionnez ici un petit aparté là qui est. concernant le rassemblement des corps des.

des grands, des politiciens à la morgue. Vous dites ici ‘dès le tout début de rassembler les corps de politiciens



T2k7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00) 20


KON 55/96

et des grands à la morgue afin de pouvoir leur donner des obsèques dignes de leur rang’, c’est une décision
du gouvernement ça ?

JK -Non. Parce que quand j'ai été nommé j'ai été, j'ai eu cette information que déjà, avant ma
nomination, on avait mis les corps des ministres, des députés à part, en prévision des, de leurs obsèques plus
tard. C’est une information que j’ai reçue avant ma prise de fonction.

PD -Ok. Vous savez ce qu’il est advenu de ces corps-là ?

JK -Non.

PD -Est-ce que c’est quelque chose... est-ce que vous savez s’il y a eu de la profanation envers ces
cadavres-là ou si heu... est-ce qu’il est venu à votre, à vos oreilles d’entendre qu’il y avait eu des choses qui
avaient été commises envers ces cadavres-là ?

JK -Non, parce que j'ai, j'ai. ce que je sais c’est que les... le corps notamment de la premier ministre
a été, aurait été amené à Butare. En prévision des obsèques éventuelles. que les autres corps avaient
toujours, étaient toujours gardés à à la morgue en vue de leurs obsèques. Je savais qu'il y avait des, des... au
niveau de l’armée, parce que c’est au niveau de l’armée que ça s’était fait, que les... il y avait des, des
précautions de prises pour garder ces corps-là.

PD -GÇa c'était au niveau des forces armées ?

JK -Oui.

PD -Le gouvernement n’avait rien à faire là-dedans ? C’était pas du ressort du gouvernement de voir à
faire des obsèques ?

TK -Non. Pour les obsèques oui, mais pas garder les corps, de mettre les corps en état ou de garder ça,
ça a pas été discuté au niveau du gouvernement, je sais que c’est l’armée qui s’en était occupé dans la mesure
où ils avaient déjà pris ça en main avant même la nomination du gouvernement.

PD -Ok. Quand... c’était une action, c'était quelque chose, c’était un fait, quand vous êtes arrivé là, c’était
fait, c’était…

JK -Oui.

PD -Ok. Qui vous a informé de ça, est-ce que vous avez...

JK -C’est le général Ndindilimana.

PD -C’est lui qui vous a informé que ces décisions-là avaient été prises.

K -Oui.

PD -Votre gouvernement a jamais eu à se pencher.



T2k7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00) 21


K00557/97

JK -Non. À un certain moment on avait pensé qu on allait faire les obsèques du président Habyarimana
lui-même, d’abord à Kigali et puis la pression était trop forte pour les faire à Kigali, et puis à Gisenyi, on avait
même creusé une tombe à Gisenyi, puis la famille a refusé à la dernière minute qu’il y ait des obsèques, c’est
le seul moment où je me souviens où on a parlé des obsèques.

PD -Est-ce qu'il y a eu des, des, des obsèques commémoratives pour le Président ?

JK -Où ça ?

PD -Benje sais pas moi, est-ce qu’il y en a eu, est-ce que vous avez fait des messes pour lui ou quelque
chose comme ça ?

TK -En exil oui.

PD -A l'exil vous avez fait ça ? Mais à ce moment-là il y a pas eu d’inhumation ?

JK -Non.

PD -Ok.

MD I ya pas eu aucune cérémonie ? |

JK -Ï y a eu une messe.

MD -Oui.

JK -Mis l’inhumation avait déjà eu lieu avant... dans la ville natale du Président du Zaïre.
PD -Je sais pas si vous avez autre chose que vous voulez ajouter sur ce ministre-là ?
JK -Non. -

MD -Est-ce qu’il était est-ce qu’il était normalement en uniforme, en treillis ?

TK -Je ne l'ai pas vu en treillis, je ne me souviens pas l’avoir vu en treillis.

MD -Est-ce qu'il était armé ?

JK -Je n’ai.. je ne me souviens pas avoir vu son arme.

MD -Ok.

PD -On a un point suivant qui est le point de, de militaires.

TK -C’est le major Ntabakuze [phonétique].

MD -Le chapitre ?

TK -8.4.10.

MD -8.4.10.

TK Commandant du bataillon para-commando du camp Kanombe. Très proche de Habyarimana et de

sa famille, c’était l’étoile montante de sa région et de sa famille. I} habitait à Nairobi près de chez moi mais



T2k7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00) 22
KON55/98

nous n'avions pas de relations. Je l'ai vu au front en 1994, une ou deux fois, son bataillon était une unité
d'élite et se trouvait toujours là où il y avait le plus de difficultés. Je crois lavoir cité lorsque j'ai parlé de
l'assassinat du Président.

Un de mes gardes du corps, Alfred Ndahimana [phonétique] était, avait servi dans son bataillon, sous ses ordres. Je l’ai interrogé concernant la mort du président Habyarimana alors que nous étions à Bukavu en 1995. C’est lui qui m'a dit qu’il avait retrouvé deux lance-missiles. Selon ce que Alfred Ndahimana m’a expliqué sa troupe a participé à deux missions cette nuit-là, la première, le major Ntabakuze a prélevé quelques hommes de sa troupe pour prêter main forte aux gardes présidentiels pour évacuer les corps de l'avion et la deuxième, à laquelle il n’a pas participé non plus, consistait à éliminer les opposants au MRND selon une liste que détenait le major Ntabakuze et à partir de laquelle il assignait les gens à éliminer aux soldats de sa troupe qu’il avait choisis. Ils sont partis toute la nuit et ne sont revenus qu’au matin, c’est
à ce moment qu’ils ont raconté à Alfred Ndahimana et aux autres la mission spéciale qui leur avait été assignée. J'ignore le nombre de soldats ayant participé à cette mission. Je sais qu'aux alentours du camp Kanombe, que le... les alentours du camp Kanombe est un endroit où les massacres ont débuté. Le choix de membres spécifiques pour assignation à une mission spéciale de ce type n est pas exceptionnel, dans l’armée le régionalisme était très présent et très puissant. Comme je sais qu’Alfred Ndahimana originait de Gikongoro, il était normal qu’il ne soit pas assigné ou choisi pour des missions spéciales. Il me répéta que ses frères. ses confrères soldats lui avaient dit avoir éliminer pendant la nuit des gens que le major Ntabakuze leur identifiait, dont entre autres... dont un entre autres, se justifiant du fait qu’il aurait insulté le MRND en habillant son chien aux couleurs de ce parti. Je crois que c’était un certain Muyango [phonétique], mais je ne peux certifier son nom. Le reste de la troupe qui était demeurée au camp était maintenue en stand-by, déjà armé avec directives qu’ils devaient s’attendre à combattre dans la ville de Kigali plutôt que d’être transportés sur d’autres fronts comme à l’habitude.

Lorsque jai quitté Bukavu, en août 1996, Alfred Ndahimana y
demeurait toujours, me servant toujours de garde du corps. Il aurait épousé Aimée Ndahitegeye
[phonétique], une fille de ma belle-famille en septembre de la même année. Le major Ntabakuze [passage
inaudible] situé dans la direction de l'aéroport.

PD -Depuis ce temps, personnellement ou indirectement, avez-vous, êtes-vous revenu en contact avec,
pardon, Monsieur Alfred ?

JK -Non.

PD -Non ? Vous avez pas eu de nouvelles de lui depuis cette époque-là.… Le major depuis votre

arrestation en juillet dernier, est-ce que vous avez eu des nouvelles, de ses nouvelles ?



T2K7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (1 1h00) 23


«ON:57/99

JK Je l'ai vu en prison.

PD -Vous l’avez vu en prison. Ok.

MD -Est-ce que vous lui avez parlé ?

JK -Non.

MD -Non.

PD -Le.. les informations qui vous ont été données par Alfred quelle valeur lui [sic] prêtiez-vous ? Est-ce
que vous avez cru ce que Monsieur Alfred vous disait ?

JK -Je ne peux pas donner de raisons de ne pas le croire, dans la mesure où quand moi je, j’ai discuté
avec lui, c’était, lui ne savait même pas pourquoi, ce que je faisais, j’étais en train de faire, c'était... j’étais
en train de, d’essayer de faire mes propres enquêtes sur les événements, il n’avait pas un dent particulière
contre son, son chef, puis il n’avait aucun intérêt à me donner de fausses informations.

PD -Ok Est-ce que les informations que Monsieur Alfred vous a donné étaient ou ont été entre-coupées
‘par d’autres informations 2 _-.

TK -Globalement je connaissais la situation de ce qui s’était passé de ce côté-là, que comme je connaissais
la situation un peu partout dans le pays, je savais exactement ce qu’il s'était. enfin, c’est à dire que je savais
que des gens avaient été tués dès les premiers jours, en, en avril 94, dans la mesure où une bonne partie de
ma belle-famille habitait dans la région donc que j'avais eu des discussions avec eux, donc je savais comment
les gens avaient été tués dès le premier jour en 94, surtout que ma belle-famille a elle-même failli être
assassinée à cette époque-là.

PD -Ok. Donc vous aviez des informations de votre belle-famille.…

JK -Oui. |

PD -.. qui entre-coupaient les informations, ou qui, qui appuyaient les informations que vous donnait
Alfred, ou qui confirmaient ?

JK -Disons que eux ils n’avaient pas les précisions que j’ai eues avec Alfred puisqu’ Alfred, lui, était
militaire donc lui il pouvait dire ‘les gens qui tuaient étaient des soldats ou des Interahamwe ou... ils venaient
de tel camp ou de tel autre camp’ mais les autres ils ont vu les militaires, ils ont vu des gens qui ont été
assassinés, dont certains s'étaient même réfugiés chez eux, donc c'est une... ça confirmait les informations
que j'avais déjà.

PD -Ok, mais on parle du camp Kanombe ou autour du camp Kanombe.

JK -Kanombe oui, parce qu’ils habitaient justement autour, tout près de ce camp, à quelques mètres du



T2k7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00) 24


KONLSEN

camp Kanombe.

PD -Quand on parle de ça on... on parle de l’endroit où s’est écrasé le.

JK -Oui.

PD -.. l'avion du Président ?

JK -Où ma belle-famille avait... leur propriété était contigué à la propriété du Président. Donc c’était juste
à côté, c’est pas à des dizaines de mètres ou de kilomètres, c’est juste à côté, c’est les mêmes propriétés, il
y a une clôture qui les sépare.

PD -Ok. Alors eux avaient des informations visuelles.

JK -Puisqu'ils étaient là...

PD -Ok.. puis ces informations-là, certaines de ces informations-là étaient confirmés par des propos
d’Alfred ?

JK -Oui. L |
PD -Ok C'est de là que vous tenez ces informations-là. Est-ce que par la suite, comme premier ministre
vous avez fait faire des enquêtes aussi, qui vous ont confirmé ça ?

JK -Non j’ai pas fait des enquêtes disons comme telles, mais les enquêtes globalement qu’on a faites
confirment ça. C’est à dire que les, je n’ai pas fait des enquêtes spécifiquement sur ce point, mais les enquêtes
qu’on a fait globalement sur l’ensemble de la situation dans cette partie de Kigali confirment oui ce que j’ai
su d’Alfred et de ma belle-famille.

PD -Ok, parce que là quand on discute, vous parlez dans les jours, ici dans la déclaration on parle
vraiment dans les heures, pendant la même nuit qui a suivi l’écrasement.
JK -Oui.

PD -Ça a débuté à ce moment-là ?

JK -Non c’est, c’est à ce moment-là, puisque la, la, les gens, les premières personnes qui ont été tuées,
d’après ce que m’a dit ma belle-famille, dès que l’avion s’est écrasé, les gens sont déjà venus chez eux pour
les. se réfugier, de même que les militaires sont venus pour les assassiner, il y a eu des débats pour savoir
si eux-même devaient être assassinés ou pas. Jusqu’à ce qu’il y ait un des militaires qui disent qu'il les
reconnaissait, qu’il les connaissait. Parce que c’est. il y a... le débat c’était que le premier ministre, c’est
comme ça qu’ils m’appelaient même à l’époque, venait souvent chez eux et que ce premier ministre était ailié
au FPR. Ils ont fait un débat là-dessus jusqu’à ce qu’ils prennent une décision en disant non, c’est pas le

premier ministre du FPR, c’est le premier ministre qui vient d’être nommé maintenant. C’est ça qui les a



T2k7465 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00) 25


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sauvés.

PD -Eux ce qu’ils vous rapportent c’est le premier ministre qui vient d’être nommé présentement.
JK -Oui. C’est ça qui a fait qu’ils n’ont pas été tués.

PD -Je sais pas si on poursuit ou...

MD -Ilest 11 heures 45. En principe il devrait.

JK -Il doit pas être loin.

MD -.. être ici très bientôt.

PD -On peut peut-être cesser pour cet avant-midi.

MD -Oui.

PD -Puis reprendre dans l’après-midi avec le même sujet ?
JK -Oui. A quatorze heures.

MD -Alors fin de...

| PD -Fin du ruban.

MD -Eleven 26 ?

PD -Eleven 46.

MD :- [inaudible], eleven forty-six.

PD -On va cesser l’enregistrement.

MD -Ok.

Fin de la face B de la cassette # 65.



T2k7#65 du 19/05/98. -28 juillet 1998 (11h00)
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