Fiche du document numéro 21833

Num
21833
Date
Mardi 28 juin 1994
Amj
Auteur
Fichier
Taille
86687
Pages
2
Titre
Paras à la recherche de sans-abri hutus
Nom cité
Lieu cité
Mot-clé
Source
Type
Dépêche d'agence
Langue
FR
Citation
KORA (RWANDA), 28 juin, Reuter - Accueillis en sauveurs par la population locale, les parachutistes français recherchent des sans-abri hutus au milieu des volcans noyés dans le brouillard du nord-ouest du Rwanda.

Les Tutsis, eux, ont péri ou se sont enfuis.

Les militaires français de l'opération Turquoise assurent que la situation humanitaire dans le nord sous contrôle du gouvernement n'est pas si dramatique qu'on le dit.

Je me dois de dire que le nord a bien moins besoin d'aide que le sud, a dit aux journalistes le général Jean-Claude Lafourcade, commandant l'opération Turquoise.

Selon lui, 1.400 hommes ont désormais rejoint leurs bases arrières dans l'est du Zaïre au cinquième jour de Turquoise. Ils rayonnent dans l'ouest du Rwanda aux mains des forces gouvernementales.

Une centaine de ces soldats ont passé la nuit de lundi à mardi en territoire rwandais où des Français, appuyés par 40 militaires sénégalais, se sont enfoncés à une cinquantaine de km à l'est au sud et environ 25 km à l'est au nord.

Des troupes de marine, fortes de 30 parachutistes, ont effectué une reconnaissance d'une durée de huit heures dans le nord-ouest lundi. Cette mission leur a permis de trouver 400 réfugiés hutus, au lieu des 10.000 à laquelle on s'attendait.

Ces soldats, circulant à bord de véhicules tout terrain camouflés et équipés de mitrailleuses légères, ont été surpris du peu de misère humaine rencontrée au cours de leur mission.

Mais l'accueil chaleureux qui leur a été fait, et notamment le spectacle de milliers d'enfants souriants et ravis de recevoir des bonbons sous l'oeil des caméras des journalistes, leur a certainement mis du baume au coeur.

Toute la journée, les parachutistes ont cherché, mais en vain, à mettre la main sur un seul membre de la minorité tutsie qui, avant le 6 avril, représentait 14 % de la population rwandaise et qui, aujourd'hui, est dissiminée aux quatre coins du pays.

Sur le chemin en provenance de leur base de Goma, sur la rive du lac kivu, leur convoi a dû ralentir en passant des groupes de jeunes gens armés de mitraillettes en bois.

Selon des responsables locaux, ce sont les futurs soldats du gouvernement intérimaire, à 100 % hutu et installé à l'hôtel Méridien de Gisenyi, sur la frontière rwando-zaïroise.


Miliciens CDR et Interahamwe




Ces mêmes responsables ont nié, comme le murmurent certains, qu'il s'agisse en fait de futurs miliciens de la Coalition pour la défense de la république (CDR) en cours d'entrainement. Les CDR ont juré d'exterminer les Tutsis et ont commis de nombreux massacres.

Gisenyi est la ville natale de Habyarimana et son fief ethno-politique.

A l'approche des paras français, les soldats gouvernementaux, les gendarmes et les civils font disparaître les barrages routiers de fortune dans lesquels, au début des massacres, les Tutsis en fuite venaient se prendre au piège.

Avant la guerre, nous avions ici 6.000 Tutsis, dit Jean Bakiye, bourgmestre de la commune de Mutura, à 20 km au nord-ouest de Gisenyi. Les deux camps ont commis des massacres ici. Les gens étaient découpés en morceaux.

D'après lui, il est faux d'affirmer qu'il existe 10.000 Hutus sans-abri à Mutura, comme le croyaient les militaires français. Mais il a affirmé que les 71.000 habitants de la commune abritaient 1.600 Hutus déplacés.

Prié de dire ce qui se passera au départ des Français, le maire a répondu: Nous espérons qu'ils ne s'en iront pas parce que nous manquons de munitions.

Il a nié qu'il existe dans sa commune des miliciens Interahamwe, connus pour leurs exactions. Devant son bureau, des hommes affublés de casquettes avec l'inscription Interahamwe ou CDR sont pourtant bien visibles. /JLF

(c) Reuters Limited 1994
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