Fiche du document numéro 2075

Num
2075
Date
Samedi 2 juillet 1994
Amj
Auteur
Auteur
Fichier
Taille
1860569
Sur titre
Alain Juppé dénonce l'«~apathie~» de la communauté internationale
Titre
Rwanda : Les miraculés de Bisesero
Sous titre
Les troupes françaises ont pris sous leur protection 800 Tutsis poursuivis depuis deux mois par les milices hutues.
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
[...]
Les marins du commando Trepel ont mis leurs armes en batterie vers les
sommets des collines voisines, d'où les Hutus ne perdent rien du
spectacle. C'est de là qu'ils partaient chaque jour pour ratisser le
secteur après l'avoir encerclé. Ils étaient régulièrement accompagnés
de soldats de l'armée rwandaise et de miliciens. Leur macabre besogne
n'épargnait personne. Pas de quartier.

Même après l'arrivée des premiers éléments de l'opération
«~Turquoise~», ils ont poursuivi leur mortelle moisson. Installés dans
une vallée voisine, les commandos de marine pensaient, en entendant
les coups de feu, qu'ils témoignaient des combats entre le FPR (Front
Patriotique rwandais) et l'armée gouvernementale.
Quand le capitaine de frégate Marin Gillier et ses hommes sont montés
sur place en fin d'après-midi, ils pensaient rencontrer les
combattants du FPR et se tenaient prêts à répondre à une attaque. Ils
n'ont trouvé que des malheureux en haillons poursuivis depuis bientôt
trois mois par les forcenés hutus.
Terrible et exemplaire aventure que celle qu'a vécue Tite Khouyira,
quarante ans, instituteur à Gishyita. [...] Son malheur l'a comme
pétrifié. Il raconte : «~{it C'était le vendredi 9 avril. Nous allons
dîner, il était huit heures. Une grenade a explosé chez Léonard, un
commerçant tutsi. Il a été tué. C'était le signal du carnage. Nous
nous sommes réfugiés à l'église de Mobuga. L'abbé Marcel, un Hutu,
nous a accueillis. Il nous a donné du riz et de l'eau. A l'extérieur
de l'église, les Hutus étaient déchaînés et criaient «~Tregomba kubika
...~» (Vous allez mourir, il faut tous les tuer). L'abbé a téléphoné
au préfet de Kibuye. Il est arrivé avec le bourgmestre. Tandis que la
foule hutue criait toujours, le père a dit: «~Vous n'allez pas faire
couler le sang de ces catholiques dans une église !~» Le préfet et le
maire ont répondu que c'était un ordre du gouvernement. Ils ont
contraint le père Marcel à monter dans un camion. Il pleurait.}~»
Tite Khouyira poursuit : «~{it Alors le massacre a commencé. J'ai
sauté par une fenêtre avec deux de mes frères. Pendant plus de deux
mois nous nous sommes cachés comme des bêtes traquées. [...]}~»
Autour de Tite, d'autres rescapés affirment avoir entendu le
bourgmestre -- un adjudant de l'armée -- dire : «~{it Dépêchons-nous
de tous les tuer avant l'arrivée des Français.}~» De fait, la chasse
aux Tutsis s'est intensifiée ces derniers jours : les coups de feu
entendus étaient ceux des bourreaux traquant leurs victimes.
Hier, en fin de matinée, le colonel Rosier, commandant les opérations
humanitaires dans la région, est venu à Bisesero. [...]
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024