Fiche du document numéro 1563

Num
1563
Date
Mardi 28 juin 1994
Amj
Fichier
Taille
28097
Pages
3
Sur titre
L'intervention militaire française au Rwanda
Titre
L'armée fait état de « tensions » dans les zones où elle patrouille
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Bien qu'aucun incident notable n'ait été signalé depuis le début de l'opération « Turquoise », les militaires français, qui se sont rendus le long de la frontière dans cinq camps de réfugiés hutus et tutsis (à Gishoma, Nyarushishi, Kirambo, Nyamymba et Kanama), ont fait état, dimanche 26 juin, de « tensions » avec les miliciens hutus qui redoutent toujours une offensive du Front patriotique rwandais (FPR).

« Des tensions existent notamment autour de Kibuyé, sur le lac Kivu », a précisé à Paris le général Raymond Germanos, chef-adjoint de
l'état-major des armées françaises. « Nous avons des indications selon
lesquelles certaines factions n'apprécient pas notre action
 », a ajouté
l'amiral Jacques Lanxade, chef d'état-major des armées, à propos des
miliciens (hutus) « porteurs d'armes blanches et parfois d'armes à feu », qui dressent des barrages sur les routes. « Une peur extrême subsiste dans les communautés où certaines personnes sont l'objet de menaces,
téléphoniques ou autres, quand nous ne sommes pas là
 », a-t-il déclaré,
en s'interrogeant sur « la permanence de la sécurité que nous leur
accordons
 ».

Les soldats français multiplient les patrouilles depuis jeudi soir à
l'extrême sud-ouest du pays, sous contrôle des forces gouvernementales.
Sur la route qui mène à Gitarama, qui comptait autrefois 50 000
habitants, les barrages des miliciens hutus sont omniprésents. La moitié
des Tutsis de la ville ont été massacrés, estiment les religieux, les
autres auraient fui vers le Zaïre voisin. « Les Français sont les
bienvenus, mais s'ils nous demandent de lever les barrages de la défense
civile, je ne serai pas d'accord
 », a averti le bourgmestre adjoint de
la ville.

Une mission italienne



A Kigali, 35 blessés de l'hôpital surpeuplé du Comité international de
la Croix-Rouge (CICR), qui devaient être transportés vers la zone sous
contrôle du FPR, ont été pris dimanche sous un déluge de feu. Ils ont
passé la journée dans le camion bâché qui devait les emporter. La
Mission des Nations unies pour l'assistance au Rwanda (MINUAR) a
vainement tenté d'obtenir du FPR un arrêt des tirs, mais le commandement
rebelle, selon l'ONU, s'est dit incapable « de prendre contact avec ses
combattants qui bombardent le centre-ville
 ».

Le chef d'état-major des Forces armées rwandaises (FAR), le général
Augustin Bizimungu, a annoncé dimanche à la MINUAR qu'il allait « passer
à l'offensive contre le FPR
 ». Un calme relatif est cependant revenu
lundi à Kigali. Dans la capitale, l'hostilité à la France semble
désormais plus forte parmi les miliciens hutus que dans les rangs du
FPR. La rébellion s'est apparemment alignée sur les positions de son
commissaire politique, Frank Mugambage, qui a annoncé vendredi que la
France serait jugée « sur pièces » et que le FPR ne s'opposerait pas à
une « mission qui demeurerait strictement humanitaire ».

Le volet humanitaire de l'opération « Turquoise » devrait commencer mardi avec l'arrivée à Goma, au Zaïre, des premiers membres de l'état-major de la cellule « humanitaire » du gouvernement français. Les responsables de la cellule devront organiser les relations avec les différentes organisations non gouvernementales (ONG).

Dans une déclaration adoptée à l'issue du sommet européen de Corfou, les Douze ont demandé samedi que les responsables du « génocide » perpétré au Rwanda soient « traduits en justice ». Ils ont d'autre part apporté un soutien politique à l'intervention française, en se félicitant du fait que l'ONU ait autorisé « la mise en place, en attendant le renforcement du contingent de la MINUAR, d'une opération temporaire destinée à protéger les personnes déplacées, les réfugiés et les civils en danger au Rwanda ».

L'Italie doit envoyer une mission au Rwanda, en début de semaine, pour « vérifier les conditions d'un concours des forces armées » aux
initiatives humanitaires déjà prises par le gouvernement italien, a
annoncé samedi le ministère des affaires étrangères. Cette mission doit
commencer sa tâche à la frontière entre le Rwanda et l'Ouganda. Le
gouvernement mauritanien a envoyé samedi une équipe médicale au Rwanda,
en soutien à l'intervention française. Le président nigérien, Mahamane
Ousmane, a indiqué dimanche que le Niger est prêt, si la France le lui
demande, à envoyer des troupes pour participer à l'opération « Turquoise ». Enfin, une source congolaise autorisée a affirmé que le gouvernement
congolais est prêt à envoyer des soldats au Rwanda aux côtés des troupes
françaises, mais souhaite une décision dans ce sens des chefs d'Etat de
l'Union douanière et économique d'Afrique centrale (UDEAC) réunis lundi
à Libreville. (AFP, Reuter.)
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