Fiche du document numéro 13939

Num
13939
Date
Dimanche 19 juin 1994
Amj
Hms
14:24:00
Fichier
Taille
86695
Pages
2
Urlorg
Titre
Paris prépare une mission humanitaire au Rwanda
Cote
reutfr0020011106dq6j00wcy
Source
Fonds d'archives
Type
Dépêche d'agence
Langue
FR
Citation
KIGALI, 19 juin, Reuter - Alors que la France s'apprête à s'engager au
Rwanda en dépêchant des troupes à la frontière du pays, les combats
redoublent d'intensité à Kigali.

Trois obus de mortier tirés par les forces du Front patriotiques
rwandais (FPR) sont tombés dimanche dans le secteur de l'hôpital, dans
le centre-ville contrôlé par les forces gouvernementales, causant la
mort d'une employée de la Croix-Rouge rwandaise et blessant trois
autres personnes.

Quelque 500 blessés ont été soignés à l'hôpital du Comité international
de la Croix-Rouge à Kigali au cours des trois derniers jours de
violents combats, a précisé le représentant du CICR dans la capitale.

Au plan diplomatique la France a chargé son ambassadeur au Rwanda,
Jean-Michel Marlaud, d'expliquer aux belligérants, les rebelles du FPR
notamment, l'intervention humanitaire que Paris estime nécessaire et
urgente en raison de la gravité de la situation.

La France a présenté dimanche matin au Conseil de sécurité un projet de
résolution lui permettant d'intervenir sous le drapeau de l'Onu au
Rwanda, avec l'espoir qu'il soit adopté mardi.

Dans ce document, rédigé dans le cadre du chapitre VII de la charte des
Nations unies qui autorise le recours à la force, Paris demande
l'autorisation d'intervenir en attendant l'augmentation des effectifs
de la Mission de l'Onu d'assistance au Rwanda (Minuar), qui ne compte
que 450 hommes.

Jusqu'à présent, seul le Sénégal s'est officiellement engagé à épauler
Paris. Reste encore à convaincre l'Onu ainsi que d'autres pays
européens et africains.

Samedi l'Elysée et Matignon avaient annoncé que la France avait décidé
d'envoyer aux frontières du Rwanda les moyens nécessaires à une
opération internationale à but humanitaire destinée à sauver des vies
humaines et à mettre fin aux massacres


Après avoir indiqué samedi que 1.000 à 2.000 hommes participeraient à
l'opération, le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, en
visite à Dakar, s'est refusé dimanche à donner d'autres précisions.

De source informée, on laisse entendre que ces troupes pourraient être
stationnées au Zaïre, les pays frontaliers, l'Ouganda, qui soutient le
FPR, et le Burundi en proie à ses propres problèmes ethniques, semblant
exclus.

Alain Juppé a rappelé qu'un minimum de discrétion était de rigueur
dans de telles circonstances.

Car l'envoi de militaires français en mission humanitaire au Rwanda,
loin de faire l'unanimité, est vivement contesté par les rebelles du
Front patriotique du Rwanda qui, sur le terrain, sont en passe de
l'emporter.

Ce n'est pas aux Français d'intervenir. C'est à nous de le faire, a
affirmé samedi le commandant Wilson Rutayisire, porte-parole du FPR
tout en menacant de s'opposer aux Français si nécessaire.

Les rebelles, en majorité tutsis, n'ont pas oublié l'appui longtemps
apporté par la France au gouvernement du président Habyarimana, un Hutu
assassiné le 6 avril dernier.

Ils accusent également Paris d'avoir armé et entraîné les milices
hutues mises en cause dans la plupart des massacres.

Les analystes politiques ne cachent pas leur doute sur l'opportunité
d'une telle opération.

L'intervention française serait un facteur de complication
supplémentaire, elle pourrait se révéler désastreuse à la fois au
niveau politique et humanitaire
, estime l'un d'entre eux.

Un observateur militaire de l'Onu, originaire d'un pays africain,
souligne que les miliciens rencontrés aux barrages routiers à
l'extérieur de Kigali sont de plus en plus nerveux et hostiles à tous
les Blancs
. /AP

(c) Reuters Limited 1994
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