Fiche du document numéro 12245

Num
12245
Date
Jeudi 23 juin 1994
Amj
Auteur
Auteur
Fichier
Taille
14338544
Pages
9
Titre
Opération survie : Cinq avions pour le Rwanda
Page
6-13
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Lieu cité
Cote
n° 2547
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
[...]
Grâce à elle et à un baroudeur de Terre des Hommes, Alexis Briquet, les orphelins de Butare sont peu à peu mis à l'abri. Alexis va les chercher à la hussarde et les ramène au Burundi, quoi qu'en pensent les miliciens. Le 18 juin, un nouveau convoi a pu passer du Rwanda au Burundi avec cent quatre-vingt-trois gamins évacués de Butare. Des petites mains qui vous accrochent et ne veulent plus vous lâcher. Un sourire, des bras qui se tendent en quête d'humanité: les enfants de Butare ont une soif inextinguible de tendresse. Ils ont vu mourir leurs parents, leurs frères, leurs soeurs. Et, quand on leur demande où sont leurs proches, ils répondent presque indifféremment: « on les a tués ». Ababaganze, sept ans, vous confie de sa petite voix: « C'est un camion militaire qui m'a renversé », pour expliquer le gros pansement qu'il porte à l'oreille. Vrai ou faux ? La réalité peut être bien pire encore: « Ce sont les voisins qui m'ont tapé avec leur machette », explique Nrabimana, onze ans. Réfugié dans une absence inquiétante, il paraît insensible à la longue plaie qu'il porte sur le crâne. « Ils ont aussi coupés mes amis... » Pourquoi? lui demande-t-on doucement. « Je ne sais pas », épelle lentement le gamin.

Il aurait pu répondre comme le font ses aînés: « Parce que je suis tutsi ». Mais qu'est-ce que cela signifie ? Quelles raisons monstrueuses ont pu pousser les chefs de ce pays à programmer ce carnage barbare ? Comment le ministre de la famille, Pauline, a-t-elle pu, dans un meeting, désigner des victimes tutsies à la foule en criant: « Et ceux-là, pourquoi ne les avez-vous pas tués ? »

« Parfois, je me sens comme dans un rêve », s'écrit Rosemonde, une réfugiée de Butare qui s'efforce de reconnaître dans le groupe des petits les copines de classe de ses propres enfants. « Suis-je vraiment dans la réalité ? Si encore on tuait par balles ! Il faut au moins cinq ou six coups pour tuer un homme à la machette ! Butare était une ville universitaire. Il n'y avait ni Hutus, ni Tutsis. Mes frères, mes soeurs étaient venus de Kigali se réfugier chez moi, avec leurs enfants. La ville était encore si calme. Et pourtant, c'est là qu'on les a tués tous !» hurle-t-elle.
Haut

fgtquery v.1.9, 9 février 2024