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9 avril 2024
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Alain Juppé : « le rôle de la France n'est pas de rétablir l'ordre par des soldats sur l'ensemble du continent africain »

Numéro : 17398
Date : 11 avril 1994
Auteur : Juppé, Alain
Titre : Interview du ministre des Affaires étrangères, M. Alain Juppé, à la radio Africa n° 1
Source : Africa n° 1
Fonds d'archives : PolEtrang
Résumé : Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères, estime que le rôle de la France n'est pas de rétablir l'ordre par ses soldats sur l'ensemble du continent africain. Nous ne pouvons pas nous substituer à la responsabilité des acteurs africains eux-mêmes.
Commentaire : À l'heure où le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé justifie son refus d'envoyer ses soldats pour « rétablir l’ordre » au Rwanda, des soldats français sont là, à Kigali, l'arme au pied, en train de regarder des innocents se faire massacrer. Pendant qu'il invite à « revenir à la logique des accords d’Arusha », les militaires français refusent de protéger Boniface Ngulinzira, le principal négociateur de ces accords pour le gouvernement rwandais. Les Français l'abandonnent aux tueurs qui l'exécutent ce 11 avril 1994. L'ambassadeur de France transmet à Paris le même jour une demande de soutien militaire aux organisateurs des massacres.
Citation: Q : Dernière question, la situation qui prévaut à l'heure actuelle au Rwanda et au Burundi inquiète énormément les Africains. Beaucoup d’observateurs avertis pensent que les dernières mesures prises par la France constituent un désengagement de la France dans cette zone. Ne craignez-vous pas justement que ces mesures laissent le champ libre aux adversaires de la démocratie ? R : Il faut bien s’entendre. La situation au Rwanda est une tragédie qui nous touche profondément. La France a fait des efforts considérables depuis des mois et des mois pour faciliter le retour de la stabilité dans le cadre des accords d’Arusha. Nous avons pris tout récemment les mesures destinées à protéger nos ressortissants. Mais, là encore, excusez-moi d’une certaine franchise : le rôle de la France n’est pas de rétablir l’ordre par ses soldats sur l’ensemble du continent africain. Nous ne pouvons pas nous substituer à la responsabilité des acteurs africains eux-mêmes. Nous les appelons aujourd’hui à se ressaisir pour revenir à la logique des accords d’Arusha et retrouver la voie d’une concorde nationale. Cela peut paraître paradoxal alors que les combats font rage un peu partout, mais c’est cela notre rôle, plutôt que de nous transformer à nouveau en une puissance interventionniste qui enverrait ses soldats partout. Ce n’est pas le rôle de la France.

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