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Mise à jour :
2 février 2024 Anglais

Les forces du FPR ont pris ce matin possession de la capitale Kigali et de la ville de Butare

Fiche Numéro 33404

Numéro
33404
Auteur
Bilalian, Daniel
Auteur
Rabine, Giles
Auteur
Boisserie, Philippe
Auteur
Duquesne, Benoît
Auteur
Boussié, Laurent
Auteur
Lemaire, Jean-Marie
Date
4 juillet 1994
Amj
19940704
Heure
13:00:00
Fuseau horaire
CEST
Surtitre
Journal de 13 heures [7:38]
Titre
Les forces du FPR ont pris ce matin possession de la capitale Kigali et de la ville de Butare
Soustitre
La décision a été prise de s'opposer à l'avancée des troupes du FPR à Gikongoro. C'est un tournant dans l'opération Turquoise.
Taille
22526184 octets
Source
Fonds d'archives
INA
Type
Journal télévisé
Langue
FR
Résumé
- Au Rwanda les forces du Front patriotique ont pris ce matin possession de la capitale Kigali et de la ville de Butare où les Français avaient été accrochés pour la première fois hier [3 juillet] après-midi par des soldats du FPR à l'occasion de l'évacuation d'un orphelinat.
- Giles Rabine : "Nous venons de faire un tour de la ville avec les vainqueurs, avec les forces du FPR, et nous avons pu constater qu'ils avaient pris l'essentiel du centre-ville. Il y a encore des combats sporadiques dans le contrebas des collines qui surplombent la ville mais véritablement ce sont les derniers combats. La France s'est beaucoup émue pour les trois orphelinats dans Kigali. Le dernier qui restait, c'était celui de Marc Vaiter. Tous les orphelins de Marc Vaiter et Vaiter lui-même sont saufs. Ils ont été sauvé aux premières heures du matin par les forces du FPR. Toute la nuit dernière nous avons assisté à de très violents échanges d'artillerie. Nous avons entendu de très importants mouvements de troupes, beaucoup plus importants que d'habitude. Et tout à coup à 6 h 30, 7 heures ce matin, ça a été le silence : plus de canons, plus de tirs de mitrailleuse et plus de fusillades. Nous avons été une première fois dans la ville vers 9 heures. Quand nous sommes rentrés dans le centre-ville, nous avons d'abord constaté qu'il n'y avait plus aucun contrôle gouvernemental, que la ville était absolument déserte. Au carrefour où hier [3 juillet] un Casque bleu russe a été blessé, des soldats du FPR se sont posés sur les trottoirs et un peu plus haut, dans cette avenue, une escouade s'apprêtait à progresser ; les hommes étaient disposés en colonne sur les bas côtés, de part et d'autre de l'avenue. Et pendant les quelques minutes où le FPR nous a permis de rester à cet endroit, nous avons pu assister à une arrestation, vraisemblablement d'un mercenaire qui avait jeté son arme avant d'être arrêté. La première conséquence de cette prise de la ville, c'est que les rebelles du FPR, dorénavant, il faudra les appeler 'les ex-rebelles du FPR' parce qu'ils tiennent l'essentiel du pays et que aujourd'hui ils tiennent la capitale et la deuxième ville du pays, Butare. Autrement dit, aux ex-gouvernementaux ils ne restent plus qu'une peau de chagrin, c'est-à-dire juste la zone autour de Gisenyi où les Français sont en train d'essayer de ravitailler et de sauver un maximum de réfugiés. Ils essaient d'ailleurs de gagner cette région. C'est tout ce qu'il reste de l'ancien Rwanda gouvernemental. Les troupes tutsi du Front patriotique rwandais ont pris l'essentiel du pays aujourd'hui à midi".
- Philippe Boisserie : "Butare est donc tombée aujourd'hui. Une prise de la ville qui a été très rapide puisqu'il y a une semaine les militaires du FPR avaient plutôt tendance à avancer vers l'Est du pays. Et en fait ils ont changé d'objectif : ils sont donc partis sur Butare, qui est donc tombée très rapidement. Une prise très importante puisque c'est la deuxième ville du pays. Et puis surtout c'est une ville emblématique pour les Tutsi puisque c'est l'ancienne capitale du royaume tutsi. Une fois que Butare est tombée, les Français estiment que les militaires du FPR pourraient maintenant avancer sur Kibuye. Et pour cela, il faut effectivement traverser une zone qui est peuplée de dizaines de milliers de réfugiés civils. Alors comment les protéger aujourd'hui ? C'est toute la question pour les militaires français dont c'est la mission. Est-ce qu'ils devront s'interposer devant l'avancée du FPR ou est-ce qu'ils devront en quelque sorte aménager cette avancée des militaires du FPR ? C'est donc une décision militaire délicate. Et surtout c'est une décision très politique".
- Benoît Duquesne : "On vient d'apprendre que la décision a été prise à Paris de s'opposer ici à Gikongoro à l'avancée des troupes du FPR. Autrement dit, c'est un tournant dans l'opération Turquoise. Jusqu'à présent les consignes étaient d'éviter le contact avec les troupes du FPR de ne pas rechercher l'affrontement. Là, les consignes venues de Paris ont changé : les Français maintiendront cette position à Gikongoro pour protéger le camp de réfugiés. Et ils vont donc être amenés à s'opposer directement aux troupes du FPR. Les déclarations du colonel Thibaut ont été très claires : "Nous tiendrons la position, nous ne reculerons pas". Il y a environ 150 militaires français ici à Gikongoro. Des renforts, une centaine, vont arriver cet après-midi. Et s'ajouteront à cela deux compagnies de la Légion qui sont en bordure de forêt à environ une trentaine de kilomètres. En face il faut savoir que le FPR disposerait environ de 2 000 hommes".
- Les combats dans la capitale Kigali duraient depuis deux mois. Ces derniers jours ils étaient violents, les forces gouvernementales résistant dans quelques quartiers. La ville était pratiquement coupée du monde extérieur et nos envoyés spéciaux ont pu filmer la détresse des civils, femmes, enfants, blessés dans ces combats.
- Ils ont été blessés il y a trois jours déjà mais ça n'est qu'aujourd'hui que le chirurgien anglais de Médecins sans frontières a pu s'occuper d'eux. Des enfants, des bébés, souvent orphelins, déjà réfugiés et maintenant mutilés, avec dans les yeux la détresse et toute l'horreur d'une guerre qui comme toujours frappe les plus faibles. Le chirurgien de MSF : "Ils ont évacué hier [3 juillet] depuis l'hôpital du CICR jusqu'ici parce qu'ils en avaient trop. Moi j'étais là pendant trois jours et on a reçu au moins 1 000 patients. Du point de vue médical on a les pansements pour peut-être deux jours".
- Des pansements et des médicaments qui vont commencer à manquer au moment où la situation médicale et sanitaire n'a jamais été aussi mauvaise. En raison des combats, l'hôpital de la Croix-Rouge, situé en centre-ville, est souvent pris sous le feu des armes lourdes et les évacuations de blessés vers d'autres lieux sont souvent ralenties, voire stoppées.
- Elle, elle a reçu il y a quelques minutes une balle dans la tête. Sans soins, elle attend la mort à côté de ceux qui, blessés la nuit dernière, sont soignés sans anesthésie. Et pourtant ceux-là ont eu de la chance : 49 des leurs, réfugiés dans la même paroisse, ont été exécutés par les miliciens hutu à quelques mètres d'ici.
- C'est dans ce contexte dramatique que le Front patriotique rwandais avait demandé l'évacuation de l'hôpital de la Croix-Rouge du centre-ville. Un hôpital qui, avec ses 900 blessés, ses mourants et surtout avec ses chirurgiens et ses infirmières de la Croix-Rouge, gênait le FPR dans ses offensives contre les soldats gouvernementaux. Ce matin, quand Kigali est tombée, l'hôpital était encore rempli de nouveaux blessés.
- Le président de la République, Monsieur Mitterrand, a été accueilli ce matin au Cap par le Président Mandela.
Commentaire
Le JT de 13 heures de France 2 du 4 juillet 1994 est visible dans son intégralité ici : https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/cab05083218/f2-le-journal-13h-emission-du-4-juillet-1994